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Relations entre les États-Unis et le Japon

Les relations entre les États-Unis et le Japon renvoient aux relations internationales entre l'empire du Japon, devenu le Japon en 1946, et les États-Unis d'AmĂ©rique. Elles s'Ă©tendent de l'arrivĂ©e du commodore Perry Ă  l'empire du Japon en 1853 jusqu'Ă  nos jours. Une premiĂšre pĂ©riode est marquĂ©e par l'ouverture forcĂ©e de l'empire du Japon sur le monde Ă  des fins commerciales dont les États-Unis voulaient profiter. C'est seulement Ă  partir du dĂ©but du XXe siĂšcle que les États-Unis entreprennent d'apaiser leurs relations avec le Soleil Levant, et d'aller jusqu'Ă  une Ăšre de coopĂ©ration. Seulement, l'arrivĂ©e de Hiro-Hito sur le trĂŽne impĂ©rial de l'empire du Japon en 1926 annonce le dĂ©but de la remilitarisation nippone et la renaissance des tensions. La remilitarisation nippone conduit alors Ă  l'affrontement armĂ© entre les États-Unis et le Japon Ă  partir de la bataille de Pearl Harbor, engageant les deux pays dans la Seconde Guerre mondiale.

Relations entre les États-Unis et le Japon
Drapeau des États-Unis
Drapeau du Japon
États-Unis et Japon
États-Unis Japon

L'ouverture contrainte du Japon Ă  l'apaisement (1853-1907)

Avant l'Ăšre Komei (1846-1867), le Japon reste totalement fermĂ© aux Ă©trangers malgrĂ© les nombreuses tentatives Ă©trangĂšres. Une loi shogunale ordonne l'exĂ©cution de tout Ă©tranger posant le pied sur le territoire[1]:134. Dans le mĂȘme temps, les AmĂ©ricains dĂ©veloppent des intĂ©rĂȘts commerciaux dans les rĂ©gions de l'archipel nippon. En effet, les baleiniers amĂ©ricains passent souvent prĂšs des littoraux de l'empire sans pouvoir se rĂ©approvisionner. AprĂšs de multiples demandes, les AmĂ©ricains sont les premiers Ă  contraindre le Japon Ă  l'ouverture. En 1853, le commodore Perry entre dans la baie de Tokyo pour demander l'ouverture commerciale du pays. Le malaise s'installe chez les dirigeants, et le « bakumatsu » (fin du shogunat) est Ă©vident. Le gouvernement se divise alors en deux tendances : les conservateurs dĂ©sirent expulser les Ă©trangers et se rallient au cri de « joi » (expulsez les barbares)[1]:137, alors que les rĂ©alistes, ayant pris peur devant les canons de Perry, demandent la soumission aux exigences amĂ©ricaines.

Lors du retour de Perry en , le gouvernement du shogun, l'empereur, ainsi que les nombreux daimyos consultĂ©s tranchent en faveur du rejet de la requĂȘte du prĂ©sident amĂ©ricain Millard Fillmore. Lorsque la flotte de Perry revient en 1854 dans la baie d'Edo pour obtenir la rĂ©ponse de l'empire, le shogunat Tokugawa se trouve incapable d'appliquer la dĂ©cision shoguno-impĂ©riale face Ă  la flotte amĂ©ricaine. Finalement, les deux partis signent la convention de Kanagawa. Le gouvernement autorise les bĂątiments amĂ©ricains Ă  se ravitailler sur les ports de Shimoda et Hakodate. Un consul amĂ©ricain est mĂȘme autorisĂ© Ă  s'Ă©tablir Ă  Shimoda. Ainsi, en cĂ©dant aux exigences amĂ©ricaines, le Japon prend le chemin de l'ouverture sur le reste du monde, et rĂ©tablit l'autoritĂ© impĂ©riale aux dĂ©pens du Shogun.

Le TraitĂ© Harris ou « traitĂ© d'amitiĂ© et de commerce » est signĂ© entre les États-Unis et le Japon au temple Ryƍsen-ji Ă  Shimoda le . Il ouvre les ports de Tokyo et de quatre autres villes japonaises au commerce amĂ©ricain et accorde l'extraterritorialitĂ© aux Ă©trangers, entre autres conditions.

