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Helleborus cyclophyllus

Helleborus cyclophyllus est une plante herbacĂ©e vivace de la famille des Ranunculaceae, poussant dans les Balkans et en particulier en GrĂšce oĂč elle est cĂ©lĂšbre depuis l’AntiquitĂ© comme plante mĂ©dicinale. Dans le Corpus hippocratique, elle est connue sous le nom d’ellĂ©bore noir (elleboros melas ΔλλΔÎČÎżÏÎżÏƒ ΌΔλας) rĂ©putĂ©e comme un excellent Ă©vacuant puis Ă  partir des premiers siĂšcles de notre Ăšre, elle fut principalement recommandĂ©e en usage interne pour guĂ©rir la folie (voir Histoire de l’ellĂ©bore mĂ©dicinal).

C’est une plante vivace, au feuillage caduc et aux fleurs vert clair.

Étymologie

Le nom de genre Helleborus, introduit par LinnĂ© en 1753 dans Species plantarum[1], dĂ©signe en latin et en grec (ΔλλΔÎČÎżÏÎżÏ‚, elleboros) une espĂšce d'hellĂ©bore qui Ă©tait l’évacuant par excellence de la mĂ©decine hippocratique dans la GrĂšce antique(AndrĂ©[2]).

L’épithĂšte spĂ©cifique cyclophyllus est une composition du grec ancien kuklos (ÎșύÎșÎ»ÎżÏ‚) « cercle » et phullon (Ï†Ï…Î»Î»ÎżÎœ) « feuille » (Bailly[3]). En grec ancien, l'upsilon se prononce vraisemblablement [u] et change de point d'articulation Ă  l'Ă©poque classique en [y].

Histoire de la nomenclature

Aux Ve – IVe siĂšcles av. J.-C., l’ellĂ©bore noir (elleboros melas, έλλέÎČÎżÏÎżÏ‚ Όέλας, terme employĂ© dans les textes mĂ©dicaux grecs antiques) est une des plantes mĂ©dicinales les plus utilisĂ©es par les mĂ©decins hippocratiques[4]. Le remĂšde continua Ă  ĂȘtre connu grĂące Ă  l’ouvrage de rĂ©fĂ©rence de la matiĂšre mĂ©dicale de Dioscoride, traduit au cours des siĂšcles, en latin (De materia medica), syriaque, arabe, persan et langues europĂ©ennes.

Au XVIe siĂšcle, le mĂ©decin italien Mattioli Ă©crivit un Commentarii in libros sex Pedacii Dioscoridis, ornĂ© de 500 gravures, qui connut un immense succĂšs. L’Ɠuvre fut publiĂ©e en italien en 1544, puis en latin en 1554 et traduite en français[5] en 1572 et en allemand en 1626. Sur la base des descriptions sommaires de l’AntiquitĂ©, Mattioli assure que « Tant l’ellebore blanc, que le noir sont assez connus d’un chacun en Italie. Et combien qu’on n’y trouve qu’une espĂšce d’ellebore blanc : ceneanmoins il y en a trois espĂšces de noir, qui ne sont differents qu’en la fleur. Car l’un a les fleurs rouges,& telles que les descrit Dioscoride : l’autre les a blanches : & le tiers, verdes » (Commentaires de Matt. de Diosc., III, chap. CXLVI).

Dans ce seiziĂšme siĂšcle europĂ©en, la botanique commence Ă  se construire comme une vĂ©ritable science : les descriptions de plantes sont plus mĂ©ticuleuses, la terminologie s’établit, les diverses parties du vĂ©gĂ©tal sont analysĂ©es, des herbiers sont constituĂ©s et les premiĂšres Ă©bauches de classifications apparaissent[6].

L’identification de l’espĂšce d’hellĂ©bore que connaissait Hippocrate, va maintenant ĂȘtre l’Ɠuvre de botanistes. Il faudra toutefois quatre siĂšcles, pour que les botanistes explorateurs Pierre Belon au XVIe siĂšcle et Pitton de Tournefort au XVIIe siĂšcle, puis les thĂ©oriciens du siĂšcle des LumiĂšres, Carl LinnĂ© et Jean-Baptiste de Lamarck et enfin le botaniste explorateur Edmond Boissier au XIXe siĂšcle, tirent au clair l'identitĂ© botanique de elleboros melas qui croissait dans les montagnes de la GrĂšce antique.

