Jacopo Bassano
Jacopo Bassano, ou Jacopo dal Ponte ou même Jacopo Bassano l'Ancien (Bassano del Grappa, 1510 - Bassano del Grappa, ) est un peintre italien maniériste de l'école vénitienne. Il est le plus âgé et le plus connu des peintres de la famille Dal Ponte.
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Biographie
Jacopo Bassano est né vers 1510 et mort en 1592 à Bassano del Grappa, village situé à environ 65 km de la ville de Venise, dont il tire son nom.
Son père, Francesco Bassano l'Ancien est un peintre au succès local qui a créé un atelier familial qui produit principalement des œuvres religieuses dans le style autochtone. Au cours de sa jeunesse, Bassano est apprenti dans l'atelier de son père qui se définit comme un « artiste paysan ». Dans ses toiles, pissenlits et mauvaises herbes sont décrits avec minutie. Jacopo adoptera des éléments de son style, qu'il mettra à profit pour réaliser des peintures religieuses innovantes à la manière des paysages et des scènes de genre[1].
Il traite souvent des thèmes bibliques à la manière de scènes de genre rurales, dépeignant des gens qui ressemblent à des paysans locaux et représentant des animaux avec un réel intérêt[2]. Les tableaux de Bassano sont très populaires à Venise en raison de leur représentation d'animaux et de scènes nocturnes. Ses quatre fils : Francesco Bassano le Jeune, Giovanni Battista Bassano, Leandro Bassano et Gerolamo Bassano, sont également devenus des artistes et ont suivi son style et ses sujets.
Il débute à l'atelier de Bonifacio de' Pitati à Venise dans les années 1530 et est confronté à des artistes célèbres tels que Titien et Le Pordenone. Il étudie également en autodidacte auprès des autres artistes de son époque dans d'autres villes italiennes. Ses relations avec eux sont variables : Jacopo Bassano dépeint ainsi Le Titien en agent de change dans sa Purification du Temple. Il s'intéresse à la « manière moderne » des nouveaux artistes arrivés à Venise et surtout aux gravures provenant de Rome. Il conserve toutefois son goût pour le naturalisme chromatique et un sens prononcé des volumes et des formes, caractéristiques des peintures de cette époque.
Après la mort de son père en 1539, il retourne à Bassano del Grappa et s'y installe définitivement, prenant même Elisabetta Merzari, comme épouse en 1546, une jeune femme du lieu. Il habite près du pont : on le nomme Jacopo dal Ponte. Sa renommée lui vaut de prendre le nom de sa ville – où il travaille avec ses quatre fils.
Après sa mort en 1592, ses fils continuent à produire de nombreuses œuvres dans son style, ce qui a rendu difficile pour les historiens de l'art ultérieurs d'établir quelles pièces ont été créées par Jacopo lui-même et quelles œuvres ont été créées par sa progéniture. Les Bassano ont en effet mis au point un système étonnant de double signature : sur les copies ou variantes exécutées par ses fils, Jacopo appose son paraphe, comme un « label de qualité ». Il partagent de nombreuses similitudes stylistiques et, de ce fait, quelques œuvres sont difficilement attribuables.
Style
Entre le milieu des années 1540 et la fin des années 1550, Jacopo Bassano crée sa version du maniérisme en faveur à Venise[3]. Les corps étirés et les grands effets de composition balancée ne lui font pas pour autant abandonner les robes de ses puissants animaux. À la fin de sa carrière le genre pastoral qui a fait sa célébrité lui est commandé par des collectionneurs vénitiens. Il les compose dans un paysage crépusculaire rythmé par les effets presque théâtraux du clair-obscur. Au sujet de l'une des toutes dernières toiles, La Déposition du musée de Lisbonne, W. R. Rearick[4] « pense que Jacopo l'envoya sans doute à Venise pour qu'elle serve de modèle dans l'atelier de son fils Francesco, d'où sont sorties la plupart des versions connues du thème (dont la version du Louvre)[5] ».
Jacopo Bassano est considéré comme unique parmi ses collègues artistes de la Renaissance par sa capacité à incorporer diverses influences artistiques (dont Albrecht Dürer, Parmigianino, Le Tintoret et Raphael) dans son travail malgré sa réticence à quitter le confort de sa ville natale. On pense qu'il a découvert leur art en voyant leurs gravures, dont il était très probablement un collectionneur passionné.
L'introduction du quotidien dans la peinture religieuse, a rencontré la faveur des commanditaires et a eu un grand succès au XVIIe siècle, y compris à la cour de Louis XIV, grâce à Richelieu. Au XIXe siècle, quand on commence à porter attention à la qualité intrinsèque de chaque œuvre, l'inégalité de leur facture apparaît. Les Bassano rejoignent en nombre les réserves des musées et sont un peu oubliés.
