Inflorescence sans feuille
L'inflorescence sans feuille est, chez les plantes, la floraison sur un rameau ou une tige non feuillu ou sans nouvelles feuilles de lâannĂ©e, elle est spĂ©cialement dĂ©crite et Ă©tudiĂ©e chez Citrus oĂč elle constitue un type de floraison qui handicape la production de fruits.
DĂ©nomination
On parle aussi couramment de floraison blanche[2] en anglais bouquet bloom, white blossom[3]. Alphonse de Candolle (1837) parle des inflorescences sur rameau sans feuille comme une anormalitĂ©[4]. L. Faucheron (1906)[5], M. F. Gagnepain (1909)[6] emploient lâexpression: inflorescence sans feuille.
Reece (1945) nomme le phĂ©nomĂšne leafless inflorescence chez Citrus. En français, l'expression inflorescence sans feuille est utilisĂ©e depuis, Camille Jacquemond et al. parlent (2013) dâinflorescence avec ou sans feuille chez le clĂ©mentinier[7]. C. J. Lovatt et Streeter dans leur travaux sur l'orange navel assimilent les pousses florifĂšres sans feuilles et celles de moins d'une feuille par fleur, les deux dĂ©bourrement et nouent plus tĂŽt que les inflorescences feuillues[8].
Histoire
En 1872 Charles Naudin construit une théorie les floraisons successives et différentes de P. trifoliata, et en 1874 M.C. RoumeguÚre décrit chez C. australis une floraison hùtive qui ne noue pas[9].
Câest Philip C. Reece qui dĂ©veloppe dans les Actes de l'American Society For Horticultural Science Vol-46 (1945) une recherche sur La relation entre lâĂ©volution de la floraison et la mise Ă fruit chez l'orange douce[10]. Il distingue la floraison de nouvelles pousses portant des feuilles et des fleurs Ă leur aisselle sur le bois neuf (inflorescences feuillues) par opposition Ă floraison sans feuilles nouvelles qui se produit gĂ©nĂ©ralement sur du vieux bois. Chez lâoranger doux l'inflorescence feuillue produit entre 3 et 3,7 fois plus de fruits que l'inflorescence sans feuille. «Car 9,9 % des inflorescences feuillues produisaient des fruits, contre seulement 3,4 % pour les sans feuilles et la premiĂšre a davantage de fleurs (multiple de lâordre de 1,3)». Les fleurs des inflorescences feuillues sont moins sensibles la dominance apicale (le fruit est bien fixĂ©, mĂȘme loin de lâextrĂ©mitĂ© du rameau) d'oĂč sa proposition: «la rĂ©colte pourrait ĂȘtre considĂ©rablement augmentĂ©e si seulement un lĂ©ger dĂ©placement des inflorescences sans feuilles vers le type feuillu pouvait ĂȘtre provoquĂ© »[11].
Causes et mécanismes
Beaucoup d'observations ont été accumulées avant que l'apport de la génétique ne facilite la compréhension, pour autant tout n'est pas expliqué, par exemple certaines variétés d'oranges (les Valencia et les Navel) et la mandarine Baladuy feraient davantage d'inflorescences sans feuille que d'inflorescences feuillues[13].
Alimentation du fruit
Moss (1972) montre que le dĂ©veloppement du fruit nĂ©cessite un apport en carbone par les feuilles adjacentes. Dans l'inflorescence feuillue la surface foliaire (1,24 dm2) et la capacitĂ© photosynthĂ©tique suffisent aux besoins du fruit. En revanche, dans inflorescence sans feuille les vieilles feuilles ont une capacitĂ© photosynthĂ©tique et une surface insuffisantes[14]. Une publication sud-africaine (1994) indique que dans le Transvaal oriental oĂč les conditions de tempĂ©rature sont Ă©levĂ©es, l'assimilation nette de CO2 des fleurs feuillues et sans feuilles est faible et similaire pendant toutes les pĂ©riodes de dĂ©veloppement[15].
En 1996 Yair Erner et al. étudient (chez l'orange de Jaffa et le C. x paradisi Marsh) les déterminants de la nouaison et de la floraison. Ils mettent en évidence des différences structurelles de vascularisation. «La nouaison est favorisée sur les inflorescences feuillues tandis que l'avortement est presque complet sur les inflorescences sans feuilles. Les inflorescences sans feuilles de l'orange Shamouti à une fleur ont une tige trÚs fine contenant peu de faisceaux vasculaires, tandis que celles à trois fleurs avaient des systÚmes vasculaires mieux développés. Le systÚme vasculaire des inflorescences feuillues est significativement différent de celui des inflorescences sans feuilles et contient un cylindre de xylÚme central distinct. La zone vasculaire des inflorescences sans feuilles ne représente qu'environ un quart de celle des inflorescences feuillues»[1].
Stress thermique
Une Ă©tude pakistanaise (2004) confirme que les inflorescences sans feuilles sont en pleine floraison plus tĂŽt que les feuillues chez qui lâovaire est plus lourd 27,75 contre 22,7 mg/ovaire et la nouaison est plus Ă©levĂ©e[16]. Les annĂ©es Ă hiver froid provoquent des inflorescences sans feuilles. Chez lâoranger doux les feuilles nouvelles sont plus nombreuses de 24 Ă 19 °C et 27 Ă 19 °C et plus rares de 18 Ă 13 °C et 15 Ă 10 °C[17]. Le calendrier de la floraison joue Ă©galement un rĂŽle (1984).
