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Jean-René Suratteau

Biographie

Fils de Charles-René Suratteau (1883-1968) et d'Alicie Boutault (1884-1969), instituteurs de l’école publique laïques et républicains, syndicalistes et mutualistes, Jean-René naît le . Élève au lycée Pothier d'Orléans, il obtient son baccalauréat en 1934 (mention très bien), puis entre à l'hypokhâgne du lycée Louis-le-Grand, à Paris, où il fait la connaissance d'Albert Soboul. Avec lui, il adhère à la Fédération des étudiants révolutionnaires, proche du Parti communiste français, et participe aux manifestations antifascistes, qui précèdent le Front populaire. En 1935, il suit des cours d'histoire et de géographie à la Sorbonne. En 1939, il soutient un mémoire de DES, La fortune rurale du chapitre de Sainte-Croix d’Orléans pendant la guerre de Cent Ans et la période de la reconstruction, préparé sous la direction de Marc Bloch. De son côté, le mémoire annexe, portant sur les Journaux thermidoriens, est préparé avec Georges Lefebvre et l'épreuve complémentaire, sur la structure agraire de la commune de Vrigny-aux-Bois (Loiret), avec Albert Demangeon.

Plutôt que d'adhérer au Parti communiste, dont l'organisation centraliste le rebute, de même que l'évolution de l'Union soviétique, Suratteau fréquente quelque temps des groupes liés à la Quatrième Internationale trotskyste, avant d'adhérer, après 1936, à la SFIO. Dans ce parti, il se montre proche de Marceau Pivert et adhère au courant de la Gauche révolutionnaire. Exclu de la SFIO en même temps que Marceau Pivert, il suit ce dernier au Parti socialiste ouvrier et paysan, fondé en 1938. Toutefois, opposé à la politique d'agression de Hitler, il s'oppose au pacifisme et devient antimunichois.

Mobilisé lors de la déclaration de la guerre, en , puis démobilisé lors de la débâcle de juin 1940, il trouve un emploi de surveillant et reprend ses études. En 1942, il obtient le Certificat d’aptitude à l’enseignement dans les collèges (CAEC), avant d'être nommé à titre provisoire comme professeur délégué au lycée Pasteur de Neuilly-sur-Seine. À partir de 1943, il entre dans la Résistance intérieure : il rejoint les rangs du réseau Ceux de la Résistance (CDLR), fondé à la fin de 1942 en zone occupée. Entré dans la clandestinité à l'automne 1943, Suratteau est envoyé à Laval, en Bretagne et en Normandie afin de préparer le débarquement allié de . Il entre au Comité exécutif national de CDLR au printemps de 1944, puis au secrétariat général du département de Seine-et-Marne à la Libération.

Le , Suratteau démissionne du Comité exécutif national du CDLR et retourne vers la recherche. Entré comme aide-technique au CNRS, il est nommé à l'Institut d'histoire de la Révolution française à la Sorbonne, où il côtoie Georges Lefebvre. Agrégé d'histoire en 1945, il devient professeur au lycée Henri-Martin de Saint-Quentin (1945-1946). Délégué provisoire au lycée Henri-IV (1946-1948), il devient professeur titulaire au lycée Pasteur de Neuilly-sur-Seine, puis au lycée Buffon, en 1949.

Marié en avec Anne-Marie Caprais (née le ), docteur en droit, cadre administratif au ministère de la Marine marchande originaire de Bretagne par son père et de Suisse alémanique par sa mère, et de foi catholique, il est père de cinq enfants, nés entre 1947 et 1957.

En 1949, il s’engage dans des recherches sur le Directoire, commençant par s’attacher à la « terreur directoriale » après le coup d'État du 18 fructidor an V. Détaché au CNRS en 1956, il se réoriente vers Le département du Mont-Terrible sous le régime du Directoire (1795-1800). Étude des contacts humains, économiques et sociaux dans un pays annexé et frontalier, « thèse de type monographique », pour son doctorat d’État ès lettres, soutenu le (mention très honorable). Quant à la thèse complémentaire, elle porte sur Les élections de l’an VI et le « coup d’État » du 22 floréal (). Étude documentaire, statistique et analytique. Essai d’interprétation.

