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Monstre de Gila

Heloderma suspectum

Heloderma suspectum, le Monstre de Gila, est une espĂšce de sauriens venimeux de la famille des Helodermatidae[1]. C'est un lĂ©zard lent, d'aspect massif, pouvant atteindre 60 cm. C'est le seul lĂ©zard venimeux connu d'AmĂ©rique du Nord avec son proche cousin Heloderma horridum[2]. Bien qu'il soit venimeux son caractĂšre tranquille voire passif fait qu'il est peu dangereux pour les humains. Il a toutefois mauvaise rĂ©putation et est parfois tuĂ© pour cette raison bien qu'il soit protĂ©gĂ© en Arizona[3].

Distribution et habitat

Cette espùce se rencontre en Californie, au Nevada, en Utah, en Arizona et au Nouveau-Mexique aux États-Unis[4].

Ce lĂ©zard vit dans des zones assez arides comme les garrigues, dĂ©serts, forĂȘts de chĂȘnes, se cachant dans des terriers, fourrĂ©s ou sous des rochers, de prĂ©fĂ©rence proches de zones plus humides[5]. Il semble en effet apprĂ©cier l'eau et peut ĂȘtre observĂ© se plongeant dans les flaques aprĂšs une pluie d'Ă©tĂ©[6]. Il Ă©vite de s'aventurer dans les espaces dĂ©couverts comme les terres cultivĂ©es[7].

Description

Heloderma suspectum
Heloderma suspectum

C'est l'un des rares lézards venimeux du monde, et un des deux seuls d'Amérique.

Sa taille atteint 60 centimĂštres. La couleur de sa peau peut ĂȘtre noire, rose, orange ou jaune, en gĂ©nĂ©ral avec un fond noir mouchetĂ© de couleur, les taches s'organisant parfois en bandes transversales.

Alimentation

Le monstre de Gila se nourrit de grenouilles, d'insectes, de souris, de lapins et de charognes et d'Ɠufs[8]. Il a la capacitĂ© de ne se nourrir que cinq Ă  dix fois par an[9], et garde en rĂ©serve les graisses nĂ©cessaires pour l'hiver dans sa queue. Mais lorsqu'il se nourrit il peut avaler jusqu'Ă  un tiers de son poids[10].

Il utilise son sens trĂšs dĂ©veloppĂ© de l'odorat pour localiser ses proies − en particulier les Ɠufs − et est capable de localiser un Ɠuf de poule enterrĂ© Ă  15 cm de profondeur et de suivre la trace d'un Ɠuf dĂ©placĂ©[11].

Les proies sont tuĂ©es par mastication si elles sont grosses ou avalĂ©es vivantes sinon. Il est capable d'escalader des arbres et des cactus pour chercher des Ɠufs et des petits dans leurs nids[12].

Comportement

Le Monstre de Gila sort d'hibernation en janvier ou fĂ©vrier. La reproduction a lieu en mai-juin. À l'approche de la saison des amours les mĂąles se combattent en se poussant et se frappant des pattes, jusqu'Ă  ce que l'un d'entre eux prenne le dessus sur l'autre[13]. Le mĂąle cherche une femelle Ă  l'odeur. Si elle est rĂ©ceptive, la copulation peut durer de 15 minutes Ă  deux heures et demie. La femelle pond en juillet-aoĂ»t de 2 Ă  12 Ɠufs (5 en moyenne) qu'elle enterre dans le sable. L'incubation dure environ 9 mois, les petits naissant d'avril Ă  juin de l'annĂ©e suivante[14]. Ils mesurent environ 16 cm Ă  la naissance et produisent du venin dĂšs leur sortie. Les jeunes atteignent la maturitĂ© sexuelle entre 3 et 5 ans.

Bien qu'il ait un faible mĂ©tabolisme et une vitesse de course les plus faibles chez les reptiles il possĂšde une grande capacitĂ© aĂ©robie − en particulier chez les mĂąles − probablement parce que c'est un avantage lors des combats pour la reproduction[15].

Le Monstre de Gila peut vivre jusqu'à 20 ans dans la nature et 30 ans en captivité[16].

