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Tyché

Dans la mythologie grecque, Tyché (en grec ancien Τύχη / Túkhē, « Fortune, Hasard ») est la divinité de la Fortune, de la Prospérité et de la Destinée d'une cité ou d'un État.

La Tyché d'Antioche. Marbre, copie romaine d'un original grec en bronze du Ier siècle av. J.-C.

Son équivalent romain est Fortuna.

Généalogie et famille

Il existe plusieurs versions de sa généalogie :

Tyché Agatha est l'épouse de Agathodémon ou Agathodaïmon (« bon esprit »).

Fonctions

Tyché décide du destin des mortels, comme jouant avec une balle, rebondissant, de bas en haut, symbolisant l'insécurité de leurs décisions. Nul ne doit donc se vanter de sa bonne fortune ou négliger d'en remercier les dieux, sous peine d'attirer l'intervention de Némésis.

Philosophie

Au IVe siècle av. J.-C., Tyché symbolise le désordre et l'irrationnel, et son culte marque la faillite du panthéon olympien, les hommes doutant de l'efficacité des autres dieux[5].

Théophraste (ca. 371 à ca. 288 avant notre ère), élève d'Aristote, dit que la fortune est aveugle, prompte à nous ôter le fruit de notre peine et à bouleverser ce qui nous semble être la prospérité sans aucune opportunité déterminée. Sa phrase « La vie est gouvernée par la fortune, non la sagesse », dans son ouvrage sur le deuil (Callisthène), fait également référence au principe métaphysique de la tyché, nécessité transcendantale qui oriente les événements dans le sens d’une finalité prédéterminée[6].

Pour Polybe (208 à 126 avant notre ère), les dieux et le surnaturel n'existent pas mais il existe un principe métaphysique sous la forme de la tyché, équivalent de la « fortune ». Elle joue chez cet historien le rôle d'une nécessité transcendantale qui oriente les événements dans le sens d’une finalité prédéterminée. Chez Hérodote, la tyché était encore une puissance entre les mains des dieux mais chez Polybe, ce n'est plus qu'une notion abstraite[7].

Cultes et représentations

À l'époque hellénistique, son culte connait une grande diffusion. Tyché devient la « Fortune de la cité », en grec ancien, Τύχη τῆς πόλεως, divinité féminine porteuse de la corne d'abondance, le front ceint d'une couronne murale. Elle est associée aux anciennes divinités poliades ou se substitue à ces dernières[8].

Plusieurs villes grecques antiques ont leur propre version de Tyché[9]

  • À Antioche et Alexandrie en particulier, elle est vénérée comme déesse protectrice de la ville[10].
  • À Antioche (fondée vers 300 avant notre ère) par Séleucos Ier Nicator, le sculpteur Eutychidès de Sicyone en réalise une représentation en bronze doré, considérée comme le chef-d'œuvre de cet artiste[9].

Tyché fait partie des divinités dont les statues colossales ornaient le tombeau du roi Antiochos Ier de Commagène (règne de ca. 69 à ca. 40 avant notre ère) sur le Nemrut Dağı.

  • Les Trois Tychés (musée du Louvre) ; ces trois figures coiffées de couronnes crénelées personnifient des villes.
    Les Trois Tychés (musée du Louvre) ; ces trois figures coiffées de couronnes crénelées personnifient des villes.
  • Tête de Tyché sur le Nemrut Dağı.
    Tête de Tyché sur le Nemrut Dağı.

Par la suite, Tyché sera représentée avec une corne d'abondance, la barre emblématique d'un bateau et la Roue de Fortune.

Art gréco-bouddhique de Gandhâra

Dans l'art gréco-bouddhique de Gandhâra, elle est associée à l'ogresse ou déesse Hārītī (ou Kishimojin).

Sur le site archéologique de Hadda, le Bouddha avec Héraclès/Vajrapani (détail de gauche) et Tyché/Hārītī (détail de droite) pourrait être « une sculpture bouddhiste naissante en style indo-grec » (Boardman[11]). Héraclès a encore sa peau de lion sur l’épaule gauche mais sa massue a été remplacée par le vajra (foudre) de Vajrapani. Tyché tient une corne d'abondance classique.

Numismatique

Tyché apparaît au revers des drachmes ou pièces de monnaie de différents royaumes antiques, surtout dans la région de l'Égée. On la rencontre également dans le royaume parthe (partie de l'Iran actuel jusqu'en Mésopotamie) et les régions influencées par l'hellénisme.

Notes et références

Notes

    Références

    1. Hésiode, Théogonie [détail des éditions] [lire en ligne]
    2. https://fr.wikisource.org/wiki/Hymnes_hom%C3%A9riques/%C3%80_D%C3%A8m%C3%A8t%C3%A8r_2 page 454.
    3. http://remacle.org/bloodwolf/poetes/falc/homere/hymnes.htm#IV Hymne 4.
    4. Pindare, Odes [détail des éditions] (lire en ligne), (Olympiques, XII, 1, 2).
    5. Édouard Will, Claude Mossé, Paul Goukowsky, Le Monde grec et l'Orient, Le IVe siècle et l’époque hellénistique, PUF., 1975, page 226.
    6. Édouard Will, Claude Mossé, Paul Goukowsky, Le Monde grec et l'Orient, Le IVe siècle et l'époque hellénistique, PUF., 1975, page 606.
    7. Édouard Will, Claude Mossé, Paul Goukowsky, Le Monde grec et l'Orient, Le IVe siècle et l'époque hellénistique, PUF., 1975, pages 605-606.
    8. Édouard Will, Claude Mossé, Paul Goukowsky, Le Monde grec et l'Orient, Le IVe siècle et l'époque hellénistique, PUF., 1975, p. 612-613.
    9. Catherine Saliou, Le Proche-Orient : De Pompée à Muhammad, Ier s. av. J.-C. - VIIe s. apr. J.-C., Belin, coll. « Mondes anciens », , 608 p. (ISBN 978-2-7011-9286-4, présentation en ligne), chap. 3 (« Polythéisme, monothéismes : multiplicité des cultes et innovations religieuses »), p. 158.
    10. (en) Judith S. McKenzie et Andres T. Reyes, « The Alexandrian Tychaion: a Pantheon? », Journal of Roman Archaeology, vol. 26, , p. 37-52.
    11. (en) The Diffusion of Classical Art in Antiquity de John Boardman (ISBN 0-691-03680-2)

    Annexes

    Bibliographie

    • Émile Chambry, Émeline Marquis, Alain Billault et Dominique Goust (trad. du grec ancien par Émile Chambry), Lucien de Samosate : Œuvres complètes, Paris, Éditions Robert Laffont, coll. « Bouquins », , 1248 p. (ISBN 978-2-221-10902-1). Ouvrage utilisé pour la rédaction de l'article
    • Fernand Allègre : Étude sur la déesse grecque Tyché : sa signification religieuse et morale, son culte et ses représentations figurées. Paris, 1889, Ernest Leroux 243 p.

    Articles connexes

    Liens externes

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