Tu es Petrus
Tu es Petrus (en français : « Tu es Pierre ») est une locution latine tirée de l’Évangile selon Matthieu (Mt 16:18). Ces trois mots sont l'incipit du verset où, selon l'Église catholique, Jésus-Christ confie à l’apôtre Pierre la gouvernance de son Église : « Tu es Pierre, et sur cette pierre je bâtirai mon Église ».
Le verset, mis en musique sous forme de motet ou hymne liturgique, est chanté communément lors de célébrations auxquelles le pape participe.
Texte et circonstances
Le texte grec
La langue d'origine des Évangiles est la langue grecque. Le texte grec tiré de Matthieu 16, versets 15-19 est celui-ci :
15 - Λέγει αὐτοῖς, Ὑμεῖς δὲ τίνα με λέγετε εἶναι; Et vous, leur dit-il, que dites-vous que je suis ?
16 - Ἀποκριθεὶς δὲ Σίμων εἶπεν, Σὺ εἶ ὁ χριστός, ὁ υἱὸς τοῦ θεοῦ τοῦ ζῶντος. Simon répondit : Tu es le Christ, le Fils du Dieu vivant.
17 - Καὶ ἀποκριθεὶς ὁ Ἰησοῦς εἶπεν αὐτῷ, Μακάριος εἶ, Σίμων Βαριωνᾶ, ὅτι σὰρξ καὶ αἷμα οὐκ ἀπεκάλυψέν σοι, ἀλλ’ ὁ πατήρ μου ὁ ἐν τοῖς οὐρανοῖς. Jésus, reprenant la parole, lui dit : Tu es heureux, Simon, fils de Jonas ; car ce ne sont pas la chair et le sang qui t'ont révélé cela, mais c'est mon Père qui est dans les cieux.
18 - Κἀγὼ δέ σοι λέγω, ὅτι σὺ εἶ Πέτρος, καὶ ἐπὶ ταύτῃ τῇ πέτρᾳ οἰκοδομήσω μου τὴν ἐκκλησίαν, καὶ πύλαι ᾍδου οὐ κατισχύσουσιν αὐτῆς. Et moi, je te dis que tu es Pierre, et que sur cette pierre je bâtirai mon Église, et que les portes du séjour des morts ne prévaudront point contre elle.
19 - Καὶ δώσω σοὶ τὰς κλεῖς τῆς βασιλείας τῶν οὐρανῶν: καὶ ὃ ἐὰν δήσῃς ἐπὶ τῆς γῆς, ἔσται δεδεμένον ἐν τοῖς οὐρανοῖς: καὶ ὃ ἐὰν λύσῃς ἐπὶ τῆς γῆς, ἔσται λελυμένον ἐν τοῖς οὐρανοῖς. Je te donnerai les clefs du royaume des cieux : ce que tu lieras sur la terre sera lié dans les cieux, et ce que tu délieras sur la terre sera délié dans les cieux.
Le texte latin
Le texte complet latin des deux versets 18 et 19 du chapitre 16 de Matthieu est :
« Tu es Petrus, et super hanc petram aedificabo Ecclesiam meam, et portae inferi non praevalebunt adversus eam. Et tibi dabo claves Regni coelorum. Quodcumque ligaveris super terram, erit ligatum et in coelis. Et quodcumque solveris super terram erit solutum et in coelis. »
En français :
« Tu es Pierre, et sur cette pierre je bâtirai mon Église, et les portes de l’enfer ne tiendront pas contre elle. Je te donnerai les clés du Royaume des Cieux : quoi que tu lies sur la terre, ce sera tenu dans les cieux pour lié, et quoi que tu délies sur la terre, ce sera tenu dans les cieux pour délié[1] »
Circonstances
Simon et André sont de simples pêcheurs de la ville de Capharnaüm en Galilée, lorsqu’ils sont appelés par Jésus à le suivre sur les routes de Galilée, Samarie et Judée, jusqu'à Jérusalem, pour proclamer à sa suite la Bonne Nouvelle du Royaume des Cieux. Dans un moment intense qui suit la question posée par Jésus à ses disciples « pour vous qui suis-je ? », Simon-Pierre (Jésus lui a donné le nom de « Pierre ») prend la parole pour répondre : « Tu es le Christ, le Fils du Dieu vivant ». C’est alors que Jésus répond : « Tu es Pierre et sur cette pierre je construirai mon Église […] je te donnerai les clés du Royaume des Cieux » (Mt 16:18,19). Immédiatement après leur avoir enjoint de ne dire à personne qu’il est le Christ, Jésus annonce pour la première fois qu’il devra souffrir à Jérusalem (Mt 16:21-23).
