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Mano Solo

Emmanuel Cabut, dit Mano Solo, est un chanteur, guitariste, dessinateur et peintre français, né le [1] à Châlons-sur-Marne et mort le à Paris[2] dans le 18e arrondissement[1].

Mano Solo
Mano Solo en concert au Grand Rex (Paris), le .
Biographie
Naissance
Décès
SĂ©pulture
Nom de naissance
Emmanuel Cabut
Pseudonyme
Mano Solo
Nationalité
Activités
Période d'activité
Père
Autres informations
Membre de
Label
Wagram
Genre artistique
Site web
Distinction

Considéré comme un héritier de la chanson réaliste en y incluant un esprit punk-rock, il a à son tour inspiré et influencé la nouvelle scène française.

Biographie

Jeunesse

Né le à Châlons-sur-Marne, Mano Solo est le fils du dessinateur Cabu (1938-2015) et d'Isabelle Monin (1937-2012), rédactrice en chef du journal écologiste La Gueule ouverte. Il grandit à Ozoir[3]. Ses deux parents gravitent dans l'univers de Hara Kiri Hebdo, devenu peu après Charlie Hebdo. En 1976, ses parents divorcent[4]. Mano Solo entretient une grande partie de sa vie des rapports conflictuels avec son père[5], et plutôt complices avec sa mère[4].

Il est rapidement attiré par le mouvement punk, le monde de la rue et tombe dans l'addiction à l'héroïne. Dès l'âge de 17 ans, Mano Solo joue dans un groupe punk, les Chihuahua, au sein duquel il est guitariste[5].

En 1986, il apprend sa séropositivité[6].

Graphisme

En parallèle de son activité musicale, il dessine et peint beaucoup, individuellement et au sein de collectifs[5]. Il peint sous le nom de Boredom, en hommage à une chanson des Buzzcocks[7]. Il réalise ainsi toutes les pochettes de ses albums. Quelques expositions modestes ont été consacrées à son travail graphique[8] - [9].

Production littéraire et cinématographique

Mano Solo écrit aussi et, avec l'argent gagné grâce à la musique, il monte sa propre maison d'édition littéraire, en collaboration avec Fatiha Bendahmane, dans le cadre de sa société La Marmaille Nue, et publie deux ouvrages : en 1995, un recueil de poèmes, Je suis là, et en 1996, un roman, Joseph sous la pluie. Ces deux ouvrages sont rassemblés dans un livre, Joseph sous la pluie, roman, poèmes et dessins, publié par les Éditions du Seuil en augmenté de textes et de dessins inédits. Enfin, il joue le rôle du roi dans Sodomites, un court métrage de Gaspar Noé, sorti en 1998.

Carrière musicale

DĂ©buts et premier album La Marmaille nue

C'est au dĂ©but des annĂ©es 1990[10], qu'il passe derrière le micro et interprète ses textes. Blaise Cendrars fait partie, entre autres, de ses inspirations littĂ©raires[11]. Il chante frĂ©quemment au théâtre du Tourtour avec Marousse et P'tit Louis. Son premier album, La Marmaille nue sort en 1993 et se vend Ă  100 000 exemplaires la première annĂ©e.

Deuxième album Les Années sombres

En 1995, il crée son entreprise de spectacle La Marmaille Nue, avec sa manageuse et éditrice Fatiha Bendahmane[12] - [13] - [14]. Parallèlement, il publie son deuxième album, Les Années sombres, qui est, comme son titre l'indique, un album aux textes tourmentés et tragiques (disque d'or également dès les premiers mois). Discret sur sa vie privée, il annonce la même année lors d'un concert au Bataclan qu'il a contracté le sida[10] - [15]. Il a également affirmé un an plus tôt que « se défoncer est une perte de temps »[16].