Chrolologie des cinq botanistes ayant contribué à établir l'identité botanique de Helleborus cyclophyllus

De 1546 Ă  1549, le naturaliste Pierre Belon (1517-1564) accompagne deux ambassadeurs de François Ier auprĂšs de Soliman le Magnifique. Il parcourt le Levant de 1546 Ă  1549 et lorsqu’il passe au mont Athos, il observe dans plusieurs vallĂ©es l’hellĂ©bore noir. Dans le rĂ©cit qu’il en donne, Les observations de plusieurs singularitĂ©s et choses mĂ©morables, il remarque que sur ce mont Athos, il « n’y a plante insigne qui ne soit connue par le mĂȘme nom ancien que ThĂ©ophraste, Dioscoride & Galien laissĂšrent par Ă©crit »[7] et sur le mont Olympe, il observe que « L’hellebore noir y produit librement la fleur rouge & y croit en grande quantitĂ© ».

La seconde expĂ©dition au Levant a Ă©tĂ© dĂ©cidĂ©e par Louis XIV qui envoya le naturaliste Pitton de Tournefort (1656-1708) afin de « reconnaĂźtre les plantes des Anciens, ...de faire des observations sur l'histoire naturelle, sur la gĂ©ographie.. et mĂȘme sur les mƓurs, la religion, et le commerce des peuples » (Fontenelle, prĂ©face Ă  Relation d’un voyage au Levant, tome1[8]). Il partit de Marseille le 9 mars 1700 et visita la CrĂšte, les Cyclades, Constantinople, et l’Asie mineure, sans passer par la GrĂšce-Centrale ou la Thessalie (avec au nord le mont Olympe).

Dans le tome 2 de son récit, il écrit p. 474:

« Nous connĂ»mes deux Herboristes Ă  Prusse (nord-ouest de l’Anatolie), l’un Émir et l’autre ArmĂ©nien, qui passoient pour de grands Docteurs. Ils nous fournirent des racines du vĂ©ritable EllĂ©bore noir des anciens, autant que nous voulĂ»mes pour en faire l’extrait. C’est la mĂȘme espĂšce que celles des Anticyres et des cĂŽtes de la mer Noire. Cette Plante que les Turcs appellent ZoplĂ©me et qui est trĂšs commune au pied du mont Olympe, a pour racine un trognon, gros comme le pouce, couchĂ© en travers, long de trois ou quatre pouces, dur, ligneux, divisĂ© en quelques racines plus menues et tortues. » (Relat. voy. au Levant, tome 2[9])

Avant d’entreprendre cette expĂ©dition, Tournefort avait proposĂ© une nouvelle classification des plantes dans un ouvrage intitulĂ© ÉlĂ©ments de botanique (publiĂ© en 1694) puis en latin Institutiones rei herbariae (en 1700). Avant LinnĂ©, il propose de regrouper les espĂšces de plantes par genre, et de faire commencer le nom des espĂšces d’un mĂȘme genre par le mĂȘme terme. Dans la classe VI, le genre XI, intitulĂ©e Helleborus, EllĂ©bore noir, il note « les fleurs sont Ă  plusieurs feuilles disposĂ©es en rose. On trouve entre ces feuilles et les Ă©tamines plusieurs cornets disposĂ©s en couronne Ă  la base du pistil » (ElĂ©mens de botanique[10], p. 85). Dans sa liste d’ellĂ©bore noir, il signale deux EllĂ©bores noirs orientaux, l’un Ă  trĂšs grande feuilles, Ă  tige trĂšs Ă©levĂ©e, Ă  fleur purpurine et un autre Ă  feuilles de Renoncule, Ă  fleur non globuleuse.

