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Ouvrage du Col-de-Garde

L'ouvrage du Col-de-Garde est une fortification faisant partie de la ligne Maginot, située sur la limite entre les communes de Sainte-Agnès et de Gorbio, dans le département des Alpes-Maritimes.

Ouvrage du Col-de-Garde
l'unique cloche GFM de l'ouvrage, sur le bloc 3.
l'unique cloche GFM de l'ouvrage, sur le bloc 3.

Type d'ouvrage Petit ouvrage d'infanterie
Secteur
└─ sous-secteur
secteur fortifié des Alpes-Maritimes
└─ sous-secteur des Corniches,
quartier Sainte-Agnès
Numéro d'ouvrage EO 10
Année de construction 1935-1939
RĂ©giment 86e BAF
Nombre de blocs 4
Type d'entrée(s) Entrée des hommes (EH)
Effectifs 111 hommes et quatre officiers
CoordonnĂ©es 43° 47′ 10,83″ nord, 7° 27′ 49,71″ est

Il s'agit d'un petit ouvrage[n 1] de quatre blocs servant d'abri actif : il avait pour mission non seulement de protéger une section d'infanterie, mais aussi de renforcer la ligne de fortifications grâce à son armement.

Description

L'abri a Ă©tĂ© construit Ă  270 mètres d'altitude, sur le versant sud du col de Garde (en contrebas de la route D 22, qui relie Menton au col de Saint-Pancrace)[2] sous lequel passe le tunnel de l'autoroute A 8.

Position sur la ligne

L'ouvrage faisait partie du secteur fortifiĂ© des Alpes-Maritimes, dans le sous-secteur des Corniches, qui devait dĂ©fendre le territoire français contre une invasion italienne. Il se situe sur la « ligne principale de rĂ©sistance » (couverte par la ligne des avant-postes, plus Ă  l'est), entre l'ouvrage de Sainte-Agnès 1 320 mètres plus au nord (Ă  vol d'oiseau) et celui de Roquebrune 1 880 m plus au sud. Un barrage de route Ă©tait en place juste Ă  l'est de l'ouvrage, composĂ© d'une simple barrière basculante composĂ©e de tubes mĂ©talliques[3].

La mission de l'ouvrage était triple : premièrement il devait servir d'abri pour une section d'infanterie (qui pouvait être ainsi utilisée comme une réserve mobile)[4], deuxièmement il devait participer avec ses mitrailleuses à la continuité des feux d'infanterie entre les deux gros ouvrages voisins (tirs en flanquement vers le nord et vers le sud par les blocs 2 et 4) et troisièmement il devait interdire la route montant de Menton vers Sainte-Agnès par le col de Garde (mission des blocs 3 et 4 couvrant les lacets de la route) avec l'aide d'une barrière antichar.

Souterrains

Comme tous les autres ouvrages de la ligne Maginot, celui du Col-de-Garde est conçu pour rĂ©sister Ă  un bombardement d'obus de gros calibre. Les organes de soutien sont donc amĂ©nagĂ©s en souterrain, creusĂ©s sous plusieurs mètres de roche, tandis que les organes de combat, dispersĂ©s en surface sous forme de blocs, sont protĂ©gĂ©s par d'Ă©pais cuirassements en acier et des couches de bĂ©ton armĂ©. Les installations souterraines abritent un casernement pour l'Ă©quipage (amĂ©nagĂ© dans la galerie d'accès un peu Ă©largie menant au bloc 2), un système de ventilation et de filtration de l'air, un poste de secours, des latrines, des lavabos, un petit stock de munitions (la dotation thĂ©orique Ă©tait de 150 obus de 37 mm pour le canon antichar, 500 obus de 50 mm pour le mortier sous cloche GFM, 50 000 cartouches de 7,5 mm par mitrailleuses, 14 000 pour le FM sous cloche et 1 000 par FM de porte)[5], un stock de vivres, une usine, des rĂ©servoirs de gazole et d'eau, ces derniers alimentĂ©s grâce Ă  un puits et une pompe Ă©lectrique.

L'énergie est fournie par le réseau civil, mais en cas de coupure, le courant électrique pouvait être généré par un groupe électrogène[6], composé d'un moteur Diesel Baudouin type DB 2 (à deux cylindres fournissant 24 ch à 750 tours par minute)[4] couplé à un alternateur, complétés par un groupe auxiliaire CLM 1 PJ 65[n 2]. Le refroidissement des moteurs se fait par circulation d'eau.