Mission japonaise de 1860 aux États-Unis

Le , une premiĂšre ambassade de l'empire du Japon est envoyĂ©e aux États-Unis Ă  bord du bĂątiment amĂ©ricain l'USS Powhatan et d'un vaisseau japonais le Kanrin Maru. La mission est composĂ©e de trois diplomates : l'ambassadeur Shinmi Masaoki, le vice-ambassadeur Muragaki Norimasa et l'observateur Oguri Tadamasa, ainsi que de quelque 170 autres samouraĂŻs, bureaucrates et autres scientifiques[2]. L’objectif de l'ambassade arrivĂ©e Ă  San Francisco est de nĂ©gocier un nouveau traitĂ© d'amitiĂ©, de commerce et de navigation avec les AmĂ©ricains afin de rĂ©Ă©quilibrer certains aspects inĂ©gaux du prĂ©cĂ©dent traitĂ© Harris de 1858, en vain. L'envoi d'un navire de guerre japonais aux États-Unis permet Ă©galement aux Japonais de montrer que malgrĂ© 250 ans d'isolement, l'archipel est parvenu, en seulement 6 ans, Ă  se doter d'armements modernes Ă  l'occidentale.

Le bombardement allié de Shimonoseki de 1864

capture d'une batterie d'artillerie
Capture d'une batterie d'artillerie Ă  Shimonoseki.

Les États-Unis Ă  l’épreuve de la montĂ©e de l’impĂ©rialisme japonais (fin des annĂ©es 1880 jusqu’au dĂ©but du XXe siĂšcle) : le Japon est tout Ă  la fois un « ExtrĂȘme-Orient » contraint Ă  l’ouverture par les États-Unis qui a su dĂ©velopper l’imitation et l’apprentissage des modĂšles occidentaux et un « ExtrĂȘme-Orient » car ce pays s’industrialise et se lance dans la colonisation progressivement. En 1894, il intervient en CorĂ©e, royaume vassal de la Chine et le conflit se solde par une victoire Ă©crasante des Japonais et, en , est signĂ© le traitĂ© de Shimonoseki qui octroie au Japon l’üle de Formose, l’archipel des Pescadores et la presqu’üle du Liao. En 1899, le secrĂ©taire d’État John Hay Ă©nonce la doctrine de la porte ouverte, qui se veut contre l’existence de zones d’influence en Chine et contre toute discrimination en matiĂšre commerciale. Le rĂšglement du conflit russo-japonais (1904-1905) se dĂ©roule lors du traitĂ© de Portsmouth en 1905 et voit les États-Unis se poser comme mĂ©diateurs du conflit. Le Japon obtient la Mandchourie, la CorĂ©e, le sud de l'Ăźle Sakhaline, mais pas l’énorme indemnitĂ© qu’ils rĂ©clamaient. Peu aprĂšs la confĂ©rence de Portsmouth, Roosevelt reconnaĂźt la domination de Tokyo sur la CorĂ©e par le biais des accords de Taft-Katsura (en). Ce conflit marque la victoire d’une puissance d’ExtrĂȘme Asie sur les forces occidentales pour la premiĂšre fois, entraĂźnant la mĂ©fiance Ă  l’égard des Japonais et la peur du « pĂ©ril jaune ». L’immigration japonaise de plus en plus prĂ©sente Ă  l’Ouest des Rocheuses, ce qui va progressivement entrainer une montĂ©e du racisme et une limitation de l’immigration. En 1906, aprĂšs les Chinois, la Californie Ă©tend la sĂ©grĂ©gation aux Japonais. En 1907, le Japon et les États-Unis conviennent d’un « accord Ă  l’amiable » ou gentlemen’s agreement qui restreint l’immigration japonaise.

La volontĂ© des États-Unis d’apaiser ses relations avec le Japon (1907-1926)

De Ă  , la flotte amĂ©ricaine fait le tour du monde. Elle s’arrĂȘte notamment dans les ports japonais pour tĂ©moigner de l’amitiĂ© entre les deux pays. D’autre part, ThĂ©odore Roosevelt obtient le prix Nobel de la paix pour son rĂŽle d’arbitre dans le conflit russo-japonais notamment. Ainsi, le danger de la guerre est Ă©cartĂ©. William Taft est choisi par Roosevelt pour ĂȘtre son successeur, et ce dernier veut qu’il continue sa politique progressiste. Or cela ne va pas ĂȘtre le cas puisque W. Taft laisse la politique Ă©trangĂšre Ă  son secrĂ©taire d’État, Philander Knox qui dĂ©veloppe la « diplomatie du dollar » en Asie. Il s’agit d’y dĂ©fendre l’intĂ©rĂȘt national par des investissements massifs. Ainsi, le Japon se rapproche de la Russie[3].