Carl LinnĂ© (1707-1778) intervient dans cette histoire de l’elleboros melas, non pas pour avoir contribuĂ© Ă  l’identifier, mais pour avoir fermement Ă©tabli un systĂšme binomial d’appellation des espĂšces qui servira Ă  le nommer. En 1753, dans Species plantarum, il crĂ©e le genre Helleborus, possĂ©dant cinq espĂšces[11] : H. hyemalis, H. niger, H. veridis, H. foetidus, et H. trifolius. Son hellĂ©bore noir (Helleborus niger) est purement europĂ©enne (Habitat in Austria, Hetruria [Toscane], Apenninis), il ne mentionne pas l’EllĂ©bore noir oriental de Tournefort.

Lamarck qui s’intĂ©ressait Ă  la classification, connaissait bien les travaux de Tournefort qui de surcroit avait travaillĂ© dans la mĂȘme institution que lui[n 1]. Car, s’il est surtout connu pour ĂȘtre le premier scientifique Ă  avoir dĂ©fendu l’idĂ©e d’évolution, il fut aussi l’un des plus grands botanistes de son temps[6]. Dans EncyclopĂ©die mĂ©thodique. Botanique[12] publiĂ© en 1789, il introduit une nouvelle espĂšce dans le systĂšme binomial, Hellebore du Levant, Helleborus orientalis « les fleurs sont terminales, penchĂ©es, d’un vert pourprĂ© ou d’un pourpre brun ». Elles ont un calice Ă  5 folioles ovales ou arrondies, 5 pĂ©tales ou davantage, tout Ă  fait tubuleux, en cornet, plus court que le calice, un grand nombre d’étamines, plusieurs ovaires droits. La distribution est dans l’aire de la GrĂšce antique (GrĂšce centrale, Anatolie) « cette plante est commune dans les Ăźles d’Anticyre, qui sont vis-Ă -vis le mont Oeta, dans le golfe de Zeiton, prĂšs de NĂ©grepont [Ăźle d’EubĂ©e], elle l’est encore plus sur les bords du Pont-Euxin (la mer noire) & surtout au pied du mont Olympe en Asie, proche de la ville de Pruse ».

Il ne restait plus qu'Ă  un botaniste expĂ©rimentĂ© d'aller sur le terrain pour contrĂŽler les informations assez parcellaires jusque-lĂ  rĂ©coltĂ©es. C’est ce que fit le botaniste suisse Edmond Boissier (1810-1885), ancien Ă©lĂšve de Augustin Pyrame de Candolle, qui avait acquis une solide expĂ©rience en Ă©laborant la premiĂšre flore d’Espagne. En 1842, il part en GrĂšce et parcourt le PĂ©loponnĂšse, et dans l’Empire ottoman, les environs de Constantinople, ainsi qu'en Asie mineure, La Lydie, La Carie, la Bithynie. La GrĂšce longtemps occupĂ©e par l’empire Ottoman venait d’obtenir son indĂ©pendance par le TraitĂ© de Constantinople (1832). Dans Flora Orientalis[13], il donne la description d’une nouvelle hellĂ©bore, qu’il nomme Helleborus cyclophyllus et qu’il localise dans la rĂ©gion du mont Parnasse, l’EubĂ©e, le mont HĂ©licon en BĂ©otie. Il conserve nĂ©anmoins l’espĂšce Helleborus orientalis Lamarck qu’il localise en MacĂ©doine, Thrace, Asie mineure borĂ©ale.

Description

L’Helleborus cyclophyllus est une plante vivace, de 40 Ă  60 cm de haut[14] et autant de large.

Feuillage
Fleurs aux sépales verts

Le feuillage est caduc, il meurt Ă  l’automne. Les feuilles se dĂ©veloppent sur la tige florale, une fois qu’elle a pris de la hauteur.

La feuille est pĂ©dalĂ©e, formĂ©e de sept segments principaux dont les extĂ©rieurs sont Ă  nouveau divisĂ©s pour former jusqu’à onze segments. La foliole centrale n’est jamais divisĂ©e[15]. Les segments sont largement lancĂ©olĂ©s, dentĂ©s, densĂ©ment velus en dessous, spĂ©cialement pour les feuilles naissantes qui ont des poils argentĂ©s.

