Maurille d'Angers
Maurille (Maurilius en latin), nĂ© vers 363 Ă Milan et mort en 453 Ă Angers, est le quatriĂšme Ă©vĂȘque d'Angers, considĂ©rĂ© saint par les Ăglises catholique et orthodoxe. Maurille est fĂȘtĂ© le [1]. Il est le saint patron des pĂȘcheurs et des jardiniers. Dans l'iconographie catholique romane, il est reprĂ©sentĂ© comme un Ă©vĂȘque avec un poisson et tenant une clef ou une bĂȘche. Les Ă©glises de Chalonnes-sur-Loire, ChĂ©rancĂ©, Saint-Morillon, SouvignĂ©-sur-Sarthe et Saint-Moreil honorent son nom.
Maurille d'Angers | |
Statue de saint Maurille d'Angers, Ă©glise du SacrĂ©-CĆur de Cholet. | |
Saint, Ă©vĂȘque | |
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Naissance | v. 363 Milan, Empire romain d'Occident |
DĂ©cĂšs | (90 ans) Angers, Gaule lyonnaise, Empire romain d'Occident |
Vénéré par | catholiques et orthodoxes |
FĂȘte | 13 septembre |
Attributs | en Ă©vĂȘque, avec poisson et clef ou bĂȘche |
Saint patron | pĂȘcheurs, jardiniers |
Biographie
Les trois sources hagiographiques pour les premiers saints sont des ouvrages monumentaux de Jean Croiset (1656-1738), en français et d'Alban Butler (1710-1773), en anglais, mais traduits en français par Jean-François Godescard (1728-1800) et lâĆuvre de la SociĂ©tĂ© des Bollandistes. Le « Butler » a Ă©tĂ© continuellement augmentĂ© et mis Ă jour avec des dĂ©couvertes historiques. La comparaison du texte originel[4], pages 164-165 avec le texte publiĂ© en 2015 est Ă©difiant.
La seule authentique Vie de saint Maurille a été écrite par Mainbeuf d'Angers, l'un de ses successeurs, vers 620. D'autres récits, plus tardifs, sont trÚs sujets à caution. L'un d'eux, écrit vers 905 par un certain Archanaldus (qui prétendait que le livre avait été écrit par Venance Fortunat et corrigé par Grégoire de Tours) est la source de l'invention du saint légendaire saint René d'Angers et de l'iconographie utilisée pour représenter saint Maurille. La supercherie a été découverte seulement en 1649.
Le récit de Mainbeuf
Maurille naquit au sein de la famille d'un patricien milanais, riche et croyant. Ses parents le mirent tÎt sous la houlette du futur saint Martin qui, venant de Pannonie (Hongrie), avait décidé de se retirer dans un ermitage avant de l'ouvrir à des jeunes gens[5]. Mais Martin subit l'hostilité de certains ariens et se vit contraint de quitter la ville, abandonnant-là sa premiÚre tentative de vie monacale. Saint Ambroise prit alors Maurille comme lecteur et l'exerça au chant.
Vers l'Ăąge de vingt ans aprĂšs la mort de son pĂšre, il quitta sa famille et son pays pour rejoindre la ville de Tours oĂč Martin Ă©tait devenu Ă©vĂȘque et se remit sous sa direction. Suivant les compĂ©tences qu'il apprit auprĂšs d'Ambroise, Martin le plaça comme chantre[Note 1]. Puis il accĂ©da Ă la prĂȘtrise avant d'ĂȘtre envoyĂ© Ă Angers pour y travailler au salut des Ăąmes.
AprĂšs une Ă©cole druidique assez importante, il y avait Ă Chalonnes-sur-Loire (Ă l'Ă©poque Calonna) un temple romain oĂč Ă©tait cĂ©lĂ©brĂ© le culte paĂŻen. Maurille s'y rendit et pria Dieu de l'aider Ă le dĂ©faire. Le feu vint alors du ciel et rĂ©duisit le temple en cendre. Ă la place, Maurille dĂ©cida la construction d'une chapelle (aujourd'hui l'Ă©glise Notre-Dame) autour de laquelle vinrent se regrouper les quelques chrĂ©tiens. Maurille resta lĂ une vingtaine dâannĂ©es Ă consolider la communion de fidĂšles et Ă venir en aide aux divers besoins de la population[6].
C'est ainsi qu'il se mit Ă faire des miracles :
- AprÚs avoir passé une nuit en priÚre, il guérit un habitant de la PossonniÚre qui était perclus des deux mains.
- On lui amena aussi une femme aveugle qui Ă©tait enchaĂźnĂ©e et garrottĂ©e parce quâelle Ă©tait possĂ©dĂ©e par un dĂ©mon responsable de son infirmitĂ©. Il la regarda dâun Ćil et son regard Ă©tait si fort que le dĂ©mon fut contraint de sortir de la femme. Il fit le signe de la croix sur ses yeux et lui rendit la vue.
- Par ses priĂšres il obtint un enfant pour une femme dâAngers, qui Ă©tait stĂ©rile et dĂ©jĂ dâun grand Ăąge.