L'immigration japonaise aux États-Unis vers 1920 : l’« Oriental Exclusion Act » en 1924

Entre 1880 le dĂ©but des annĂ©es 1920, l'immigration japonaise aux États-Unis s'Ă©lĂšve Ă  plus de 400 000 migrants[4]. Seulement, sous l'administration Coolidge, l'immigration japonaise est stigmatisĂ©e et aboutit Ă  l'« Oriental Exclusion Act ». Il interdit l’immigration asiatique et une loi d’exclusion interdit Ă©galement aux Japonais de se faire naturaliser amĂ©ricains. Cette mesure est perçue comme une insulte par les militaristes japonais, d’autant plus que les Japonais s’étaient montrĂ©s jusque-lĂ  fort arrangeants[5]

Les annĂ©es 1920 : l’esprit de coopĂ©ration

La dĂ©lĂ©gation japonaise propose lors du traitĂ© de Versailles de 1919 l’introduction d’une clause d’égalitĂ© des races. Or les États-Unis refusent et la proposition est rejetĂ©e[3]. Au dĂ©but des annĂ©es 1920, une rivalitĂ© nouvelle est apparue entre les États-Unis et le Japon mais va finalement trouver un compromis. Or ce compromis est dĂ©pendant du contexte de prospĂ©ritĂ© des annĂ©es 1920 et reste fragile. Une Ăšre de coopĂ©ration s’ouvre au prix d’un recentrage, d’un recul politique et militaire japonais en Asie orientale et au profit des États-Unis. La confĂ©rence de Washington sur le dĂ©sarmement et la dĂ©fense de l’intĂ©gritĂ© en Chine se dĂ©roule de Ă  . Le Japon abandonne ses ambitions et cette confĂ©rence marque le succĂšs de diplomatie amĂ©ricaine ainsi que l’échec du plan d’expansion japonais en Asie orientale avec le TraitĂ© de Washington de 1922. Le Japon choisit la voie de l’expansion pacifique[6].

Sous le gouvernement de KijĆ«rƍ Shidehara (« annĂ©es Shidehara »), ministre des affaires Ă©trangĂšres, engage une politique de coopĂ©ration avec les États-Unis et une « collaboration internationale » avec SDN. C’est aussi l’époque de la « diplomatie Ă©conomique » avec la Chine. Le gouvernement de Tokyo reconnait l’unitĂ© chinoise et s’engage Ă  une non intervention dans ses affaires intĂ©rieures.

Les dĂ©buts de l'Ăšre Showa, les relations entre le Japon et les États-Unis durant la montĂ©e du militarisme nippon (1926-1941)

L'Ăšre Showa (qui signifie « Ăšre de paix Ă©clairĂ©e ») correspond au rĂšgne de l'empereur Hiro-Hito sur l'empire du Japon (Nihon ? Taikoku) puis le Japon de 1926 Ă  1989. Les relations des gouvernements successifs de Hiro-Hito avec les États-Unis

Traité naval de Londres 1930

Le traitĂ© naval de Londres, entiĂšrement dĂ©signĂ© comme le « traitĂ© pour la restriction et la rĂ©duction d'armement naval » liait, en plus des États-Unis et du Japon, la Grande-Bretagne, la France ainsi que l’Italie. Cette confĂ©rence tenue en visait Ă  interdire la construction de nouveaux bĂątiments de guerre dans les flottes nationales pour Ă©viter d'aller en direction du conflit armĂ©.

Dans son application, les flottes amĂ©ricaine, britannique et japonaise se sont entendues pour permettre la construction de « croiseurs lĂ©gers », qui se trouvent ĂȘtre en rĂ©alitĂ© des bĂątiments de type « dreadnought » lourdement armĂ©s. La limite japonaise de construction de croiseur est inĂ©galement imposĂ©e par une limite de 70 % du tonnage amĂ©ricain ou britannique. La volontĂ© japonaise de dĂ©velopper sa flotte au-delĂ  du tonnage prĂ©vu lors du traitĂ© de Washington de 1922 illustre la politique expansionniste se mettant progressivement en place parmi l'Ă©lite militaire nippone. De plus, Ă  la suite de l'adoption de la clause de limitation de la flotte, une partie du gouvernement se dĂ©tache pour former un groupe de militaires hostiles au gouvernement Minseito, signataire du traitĂ©. Ce groupe est appelĂ© faction de la flotte[7].

La crise Ă©conomique

La crise de 1929 atteint peu Ă  peu le Japon et entraĂźne l’effondrement du commerce extĂ©rieur japonais et l’influence croissante du pouvoir militaire qui, combinĂ©s aux problĂšmes structurels que sont le problĂšme dĂ©mographique et l’insuffisance de la demande intĂ©rieure, vont entrainer le retour Ă  l’expansion armĂ©e[6]

La non-reconnaissance du Mandchoukouo par les États-Unis en 1931

carte du Mandchoukouo
Carte du Mandchoukouo (en vert).