Blocs

Le crĂ©neau mixte pour un jumelage de mitrailleuses ou un canon antichar de 37 mm (permutables entre-eux).

L'ouvrage est en fait un abri-caverne Ă  deux entrĂ©es, sur lequel a Ă©tĂ© greffĂ© une cloche de tir et une casemate (d'oĂą l'expression d'« abri actif »)[2] : il est composĂ© en surface de quatre blocs, reliĂ©s par des galeries souterraines. Le niveau de protection est le no 2[7], soit pour les murs exposĂ©s une Ă©paisseur de 2,25 mètres de bĂ©ton armĂ© et pour les dalles deux mètres, de quoi thĂ©oriquement rĂ©sister Ă  un pilonnage jusqu'au calibre 240 mm.

Le bloc 1 est l'entrée sud-ouest de l'ouvrage, construit sur un versant regardant vers le sud. La porte blindée étanche est protégée par une visière en béton et par un fossé diamant qui était enjambé par une passerelle métallique, la défense étant confiée à une goulotte lance-grenades (pour interdire le fossé) et à deux créneaux pour fusil mitrailleur, l'un monté sur la porte, l'autre sous béton dans l'axe du chemin d'accès. Une prise d'air de forme circulaire traverse la façade à côté du créneau.

Le bloc 2 est l'entrĂ©e sud-est, Ă  environ 40 mètres de l'autre entrĂ©e. En plus de la porte blindĂ©e et du fossĂ©, le bloc est Ă©quipĂ© d'un crĂ©neau pour un jumelage de mitrailleuses tirant vers le sud et un crĂ©neau de porte pour fusil mitrailleur, tandis que le fossĂ© est dĂ©fendu par une goulotte lance-grenades. Une prise d'air de forme circulaire traverse la façade.

Le bloc 3 est Ă©quipĂ© d'une cloche GFM (pour « guetteur et fusil mitrailleur ») type A, qui Ă©tait armĂ©e avec un fusil mitrailleur et un mortier de 50 mm. La liaison entre le bloc et le reste de l'ouvrage se fait par un puits. En surface, le bloc se situe en surplomb du bloc 2, aujourd'hui sur un chemin venant du bloc 4 ; il est dĂ©broussaillĂ© par la mairie de temps en temps.

Le bloc 4 est une casemate, situĂ©e Ă  l'extrĂ©mitĂ© nord de l'ouvrage, en bordure de la route. Il pouvait tirer vers l'est pour dĂ©fendre le bloc 2 de l'ouvrage de Sainte-Agnès grâce Ă  un crĂ©neau pour un jumelage de mitrailleuses ou un canon antichar de 37 mm (les armes Ă©tant permutables entre elles), ainsi que vers le nord par un autre crĂ©neau pour jumelage de mitrailleuses[6]. Le fossĂ© Ă©tait dĂ©fendu par deux goulottes lance-grenades. Il s'agit d'un bloc avec accès en puits au reste de l'ouvrage ; il se trouve sur la route menant vers le village de Sainte-Agnès (ce qui sert de repère pour trouver l'ouvrage). Une entrĂ©e d'air a Ă©tĂ© amĂ©nagĂ©e sur le bloc.

Une barrière antichar basculante était installée sur la route.

Armement

Les mitrailleuses et fusils mitrailleurs de l'ouvrage Ă©taient chacun protĂ©gĂ© par une trĂ©mie blindĂ©e et Ă©tanche (pour la protection contre les gaz de combat). Ils tirent la mĂŞme cartouche de 7,5 mm Ă  balle lourde (modèle 1933 D de 12,35 g au lieu de g pour la modèle 1929 C)[8].

Les mitrailleuses Ă©taient des MAC modèle 1931 F, montĂ©es en jumelage (JM) pour pouvoir tirer alternativement, permettant le refroidissement des tubes. La portĂ©e maximale avec cette balle (Vo = 694 m/s) est thĂ©oriquement de 4 900 mètres (sous un angle de 45°, mais la trĂ©mie limite le pointage en Ă©lĂ©vation Ă  15° en casemate), la hausse est graduĂ©e jusqu'Ă  2 400 mètres et la portĂ©e utile est plutĂ´t de 1 200 mètres. Les chargeurs circulaires pour cette mitrailleuse sont de 150 cartouches chacun, avec un stock de 50 000 cartouches pour chaque jumelage[5]. La cadence de tir thĂ©orique est de 750 coups par minute[9], mais elle est limitĂ©e Ă  450 (tir de barrage, avec trois chargeurs en une minute), 150 (tir de neutralisation et d'interdiction, un chargeur par minute) ou 50 coups par minute (tir de harcèlement, le tiers d'un chargeur)[10]. Le refroidissement des tubes est accĂ©lĂ©rĂ© par un pulvĂ©risateur Ă  eau ou par immersion dans un bac.