- Il y avait encore, prĂšs de Chalonnes, un temple nommĂ© Prisciacus, dans lequel on rendait des cultes abominables. Il sây rendit pour le dĂ©truire. Les dĂ©mons lui dirent : « Pourquoi, Maurille, nous persĂ©cutez-vous avec tant de rigueur ? Nous ne saurons plus nous cacher dans ce pays. Vous nous cherchez partout et vous nous forcez Ă nous enfuir ». Maurille les chassa et, aprĂšs avoir fait un monceau de toutes les idoles, il y mit le feu. Sur les ruines, il bĂątit le monastĂšre de Saint-Pierre de Chalonnes.
- Un jour, il rencontra une troupe dâesclaves guidĂ©s par des marchands qui les emmenaient en Espagne oĂč ils pourraient facilement les vendre. Un esclave se sauva du groupe et vint se jeter au pied de Maurille, le suppliant de le dĂ©livrer. Maurille nĂ©gocia avec le marchand qui resta inflexible. Maurille fit alors une priĂšre et le marchand fut saisi de fiĂšvre et mourut dans lâinstant.
- Tous les autres captifs croyant quâils subiraient un chĂątiment pour ce qui sâĂ©tait passĂ©, suppliĂšrent Maurille dâobtenir la grĂące pour le marchand. Maurille se prosterna alors et ne se releva quâau moment oĂč le marchand ressuscita.
- Celui-ci libéra alors les esclaves et fit de grands dons à Maurille.
LâĂ©vĂȘque dâAngers Ă©tait mort en 423. On alla chercher Maurille pour le remplacer. En entrant dans lâĂ©glise, une colombe arriva et se posa sur sa tĂȘte. Saint Martin lui imposa alors les mains et le consacra Ă©vĂȘque d'Angers.
Maurille reste Ă©vĂȘque pendant trente ans et meurt en 453. Il est enterrĂ© dans l'Ă©glise Notre-Dame d'Angers qu'il a fondĂ©e, qui devint plus tard la cathĂ©drale Saint-Maurice d'Angers. Sous la prĂ©lature de l'Ă©vĂȘque Neffingue (966-973), lors de la translation des reliques de saint Maurille dans une nouvelle chĂąsse, de nouveaux miracles sont rapportĂ©s. On trouve quelques prĂ©cisions sur ces miracles dans les archives de la SociĂ©tĂ© des Bollandistes[8]. La concomitance de ces miracles tardifs et la publication de la lĂ©gende de saint RenĂ© est Ă noter.
Le récit d'Archanaldus
Lâenfant, que Maurille avait rĂ©ussi Ă obtenir Ă une femme, tomba malade gravement. Comme sa mĂšre craignait quâil ne mourut avant dâavoir obtenu le sacrement de confirmation, elle lâapporta d'urgence Ă lâĂ©glise de Maurille. Mais comme celui-ci disait la messe, il ne put ĂȘtre interrompu et lâenfant mourut pendant ce temps-lĂ .
Quand il apprit cela, Maurille rĂ©solut dâexpier cette faute le temps nĂ©cessaire. Comme il ne lui Ă©tait pas facile de le faire sur place, il dĂ©cida de partir pour lâAngleterre afin dây pratiquer les austĂ©ritĂ©s nĂ©cessaires. Il sortit en cachette dâAngers et se rendit Ă un port de pĂȘche pour y prendre un bateau. Pendant quâil attendait, il marqua son nom, sa qualitĂ© et la date de son passage sur une pierre.
ArrivĂ© en pleine mer, il sâaperçut quâil avait emmenĂ© avec lui les clefs des reliques de son Ă©glise. Comme il les tenait dans ses mains en se demandant pourquoi il les avait emportĂ©es, le dĂ©mon le troubla et les clefs tombĂšrent dans lâeau. Il fondit alors en larmes et se jura de ne jamais rentrer Ă Angers sans avoir retrouvĂ© les clefs.
En Angleterre, il sâhabilla pauvrement et se loua comme jardinier Ă un seigneur.
Au mĂȘme moment, les Angevins Ă©taient attristĂ©s de ne plus voir leur Ă©vĂȘque et surtout de ne pas savoir oĂč il Ă©tait passĂ©. Plusieurs dirent que sâils ne le retrouvaient pas, Angers serait affligĂ©e de grands malheurs. Ils choisirent donc quatre dâentre eux pour partir Ă sa recherche. Ils parcourent lâEurope occidentale pendant sept ans sans rien trouver. Il ne restait plus que lâAngleterre Ă fouiller. Comme ils attendaient un bateau, ils sâĂ©taient assis sur la pierre marquĂ©e et virent lâinscription laissĂ©e par Maurille.
Ils sâembarquĂšrent donc avec joie. ArrivĂ©s en pleine mer, un gros poisson sâĂ©lança et vint tomber dans leur navire. Cela les Ă©tonna, mais ils furent encore plus surpris lorsquâils eurent ouvert le ventre du poisson, dây trouver les clefs des reliques dâAngers. Ils pensĂšrent alors que Maurille avait aussi Ă©tĂ© englouti par un poisson. Mais la nuit suivante ils eurent un songe qui leur ordonnait de poursuivre leur route.