Dans la nuit du , un tronçon de chemin de fer est sabotĂ© en Mandchourie Le gouvernement de Tokyo s'empresse de rejeter la faute sur les Chinois et d'envahir la Mandchourie afin d'en faire un État vassal du Japon. Cette politique expansionniste type rĂ©pond Ă  un mythe populaire (« infondĂ© » selon E. Behr) qui fait de la Mandchourie un territoire pouvant accueillir et nourrir des millions de Japonais. Ainsi, ce qui fut plus tard appelĂ© l'« incident de Mukden » permet l'Ă©tablissement d'un État subordonnĂ© Ă  Tokyo : le Mandchoukouo, dirigĂ© par l'empereur fantoche Puyi, ancien et dernier empereur de Chine.

À la suite du rapport Lytton demandĂ© par la SociĂ©tĂ© des Nations sur le fameux « incident », les positions internationales furent prises. Le rapport dĂ©nonçait une agression japonaise prĂ©mĂ©ditĂ©e sur le sol chinois (des canons nippons Ă©taient entre autres cachĂ©s dans une « piscine » rĂ©cemment construite). Les États-Unis optĂšrent stratĂ©giquement pour la « doctrine Stimson », du nom du secrĂ©taire d'État amĂ©ricain qui notifia ainsi la non-reconnaissance des conquĂȘtes japonaises, contraires au pacte Briand-Kellogg, et dĂ©sirant ainsi maintenir le systĂšme de Versailles. Afin de garantir les intĂ©rĂȘts commerciaux que les États-Unis possĂ©daient avec la Chine, l'administration Hoover entretenait la politique de la « Porte Ouverte », et fournit des moyens militaires aux Chinois afin qu'ils puissent rĂ©sister Ă  l'expansionnisme japonais[8]

Traités et pactes

Le , le gouvernement japonais signale qu'il compte mettre fin au traité de Washington de 1922. Ses dispositions restÚrent en vigueur jusque fin 1936, et il ne fut pas renouvelé.

Un Pacte anti-Komintern est signĂ© en 1936, entre l'Allemagne nazie et l'Empire du Japon, lesquels sont ensuite rejoints par d'autres États ayant des gouvernements fascistes ou Ă  tendances fascistes. La mĂȘme annĂ©e, le Second TraitĂ© naval de Londres est signĂ©, le , entre la France, le Royaume-Uni et les États-Unis.

La guerre sino-japonaise de 1937

Les États-Unis, suivis peu aprĂšs par la Grande-Bretagne et les Pays-Bas, engagent un embargo gĂ©nĂ©ral sur toutes leurs exportations de pĂ©trole et de matiĂšres premiĂšres dans l'espoir de contraindre le Japon Ă  une attitude plus conciliante. Hirota nouvellement nommĂ© premier ministre, voit se placer dans son ombre le ministre de la DĂ©fense impĂ©riale Hisaichi Terauchi, qui a la ferme intention de soumettre la Chine.

Dans les semaines qui prĂ©cĂ©dent l'« incident du pont Marco Polo » et l'invasion de l'Empire du milieu, Hiro-Hito ne laisse paraĂźtre aucune rumeur sur le plan qui se trame. Rappelant souvent officiellement les liens personnels qui lient l'empereur aux États-Unis, il ne faiblit pas lorsque le prĂ©sident des Philippines Manuel L. Quezon passe par le Japon pour faire escale en direction des États-Unis accompagnĂ© par le gĂ©nĂ©ral MacArthur. Joseph Grew, ambassadeur amĂ©ricain au Japon, note qu'il a rarement vu l'empereur aussi « affable »[9]:265.

L'attitude de Roosevelt face Ă  l'expansionnisme japonais

Lors de la guerre sino-japonaise de 1937, Roosevelt se voit confrontĂ© Ă  une nouvelle baisse Ă©conomique aux États-Unis et ne peut donc pas se permettre de faire appliquer le Neutrality Act, les lois de neutralitĂ© Ă  l'Ă©gard des Ă©vĂšnements d'ExtrĂȘme-Orient. Il laisse donc les entreprises d'armement armer progressivement la Chine d'une part, pour qui les États-Unis sont la seule source d'armes, et le Japon d'autre part, Ă  qui ils fournissent environ six fois plus de matĂ©riel. Le gouvernement Roosevelt se trouve ainsi fournisseur du massacre sino-japonais, et catalyseur de l'expansionnisme japonais[10]:366.