Primauté de Pierre
Arguments scripturaires
Ces versets de l’Évangile selon Matthieu sont l’argument scripturaire souvent avancé par l’Église catholique pour attester de la primauté de Pierre parmi les apôtres. D’autres sont tirés des Actes des Apôtres (Ac 1:15, 2:14, 15:7), où apparaît que Pierre occupe une place spéciale dans l'Église primitive.
Comme le premier apôtre est devenu évêque de Rome, l’Église catholique assure que les successeurs de Pierre sur le siège épiscopal de Rome jouissent de la même primauté au sein du collège des évêques.
Aux yeux des catholiques, l'épisode évoquant la visite de Pierre et Jean au tombeau (Jn 20, 3-8) confirme la primauté du disciple Pierre.
La manière dont ce ministère « pétrinien » s’est développé au cours des siècles et est exercé aujourd’hui par le pape n’est pas acceptée par les Églises chrétiennes non catholiques.
Basilique Saint-Pierre
À la base de la coupole de la basilique Saint-Pierre de Rome on peut lire le Tu es Petrus et les paroles de Jésus-Christ à Pierre telles que rapportée dans l’évangile de Matthieu (Mt 16:18,19). Les lettres de très grande dimension (deux mètres de hauteur chacune), sont de couleur noire sur fond doré. Le verset scripturaire est éclairé par les 16 baies vitrées de la coupole, œuvre architectural typique de Michel-Ange.
- + TV ES PETRVS ET SVPER HA[NC]
- [HAN]C PETRAM AEDIFICABO ECCLESIAM MEAM ET TIBI DA[BO]
- ET TIBI DABO CLAVES REGN[I]
- [CLA]VES REGNI CAELORUM + TV ES PETRVS ET SVPER
Musique sacrée
L'expression Tu es Petrus a fréquemment été mis en musique. L’hymne est chanté lors de cérémonies solennelles papales, liturgiques ou autres, souvent lors de la procession liturgique d’entrée ou comme chant d’accueil du pape.
- Tu es Petrus, messe de Palestrina (XVIe siècle).
- Tu es Petrus, messe de Jean Mouton (début du XVIe siècle).
- Tu es Petrus, un motet à six voix, de William Byrd (1607).
- Tu es Petrus, antiphonie pour deux chœurs à quatre voix d'Alessandro Scarlatti (début du XVIIIe siècle).
- Tu es Petrus, de Michael Haydn (XVIIIe siècle).
- Tu es Petrus, op. 111, de Felix Mendelssohn (1827).
- Tu es Petrus, motet de Gabriel Fauré (XIXe siècle).
- Tu es Petrus, messe (op. 23 no 2) de Charles-Marie Widor (1876).
- Tu es Petrus, cantate de Theodor Pröpper (XXe siècle).
- Tu es Petrus, pour chœur et orgues, de Camille Saint-Saëns (1914).
- Tu es petra et portæ inferi non prævalebunt adversus te, toccata no 10 pour orgue des Esquisses byzantines (1920), d'Henri Mulet.
- Tu es Petrus, motet de Reynaldo Hahn (1938).
- Tu es Petrus, choral pour orgue sur thème grégorien, de Jeanne Demessieux (1947).
- Tu es Petrus, motet sur un thème grégorien, de Maurice Duruflé (1960).
- Tu es Petrus, Deuxième partie : Après l'Épiphanie - VIII. Tu es Petrus « La fondation de l'Église », oratorio Christus de Franz Liszt.
Vitrail
Littérature
« L’Apôtre saint Pierre et sa concierge » est un texte parodique d’Alphonse Allais (1854-1905) publié en 1894 avec d’autres dans l’ouvrage Rose et Vert-Pomme dans lequel un saint anglophone cite la formule dans sa langue, laquelle rend le jeu de mots incompréhensible : « Et saint Patrick d’ajouter froidement : — You are Peter, and on that stone… »[2].
Articles connexes
Notes et références
- s:Bible Segond 1910/Évangile selon Matthieu#Matthieu 16 : traduction de Louis Segond (1910) procurée par Wikisource
- Traduction tirée de la Bible de Jérusalem
- Texte procuré par Wikisource : s:Rose et Vert-Pomme/L’Apôtre saint Pierre et sa concierge ; page 196 (de Rose et Vert-Pomme) : s:Page:Allais - Rose et Vert-Pomme.djvu/201.