Au terme de son détachement au CNRS, Suratteau est nommé à sa demande au lycée Victor-Hugo de Besançon pour achever sa thèse. Il devient maître de conférences en 1967, puis professeur sans chaire à l’université de Dijon. Devenu professeur titulaire de la chaire d’histoire contemporaine en 1974, il mène sa carrière à Dijon jusqu’à sa retraite et son accession au titre de professeur émérite en 1985.

Suratteau meurt le à Vence, quelques mois après son épouse. Ils reposent tous les deux à Tourrettes-sur-Loup. Comme d'autres historiens, il lègue sa bibliothèque personnelle au centre de documentation du musée de la Révolution française[1].

Engagements et fonctions

Homme de gauche, Suratteau soutient Pierre Mendès France en 1953-1954, défend la décolonisation, adhère un temps au Parti socialiste autonome d’Édouard Depreux, accueille favorablement Mai 68, mais se détourne bientôt des organisations universitaires gauchistes.

Il occupe les fonctions de doyen de la faculté des lettres et des sciences humaines de l’université de Dijon de 1976 à 1982.

Il a également été membre de la Commission Jaurès (devenue en 1983 Commission d’histoire de la Révolution française), rattachée au Comité des travaux historiques et scientifiques du ministère de l'Éducation nationale, de la Recherche et de la Technologie, jusqu’en 1995 (où il devient membre à titre honoraire) ; membre du conseil d’administration, vice-président, puis membre de la présidence collégiale (1982-1998) de la Société des Études robespierristes ; membre du conseil d’administration puis vice-président (1980-1983), président (1983-1984) et président d’honneur de la Société d'Histoire moderne et contemporaine ; membre (à l’occasion du bicentenaire de la Révolution) puis vice-président de la Commission ad hoc du CNRS présidée par Michel Vovelle ; l’un des fondateurs de l’Association des historiens européens, à Rome, en 1979 ; membre du Comité d’histoire de la Seconde Guerre mondiale (1975-1991), jusqu’à son absorption par l’Institut d’histoire du temps présent ; fondateur puis président de l’Association pour la recherche sur l’Occupation et la Résistance en Morvan jusqu’en 1991 ; directeur du musée de la Résistance à Saint-Brisson, dans la Nièvre (1983-1991). Retiré à Vence il abandonne l’essentiel de ces fonctions entre 1991 et 1995.

Publications

Ouvrages

  • Le dĂ©partement du Mont-Terrible sous le rĂ©gime du Directoire (1795-1800). Étude des contacts humains, Ă©conomiques et sociaux dans un pays annexĂ© et frontalier, Paris, Les Belles Lettres, 1965.
  • Les Ă©lections de l’an VI et le « coup d’État » du 22 florĂ©al (). Étude documentaire, statistique et analytique. Essai d’interprĂ©tation, Paris, Les Belles Lettres, 1971.
  • L’idĂ©e nationale de la RĂ©volution Ă  nos jours, Paris, PUF, collection Sup, 1972, 225 p.
  • La RĂ©volution française, certitudes et controverses, Paris, PUF, collection Clio, 1973, 96 p.
  • Jean-François Reubell, l’Alsacien de la RĂ©volution française, Mulhouse, Éditions du Rhin, 1995, 543 p.

Ouvrages en collaborations

  • La France du Directoire, Paris, Éditions Sociales, 1977. RĂ©Ă©dition du cours de Georges Lefebvre, avant-propos d’Albert Soboul, introduction, mise Ă  jour bibliographique, « État des questions » de Jean-RenĂ© Suratteau.
  • Albert Soboul (dir.), Dictionnaire historique de la RĂ©volution française, Paris, PUF, 1989. Direction scientifique de François Gendron et de Jean-RenĂ© Suratteau, auteur de 121 entrĂ©es.