Toutefois, F. D. Roosevelt fait, le , un discours restĂ© cĂ©lĂšbre sur la « quarantaine » qui doit alors prĂ©server les États-Unis de tout pays agresseur et donc d'une entrĂ©e en guerre, afin de ne pas froisser un Ă©lectorat Ă©minemment isolationniste[10]:322 : « Lorsqu'une Ă©pidĂ©mie se rĂ©pand, on met en quarantaine les malades pour protĂ©ger la santĂ© de la communauté  La guerre est une contagion, qu'elle soit dĂ©clarĂ©e ou non
 ». À partir de ce discours, le prĂ©sident Roosevelt implique son pays dans la marche vers la guerre. Les dĂ©mocraties se battant avec des discours, une rĂ©union est organisĂ©e Ă  Bruxelles en novembre : les puissances de l'Axe n'y prennent pas part.

La canonniĂšre USS Panay est coulĂ©e par l'aviation japonaise sur le Yangtze, le , mais les États-Unis n'interviennent pas. MĂ©sentente entre les militaires et hommes politiques japonais. Les AmĂ©ricains obtiennent des excuses de la part du gouvernement de Tokyo ainsi qu'une rĂ©paration de deux millions de dollars et l'Incident du Panay est clos.

En 1938, le Japon affirme la doctrine du « Nouvel ordre en Asie orientale »[5]. En consĂ©quence, Roosevelt dĂ©pose, fin , un vaste projet de rĂ©armement naval devant le CongrĂšs afin que la flotte puisse tenir tĂȘte aux flottes de l'Axe. Les Chambres donnent leur accord trois mois plus tard, mais la politique de Roosevelt reste nĂ©anmoins toujours trĂšs vague. Demandant la construction de nouveaux armements, il rĂ©affirme au CongrĂšs la nĂ©cessitĂ© de ne pas rentrer dans la guerre[10]:356.

Finalement, Ă  la suite de l'Ă©chec de la dĂ©marche conciliatrice de Roosevelt pour rĂ©unir les puissances autour du dialogue, les États-Unis se montrent plus fermes avec le Japon. Dans le mĂȘme temps, le prince Konoe (aussi dit Konoye), chef du gouvernement nourri de sympathies envers les AmĂ©ricains est remplacĂ© par le baron Hiranuma, pro-allemand. En 1940, le gouvernement japonais se rallie au plan d’expansion dans le Sud-Est asiatique. Les États-Unis, qui sont pour la doctrine de la « Porte Ouverte », s’y opposent. En fĂ©vrier, la flotte japonaise prend possession de plusieurs Ăźles au large de l'Indochine, dont celle de Hainan, et de plusieurs atolls dans le Pacifique, qui n'ont pas grand-chose Ă  voir avec la guerre sino-japonaise. Roosevelt fait alors se rassembler, en , une partie de la flotte le long des possessions pacifiques amĂ©ricaines, avant de dĂ©noncer le traitĂ© de commerce qui liait le Japon aux États-Unis. À partir de , les exportations de fer et de pĂ©trole Ă  destination du Japon se trouvent rĂ©duites de maniĂšre draconienne[10].

L'invasion japonaise de l'Indochine engage le Japon vers Pearl Harbor

Le Japon profite de la dĂ©faite française de pour menacer les positions de l’État français en Indochine. Quelque 44 000 hommes sont dĂ©ployĂ©s pour avoir raison des 10 000 Français occupant l’Indochine, alors devenue territoire occupĂ© par les Japonais. Lors de l'invasion de l'Indochine par le Japon, les États-Unis finissent par mettre un embargo total sur les exportations de matiĂšres premiĂšres afin de saper la machine de guerre nippone. Plusieurs options s'offrent alors aux militaires japonais. Avec deux ans de rĂ©serve de pĂ©trole pour alimenter l'armĂ©e, le gouvernement juge opportun de lancer une offensive pour dĂ©finitivement soumettre la Chine et ne plus manquer de matiĂšres premiĂšres et de munitions. Le retrait de la Chine pour lever l'embargo amĂ©ricain ne parait pas une option conforme Ă  Hiro-Hito, qui ne veut pas perdre la face. Il choisit d'adopter une politique belliciste[9]:390.