Venin

Un monstre de Gila au zoo de Bristol Ă  Bristol, Royaume-Uni. Photographie prise en mai 2005.
Animaux venimeux et venins, 1922.
Heloderma suspectum à la ménagerie du jardin des plantes de Paris
Heloderma suspectum à la ménagerie du jardin des plantes de Paris

Cette espÚce produit du venin, bien qu'elle soit moins venimeuse que son cousin le lézard perlé (Heloderma horridum). La morsure du monstre de Gila n'est normalement pas mortelle pour l'homme, mais il est difficile de lui faire lùcher prise quand il a mordu, ses dents étant légÚrement recourbées vers l'arriÚre.

Production du venin

Le monstre de Gila produit son venin dans des glandes salivaires modifiĂ©es situĂ©es dans la mĂąchoire infĂ©rieure − contrairement aux serpents dont le venin vient de la mĂąchoire supĂ©rieure. Il ne possĂšde aucun mĂ©canisme permettant d'injecter ce venin et ce dernier est envoyĂ© sur les dents par la mastication et passe Ă  sa victime lors d'une morsure par simple capillaritĂ©. Certaines observations montrent que cette espĂšce se retourne lors d'une morsure, probablement pour faciliter l'Ă©coulement du venin dans la plaie. Les dents sont faiblement attachĂ©es et peuvent tomber facilement, mais elles sont remplacĂ©es par de nouvelles tout au long de la vie de l'animal. Les proies du Monstre de Gila Ă©tant de petits animaux ne pouvant se dĂ©fendre, son venin est supposĂ© avoir Ă©voluĂ© pour la dĂ©fense plutĂŽt que pour la chasse, ce que corrobore la coloration d'avertissement.

Toxicité

Bien que son venin soit un neurotoxique aussi puissant que celui du serpent corail, cette espĂšce en produit peu. La morsure d'un Monstre de Gila est habituellement non fatale Ă  un homme adulte, aucun dĂ©cĂšs Ă  la suite d'une morsure n'a Ă©tĂ© confirmĂ© depuis 1939, et ceux qui ont prĂ©cĂ©dĂ© sont douteux de par les traitements « primitifs » appliquĂ©s aux victimes. Le Monstre de Gila peut mordre rapidement − en particulier grĂące Ă  une rotation rapide de la tĂȘte − et maintient avec vigueur sa morsure douloureuse. En cas de morsure la victime peut ĂȘtre amenĂ©e Ă  plonger ce lĂ©zard dans l'eau pour le forcer Ă  lĂącher tant il est tenace. Les symptĂŽmes d'une morsure incluent une forte douleur, un ƓdĂšme et une faiblesse associĂ©e Ă  une rapide baisse de la pression sanguine.

Molécules liées au venin

Plus d'une douzaine de peptides et protĂ©ines ont Ă©tĂ© isolĂ©es Ă  partir du venin du Monstre de Gila, incluant hyaluronidase, sĂ©rotonine et phospholipase ainsi que plusieurs kallicrĂ©ines comme les glycoprotĂ©ines, responsables de la douleur et de l'ƓdĂšme liĂ©s au venin.

En 2005 la Food and Drug Administration (États-Unis) a approuvĂ© un mĂ©dicament (commercialisĂ© depuis 2005) contre le diabĂšte de type 2 basĂ© sur l'exĂ©natide-4 dĂ©rivĂ© de la salive du Monstre de Gila[17] - [18], cette protĂ©ine Ă©tant proche d'une hormone humaine servant Ă  rĂ©guler l'insuline et le glucagon, et rĂ©duit de plus l'appĂ©tit, contribuant Ă  une perte de poids[19].

D'autres composés présents dans la salive de cette espÚce sont à l'étude. L'un d'entre eux agit sur la mémoire et pourrait fournir des médicaments susceptibles d'aider les patients souffrant de la maladie d'Alzheimer, de schizophrénie ou de TDA.

Liste des sous-espĂšces

Selon Reptarium Reptile Database (9 août 2013)[20] :

Protection

Le monstre de Gila est une espĂšce considĂ©rĂ©e comme quasi menacĂ©e par l'UICN[3] et elle est protĂ©gĂ©e par la loi de l'État de l'Arizona.

Il apparaĂźt dans l'Appendix II de CITES[21].

Étymologie

Le nom de Monstre de Gila est une rĂ©fĂ©rence Ă  la riviĂšre Gila, qui traverse en particulier l'Arizona. L'Ă©pithĂšte spĂ©cifique, suspectum, a Ă©tĂ© donnĂ© par Cope car, lors de sa dĂ©couverte en 1869, celui-ci suspectait seulement qu'il soit venimeux[1]. Le nom de ce genre, Heloderma vient du grec hĂȘlos, la tĂȘte d'un clou, et du latin derma, la peau, et signifie « Ă  la peau cloutĂ©e » en rĂ©fĂ©rence aux Ă©cailles particuliĂšres de cet animal.