Un phénomÚne multifactoriel
En 2022, M. AgustĂ et al. publient une revue dĂ©taillĂ©e Ă jour des connaissances, elle Ă©numĂšre les facteurs endogĂšnes et exogĂšnes de contrĂŽle de la floraison : gĂ©nĂ©tique, environnementaux (basses tempĂ©ratures et stress hydrique qui agissent sur les mĂȘmes gĂšnes, le stress hydrique contrĂŽlĂ©[18] est utilisĂ© chez le citronnier pour la production du verdello, citron d'Ă©tĂ©), prĂ©sence de dâhormones rĂ©pressives de la floraison (chez les arbres au stade juvĂ©nile), niveau des rĂ©serves dâhydrates de carbone, rĂŽle de lâazote, et nature du porte-greffe. Ils montrent une liaison feuille-fruit : «Le fruit induit l'activation Ă©pigĂ©nĂ©tique du gĂšne CcMADS19 dans la feuille qui est corrĂ©lĂ©e Ă la rĂ©pression CiFT3 » et une interaction entre le deux[12].
Prévention
Sur ce point les auteurs énumÚrent les procédés connus de contrÎle de la floraison tout en signalant leurs limites sur un processus multifactoriel. «Enfin, les résultats les plus remarquables obtenus avec les régulateurs de croissance des plantes, l'annélation et la taille, pour inhiber ou favoriser la floraison sont présentés pour fournir des techniques capables de contrÎler l'intensité de la floraison. Il a été prouvé que certains d'entre eux modifiaient l'expression des gÚnes de la floraison, bien qu'avec des différences quantitatives qui confirme les limites horticoles pour contrÎler la floraison chez Citrus»[12].
Antérieurement l'application d'acide gibbérellique (ou de composés) était recommandée pour réduire le nombre d'inflorescences sans feuille[19], elle se fait sur le feuillage peut de temps aprÚs le début de floraison[20].
Inflorescence sans feuille chez d'autres fruitiers
Les cas cités ci-dessous montrent des résultats opposés à Citrus. Les inflorescences sans feuilles sont les plus productives.
Litchi
Chez le litchi Yu Her Pau (Litchi chinensis Fils.) les nombres totaux de fleurs, de fleurs femelles et le pourcentage de fleurs femelles dans les inflorescences sans feuilles observé à Chunghua en 2019 étaient nettement plus élevés que celles des inflorescences feuillues. Les inflorescences sans feuilles ont un rendement en fruits par grappe significativement plus élevés à la récolte (sachant qu'il n'y a pas de différence dans le taux de nouaison entre les deux types d'inflorescences)[21].
Camphrier Ă petites fleurs
L'influence du climat sur cette espÚce menacée (Cinnamomum kanehirae Hayata) a montré que le développement des fruits est inversement corrélé au nombre de feuilles ordinaires proche du fruit. Cet arbre produit 3 types d'inflorescences: sans feuilles, feuillues, et bourgeons attachés aux feuilles. Les premiÚres ont le taux de nouaison le plus élevé et portent le plus grand nombre de fruits[22].
Bibliographie
- Jakkie (OPJ) Stander. Introduction to the physiology of citrus flowering (The reproductive phenology of Citrus). Tecnology. Cri 82 - juin-juillet 2015[23].
Notes et références
- (en) Yair Erner et Ilan Shomer, « Morphology and Anatomy of Stems and Pedicels of Spring Flush Shoots Associated with Citrus Fruit Set » [PDF], sur academic.oup.com, (consulté le )
- ann, « Floraison blanche », sur EssentialCitrus, (consulté le )
- (en) « SL485/SS698: Management of Citrus Tree Canopies for Fresh-Fruit Production », sur edis.ifas.ufl.edu (consulté le )
- Alphonse de Candolle, Introduction a l'étude de la botanique: ou, Traité élémentaire de cette science; contenant l'organographie, la physiologie, la méthodologie, la géographie des plantes, un aperçu des fossils végétaux, de la botanique médicale, et de l'histoire de la botanique, Meline, Cans, (lire en ligne), p 61
- L. Auteur du texte Faucheron et Jean-Jules (1874-1938) Auteur du texte Beauverie, Atlas colorié de la flore alpine : Jura, Pyrénées, Alpes françaises, Alpes suisses / par J. Beauverie et L. Faucheron,... d'aprÚs Hegi et Dunzinger... ; Préface de R. Gérard,..., (lire en ligne), p 42
- Muséum national d'histoire naturelle (Paris) Auteur du texte, « Bulletin du Muséum national d'histoire naturelle », sur Gallica, (consulté le )
- Camille Jacquemond, Franck Curk et Marion Heuzet, Les clémentiniers et autres petits agrumes, Editions Quae, (ISBN 978-2-7592-2067-0, lire en ligne), p 174
- (en) C. J. LOV ATT et al., « PLANT PHYSIOLOGY ANO ECOLOGY PHENOLOGY OF FLOWERING IN Citrus sinensis [L.] OSBECK, ev. "WASHINGTON NAVEL ORANGE », Proc. Int, Soco Citriculture. Vol. l,â , p. 5 (lire en ligne [PDF])
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