Haplogroupe N (ADNmt)
L'haplogroupe N est un haplogroupe d'ADN mitochondrial humain (ADNmt). N est un macrohaplogroupe dont les lignées descendantes sont présentes sur de nombreux continents. Comme son groupe frÚre M, le macrohaplogroupe N est un descendant de l'haplogroupe L3.
Eurasie
Tous les haplogroupes dâADNmt trouvĂ©s en dehors de l'Afrique sont les descendants de lâhaplogroupe N ou de son groupe frĂšre M. M et N illustrent la thĂ©orie de l'origine africaine de l'Homme moderne et de sa sortie d'Afrique Ă une date rĂ©cente vers l'Eurasie. La rĂ©partition mondiale des haplogroupes N et M semble indiquer que N et M ont Ă©voluĂ© en dehors du continent africain[2]. Une division majeure de population prĂšs du golfe Persique expliquerait l'omniprĂ©sence de l'haplogroupe N et l'absence de l'haplogroupe M en Eurasie occidentale. La question de savoir si les mutations qui dĂ©finissent l'haplogroupe N lui-mĂȘme se sont produites pour la premiĂšre fois en Asie ou en Afrique reste toutefois dĂ©battue.
Buran-Kaya (Crimée)
L'analyse du gĂ©nome d'un individu fossile datĂ© de 36 000 ans environ, originaire de Buran-Kaya III en CrimĂ©e (Buran-Kaya3A), confirme que les groupes du Gravettien seraient issus d'une branche orientale de la population fondatrice de chasseurs-cueilleurs europĂ©ens qui se serait Ă©tendue depuis la Russie actuelle vers l'ouest[3] - [4]. Il a Ă©tĂ© dĂ©terminĂ© que l'haplogroupe mitochondrial de Buran-Kaya3A appartenait Ă l'une des premiĂšres branches de la lignĂ©e N, Ă savoir N1. De maniĂšre surprenante, cette attribution se situe en dehors des lignĂ©es prĂ©cĂ©demment rapportĂ©es pour l'Europe du PalĂ©olithique supĂ©rieur, qui proviennent presque toutes de branches N plus rĂ©centes (haplogroupes U et R). Le N1 de Buran-Kaya3A se distingue notablement de l'haplogroupe mitochondrial N identifiĂ© Ă partir de la mandibule ĂągĂ©e d'environ 40 000 ans de PeÈtera cu Oase, en Roumanie, qui appartient Ă une branche plus basale et qui n'a pas de descendants modernes. En outre, le N1 de Buran-Kaya3A est porteur de trois des huit mutations survenues avant N1b, un rare haplogroupe, frĂ©quent au Proche-Orient et diffus de l'Eurasie occidentale Ă l'Afrique[4]. Les descendants du nĆud N1b incluent N1b2, avec les mutations A1719G, C5507A, A12026G, T15784C et A16258C, prĂ©sent actuellement en Somalie[5] et YĂ©men[6], et N1b1b1, avec la mutation T14581C, prĂ©sent dans prĂšs de 6 % des haplogroupes Juifs ashkĂ©nazes et ça existe aussi chez les Juifs sĂ©farades[7].
Ainsi, les sĂ©quences mitochondriales ramifiĂ©es Ă la fois en amont et en aval de la sĂ©quence Buran-Kaya3A peuvent ĂȘtre retracĂ©es jusqu'au Proche-Orient, et la prĂ©sence moderne en Europe d'haplogroupes descendants de la branche N1 (N1b1b et N1a1a) Ă laquelle appartient Buran-Kaya3A semble ĂȘtre due Ă des migrations ultĂ©rieures depuis le Proche-Orient[4]. L'analyse a dĂ©terminĂ© que Buran-Kaya3A possĂ©dait 3,4 % d'ascendance nĂ©andertalienne, un niveau typique des Eurasiens de l'Ă©poque, mais lĂ©gĂšrement supĂ©rieur aux Eurasiens actuels (environ 2 %)[4].
NĂ©olithique
L'haplogroupe N1a1a est l'une des deux lignées d'ADNmt - l'autre étant K1a - observées chez les agriculteurs du Néolithique ancien d'Anatolie centrale. En GrÚce, il n'est enregistré qu'au Néolithique moyen et tardif[8].
N1a est lâhaplogroupe le plus caractĂ©ristique des premiers agriculteurs de la plaine de Pannonie et d'Europe centrale. La prĂ©sence de N1a chez les premiers agriculteurs de Pannonie (6,82 Ă 10,26 %) et en Europe centrale renforce encore son rĂŽle de marqueur de la route danubienne de l'expansion nĂ©olithique. A contrario, les haplogroupes N1a de l'ADNmt et NRY G2a sont rares parmi les populations europĂ©ennes d'aujourd'hui, ce qui reflĂšte la diffĂ©rence entre les populations des cultures du VIe millĂ©naire av. J.-C. et les populations actuelles vivant en Europe[9].
Références
- Metspalu et al., 2004
- (en) A. Olivieri, A. Achilli, M. Pala, V. Battaglia, S. Fornarino, N. Al-Zahery, R. Scozzari, F. Cruciani, D. M. Behar, J.-M. Dugoujon, C. Coudray, A. S. Santachiara-Benerecetti, O. Semino, H.-J. Bandelt et A. Torroni, « The mtDNA Legacy of the Levantine Early Upper Palaeolithic in Africa », (PMID 17170302, DOI 10.1126/science.1135566, Bibcode 2006Sci...314.1767O) : « The scenario of a back-migration into Africa is supported by another feature of the mtDNA phylogeny. Haplogroup M's Eurasian sister clade, haplogroup N, which has a very similar age to M and no indication of an African origin », p. 1767â70
- (en) David Reich, Who We Are and How We Got Here, Oxford University Press, 2018
- (en) E. Andrew Bennett et al, The origin of the Gravettians: genomic evidence from a 36,000-year-old Eastern European, biorxiv.org, juillet 2019
- YFull MTree: N1b2
- « Homo sapiens isolate Y333 haplogroup N1b2 mitochondrion, complete genome » dans la base GenBank
- (en) Kevin A. Brook, The Maternal Genetic Lineages of Ashkenazic Jews, Academic Studies Press, (ISBN 978-1644699843, DOI 10.2307/j.ctv33mgbcn), p. 15, 82-83
- (en) Nuno M. Silva, Susanne Kreutzer et al., Ancient mitochondrial diversity reveals population homogeneity in Neolithic Greece and identifies population dynamics along the Danubian expansion axis, nature.com, Scientific Reports, volume 12, n° 13474, 2022, doi.org/10.1038/s41598-022-16745-8
- (en) Anna Szécsényi-Nagy et al., « Tracing the genetic origin of Europe's first farmers reveals insights into their social organization », 2015 apr 22