Publications originales

  • Bogert & MartĂ­n del Campo, 1956 : The gila monster and its allies. Bulletin of the American Museum of Natural History, vol. 109, n. 1, p. 1-238 (texte intĂ©gral).
  • Cope, 1869 : Protocol of the March 9, 1869 meeting. Proceedings of the Academy of Natural Sciences of Philadelphia, vol. 21, p. 5 (texte intĂ©gral).

Liens externes

Notes et références

  1. (en) Référence Reptarium Reptile Database : Heloderma suspectum
  2. (en) Bryan G. Fry et al., « Early evolution of the venom system in lizards and snakes. », Nature, vol. 439, no 7076,‎ , p. 584-588 (PMID 16292255, DOI 10.1038/nature04328, lire en ligne)
  3. UICN, consulté le 26 mai 2015
  4. Reptarium Reptile Database, consulté lors d'une mise à jour du lien externe
  5. Robert Stebbins, Western Reptiles and Amphibians, New York, Houghton Mifflin, (ISBN 0-395-98272-3), p. 338-339, 537
  6. (en) Endangered Wildlife and Plants of the World, Londres, Marshall Cavendish, , 1872 p. (ISBN 0-7614-7199-5, lire en ligne), p. 629–630
  7. (en) Parc zoologique national de Washington, « Gila Monster Fact Sheet » (consulté le )
  8. Don W Wilson et David Burnie, Animal, Londres, DK, , 419 p. (ISBN 0-7894-7764-5)
  9. (en) « Meet Our Animals: Gila monster », Zoo de Philadelphie (consulté le )
  10. (en) C.M. Christel, D.FF. DeNardo et S.M. Secor, « Metabolic and digestive response to food ingestion in a binge-feeding lizard, the Gila monster (Heloderma suspectum) », J. Exp. Biol., vol. 210, no 19,‎ , p. 3430-9 (PMID 17872997, DOI 10.1242/jeb.004820)
  11. (en) Chris Mattison, Lizards of the World, Londres, Blandford, (ISBN 0-7137-2357-2)
  12. John Netherton et David P. Badger, Lizards : A Natural History of Some Uncommon Creatures, Extraordinary Chameleons, Iguanas, Geckos, and More, Stillwater, MN, Voyageur Press, (ISBN 0-7603-2579-0)
  13. (en) D.D. Beck, « Ecology and behavior of the Gila monster in southwestern Utah », Journal of Herpetology, Society for the Study of Amphibians and Reptiles, vol. 24, no 1,‎ , p. 54–68 (DOI 10.2307/1564290, JSTOR 1564290)
  14. Mark Seward, Dr. Mark Seward's Gila monster Propagation : How To Breed Gila monsters in Captivity, Natural Selections Publishing, , 80 p. (ISBN 0-9701395-0-0)
  15. (en) D.D. Beck, M.R. Dohm, T. Garland, Jr., A. Ramirez-Bautista et C.H. Lowe, « Evolutionary physiology », Copeia, vol. 1995, no 3,‎ , p. 577-585 (DOI 10.2307/1446755)
  16. « San Diego Zoo's Animal Bytes: Gila Monster », Zoo de San Diego (consulté le )
  17. Christel, DeNardo & Secor, 2007 : Metabolic and digestive response to food ingestion in a binge-feeding lizard, the Gila monster (Heloderma suspectum). The Journal of Experimental Biology, vol. 210, p. 3430–3439 (texte intĂ©gral).
  18. (en) Aaron Bond, « Exenatide (Byetta) as a novel treatment option for type 2 diabetes mellitus », Baylor University Medical Center Proceedings, vol. 19, no 3,‎ , p. 281-4 (PMID 17252050, PMCID 1484540)
  19. (en) « Drug Derived From Gila Monster Saliva Helps Diabetics Control Glucose, Lose Weight », Science Daily,‎ (lire en ligne)
  20. Reptarium Reptile Database, consulté le 9 août 2013
  21. (fr+en) RĂ©fĂ©rence CITES : espĂšce Heloderma suspectum Cope, 1869 (+ rĂ©partition) (sur le site de l’UNEP-WCMC)
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