Grottes du Pech-de-l'Azé
Les grottes du Pech-de-l'Azé sont un gisement préhistorique situé sur la commune française de Carsac-Aillac, dans le département de la Dordogne, en région Nouvelle-Aquitaine.
Pech de l'Azé I
Coordonnées |
44° 51âČ 25âł N, 1° 16âČ 34âł E |
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Pays | |
RĂ©gion | |
DĂ©partement | |
Commune | |
Vallée |
de l'ĂnĂ©a |
Voie d'accĂšs |
D704 |
Signe particulier |
5 grottes (Pech I Ă Pech V) |
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Cours d'eau | |
Occupation humaine | |
Patrimonialité |
Pech-de-l'Azé I est un site de référence pour le Paléolithique moyen régional[2].
Situation
Les grottes se trouvent au nord-ouest de Carsac-Aillac, prĂšs de la D704 menant Ă Gourdon[3]. Le site inclut cinq grottes, Pech I Ă Pech V, situĂ©es dans la vallĂ©e de l'ĂnĂ©a[4], petit tributaire de la Dordogne en rive droite.
Elles sont à une dizaine de kilomÚtres de la grotte du Roc de Combe sur Payrignac, dans le Lot ; les deux sites sont souvent considérés similairement.
Du point de vue gĂ©ologique, elles occupent la mĂȘme position que la grotte du Roc de Combe : en bordure Est du bassin aquitain, entre les formations du CrĂ©tacĂ© supĂ©rieur du PĂ©rigord et les plateaux jurassiques du Quercy[5] - [6].
Historique des fouilles et travaux
En 1816 François Jouannet dĂ©couvre Pech-de-l'AzĂ© I[7]. L'abbĂ© Audierne y fait des fouilles en 1828[8], et Ă. Lartet et H. Christy en 1864[9].
Le Pech-de-l'Azé I est fouillée en 1909 par Capitan et Peyrony, qui y trouvent les restes d'un crùne de jeune enfant[7].
En 1927 le site est classé Monument historique[1].
Pech-de-l'Azé I est fouillée de nouveau par Raymond Vaufrey (1929-1930)[10], puis par Maurice Bourgon[n 1] et François Bordes (1949-1953)[11] - [12] - [13]. Bourgon et F. Bordes découvrent Pech-de-l'Azé II en 1949[Tex 1]. Bordes (1954) définit 10 niveaux archéologiques, la couche 1 étant la plus récente[Tex 2]
François Bordes fouille de nouveau le site en 1970-1971[10]. En 1973 H. Laville détermine vingt niveaux chrono-stratigraphique des dépÎts - essentiellement en subdivisant les 10 niveaux définis par F. Bordes[Tex 3]. F. Bordes (1975) y définit une nouvelle variante peu commune du Moustérien : l'Asinipodien[14], allant de ~82 000 ans à ~70 000 ans (SIO 5a à 4)[15].
Des analyses micromorphologiques (Goldberg 1979[16]) puis chronologiques[Tex 2] (GrĂŒn & Stringer 1991, GrĂŒn et al. 1991, quatre-vingts dates ESR publiĂ©es sur les couches 2 Ă 9) pour Pech II[Tex 4] amĂšnent des contradictions avec les interprĂ©tations de F. Bordes (1954-1955) et de H. Laville (1973)[Tex 2].
Entre-temps, en 1983 une datation Th / U par Schwarcz et Blackwell d'un plancher stalagmitique inclus dans la couche 2 de Pech II a donné 103 000 +30/-25[Tex 5].
En 1999 Soressi et al. entreprennent l'étude des matériaux issus des fouilles de 1970-71, dont les résultats étaient restés inédits[2] - [17], et reprend les fouilles en 2004-2005 sur une petite surface pour compléter le matériel archéologique ; les quelque 10 m2 fouillés livrent presque 7 000 vestiges coordonnés[2] - [18].
Entre-temps, en 2000 J.-J. Cleyte-Merle, directeur du Musée national de Préhistoire, fait poser une grille autour du gisement afin de le protéger des intrusions ; et en 2005 un abri en bois de prÚs de 100 m2 recouvert de bardage est installé pour protéger les témoins archéologiques des intempéries et de la végétation[19].
