Pentobarbital
Le pentobarbital (également: pentobarbitone - nom commercial : Nembutal) est un barbiturique qui a été utilisé en anesthésie et comme somnifÚre (pour ses propriétés hypnotiques). Il est réputé pour entraßner une certaine dépendance.
Pentobarbital | ||
Identification | ||
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No CAS | ||
No ECHA | 100.000.895 | |
No CE | 200-983-8 | |
Code ATC | N05 | |
Propriétés chimiques | ||
Formule | C11H18N2O3 |
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Masse molaire[1] | 226,272 2 ± 0,011 4 g/mol C 58,39 %, H 8,02 %, N 12,38 %, O 21,21 %, |
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Données pharmacocinétiques | ||
Excrétion |
urines/selles |
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Considérations thérapeutiques | ||
Voie dâadministration | Orale, rectal | |
Unités du SI et CNTP, sauf indication contraire. | ||
Le pentobarbital de sodium est utilisĂ© Ă fortes doses pour pratiquer des euthanasies, principalement vĂ©tĂ©rinaires, mais aussi dans l'aide au suicide dans les pays oĂč cette pratique est lĂ©gale et provoque une mort sans douleur[2].
Pharmacologie et durée d'action
Contrairement Ă sa demi-vie d'Ă©limination de plus de 20h[3] - [4] - [5], le pentobarbital n'agit de façon discernable que durant 4-6 heures[4], mĂȘme si ces deux paramĂštres dĂ©pendent largement des doses consommĂ©es. En effet le facteur limitant de sa durĂ©e d'action est davantage sa propension Ă ĂȘtre dispersĂ© Ă travers le corps, hors du systĂšme nerveux central. Son dĂ©lai d'action est rapide avec un Tmax d'une heure[4] - [6].
Son canal d'action primaire est la modulation positive des rĂ©cepteurs au GABA de type A. Ces rĂ©cepteurs, lorsqu'ils sont activĂ©s, ont un effet inhibiteur sur la transmission nerveuse. Le pentobarbital potentialise l'action du GABA endogĂšne[7]. Plus spĂ©cifiquement, l'utilisation d'un barbiturique ouvre davantage le canal ionique Cl- lorsque le GABA ou un autre agoniste (tel que l'alcool) se fixe Ă ces rĂ©cepteurs. Cela permet au neurone cible de se polariser nĂ©gativement encore davantage et rĂ©duit son potentiel de stimulation par courant Ă©lectrique, lorsque des ions positifs tenteront de le charger positivement. Un effet agoniste direct des rĂ©cepteurs GABA-A est aussi remarquĂ©[8] pour des concentrations allant de âŒ100 ÎŒM Ă 1 mM, mais dĂ©pend donc de la quantitĂ© de produit consommĂ©.
Le barbiturique agit également sur d'autres canaux de maniÚre mineure : on note une action inhibitrice de la recapture de l'adénosine, ainsi qu'un antagonisme des récepteurs AMPA et une inhibition de la sécrétion de glutamate[9] - [10].
Contrairement aux benzodiazépines qui les ont largement supplantés, les barbituriques augmentent l'amplitude de l'ouverture du canal ionique Cl-, au lieu d'en augmenter le nombre d'ouvertures[11]. Ce sont ces diverses différences qui expliquent le caractÚre plus toxique du pentobarbital comparé à un composé plus moderne.
Le produit semble ĂȘtre un inducteur d'enzymes CYP[12] - [13].
Utilisation médico-légale
Le , pour la premiĂšre fois aux Ătats-Unis, un dĂ©tenu condamnĂ© Ă mort, John David Duty, a Ă©tĂ© exĂ©cutĂ© en Oklahoma avec ce produit, Ă cause d'une rupture de stock de thiopental fabriquĂ© par la firme Hospira, le seul anesthĂ©siant autorisĂ© dans tout le pays comme premier des trois produits[14] administrĂ©s Ă un condamnĂ© Ă mort[15].
Aux Ătats-Unis, face Ă une rarĂ©faction de leurs rĂ©serves de pentobarbital, de nombreux Ătats font appel Ă de nouvelles substances, comme l'hydrochlorure de midazolam, crĂ©ant un dĂ©bat de sociĂ©tĂ© ainsi qu'une augmentation des recours en justice de prisonniers craignant de finir dans d'atroces souffrances[16] - [17].
