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Lorenzo MartĂ­nez Fuset

Lorenzo MartĂ­nez Fuset (Úbeda ou Baeza, 1899 - Madrid, 1961) Ă©tait un juriste et militaire espagnol.

Lorenzo MartĂ­nez Fuset
Naissance
Úbeda ou Baeza
DĂ©cĂšs
Madrid
AllĂ©geance Monarchie bourbonienne (1920-1924) ; Dictature de Primo de Rivera (1924-1930) ; Seconde RĂ©publique (1932-1936) ; État franquiste
Arme Corps juridique de l’armĂ©e
Grade Lieutenant-colonel
Années de service 1920
Conflits Guerre civile
Autres fonctions Chef de l’auditorat militaire des forces franquistes (1937-1941) ; notaire à Tenerife

Au terme de ses Ă©tudes de droit, il avait trouvĂ© Ă  s’employer dans le Corps juridique de l’armĂ©e et occupait un poste dans les Canaries au moment oĂč le gĂ©nĂ©ral Franco vint dĂ©but y exercer comme commandant militaire. Partie prenante de la conspiration contre la RĂ©publique, il apporta son concours Ă  Franco pour son projet de voyage en avion vers le Maroc (en vue du coup d’État du 18 juillet 1936) et aida Ă  consolider la rĂ©bellion dans les Canaries.

Homme de confiance de Franco, il fut nommĂ© chef de l’Auditorat juridique de l’État franquiste en gestation, et joua Ă  ce titre un rĂŽle central dans la fĂ©roce rĂ©pression pendant et immĂ©diatement aprĂšs la Guerre civile. Dans l’aprĂšs-guerre mondiale, relĂ©guĂ© Ă  l’arriĂšre-plan, MartĂ­nez Fuset se fixa Ă  demeure dans l’üle de Tenerife comme avocat et notaire.

Biographie

Formation et jeunes années

Lorenzo MartĂ­nez Fuset vint au monde en 1899 Ă  Úbeda ou, en fonction des auteurs, Ă  Baeza (villes toutes deux situĂ©es dans la province de JaĂ©n et distantes l’une de l’autre de seulement 9 km Ă  vol d’oiseau) ; en tout Ă©tat de cause, c’est Ă  Baeza qu’il passa toute son enfance, avant d’entreprendre des Ă©tudes de droit Ă  Grenade[1]. Dans sa jeunesse, il se lia d’amitiĂ© avec le poĂšte Federico GarcĂ­a Lorca[2], de qui il Ă©tait un fervent admirateur et avec qui il allait par la suite entretenir une longue relation Ă©pistolaire[3]. De cette amitiĂ© fait foi la dĂ©dicace placĂ©e par Lorca en tĂȘte du chapitre « Albayzin » de son premier recueil de poĂ©sies Impresiones y paisajes, et qui s’énonce comme suit : Lorenzo MartĂ­nez Fuset, gran amigo y compañero (« Lorenzo MartĂ­nez Fuset, grand ami et compagnon »)[4].

En 1920, MartĂ­nez Fuset entra sur concours dans le Corps juridique militaire (Cuerpo JurĂ­dico Militar), et eut sa premiĂšre affectation Ă  Melilla, dans le Maroc espagnol, avant de se voir offrir un poste Ă  Barcelone. Quelques annĂ©es plus tard, il fut destinĂ© aux Canaries, oĂč il contracta mariage avec une jeune fille issue d’une famille en vue de l’archipel, et oĂč il advint qu’il s’y trouvait au mĂȘme moment que le gĂ©nĂ©ral Francisco Franco, lequel avait Ă©tĂ© nommĂ© au printemps 1936 commandant militaire des Ăźles Canaries. Les deux hommes ne tardĂšrent pas Ă  sympathiser, MartĂ­nez Fuset devenant bientĂŽt l’un des hommes de confiance de Franco[5].