Jacopo figure dans le groupe des musiciens des Noces de Cana de Véronèse.
- L'adoration des mages, 1563-1564. Huile / toile, 92 × 117 cm. Musée d'histoire de l'art de Vienne
- Le Miracle de l'eau; v.1869 Château royale de Varsovie
- L'Été (le sacrifice d'Isaac), v. 1575. Huile / toile 79 × 111 cm. Musée d'histoire de l'art de Vienne
- Le Christ dans la maison de Marie, Marthe et Lazare, v. 1577. Huile / toile, 98 × 126 cm. Musée des beaux-arts de Houston
La Déposition inachevée ? 1580 - 1590. Huile sur toile, 60 × 76 cm. Museu Nacional de Arte Antiga de Lisbonne
PĂ©riodes
La capacité de Bassano à expérimenter et à absorber les qualités stylistiques d'autres artistes contemporains est évidente dans les quatre périodes distinctes de son héritage artistique. Chaque période montre le travail de l'artiste en conciliant sa propre esthétique avec les styles de ses pairs.
Premières Ĺ“uvres, annĂ©es 1530 et au-delĂ
Bonifazio de Pitati a transmis à son jeune élève une connaissance durable de l'œuvre de Titien, dont l'influence se voit clairement dans ses premières pièces. Les premières peintures de Bassano montrent son obsession de toute une vie pour les couleurs brillantes qu'il a vues dans les premières œuvres de Titien, en particulier dans son Christ se révélant aux pèlerins d'Emmaüs (1538). Dans cette commande pour une église locale, Bassano remplit la toile de couleurs riches et lumineuses qui aident à distinguer les personnages de leur environnement proche. Il rompt avec les pratiques de ses contemporains en plaçant la figure du Christ vers le fond de la scène et en permettant aux laïcs qui l'entourent de jouer un rôle plus significatif dans la composition. Ils sont également uniques par leurs robes. Au lieu de vêtir ses personnages de tissus drapés et informes que de nombreux artistes de la Renaissance assimilent à la mode romaine classique, Bassano choisit de présenter des personnages vêtus de vêtements du XVIe siècle. Les détails de cette pièce en sont l'aspect le plus souvent discuté. Pour de nombreux historiens de l'art, son inclusion de divers aliments sur les tables, un chien allongé et un chat se faufilant autour des chaises, ainsi que de nombreux personnages secondaires témoigne de la pratique de Bassano de dessiner d'après nature au lieu de s'appuyer sur les conventions stylistiques de l'époque.
Maniérisme
Son tableau, La Dernière cène (1546), montre son nouvel intérêt pour le maniérisme. Dans cette œuvre, il exprime des influences liées aux estampes contemporaines de Dürer et aux peintures de Raphaël. Cela s'exprime notamment dans les émotions très chargées des sujets et la posture dynamique et très stylisée des personnages. La préoccupation maniériste pour les éléments de conception hautement développés est évidente dans le placement soigné et le « caractère » des personnages de Bassano pour créer une composition active qui guide les yeux du spectateur autour de chaque détail de la toile. Par rapport aux personnages précédents, qui étaient plus posés, les personnages de Bassano dans La Dernière cène semblent vivants, leur peau suggérant les muscles et les tendons, très différents des postures « en bois » et fatiguées de ses premiers travaux.
Bassano a commencé à expérimenter la lumière et ses sujets vers les années 1550-1570. C'est à cette époque qu'il est l'un des premiers artistes à peindre un « nocturne », c'est-à -dire un tableau dans un paysage nocturne avec éclairage artificiel. Ce type de peinture est extrêmement populaire auprès du public local et rend les peintures de Bassano très appréciées. Ses œuvres ont également commencé à mettre en évidence des éléments pastoraux, qui étaient à la fois peints par son père et faisant partie de son environnement. Plutôt que de placer des scènes religieuses dans des décors romains classiques (comme le faisaient ses homologues de la Renaissance), il place des personnages dans un paysage plus naturel, où les arbres et les fleurs sont aussi soigneusement rendus que ses personnages.
Ĺ’uvres dans les collections
- Déposition de la Croix (1532), Église San Luca di Crosara, près de Bassano
- L'Annonce aux bergers (v. 1533) huile sur toile, 116 × 94 cm, Château de Belvoir, Leicestershire, Angleterre[6]
- La montée au calvaire, 1535-1538. Huile / toile, 96 / 5 × 122 cm. Fondation Bemberg Toulouse.