Intermède Les Frères Misère

Il retrouve l'année suivante, en 1996, une partie des Chihuahuas pour l'album Frères Misère. Les rythmes sont parfois proches du punk et les textes abordent des thèmes plus engagés que pour les précédents albums solos. Peu diffusé, cet album ne rencontrera pas de succès immédiat.

Troisième album Je sais pas trop et albums live

En 1997, sort un nouvel album solo : Je sais pas trop (disque d'or) enregistré en live, aux mélodies et aux sonorités, une nouvelle fois, originales.

Deux ans plus tard, Mano Solo enregistre le double album Internationale Shalala en live au Tourtour, un petit théâtre où il se produit régulièrement depuis ses débuts. Il joue seul à la guitare, accompagné (à la guitare également) par Jean-Louis Solans. Les morceaux sont extraits des précédents albums solos, à l'exception du Shalala, un hymne de « révolution intérieure » que l'artiste chante avec son public à la fin de chaque concert. Son message est positif et dynamique.

Son deuxième album live, intitulé La Marche, sort en 2002, il reprend en grande partie des morceaux de l'album Dehors, sorti entre-temps (en août 2000). Le concert est enregistré à la Coopérative de Mai à Clermont-Ferrand et à La Halle aux Grains à Toulouse. L'album est accompagné d'un DVD où l'artiste fait figurer, aux côtés de photos et d'extraits de concerts, des animations en images de synthèse sorties de sa propre imagination. Depuis 2001, Mano Solo s'intéresse de près à Internet, il crée et développe son propre site autour de ses centres d'intérêt politiques, sociaux et artistiques, encourageant ses visiteurs à être eux-mêmes créatifs. C'est dans cet esprit que Le Cyber Poulpe verra le jour en 2002 : initié par Fred Sauton et les éditions Baleine, ce roman racontant une histoire du célèbre Poulpe sera écrit pendant un an à la manière d'un cadavre exquis par les membres du forum de Mano Solo.

Album Les Animals

En 2004, sort Les Animals. Certains titres sont de nouveaux enregistrements d'anciennes chansons, alors que d'autres avaient été composées à la base pour Juliette Gréco, qui a finalement décidé de ne pas collaborer avec lui[17]. Y figure également le titre Botzaris, enregistré avec Les Têtes Raides.

En 2004, il fait Ă©galement deux apparitions sur l'album Dans le caillou de Karpatt dans les chansons Jeux Olympiques et LĂ©on.

Retour Ă  l'autoproduction

En 2006, Mano Solo ne renouvelle pas son contrat avec Warner, sa maison de disques. Il s'autoproduit avec un nouvel album, In the Garden, sorti en . Il propose aux internautes de l'aider dans son autoproduction par une souscription destinĂ©e Ă  payer les frais de promotion une fois l'album rĂ©alisĂ©. Il a empruntĂ© Ă  sa banque, mettant sa maison en garantie, 130 000 euros avec lesquels il payera la production et la fabrication du disque. La souscription sera lancĂ©e le . Tous les mois, le souscripteur a accès Ă  de nouveaux contenus (chansons ou films) et Ă  la sortie, il reçoit l'album. L'argent rĂ©coltĂ© sera utilisĂ© pour la promotion de l'album. Par cette dĂ©marche, l'artiste souhaite se dĂ©marquer de l'industrie classique tout en montrant que la production artistique a un coĂ»t[18].

Par cette expĂ©rience et le peu de souscripteurs Internet (2 800), Mano Solo essaye de dĂ©montrer que s'il peut s'autoproduire aujourd'hui c'est uniquement sur un nom et une carrière dĂ©jĂ  Ă©tablie. Ce n'est pas Ă  un artiste dĂ©butant qu'une banque prĂŞterait une somme pareille. Les 35 000 exemplaires de l'album In the Garden vendus dans les bacs rembourseront la banque, sans offrir Ă  l'artiste le moyen de produire l'album suivant.