Stratégie et rapports de force dans le Pacifique

Le Japon choisit alors de progresser vers le Sud pour espĂ©rer un ravitaillement de matiĂšres premiĂšres dans les Ăźles philippines et indonĂ©siennes : « sphĂšre de coprospĂ©ritĂ© du Grand Est asiatique ». Cette option rend la guerre avec les États-Unis, les Pays-Bas et la Grande-Bretagne inĂ©vitable. C'est pourquoi le Japon couvre ses arriĂšres en signant un pacte avec les SoviĂ©tiques, en . Le Japon estime que tant que l'Allemagne n'aura pas subi de dĂ©faite cuisante, les forces amĂ©ricaines ne se reconcentreront pas dans le Pacifique, laissant le champ libre au Japon pour manƓuvrer sans trop de contraintes. L’Allemagne reprĂ©sente donc la premiĂšre ligne de la stratĂ©gie japonaise[1].

Les ultimes nĂ©gociations qui ont lieu du au sont un dialogue de sourds. Le , l’ambassadeur japonais annonce au dĂ©partement d’État la rupture des pourparlers alors que l’attaque japonaise a dĂ©jĂ  eu lieu sans dĂ©claration de guerre. Pour la premiĂšre fois de l’histoire, les États-Unis et le Japon se font la guerre.

Roosevelt a Ă©tĂ© accusĂ© par ses ennemis politiques d’avoir laissĂ© perpĂ©trer l’agression dont il Ă©tait au courant pour forcer le CongrĂšs et l’opinion Ă  accepter la guerre. Cependant, s’il paraĂźt clair que les mesures de sĂ©curitĂ© qui s’imposaient en raison de la forte tension n’ont pas Ă©tĂ© prises Ă  temps, rien ne prouve, pour autant, la culpabilitĂ© de Roosevelt.

Guerre du Pacifique (1941-1945)

L'extension du conflit Ă  partir de sa base continentale en Chine et en Indochine, dĂ©bute en , Ă  partir de l'entrĂ©e en guerre officielle de l'Empire du Japon contre les États-Unis, le Royaume-Uni, les Pays-Bas et l'Australie. Les Japonais connaissent des succĂšs fulgurants au dĂ©but du conflit et s'emparent de vastes territoires mais sont lentement repoussĂ©s par la supĂ©rioritĂ© industrielle amĂ©ricaine. Le thĂ©Ăątre asiatique de la Seconde Guerre mondiale se distingue du thĂ©Ăątre europĂ©en par le rĂŽle capital jouĂ© par les marines de guerre dans le dĂ©nouement du conflit. En revanche, les crimes de guerre du Japon Shƍwa n'ont rien Ă  envier Ă  ceux de l'Allemagne. Ce conflit eut d'importantes consĂ©quences en affaiblissant les puissances coloniales europĂ©ennes qui connaĂźtront toutes la phase de dĂ©colonisation aprĂšs la guerre. La guerre se termine avec la capitulation sans conditions du Japon le .

Occupation du Japon par les États-Unis (1945-1952)

Le commandant en chef des forces alliĂ©s dans le Pacifique, le gĂ©nĂ©ral Douglas MacArthur, devient gouverneur militaire du Japon aprĂšs la reddition de celui-ci. Il doit assurer la direction d'un pays exsangue, qui doit rapatrier, au lendemain de la guerre, 6 millions de compatriotes sur l’archipel nippon. De plus, il doit cĂ©der les trois quarts des terres que l'Empire du Japon s’était constituĂ©es dans le cadre de sa politique expansionniste en Asie.

La structure administrative impériale est préservée, quoique les forces d'occupation américaines soient les seules maßtresses à bord jusqu'à la tenue d'élections libres. Mais, la situation du pays est catastrophique, avec des villes en ruine et de faibles récoltes laissant présager une famine imminente. De fait, les autorités d'occupation ont bien du mal à faire face aux problÚmes qui lui sont liés : ceux de la misÚre sociale, du chÎmage, de la prostitution et du marché noir.

De leur cĂŽtĂ©, les États-Unis font l'expĂ©rience du nation building afin de mettre fin, dans la mentalitĂ© des vaincus, Ă  un militarisme dont le radicalisme avait stupĂ©fiĂ© tous les belligĂ©rants. La comparaison avec l'Ă©poque des Empires amĂšne les mĂ©dias Ă  surnommer MacArthur « vice-roi du Pacifique ». Le gĂ©nĂ©ral amĂ©ricain se comporte dans ce pays en proconsul et son rĂŽle s'avĂšre aussi dĂ©terminant que celui d'un chef d'État.

L'occupation se termine avec l'application en 1952 du traitĂ© de San Francisco. Une administration civile amĂ©ricaine demeura cependant en place aux Îles RyĆ«kyĆ« jusqu'en 1972.