- Le Christ se révélant aux pèlerins d'Emmaüs (1536-1537), Cathédrale de Cittadella près de Bassano
- Saint Vigile en gloire avec saint Jérôme et saint Jean Baptiste (1537), Église San Vigilio, Pove del Grappa. (Main de son frère Giambattista ?)
- Vierge à l'Enfant avec saint Jean Baptiste (1537), Église Santa Maria, Borso del Grappa
- La Vierge, l'Enfant et le petit saint Jean (1545), huile sur toile, 79 × 60 cm, Pavillon de la Meridiana, Palais Pitti, Florence. Tableau analogue, exécuté précédemment, et conservé à Bergame[7]
- L'Adoration des bergers (1545-1547), toile, 95 Ă— 140 cm, Gallerie dell'Accademia de Venise[8]
- Noli me tangere (1546), Église San Biagio, Onara di Tombolo
- Deux chiens de chasse liés à une souche (v. 1548), toile, 61 × 80 cm, Musée du Louvre, Paris[9]
- Portrait d'un homme barbu (1550), huile sur toile, J. Paul Getty Museum, Los Angeles
- La Descente du Saint Esprit (1551), toile, Église San Giacomo, Lusiana
- Deux chiens (1555), huile sur toile, 85 Ă— 126 cm, Galerie des Offices, Florence
- L'Adoration des mages (~1560) avec Francesco, Musée de l'Ermitage, Saint-Pétersbourg
- Sainte Justine en trône entre saint Roch, saint Sébastien et saint Antoine abbé (v. 1560), Église Santa Giustina, Enego
- Saint Jérome en méditation ou Saint Jérôme au désert (v.1560), toile, 119 × 154 cm, Galleria dell'Accademia de Florence
- Le Bon Samaritain (1562-1563), National Gallery, Londres
- L'Adoration des bergers, vers 1562-1563, huile sur toile, 72 × 112 cm, collection Alana (acquisition 2014), Newark (Delaware), États-Unis[10]
- L'Adoration des mages (1565) toile, 92 × 117 cm, Kunsthistorisches Museum, Vienne[11]. Cette toile servit à illustrer en Italie le timbre de 0,60 € de 2006.
- Saint Fabian, saint Sébastien et saint Roch (1565-1568), Musée de l'Ermitage, Saint-Pétersbourg
- JĂ©sus chassant les marchands du temple (1570), dessins Ă la craie de couleur, J. Paul Getty Museum, Los Angeles
- Saint Marc en gloire entre saint Jean et saint Barthélemy (1573), Église San Marco, Cassola
- Le Prêche de saint Paul (1574), avec la participation de son fils Francesco, Église San Antonio, Marostica.
- Le Retour de Jacob dans sa famille ou Voyage de Jacob (1580), huile sur toile, 150 Ă— 205 cm, Palais des Doges, Venise. Provient du Palais Contarini Ă San Samuele[12]
- Déposition de la Croix (1582-1584), Musée de l'Ermitage, Saint-Pétersbourg
- La Nativité (1590-1591), toile, 421 × 219 cm, Basilique San Giorgio Maggiore de Venise[12]
- Non datés
- L'Annonce faite aux bergers, Musée des beaux-arts de Chambéry
- Plusieurs tableaux au Musée des beaux-arts de Nîmes
- La Construction de l'arche de Noé, Musée des beaux-arts de Marseille
- Vierge Ă l'Enfant, Detroit Institute of Arts
- Le Chemin de Croix, Saint Jérôme au désert et un dessin préparatoire au Fitzwilliam Museum, University of Cambridge
- Flagellation, Ă©tudes, Metropolitan Museum of Art, New York
- Jésus chassant les marchands du temple, musée du Prado, Madrid
- La Cène, Nativité, Galerie Borghèse, Rome
- Repos pendant la fuite en Égypte, Bibliothèque Ambrosienne, Milan
- Le Retour de l'enfant prodigue, huile sur toile, 100 × 122,6 cm, Musée des beaux-arts, Libourne
- La Tonte des moutons, huile sur toile, 79 × 123,5 cm, Musée des beaux-arts, Rouen
- Entrée des animaux dans l'Arche, huile sur bois, 141 × 106 cm, Musée du Louvre, Paris
- DĂ©part pour Chanaan, huile sur bois, 132 Ă— 85 cm, National Gallery, Londres
- L'Adoration des bergers, Galerie nationale d'art ancien, Palais Corsini, Rome
- Le Martyre de saint Sébastien, Musée des beaux-arts de Dijon
- La Fuite en Égypte, huile sur toile, 119 × 198 cm, Norton Simon Museum[13]
- Le Christ aux outrages, huile sur toile, 122 × 182 cm, Musée des beaux-arts de Brest[14]
Copies
- L'Annonce aux bergers, XVIIe siècle, huile sur toile, 86 × 115 cm. Musée d'Évreux
- Marchandes de volailles et chasseurs (copie partielle), XVIIe siècle, huile sur toile, 25,9 × 34,5 cm, Musée d'Évreux
Notes et références
- (it)/(en) Cet article est partiellement ou en totalité issu des articles intitulés en italien « Jacopo Bassano » (voir la liste des auteurs) et en anglais « Jacopo Bassano » (voir la liste des auteurs).
