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PĂŽle et polaire

En géométrie euclidienne, la polaire d'un point par rapport à deux droites sécantes du plan est une droite définie par conjugaison harmonique : les deux droites données, la droite joignant le point à leur intersection, et la polaire forment un faisceau harmonique ; le point est appelé pÎle (de cette droite). Cette notion se généralise à celle de polaire par rapport à un cercle, puis par rapport à une conique. La relation entre pÎle et polaire est en fait projective : elle est conservée par homographie.

Fig. 1. La polaire du point P par rapport au cercle (C) passe par les points de tangence des droites tangentes à (C) menées par P.
Fig. 2. La polaire du point P est la droite (d). On note qu'elle est perpendiculaire Ă  la droite PO (O centre du cercle (C).
Fig. 3. PÎle P de la droite (d) par rapport à la conique (C). La construction, qui résulte également des propriétés du quadrilatÚre complet, est calquée sur la précédente.

DĂ©finition harmonique

Soient (C) une conique (mĂȘme dĂ©gĂ©nĂ©rĂ©e), et P un point du plan. ConsidĂ©rons un point M mobile sur (C). Soit N le deuxiĂšme point d'intersection de (MP) et (C).

Soit enfin A le point tel que P,A,M,N forment une division harmonique, c'est-Ă -dire tel que le birapport (PA,MN) vaut -1. On montre que, lorsque M varie, le lieu de A est une droite ou un segment de droite.

On appelle polaire de P par rapport Ă  (C) la droite (d) qui porte ce segment. RĂ©ciproquement, on dit que P est le pĂŽle de (d) par rapport Ă  (C).

Si la conique est formée de deux droites concourantes en O, OP, (d) et les deux droites forment un faisceau harmonique ; si les deux droites sont parallÚles, le faisceau formé par la parallÚle passant par P et les trois autres droites est harmonique.

Si la conique est non dégénérée, toute droite admet un pÎle.

Dans le cas oĂč (C) est non dĂ©gĂ©nĂ©rĂ©e, et si P est extĂ©rieur Ă  (C), on peut mener par ce point deux tangentes Ă  la conique. Appelons K et L les points de contact de ces tangentes. Alors, la polaire (d) du point P est la droite (KL) (voir Figure 1 dans le cas d'un cercle). RĂ©ciproquement, si une droite coupe la conique, son pĂŽle est l'intersection des deux tangentes aux deux points d'intersection.

Ces définitions montrent que ces notions sont invariantes par homographie, c'est-à-dire que si p est une application projective envoyant la conique (C) sur (C'), et (d) la polaire de P par rapport à (C), la polaire de p(P) par rapport à (C') est p((d)).

Propriétés géométriques dans le cas du cercle

  • La polaire d'un point P par rapport Ă  un cercle de centre O et de rayon R est une droite perpendiculaire Ă  OP, passant par H situĂ© sur la demi-droite OP tel que OP.OH = R2.
  • Soient A, B, C, D quatre points d'un cercle (C). On note les points d'intersection
    • ,
    • ,
    • .

Alors, d'aprÚs les propriétés du quadrilatÚre complet, la polaire de P par rapport à (C) est la droite (FE) (voir Figure 2).

Cette propriété permet de construire la polaire d'un point à la rÚgle uniquement, et aussi de la tracer pour un point intérieur au cercle.

On peut également, en s'aidant de cette propriété, construire à la rÚgle seulement les tangentes à un cercle passant par un point extérieur au cercle.

Généralisation aux coniques projectives

Du fait que les transformations homographiques du plan (c'est-à-dire les perspectives coniques) conservent le birapport, on peut généraliser les propriétés précédentes.

La transformée d'un point par homographie est un point. Celle d'une droite est une droite. Celle d'un cercle est une conique dont la nature dépend de l'homographie. Les homographies conservent les alignements de points et les intersections.

Les propriĂ©tĂ©s dĂ©montrĂ©es prĂ©cĂ©demment par des calculs ou des raisonnements mĂ©triques dans le cas du cercle se gĂ©nĂ©ralisent donc au cas d'une conique quelconque (et on peut mĂȘme utiliser un passage Ă  la limite pour traiter le cas d'un couple de droites comme conique dĂ©gĂ©nĂ©rĂ©e).

La notion d’extĂ©rieur/intĂ©rieur, Ă©vidente pour l'ellipse, se gĂ©nĂ©ralise aux autres coniques (parabole, hyperbole) en dĂ©finissant l'intĂ©rieur par la zone convexe et l’extĂ©rieur par son complĂ©mentaire.

  • Si le pĂŽle est Ă  l’extĂ©rieur alors sa polaire coupe la conique en 2 points.
  • Si le pĂŽle est Ă  l’intĂ©rieur alors sa polaire est Ă  l’extĂ©rieur (et ne coupe pas la conique).
  • Si le pĂŽle est sur la conique alors sa polaire est la tangente Ă  la conique en ce point.

Utilisation des coordonnées projectives

Soit C la matrice 3×3 associĂ©e Ă  la forme bilinĂ©aire symĂ©trique de la conique, d'Ă©quation affine ; la forme quadratique correspondante est donc , et . Notant M un point du plan de coordonnĂ©es projectives (X, Y, 1), M appartient Ă  la conique si et seulement si MTCM = 0[1]. Pour tout point M du plan, CM est un vecteur Ă  3 dimensions, qui grĂące Ă  la dualitĂ© projective peut ĂȘtre interprĂ©tĂ© comme une droite d’équation . Cette droite est la polaire de M (vu ici comme un pĂŽle). RĂ©ciproquement si C est inversible (conique non dĂ©gĂ©nĂ©rĂ©e), Ă  toute droite (polaire) du plan reprĂ©sentĂ©e par un vecteur , on associe le pĂŽle [2].

Points conjugués

Si un point A appartient à la polaire q du point Q, alors Q appartient à la polaire a de A. Plus généralement, les polaires de tous les points de la droite q passent par son pÎle Q.

Soit x et y deux points du plan. Si yTCx = 0, on dit que les points sont conjuguĂ©s par rapport Ă  C. On dĂ©duit des formules prĂ©cĂ©dentes que y appartient Ă  la polaire de x, et x appartient Ă  la polaire de y. De mĂȘme (figure ci-contre), les polaires de tous les points d'une droite passent par le pĂŽle de cette droite. C'est cette propriĂ©tĂ© qui montre que la transformation par polaires rĂ©ciproques est une involution[2].

Plan projectif complexe

Le cadre le plus naturel pour unifier les résultats précédents est en fait de se placer dans le plan projectif complexe (en) ; il n'apparait alors plus aucune exception pour les coniques non dégénérées (et toutes celles-ci sont isomorphes entre elles). Ainsi, par exemple, la polaire joint toujours les deux points de contact des tangentes, le centre d'un cercle (ou plus généralement d'une conique à centre) a pour polaire la droite de l'infini, etc.[2]

Notes et références

  1. Les points de coordonnées (X, Y, 0) sont les points à l'infini, appartenant à la conique si .
  2. Jean-Claude Sidler, Géométrie projective, Dunod, 2000 : les définitions sont données page 198.

Bibliographie

  • Jean-Denis Eiden, GĂ©omĂ©trie analytique classique, Calvage & Mounet, 2009, (ISBN 978-2-91-635208-4)
  • Jean Fresnel, MĂ©thodes modernes en gĂ©omĂ©trie
  • Bruno Ingrao, Coniques affines, euclidiennes et projectives, C&M, (ISBN 978-2-916352-12-1)

Articles connexes

Liens externes

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