Dans les annĂ©es 1950, l’armĂ©e amĂ©ricaine teste Ă  une douzaine de reprises ses armes biologiques sur l'ile d'Okinawa[11].

AprĂšs l'occupation

Le traitĂ© de San Francisco de 1951 est couplĂ© au traitĂ© de sĂ©curitĂ© entre les États-Unis et le Japon qui place le pays sous la totale dĂ©pendance des AmĂ©ricains en matiĂšre de sĂ©curitĂ© (avec le maintien d'importantes bases militaires notamment, outre celle d'Okinawa Hontƍ, Ă  Yokosuka, Misawa ou Kadena) tandis que Washington peut dĂ©cider unilatĂ©ralement, sans consulter le gouvernement japonais, d'augmenter ou de diminuer la taille de ses troupes prĂ©sentes dans l'archipel. La guerre de CorĂ©e vient toutefois rapidement bouleverser cette tutelle militaire de fait : le Japon devient alors un atout stratĂ©gique dans la Guerre froide, et la concentration des militaires amĂ©ricains dans l'effort de guerre pousse Tokyo, avec l'aval des États-Unis, Ă  se doter de Forces d'autodĂ©fense afin d'assurer les missions de sĂ©curitĂ© nationale Ă  l'intĂ©rieur du territoire nippon. Le TraitĂ© de coopĂ©ration mutuelle et de sĂ©curitĂ© entre les États-Unis et le Japon du , redĂ©finissant celui de 1951, permet d'Ă©tablir un rapport de force plus Ă©quilibrĂ© entre les deux pays, les États-Unis se voyant contraints de consulter le gouvernement japonais pour utiliser leurs bases, ou pour introduire des armes nuclĂ©aires dans le territoire. Le traitĂ© offre nĂ©anmoins une quasi-extraterritorialitĂ© aux bases amĂ©ricaines et une forme d’impunitĂ© aux militaires[12]. Il constitue Ă©galement l'un des piliers de la diplomatie japonaise de l'aprĂšs-guerre, Ă  savoir le maintien de relations privilĂ©giĂ©es entre Tokyo et Washington.

Le yen devient une monnaie flottante en 1971, en raison de la fin de l'étalon-or, qui constitua l'un des chocs Nixon. Le yen s'apprécia alors de maniÚre importante. Le gouvernement Nixon se mit aussi à favoriser la République populaire de Chine, alors que Washington et Tokyo avaient jusqu'alors entretenu des relations privilégiés avec Taïwan. Ce changement de politique fut ressenti comme un choc, car Nixon avait pris cette décision sans consulter au préalable les Japonais. Nixon augmenta aussi les taxes sur les importations de textiles en provenance du Japon et avait menacé de réduire les exportations de soja vers l'Archipel.

Les annĂ©es 1980 sont marquĂ©es par l'exportation massive vers les États-Unis de produits Ă  haute valeur ajoutĂ©e (tĂ©lĂ©visions, automobiles, appareil photo, magnĂ©toscopes). Ce miracle Ă©conomique japonais est principalement dĂ» au faible coĂ»t de production (bas prix, forte productivitĂ©, bas salaires), mais aussi Ă  une stratĂ©gie industrielle visant Ă  imiter les produits concurrents afin de limiter les investissements et les dĂ©lais liĂ©s Ă  la recherche. En rĂ©ponse Ă  ces pratiques, les États-Unis imposent des quotas d'importation aux copies japonaises et menacent le Japon de sanctions Ă©conomiques, ce qui a pour effet la dĂ©gradation des relations commerciales entre les deux nations.

La presse et l'opinion publique amĂ©ricaines se montent trĂšs critique Ă  l'Ă©gard du Japon, perçu comme un concurrent Ă©conomique, dans les annĂ©es 1980 et 1990. Le Japon contribue Ă  hauteur de 13 milliards de dollars Ă  la guerre contre l'Irak en 1991. Pourtant, la presse s’en est prise Ă  une « contribution rĂ©ticente », Ă  une pratique « rarement claire et jamais audacieuse »[13].

Fin , quelques semaines aprĂšs l'annonce de l'espionnage de l'ÉlysĂ©e par la NSA, Wikileaks dĂ©voile que les États-Unis ont espionnĂ© de hauts responsables du gouvernement et d'entreprises japonais telles que Mitsubishi, ainsi que le gouverneur de la banque centrale Haruhiko Kuroda, depuis au moins [14].