- Rijksbureau voor Kunsthistorische Dokumentatie, « Bassano, Jacopo », Rijksbureau voor Kunsthistorische Dokumentatie (consulté le )
- John Julius Norwich, Oxford illustrated encyclopedia, Oxford [England], Oxford University Press, 1985–1993, 37 p. (ISBN 0-19-869129-7, OCLC 11814265, lire en ligne)
- Peter Humfrey 1996, p. 219
- Le siècle de Titien 1993, p. 634
- L'image sur le site du Louvre
- Nancy Grubb, Figures d’anges : Messagers célestes à travers les arts, Editions Abbeville, , 320 p. (ISBN 2-87946-082-4), p. 89
- Mina Gregori, Le Musée des Offices et le Palais Pitti : La Peinture à Florence, Editions Place des Victoires, , 685 p. (ISBN 2-84459-006-3), p. 271
- https://www.gallerieaccademia.it/adorazione-dei-pastori
- Vincent Pomarède, 1001 peintures au Louvre : De l’Antiquité au XIXe siècle, Paris/Milan, Musée du Louvre Editions, , 589 p. (ISBN 2-35031-032-9), p.324
- Carlo Falciani et Pierre Curie (dir.), La Collection Alana : Chefs-d'œuvre de la peinture italienne, Bruxelles, Fonds Mercator, , 216 p. (ISBN 978-94-6230-154-2)Ouvrage publié à l'occasion de l'exposition au musée Jacquemart-André du 13 septembre 2019 au 20 janvier 2020, notice de Carlo Falciani p. 186.
- Wolfgang Prohaska, Le Kunsthistorisches Museum de Vienne : Peinture, C.H. Beck/Scala Books, , 128 p. (ISBN 3-406-47459-4, lire en ligne), p. 30
- Giovanna Nepi Sciré, La Peinture dans les Musées de Venise, Editions Place des Victoires, , 605 p. (ISBN 978-2-8099-0019-4), p. 310.
- Véronique Prat, Chefs-d'œuvre secrets des grandes collections privées, Albin Michel, (ISBN 2-226-03427-7), p.12
- Renaissance du Musée de Brest, acquisitions récentes : [exposition], Musée du Louvre, Aile de Flore, Département des Peintures, 25 octobre 1974-27 janvier 1975, Paris, , 80 p.
Voir aussi
Bibliographie
: document utilisé comme source pour la rédaction de cet article.
- (en) Paolo Berdini, The religious art of Jacopo Bassano : painting as visual exegesis, Cambridge University Press, Cambridge, New York, 1997, 208 p. (ISBN 0-521-56170-1)
- (fr) Jean-Pierre Habert et Catherine Loisel-Legrand, Bassano et ses fils dans les musées français, Réunion des musées nationaux, 1998, 119 p. (ISBN 9782711836697)
- Raphaël Pic, « Fous de Bassano », Muséart, no 98,‎ , p.28-33
- Peter Humfrey (trad. de l'anglais), La peinture de la Renaissance Ă Venise, Paris, Adam Biro, (1re Ă©d. 1995), 319 p. (ISBN 2-87660-175-3)
- Michel Laclotte dir., Le siècle de Titien. L'âge d'or de la peinture à Venise, Paris, Réunion des Musées Nationaux, , 745 p. (ISBN 2-7118-2610-4), p. 745
- Bernard Aikema, Jacopo Bassano and His Public: Moralizing Pictures in an Age of Reform, ca. 1535-1600 (traduit par Andrew P. McCormick), Princeton, N.J., Princeton University Press, 1996.
- W. R. Rearick, Jacopo Bassano, 1510-1592, Fort Worth, Texas, 1993, Kimbell Art Museum.
Articles connexes
- Les membres de la famille d'artistes italiens des Bassano
- Joachim Bueckelaer
- Renaissance vénitienne
Liens externes
- Ressources relatives aux beaux-arts :
- AGORHA
- Bridgeman Art Library
- Galerie nationale de Finlande
- J. Paul Getty Museum
- Musée des beaux-arts du Canada
- Royal Academy of Arts
- (en) Art Institute of Chicago
- (en) Art UK
- (en) Auckland Art Gallery
- (en) Bénézit
- (en) British Museum
- (en + de) Collection de peintures de l'État de Bavière
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