Dans une interview au quotidien belge Le Soir en , Mano Solo explique :

« L'autoproduction, ça ne peut pas marcher. J'en ai vendu 2 800 par souscription et le distributeur du CD n'a pas fait son boulot. Je suis la preuve vivante qu'on ne peut pas se passer des majors. J'en ai marre de ces mĂ©dias qui n'arrĂŞtent pas de cracher sur elles. Sans Warner, Mano Solo n'existerait pas. Ces firmes, ce ne sont pas des mĂ©cènes, elles sont lĂ  pour se faire du blĂ©. C'est normal que ces gens te jettent si tu n'es plus compĂ©tent Ă  leurs yeux. Pourquoi devraient-ils garder ceux qui ne vendent plus ? Ceux qui ne rencontrent pas leur public doivent dĂ©gager, c'est tout. Il y en a marre de ces considĂ©rations. La presse est complice de ça. Il faut arrĂŞter de se leurrer : oui, le piratage nuit Ă  la diversitĂ© et Myspace, c'est pathĂ©tique, ça fait peur, ce n'est pas lĂ  qu'on trouve l'avant-garde. Et personne en France n'a Ă©tĂ© rĂ©vĂ©lĂ© grâce Ă  ça. Le MP3, ce n'est pas faire la rĂ©volution, c'est fabriquer des chĂ´meurs.[19] »

Engagements et dernier albums

Mano Solo reste avant tout un artiste très engagĂ©. En , il organise avec le « Collectif Je Suis LĂ  » un concert au Bataclan dont les fonds ont Ă©tĂ© reversĂ©s Ă  l'association Fazasoma qui vient en aide Ă  la population malgache. Il anime Ă©galement, depuis , une Ă©mission de radio sur Aligre FM (93,1 MHz FM Ă  Paris), Le Clou de la SoirĂ©e, tous les derniers samedis du mois, de minuit Ă  pas d'heure, oĂą il donne la parole Ă  ceux qui ne l'ont pas. Sans parler de ses nombreuses apparitions dans des rassemblements visant Ă  rĂ©tablir l'Ă©galitĂ©.

À partir du , Mano Solo anime une autre émission radio, Smoke City, au détriment du Clou de la Soirée, toujours sur Aligre FM, les lundis de 18 h 30 à 19 h 30. Il y accueille le monde associatif et militant, des lanceurs d'alerte, dans une émission partisane et débridée. Beaucoup d'artistes vinrent aussi jouer en direct. L'émission du a fait l'objet d'une captation vidéo dont les images constituent le documentaire De bâbord à tri[20]. Smoke City s'arrête en .

Son dernier album est sorti le , Rentrer au port, en licence chez Wagram.

Censure

Le , un auditeur de Là-bas si j'y suis signale que la chanson Du vent de l'album Les Animals, dans laquelle il faisait rimer « Travail Famille Sarkozy » (référence au slogan vichyste Travail, Famille, Patrie) avec « C'est la compassion pour les nantis », a été amputée de ses paroles lors d'une diffusion sur une radio du service public français[21]. Il apparaît par ailleurs que cette chanson est remplacée par une autre (Paris avance) sur les sites de musique en streaming en ligne (comme Deezer, Jiwa) ainsi que sur la boutique iTunes[22].

Après une petite campagne de publicité, le titre est réapparu en mars 2010 sur Deezer.

RĂ©compenses

Il a remporté trois disques d'or.

Postérité

Décès

Tombe de Mano Solo au cimetière du Père-Lachaise (division 10).

Il meurt le à l'âge de 46 ans, des suites d'une rupture d'anévrisme[23]. Il avait été hospitalisé après son dernier concert à Paris le , après plus de vingt ans de lutte contre le sida. Il est inhumé le au cimetière parisien du Père-Lachaise (10e division), entre les tombes de Claude Chabrol et Sophie de Condorcet non loin de Frédéric Chopin.

Mano Solo est mort sans descendance.