L’inflorescence est une cyme portant plusieurs fleurs. L’axe portant les fleurs de 30 cm de haut est robuste. Les bractĂ©es sont divisĂ©es comme les feuilles et dentĂ©es.

Les fleurs, de 5-7 cm de diamĂštre, sont aplaties ou en forme de soucoupe, pendantes ou tournĂ©es vers l’extĂ©rieur. Elles sont parfumĂ©es[15].

Elles sont normalement vertes, pouvant tirer sur le jaunùtre, voire le crÚme mais jamais le blanchùtre comme H. orientalis[14]. Elles portent 3 à 7 carpelles, libres à la base (ne se joignant pas entre-eux), chacun courtement pédonculé.

La floraison se déroule de février à mars-avril.

Habitat et répartition

L’hellĂ©bore de GrĂšce est typiquement une plante de montagne qui croĂźt dans les clairiĂšres, au milieu des broussailles, sur les talus herbus, dans les bois.

Distribution : sud de l’ex-Yougoslavie, nord de la Grùce, sud de la Bulgarie, Albanie.

Notes

Références

  1. Caroli Linnaei, « Species plantarum » (consulté le )
  2. Jacques André, Les noms des plantes dans la Rome antique, Les Belles Lettres, , 334 p.
  3. Bailly, « Dictionnaire Grec Français (en ligne) » (consulté le )
  4. Maris Christine Girard, « L’hellĂ©bore : panacĂ©e ou placebo ? », dans Paul Potter, Gilles Maloney, Jacques Desautels, La maladie et les maladies dans la Collection hippocratique (actes du VIe colloque international hippocratique, QuĂ©bec, 1987), QuĂ©bec, Les Ă©ditions du sphinx,
  5. Pedacius Dioscoride Anazarbeen, Commentaires de M.P. AndrĂ© Matthiolus, medecin senois, sur les six liures de Pedacius Dioscoride Anazarbeen de la matiere medecinale : traduits de latin en françois par M. Antoine du Pinet, A l’Escu de Milan, par la veuve de Gabriel Cotier, lyon, 1572 (lire en ligne)
  6. Joëlle Magnin-Gonze, Histoire de la botanique, Delachaux et Niestlé, 2004, 2009
  7. Pierre Belon du Mans, Les observations de plusieurs singularitĂ©s et choses mĂ©morables , trouvĂ©es en GrĂšce, Asie, JudĂ©e, Égypte, Arabie & autres pays estrangers, En la boutique de Gilles Corrozet, en la grand salle du Palais, (lire en ligne)
  8. Joseph Pitton de Tournefort, Relation d’un voyage du Levant, fait par ordre du Roy, Tome 1, Lyon, chez Anisson et Posuel, (lire en ligne)
  9. Joseph Pitton de Tournefort, Relation d’un voyage du Levant, fait par ordre du Roy, Tome 1, Lyon, chez Anisson et Posuel, (lire en ligne)
  10. Pitton de Tournefort, Elémens de botanique, ou Méthode pour connoitre les plantes, tome 2, Edition augmentée de tous les supplémens donnés par Antoine de Jussieu;, Lyon : chez Pierre Bernuset et comp., (lire en ligne)
  11. Carl von Linné, Lars Salvius, Species plantarum, Holmiae: Impensis Laurentii Salvii, (lire en ligne)
  12. Jean-Baptiste, Pierre, Antoine de Monet de Lamarck, Encyclopédie méthodique. Botanique. tome 3, Paris, chez Panckoucke, (lire en ligne)
  13. Edmond Boissier, Flora Orientalis: sive, Enumeratio plantarum Ă  Oriente a Graecia et Aegypto ad Indiae amende hucusque observatarum, Genevae et Basileae, Lugduni, (lire en ligne)
  14. pivoine.hellebore.com, « Helleborus cyclophyllus » (consulté le )
  15. James Cullen , Sabina G. Knees , H. Suzanne Cubey , JMH Shaw, The European Garden Flora Floring Plants : A Manual for the Identification of Plants Cultivated in Europe, Both Out-of-Doors and Under Glass, Cambridge University Press, , 652 p. (lire en ligne)

Liens externes


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