Usage détourné et trafic
Le produit est encore aujourd'hui parfois vendu sur internet (et le darkweb notamment) pour des utilisations à des fins récréatives ou pour des suicides prémédités[18]. Il est cependant rare car la plupart de ses anciens fabricants (Abbott, Eli Lilly...) en ont abandonné la commercialisation. Il est toujours fabriqué en Chine par de nombreux laboratoires[19], qui sont souvent la source de ses fournisseurs du marché noir[20].
Le pentobarbital ayant été l'un des produits de sa classe les plus répandus, il fut largement consommé à des fins détournées au fil du temps[21]. Jusqu'aux années 1950, ces médicaments étaient souvent disponibles en vente libre. On estime par exemple qu'en Angleterre, 130 000 citoyens étaient dépendants aux barbituriques en 1965[21]. Les produits étaient aussi consommés en mélanges avec des amphétamines, de maniÚre à modérer les effets indésirables de ces derniÚres[22] - [23].
Morts dues Ă l'abus de pentobarbital
Notes et références
- Masse molaire calculĂ©e dâaprĂšs « Atomic weights of the elements 2007 », sur www.chem.qmul.ac.uk.
- « A 104 ans, un scientifique australien part mourir en Suisse », 20 minutes.fr, 7 mai 2018.
- (en) Wermeling Dp et Blouin Ra, « Pentobarbital Pharmacokinetics in Patients With Severe Head Injury », sur Drug intelligence & clinical pharmacy, 1987 may (PMID 3582175, consulté le )
- (en) PubChem, « Pentobarbital », sur pubchem.ncbi.nlm.nih.gov (consulté le )
- Steven Jason Crellin et Kenneth D. Katz, « Pentobarbital Toxicity after Self-Administration of Euthasol Veterinary Euthanasia Medication », Case Reports in Emergency Medicine, vol. 2016,â (ISSN 2090-648X, PMID 26881149, PMCID 4735920, DOI 10.1155/2016/6270491, lire en ligne, consultĂ© le )
- (en) Elisabeth F. Howell, « Equivalency chart »
- Rho, J. M. ; Donevan, S. D. ; Rogawski, M. A. (1996). "Direct activation of GABAA receptors by barbiturates in cultured rat hippocampal neurons". The Journal of physiology 497 (Pt 2): 509â522. PMC 1161000. .
- Yukiko Muroi, Cassandra M. Theusch, Cynthia Czajkowski et Meyer B. Jackson, « Distinct Structural Changes in the GABAA Receptor Elicited by Pentobarbital and GABA », Biophysical Journal, vol. 96, no 2,â , p. 499â509 (ISSN 0006-3495, PMID 19167300, PMCID 2716461, DOI 10.1016/j.bpj.2008.09.037, lire en ligne, consultĂ© le )
- (en) Wolfgang Löscher et Michael A. Rogawski, « How theories evolved concerning the mechanism of action of barbiturates », Epilepsia, vol. 53, no s8,â , p. 12â25 (ISSN 1528-1167, DOI 10.1111/epi.12025, lire en ligne, consultĂ© le )
- Eichi Narimatsu, Tomohisa Niiya, Mikito Kawamata et Akiyoshi Namiki, « [The mechanisms of depression by benzodiazepines, barbiturates and propofol of excitatory synaptic transmissions mediated by adenosine neuromodulation] », Masui. The Japanese Journal of Anesthesiology, vol. 55, no 6,â , p. 684â691 (ISSN 0021-4892, PMID 16780077, lire en ligne, consultĂ© le )
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- Dans l'ordre : thiopental, pancuronium, et chlorure de potassium.
- PremiÚre exécution avec un anesthésiant pour animaux sur le site de radio-canada.ca, 17 décembre 2010.
- Un détenu avoue son crime sur la table d'exécution sur le site de 24heures.ch, 16 octobre 2013.
- « Ohio : exécuté avec un nouveau cocktail, un condamné agonise une demi-heure », sur lemonde.fr, Le Monde, (consulté le )
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- « Chantal Sébire a bien absorbé un barbiturique », Le Figaro, 27 mars 2008.
- Causeur.fr, « Roland Jaccard mâavait montrĂ© ses deux flacons de Nembutal⊠», sur Causeur, (consultĂ© le )
Annexes
Articles connexes
Liens externes
- Fiche BIAM du pentobarbital sodique (web.archive.org)