L'ensemble des fidÚles, dont la douleur était inconsolable, le firent si bien rechercher, qu'on découvrit sa retraite ; mais il refusa de revenir au milieu de son troupeau, disant : « Je ne puis ; car ayant perdu sur mer les clefs des reliques de ma cathédrale, que j'avais emportées par mégarde, j'ai fait serment de ne plus paraßtre à Angers avant de les avoir retrouvées ».
« Les voici, lui dirent les envoyés ; pendant notre traversée, un poisson fut jeté sur le pont du navire par la vague, et dans son ventre on a trouvé ces clefs ».
Maurille obéit à la Volonté du ciel. à son retour, il se fit conduire au tombeau de l'enfant, et, les yeux baignés de larmes, il demanda à Dieu de lui rendre la vie. Le petit ressuscité reçut, à cause de cette seconde naissance, le nom de René, et fut le successeur légendaire de Maurille sur le siÚge d'Angers devenant saint René d'Angers.
Le successeur réel de Maurille a été Thalasse (453-462) dont le nom évoque la mer (du grec thalassa)[9], et les clefs et le poisson sont devenus les signes iconographiques de saint Maurille.
Apparition mariale et sanctuaires
Maurille est Ă©galement cĂ©lĂšbre pour avoir connu une apparition mariale en 430, lui demandant, en tant qu'Ă©vĂȘque, dâinstituer comme fĂȘte solennelle le 8 septembre le jour de naissance de la Vierge. De fait, aprĂšs avoir connu un dĂ©veloppement important Ă Milan, la fĂȘte de la NativitĂ© de Marie va prendre un essor dans la rĂ©gion sous l'appellation de Notre-Dame Angevine.
L'apparition se situa au lieu-dit « La Croix Pichon », au confluent de l'Ăvre et de la Loire prĂšs de Saint-Florent-le-Vieil. Le bourg du Marillais va se dĂ©velopper autour d'un petit oratoire qui fut construit sur le lieu de l'apparition devenant un but de pĂšlerinage important qui nĂ©cessita bien plus tard, entre 1890 et 1913, la construction d'une basilique devenue elle-mĂȘme le sanctuaire Notre-Dame du Marillais.
Maurille est aussi Ă l'origine de la dĂ©votion mariale de Notre-Dame de BĂ©huard sur la Loire[10] avec de mĂȘme le dĂ©veloppement d'un pĂšlerinage que le roi Louis XI promut. Des processions, un sanctuaire et une association existent toujours[11].
Notes et références
Note
- Autrefois, la fonction du chantre n'Ă©tait pas seulement de chanter aux messes. Il pouvait Ă©galement recruter et enseigner le chĆur, diriger les rĂ©pĂ©titions, interprĂ©ter les rubriques, expliquer les cĂ©rĂ©monies et mĂȘme veiller au bon fonctionnement de certaines charges plus officielles. En gĂ©nĂ©ral, il ordonnait l'office divin et composait des hymnes, parfois des sĂ©quences, voire des hagiographies.
Références
- FĂȘte de saint Maurille
- Jean Croiset, Les vies des saints pour tous les jours de l'année, t. II, Lyon, FrÚres Bruyat, (lire en ligne)
- (en) Alban Butler, Le Lives of the Saints: September, Catholic Way publishing, , 534 p. (lire en ligne)
- (en) Alban Butler, The lives of the fathers, martyrs, and other principal saints : compiled from original monuments and other authentic records, t. 9, Derby, Richardson & Sons, , 486 p. (lire en ligne)
- Saint Martin Ă Milan, Les origines du culte de saint Martin de Tours aux Ve et VIe siĂšcles de Bruno Judic, p. 4
- Saint Maurille Ă Chalonnes-sur-Loire, site de la paroisse Saint-Maurille-en-Loire-et-Layon
- Le cycle peint de la cathĂ©drale dâAngers de Marie-Pasquine Subes-Picot
- « Note sur Le livre des miracles de Saint Maurille, Ă©vĂȘque dâAngers, par Harmer », Analecta Bollandiana, vol. 18,â , p. 416-417 (lire en ligne, consultĂ© le ), pages 416-417
- Thalassa, la mer qui vient de GrĂšce !, article du site de RCF
- Lâapparition de la Sainte Vierge Ă Maurille par le PĂšre Philippe Loiseau, site Notre Histoire avec Marie.
- PĂšlerinage et sanctuaire de BĂ©huard, site communal.
Voir aussi
Articles connexes
Liens externes
- St Maurille dâAngers et la fĂȘte de la NativitĂ© de la Vierge Marie d'Isabelle Rolland
- Naissance et développement du pÚlerinage de Béhuard avec un lien sur le site du sanctuaire
- Ăglises, Ă©vĂȘques et princes Ă Angers du Ve au dĂ©but du XIe siĂšcle de SĂ©bastien Legros, Les Annales de Bretagne et des Pays de lâOuest