Articles

  • « Les Ă©lections de l’an IV », Annales historiques de la RĂ©volution française, 1951, p. 374-393 ; 1952, pp. 32-63.
  • « Les opĂ©rations de l’assemblĂ©e Ă©lectorale de France », Annales historiques de la RĂ©volution française, 1955, p. 228-250.
  • « Un commissaire du Directoire : François-Augustin Roussel », Annales historiques de la RĂ©volution française, 1957, p. 316-339.
  • « Les Ă©lections de l’an V aux Conseils du Directoire », Annales historiques de la RĂ©volution française, 1958, p. 21-63.
  • « Georges Lefebvre, historien politique », Annales historiques de la RĂ©volution française, 1960, p. 32-46.
  • « La carrière de J.-A. Rengguer sous le Consulat et l’Empire », Actes de la SociĂ©tĂ© jurassienne d’Émulation, 1960, p. 309-317.
  • « Les babouvistes, le pĂ©ril rouge et le Directoire (1796-1798) », Actes du colloque « Babeuf » Ă  Stockholm en 1960, Paris, 1963, p. 147-173.
  • « RĂ©cit inĂ©dit des Ă©vĂ©nements de dĂ©cembre 1797 et de mars 1798. Lettre de l’ancien bailli d’ErgĂĽel, Samuel Imer, adressĂ©e au conseiller aulique du prince-Ă©vĂŞque de Bâle, Joseph-Antoine Schumacher, le » (avec des notes explicatives de Jean-RenĂ© Suratteau), Actes de la SociĂ©tĂ© jurassienne d’Émulation, 1963, p. 83-100.
  • « Les abdicataires du dĂ©partement du Mont-Terrible », Actes du 89e Congrès des SociĂ©tĂ©s savantes, Lyon, 1964.
  • « La fin du dĂ©partement du Mont-Terrible », Actes de la SociĂ©tĂ© jurassienne d’Émulation, 1964, p. 205-226.
  • « Contrats de mariage, divorce et Ă©migration dans l’ancien Ă©vĂŞchĂ© de Bâle (dĂ©partement du Mont-Terrible) Ă  l’époque rĂ©volutionnaire », MĂ©moires de la SociĂ©tĂ© pour l’histoire du droit et des institutions des anciens pays bourguignons, comtois et romands, 1966, tome 27.
  • « La RĂ©publique rauracienne vue par les informateurs de l’Autriche » (Alfred Rufer et J.-R. Suratteau), dans Actes de la SociĂ©tĂ© jurassienne d’Émulation, 1967.
  • « Les “anecdotes” inĂ©dites de Reubell sur la rĂ©volution en Suisse », Revue suisse d'histoire, 1967, tome 17, fascicule 4, p. 533-548.
  • « Problèmes frontaliers de l’émigration rĂ©volutionnaire. L’exemple du Mont-Terrible », Bulletin de la Commission d’histoire Ă©conomique et sociale de la RĂ©volution française, 1967, p. 13-26.
  • « Contribution Ă  l’étude des mouvements de population dans le canton et la ville de Berne Ă  la fin du XVIIIe siècle », Actes du 92e Congrès national des SociĂ©tĂ©s savantes, Strasbourg et Colmar, 1967.
  • « La pĂ©nurie et la chertĂ© de la farine et du pain et les spĂ©culations de famine en 1789, et en 1795-1796 (d’après les papiers inĂ©dits de Reubell) », Actes du 93e Congrès national des SociĂ©tĂ©s savantes, Tours, 1968.
  • « Heurs et malheurs de la sociologie Ă©lectorale pour l’époque de la RĂ©volution française », Annales. Économies. SociĂ©tĂ©s. Civilisations, mai-, n° 3, p. 556-580.
  • « Occupation, occupants et occupĂ©s en Suisse, de 1792 Ă  1814 », Actes du colloque « Occupants/OccupĂ©s de 1792 Ă  1815 » de Bruxelles en 1968, Paris, 1969, p. 165-220.
  • « La nascitĂ  delle “Annales” », SocietĂ  et storia, 1980, n° 8, p. 457-461.
  • « Le Directoire : points de vue et interprĂ©tations d’après des travaux rĂ©cents », Annales historiques de la RĂ©volution française, 1976, p. 180-214.
  • « Le Directoire comme modèle de rĂ©gime ou mode de gouvernement ? », Voies nouvelles pour l’histoire de la RĂ©volution française (Actes du colloque Mathiez-Lefebvre de 1974), Publications de la SociĂ©tĂ© des Études robespierristes, 1978, p. 381-399.
  • « Ă€ propos de la fin (ou de la « consomption ») de la Première RĂ©publique », Annales historiques de la RĂ©volution française, 1991, p. 79-92.

Notes et références

Voir aussi

Bibliographie

Liens externes

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