Coup d’État de juillet 1936

À la veille de l’insurrection militaire du 18 juillet 1936, avant de s'envoler pour le Maroc afin d’y prendre le commandement de l’ArmĂ©e d’Afrique, Franco chargea le lieutenant-colonel MartĂ­nez Fuset, qui Ă©tait comme lui impliquĂ© dans la conspiration contre la RĂ©publique, de prendre soin, pendant les premiĂšres semaines de la Guerre civile, de son Ă©pouse et de sa fille[6] - [7], lesquelles furent embarquĂ©es incognito, sous escorte de MartĂ­nez Fuset, sur le patrouilleur Uad Arcilla[8]. MartĂ­nez Fuset se vit aussi confier la rĂ©daction du manifeste dans lequel les insurgĂ©s s’évertuaient Ă  justifier leur rĂ©bellion et dont il fut donnĂ© lecture le sur Radio Las Palmas[9].

Guerre civile et rÎle dans la répression franquiste

À son retour dans la PĂ©ninsule, MartĂ­nez Fuset fut choisi fin , avec JosĂ© Antonio de SangrĂłniz, pour constituer une façon de cabinet des Affaires Ă©trangĂšres pour le compte de Franco, aprĂšs que celui-ci eut conquis l’Andalousie et l’EstrĂ©madure et installĂ© son quartier-gĂ©nĂ©ral Ă  CĂĄceres[10]. Fin , quand il s’agit de nommer un chef de l’État pour la zone nationaliste, MartĂ­nez Fuset fut avec SangrĂłniz, MillĂĄn-Astray et NicolĂĄs Franco, frĂšre aĂźnĂ© de Francisco Franco, parmi ceux qui exhortĂšrent ce dernier Ă  prĂ©senter sa candidature[11]. Le discours radiophonique que Franco prononça aprĂšs qu’il eut Ă©tĂ© dĂ©signĂ© chef de l’État par dĂ©cision collĂ©giale des chefs militaires rebelles, avait Ă©tĂ© composĂ© par NicolĂĄs Franco et par MartĂ­nez Fuset, et abrĂ©gĂ© et simplifiĂ© par Franco[12]. À Salamanque, oĂč Franco avait pris ses quartiers dĂ©but , MartĂ­nez Fuset fut appelĂ© Ă  diriger l’Auditorat juridique[13] - [14] et faisait dĂšs lors figure d’homme de main du Caudillo, avec pour mission d’éliminer tout ce qui Ă©tait susceptible de nuire Ă  l’ordre franquiste — francs-maçons, libĂ©raux, anarchistes, rĂ©publicains, socialistes et communistes — et obtint de la sorte des ralliements nombreux Ă  la Phalange et des enrĂŽlements dans les forces nationalistes[15]. D'autre part, plusieurs auteurs ont mis en lumiĂšre le rĂŽle de premier plan que MartĂ­nez Fuset eut Ă  jouer dans la rĂ©pression qui sĂ©vit dans la zone insurgĂ©e. L’historien Hugh Thomas en particulier a signalĂ© que MartĂ­nez Fuset fit peu, de sa position comme chef du Corps juridique militaire, pour attĂ©nuer le climat rĂ©pressif qui s’abattit sur les rĂ©publicains Ă  l’issue de la Guerre civile[16], se montrant au contraire d’une rigueur extrĂȘme[17]. Dans le mĂȘme temps, il clamait, et avec lui la propagande des vainqueurs de la Guerre civile, que « seuls furent fusillĂ©s ceux qui avaient commis des crimes qui eussent Ă©tĂ©, devant la justice ordinaire, punis Ă©galement de la peine de mort »[18], et lĂącha, Ă  propos de la rĂ©pression, le commentaire suivant[19] :

« Nous, nous n’assassinons pas. Nous dĂ©fĂ©rons nos ennemis, les responsables prĂ©sumĂ©s, devant les tribunaux et conseils de guerre. LĂ , des juges impartiaux, autonomes dans leur fonction, prononcent leurs verdicts, que nous nous bornons Ă  exĂ©cuter. »