Les fusils mitrailleurs (FM) Ă©taient des MAC modèle 1924/1929 D, dont la portĂ©e maximale est de 3 000 mètres, avec une portĂ©e pratique de l'ordre de 600 mètres[11]. L'alimentation du FM se fait par chargeurs droits de 25 cartouches, avec un stock de 14 000 par cloche GFM, 7 000 par FM de casemate et 1 000 pour un FM de porte ou de dĂ©fense intĂ©rieure[5]. La cadence de tir maximale est de 500 coups par minute, mais elle est normalement de 200 Ă  140 coups par minute[12] - [13].

Histoire

L'ouvrage est construit par la main-d'œuvre militaire (MOM)[4], pour faire des économies, de 1935 à 1939[14]. Il est occupé d' à , mais ne participe pas aux combats de juin 1940, l'avancée italienne étant très limitée. Comme tous les ouvrages des Alpes, il fut désarmé et évacué après l'entrée en application de l'armistice du 24 juin 1940. Les Allemands le réarmèrent en 1944.

État actuel

L'ouvrage est actuellement verrouillé. Le bloc 1 commence à disparaître sous la végétation. Quant au bloc 2, il est plutôt facile à trouver, il suffit juste de monter sur le petit chemin menant vers la route ; après être monté un peu à votre gauche, vous trouverez un chemin descendant vers le bloc 2. Le sol est plutôt glissant. Le fossé du bloc 2 a commencé à servir de décharge, tandis que la passerelle en fer a été volée.

Notes et références

Notes

  1. L'appellation d'« ouvrages » pour désigner les abris actifs est sujet à débats. Selon Philippe Truttmann, « les abris-actifs jouent, dans le Sud-Est, le rôle dévolu aux ouvrages d'infanterie ; ils s'appellent d'ailleurs parfois petits ouvrages »[1].
  2. Le nom du petit moteur Diesel CLM 1 PJ 65 correspond au fabricant (la Compagnie lilloise de moteurs, installĂ©e Ă  Fives-Lille), au nombre de cylindres (un seul fonctionnant en deux temps, mais avec deux pistons en opposition), au modèle (PJ pour « type Peugeot fabriquĂ© sous licence Junkers ») et Ă  son alĂ©sage (65 mm de diamètre, soit 700 cm3 de cylindrĂ©e). Ce groupe auxiliaire servait au lancement des gros groupes (en fournissant de l'air comprimĂ©) et Ă  l'Ă©clairage d'urgence.

Références

Voir aussi

Bibliographie

  • Jean-Marc Truchet, Ligne Maginot : casemates et avant-postes fortifiĂ©s de Menton au massif de l'Authion, Villebois, la Plume du temps, , 132 p. (ISBN 978-2-913788-60-2).
  • Jean-Yves Mary, Alain Hohnadel, Jacques Sicard et François Vauviller (ill. Pierre-Albert Leroux), Hommes et ouvrages de la ligne Maginot, Paris, Ă©ditions Histoire & collections, coll. « L'EncyclopĂ©die de l'ArmĂ©e française » (no 2) :
    • Hommes et ouvrages de la ligne Maginot, t. 2 : Les formes techniques de la fortification Nord-Est, Paris, Histoire et collections, , 222 p. (ISBN 2-908182-97-1) ;
    • Hommes et ouvrages de la ligne Maginot, t. 4 : la fortification alpine, Paris, Histoire & collections, , 182 p. (ISBN 978-2-915239-46-1) ;
    • Hommes et ouvrages de la ligne Maginot, t. 5 : Tous les ouvrages du Sud-Est, victoire dans les Alpes, la Corse, la ligne Mareth, la reconquĂŞte, le destin, Paris, Histoire & collections, , 182 p. (ISBN 978-2-35250-127-5).
  • Philippe Truttmann (ill. FrĂ©dĂ©ric Lisch), La Muraille de France ou la ligne Maginot : la fortification française de 1940, sa place dans l'Ă©volution des systèmes fortifiĂ©s d'Europe occidentale de 1880 Ă  1945, Thionville, Éditions G. Klopp, (rĂ©impr. 2009), 447 p. (ISBN 2-911992-61-X).

Articles connexes

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