Avant son Ă©lection en Ă  la PrĂ©sidence des États-Unis, Donald Trump fait part de son souhait de revenir sur les accords militaires avec le Japon et la CorĂ©e du Sud, expliquant que les États-Unis n'ont plus les moyens d'offrir une protection Ă  leurs partenaires d'Asie du Nord-Est, et que ces alliances du passĂ© ne servent plus les intĂ©rĂȘts de son pays. Il se dit prĂȘt Ă  envisager un retrait des 80 000 militaires amĂ©ricains basĂ©s dans la rĂ©gion, Ă  moins que le Japon et la CorĂ©e du Sud n'acceptent de payer beaucoup plus. Donald Trump leur suggĂšre par ailleurs de se doter de l'arme nuclĂ©aire pour rĂ©pondre Ă  la menace nord-corĂ©enne[15]. Il se plaint Ă©galement de la qualitĂ© de la relation commerciale bilatĂ©rale, dĂ©nonçant un yen trop faible et un marchĂ© japonais trop fermĂ© aux automobiles amĂ©ricaines[16].

Lors de sa rencontre de avec Shinzo Abe, Trump n'insiste plus sur la valeur de la devise japonaise ni sur le dĂ©sĂ©quilibre des Ă©changes, plaidant seulement pour la construction d'une relation commerciale « libre, juste et rĂ©ciproque », convaincu par les explications de Shinzo Abe. Le premier ministre japonais a de plus prĂ©cisĂ© que son pays Ă©tait prĂȘt Ă  faire plus d'efforts en matiĂšre de dĂ©fense[16].

Le Japon verse environ 2 milliards de dollars pour compenser le coĂ»t des 54 000 militaires amĂ©ricains dans le pays. Le prĂ©sident amĂ©ricain Donald Trump fait pression sur Tokyo afin de faire quadrupler ce montant[17].

Notes et références

  1. Edwin O. Reischauer, Histoire du Japon et des Japonais, vol. 1 Des origines Ă  1945, Paris, Seuil, , 251 p. (ISBN 978-2-02-000675-0).
  2. (en) Masao Miyoshi, As we saw them : The First Japanese Embassy to the United States (1860), Berkeley, University of California Press, , 232 p. (ISBN 978-0-520-03767-0).
  3. Jacques Gravereau, Le Japon au XXe siĂšcle, Paris, Seuil, , 636 p. (ISBN 978-2-02-013186-5).
  4. (en) Laura Ichise, « The History of Japanese Immigration to the United States », KCC Alterna-TV (consulté le ).
  5. Patrice Touchard, Christine Bermont, Patrick Cabanel et Maxime Lefebvre, Le SiÚcle des excÚs de 1880 à nos jours, Paris, Presses universitaires de France, coll. « Major », , 592 p. (ISBN 978-2-13-045172-3).
  6. Marc Nouschi, Le XXe siĂšcle, Paris, Armand Collin, , 542 p. (ISBN 978-2-200-25132-1).
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  8. Pierre Melandri, Histoire des États-Unis depuis 1865, Paris, Fernand Nathan, , 348 p. (ISBN 978-2-09-191112-0).
  9. Edward Behr (trad. de l'anglais par BĂ©atrice Vierne), Hiro-Hito l'empereur ambigu, Paris, Robert Laffont, , 525 p., 24 cm (ISBN 978-2-221-05640-0).
  10. Robert Lacourt Gayet, Histoire des États-Unis, de la fin de la guerre civile à Pearl Harbor, Paris, Fayard, (ISBN 978-2-213-00315-3).
  11. Lina Sankari, « Japon. Akahata, la paix pour drapeau », L'HumanitĂ©,‎ (lire en ligne, consultĂ© le )
  12. Les militaires amĂ©ricains basĂ©s au Japon, jugĂ©s responsables de la propagation d’Omicron dans l’Archipel, lemonde.fr, 11 janvier 2022
  13. L’opinion publique amĂ©ricaine s’alarme des succĂšs Ă©conomiques du Japon, Serge Halimi, octobre 1991
  14. « Les États-Unis ont espionnĂ© gouvernement et entreprises au Japon », Les Échos,‎ (lire en ligne).
  15. Yann Rousseau, « Donald Trump effraie le Japon mais réjouit la Chine », Les Echos, le 11 avril 2016
  16. Yann Rousseau, « Pyongyang pousse Donald Trump et Shinzo Abe à réaffirmer leur alliance », Les Echos, le 12 février 2017
  17. « DerriĂšre l’abandon par le Japon d’un systĂšme de dĂ©fense antimissile amĂ©ricain, le choix d’une stratĂ©gie agressive », sur L'HumanitĂ©,

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