De par sa position, c’est Ă  MartĂ­nez Fuset qu’il incombait d’examiner et de rĂ©viser les sentences de mort qui parvenaient au quartier-gĂ©nĂ©ral de Franco avant que celui-ci ne leur donne son aval[20]. Pour la mĂȘme raison, c’est lui aussi qui pour une large part Ă©tait appelĂ© Ă  apporter directement Ă  Franco les sentences de mort pour qu’il y appose sa signature[21]. Il accomplit cette tĂąche pendant les pires annĂ©es de la rĂ©pression franquiste, et ce jusqu’en 1941, date Ă  laquelle il fut relevĂ© de ses fonctions par le chef de l’Assessorat du ministĂšre de l’ArmĂ©e, Cirilo GenovĂ©s AmorĂłs[22].

AprĂšs-guerre civile

Certains historiens ont mis en Ă©vidence la part qu’eut MartĂ­nez Fuset dans le processus d’institutionnalisation de la dictature franquiste[23]. Il fut de ceux qui ne cessĂšrent de mettre Franco en garde contre les pratiques frauduleuses, la corruption, les malversations, les dĂ©tournements de fonds publics, les enrichissements personnels dans l’exercice du pouvoir et l’attribution subsĂ©quente de hauts postes dans les conseils d’administration de grandes entreprises, le trafic d'influence, etc., dont se rendaient coupables les dignitaires du rĂ©gime, et plus particuliĂšrement les intimes du Caudillo[24] - [25] - [26], rĂ©vĂ©lations auxquelles ce dernier se refusait cependant de prĂȘter attention, Ă  la grande frustration de MartĂ­nez Fuset et aussi de Muñoz Grandes[27].

AprĂšs la guerre mondiale, MartĂ­nez Fuset ne se verra plus offrir aucun poste de quelque importance au sein du rĂ©gime, et s’en retourna aux Canaries en 1945, pour y exercer comme notaire Ă  Tenerife, fonction pour laquelle il avait Ă©tĂ© nommĂ© en 1937, en pleine Guerre civile[28], et aussi pour y devenir un illustre avocat. Il reçut vers la fin de 1950 la visite de Franco et de son Ă©pouse, au retour de leur pĂ©riple en bateau au Sahara occidental[29]. MartĂ­nez Fuset Ă©tait propriĂ©taire de la fameuse Casa Fuset Ă  Tenerife[30] et demeura dans l’archipel jusqu’à sa mort en 1961.