Hommages

Le , sort l'enregistrement du dernier concert de Mano à l'Olympia qui eut lieu en . La publication de cet enregistrement a été demandée par les musiciens du chanteur et acceptée par la famille. Les bénéfices des ventes reviennent à l'association Fazasoma.

Une collection de livrets de toutes les chansons de Mano Solo pour piano, chant et guitare est sortie en 2012 aux Éditions Sauvagette.

Le , à l'occasion du dixième anniversaire de la mort du chanteur, Novelab, La Vingt-Cinquième Heure et Mediapart publient Mano Solo: Vive la révolution !, une « bande défilée » rendant hommage à l'artiste en décrivant son univers, de son enfance jusqu'à sa mort[24]. Cette bande dessinée interactive inclut des extraits d'un texte autobiographique inédit intitulé Les Ailes aux talons, et une sélection d'archives de l'artiste (dessins, BD, peintures et photos, entre autres)[25].

Publication

  • Mano Solo, Joseph sous la pluie, Paris, Éditions du Seuil, coll. « Points », 2012, 318 p. (ISBN 978-2-7578-2700-0)

Discographie

Albums studio

Avec Les Frères Misère

Albums en public

Vidéo

Notes et références

  1. Institut national de la statistique et des études économiques, « Fichier des décès - années 2010 à 2018 » [zip], sur www.insee.fr
  2. Le chanteur Mano Solo est mort sur le site du Monde
  3. « L'émotion des proches de Mano Solo », sur leparisien.fr, (consulté le ).
  4. http://parolesdozoir.free.fr/IMG/pdf/Rico_49.pdf
  5. « Mano Solo (1963-2010), poète punk », sur France Culture, (consulté le ).
  6. « En 1997, Mano Solo témoigne sur son sida », sur L'Obs, (consulté le ).
  7. (en) « Mano Solo Biography, Songs, & Albums », sur AllMusic (consulté le ).
  8. Ouest-France, « Des dessins de Mano Solo à admirer à Errand », sur Ouest-france.fr, (consulté le ).
  9. « Saint-Malo-de-Guersac. « Non censurée », l'expo qui dévoile Mano Solo », sur saint-nazaire.maville.com (consulté le ).
  10. Zineb Dryef, « Décédé dimanche, le chanteur Mano Solo « ne viendra plus » », sur Rue89, nouvelobs.com (consulté le ).
  11. « Mano Solo, rage tendre », Le Temps,‎ (ISSN 1423-3967, lire en ligne, consulté le )
  12. « Mano Solo & Fatiha Bendahmane, la rencontre. », sur www.sauvagette.com (consulté le )
  13. « Fatiha Bendahmane », sur Discogs (consulté le )
  14. « La beauté brute de l'oeuvre de Mano Solo revit grâce aux Hurlements d'Léo », sur Culturebox (consulté le )
  15. « Cover », dans « C’est comme s’il y avait plusieurs personnes en moi ! », Peter Lang (lire en ligne)
  16. https://www.youtube.com/watch?v=lTICRAm8AQA
  17. INA, « Qui était Mano Solo ? | INA Arditube », sur youtube.com, (consulté le )
  18. Loin de l'industrie du disque, Mano Solo tente un pari sur internet ; AFP ; 11 octobre 2006 ([PDF] article en ligne)
  19. T'es pas tout seul, Mano Solo, Le Soir, 15 avril 2008 ; AFP ; 29 avril 2009 (www.lesoir.be, consulté le 15/04/2009)
  20. Site de diffusion du documentaire De bâbord à tri sur l'émission Smoke City du 7 juin 2008
  21. « Là-bas si j’y suis - Inde, la dernière guerilla »
  22. « source rue89 »
  23. Le chanteur français Mano Solo est mort dimanche à 46 ans, AFP, 10 janvier 2010
  24. « Une BD interactive en hommage à Mano Solo », sur France Inter, (consulté le )
  25. « Mano Solo, Vive la révolution | La Vingt-Cinquième Heure », sur La 25ème Heure (consulté le )

Liens externes

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