Références

  1. (es) Juan Luis Tapia, « Martínez fuset: El hombre que pudo salvar a García Lorca », sur granadahoy.com, .
  2. (es) Ian Gibson, Federico GarcĂ­a Lorca: De Fuente Vaqueros a Nueva York (1898 - 1929), Barcelone, Grijalbo, , 720 p. (ISBN 978-8425316746), p. 118.
  3. (es) Nicole Delbecque et Nadia Lie, Federico García Lorca et Cetera. Estudios sobre las literaturas hispånicas en honor de Christian De Paepe, Louvain, Leuven University Press, coll. « Symbolae Facultatis Litterarum Lovaniensis », , 602 p. (ISBN 978-9058673190), p. 103.
  4. (es) Ian Gibson, « Un probable artĂ­culo de Lorca sobre Omar Jayyam », Cuadernos Hispanoamericanos. Homenaje a GarcĂ­a Lorca, Madrid, Agencia Española de CooperaciĂłn Internacional (AECID), vol. I, nos 433-434,‎ , p. 37-42 (ISSN 0011-250X, lire en ligne).
  5. (es) Stanley G. Payne et JesĂșs Palacios, Franco. Una biografĂ­a personal y polĂ­tica, Barcelone, Espasa, , 813 p. (ISBN 978-84-670-0992-7), p. 140.
  6. (es) George Hills, Franco, el hombre y su naciĂłn, Madrid, Editorial San MartĂ­n, , 480 p. (ISBN 978-8471400253), p. 231-233.
  7. Andrée Bachoud, Franco, ou la réussite d'un homme ordinaire, Paris, Fayard, , 530 p. (ISBN 978-2213027838), p. 125
  8. S. G. Payne & J. Palacios (2014), p. 156.
  9. (es) Julio Antonio Yanes Mesa, « De la megalomanĂ­a fascista a la precariedad minifundista. Los recursos tĂ©cnicos, financieros y humanos de la radiodifusiĂłn franquista en las Canarias Occidentales », BoletĂ­n Millares Carlo, Madrid, Universidad Nacional de EducaciĂłn a Distancia (UNED) / Centro Asociado de Las Palmas de Gran Canaria, no 31,‎ , p. 177 (ISSN 0211-2140, lire en ligne).
  10. A. Bachoud (1997), p. 134.
  11. S. G. Payne & J. Palacios (2014), p. 177.
  12. S. G. Payne & J. Palacios (2014), p. 185.
  13. (en) Stanley G. Payne, The Franco Regime, 1936–1975, Madison (Wisconsin), The University of Wisconsin Press, , 704 p. (ISBN 978-0299110703), p. 214.
  14. S. G. Payne & J. Palacios (2014), p. 174-175.
  15. A. Bachoud (1997), p. 143.
  16. (es) Hugh Thomas, La Guerra Civil Española, Barcelone, Grijalbo, (ISBN 84-253-2767-9), p. 991.
  17. BartolomĂ© Bennassar, Franco. Enfance et adolescence, Paris, Éditions Autrement, coll. « Naissance d’un destin », , 193 p. (ISBN 2-7028-3307-1), p. 461.
  18. (es) Peter Anderson, « Francisco Franco, Âżcriminal de guerra? », Hispania Nova. Revista de Historia ContemporĂĄnea, Madrid, UniversitĂ© Charles-III de Madrid / Departamento de Humanidades: Historia, GeografĂ­a y Arte, no 10,‎ (ISSN 1138-7319, lire en ligne).
  19. (es) Ramón Garriga, Los validos de Franco. Los claves para comprender cómo manejó el dictador la política interior de España a través de sus servidores mås adictos, Barcelone, Planeta, coll. « Textos », , 386 p., p. 42-43.
  20. (es) Justino Sinova et Amando de Miguel, La censura de prensa durante el franquismo, Debolsillo, , 310 p. (ISBN 978-8483461341), p. 351.
  21. (es) Paul Preston, Las tres Españas del 36, Random House Mondadori, , 512 p., p. 90. Rééd. Debolsillo 2018 (ISBN 978-8497930611).
  22. (es) Julius Ruiz, La justicia de Franco, RBA Libros, (ISBN 978-84-9006-243-2), p. 154 & 378.
  23. (en) Francisco J. Romero Salvadó, Historical Dictionary of the Spanish Civil War, Scarecrow Press, coll. « Historical Dictionaries of War, Revolution and Civil Unrest », , 449 p. (ISBN 978-0810857841), p. 207.
  24. Bartolomé Bennassar, Franco, Paris, Perrin, coll. « Tempus », (1re éd. 1995) (ISBN 978-2-262-01895-5), p. 312-322
  25. R. Garriga Alemany (1981), p. 120-121 & 208.
  26. (es) Miguel Ángel del Arco Blanco, « La corrupciĂłn en el franquismo: el fenĂłmeno del “Gran Estraperlo” », Hispania Nova. Revista de Historia ContemporĂĄnea, Madrid, Universidad Carlos III de Madrid / Departamento de Humanidades: Historia, GeografĂ­a y Arte, no 16,‎ , p. 623 (ISSN 1138-7319).
  27. S. G. Payne & J. Palacios (2014), p. 439.
  28. « Orden de la Presidencia de la Junta TĂ©cnica del Estado de 18 de Junio de 1937 », BoletĂ­n Oficial del Estado, Madrid, no 245,‎ , p. 2013 (lire en ligne, consultĂ© le ).
  29. S. G. Payne & J. Palacios (2014), p. 393.
  30. (es) « La casa de Franco: unas ruinas con historia », El DĂ­a, Santa Cruz de Tenerife,‎ (lire en ligne).

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