GĂ©ologie
Pech-de-l'Azé II
Texier, réexaminant en 2006 les événements géologiques survenus dans Pech II, détermine sept phases principales à l'évolution du site :
- Fin du Tertiaire ou du début du Quaternaire, ùge incertain.
- DĂ©pĂŽts de sables fluviatiles endokarstiques Ăąge incertain.
- Ruissellement et éboulement, avec gélisol peu profond - premiÚre partie du stade isotopique de l'oxygÚne 6 (SIO 6).
- Intensification du froid, éboulement prédominant, gélisol profond dans les dépÎts sous-jacents - partie supérieure du SIO 6[Tex 6].
- Ruissellement prĂ©pondĂ©rant - SIO 5[Tex 6] (WĂŒrm I[Tex 2]).
- Transformation des sédiments antérieurs en une roche sédimentaire (évolution diagénétique), gélisol profond - SIO 4 ou/et 2.
- Importante bioturbation, phénomÚnes de carbonatation - SIO 1[Tex 6].
La datation des couches 9 à 5 selon F. Bordes est comprise entre la fin du SIO 7 et le début du SIO 5 ; celle des couches 4 à 2 vont de la fin du SIO 5 au début du SIO 3[Tex 4].
Archéologie
Les grottes forment un gisement archéologique remontant au Moustérien de tradition acheuléenne (MTA) de type B[20]. Cette période se retrouve dans Pech-de-l'Azé I[21], qui a livré un fossile de crùne de jeune enfant néandertalien de cette période[22] en bas de la couche 6. C'est le premier vestige humain du MTA de type B (exception faite d'une dent isolée). La couche 6 a été datée entre 37 000 et 51 000 ans ; le crùne est daté entre 41 000 et 51 000 ans[23].
Les dĂ©pĂŽts rissiens et du WĂŒrm I ont Ă©tĂ© dĂ©truits au Pech de l'AzĂ© I lors de l'interstade WĂŒrm I-II, et ne subsistent qu'au Pech de l'AzĂ© II qui, moins bien exposĂ©, avait Ă©tĂ© moins utilisĂ© et est assez pauvre en vestiges archĂ©ologiques[8]. La partie avant de la voĂ»te de Pech II s'est effondrĂ©e aprĂšs le Riss.
De nombreux foyers ont été découverts à des niveaux divers et à des emplacements variés, dont certains nettement à l'intérieur de la grotte ; ces derniers étaient donc placés encore plus vers l'intérieur à l'époque de leur usage[24]. Au Pech II, les couches du MTA présentent des foyers « à queue », c'est-à -dire des dépressions contenant de la cendre et prolongées sur un bord par une mini-tranchée. Cette forme de foyer se retrouve ailleurs dans plusieurs lieux et périodes (Aurignacien I du Roc de Combe, couche IA de Corbiac, Solutréen de la grotte ornée d'Ambrosio (es)[25].
Bordes signale pour Pech-de-l'Azé II un os gravé remontant au MTA et un os percé du Moustérien[26]. Les « gravures » de l'os en question (un fragment de cÎte) sont en fait les empreintes naturelles de sillons vasculaires, mises en évidence par une analyse par microscopie optique et par MEB, et par sa comparaison avec des ossements actuels[27].
Pigments
Une grande quantitĂ© de pigments a Ă©tĂ© trouvĂ©e, de mĂȘme que dans la grotte du Renne sur le site d'Arcy-sur-Cure (Yonne), et ailleurs[28]. Ainsi Pech I a livrĂ© plus de 250 blocs de dioxyde de manganĂšse utilisĂ©s[4].
Les pigments Ă©taient utilisĂ©s sur les cuirs travaillĂ©s (vĂȘtements, tentes), prouvant que bien avant l'apparition en Europe des peintures rupestres les nĂ©andertaliens savaient manier les matĂ©riaux colorants et qu'ils n'ont pas attendu l'Homo sapiens pour donner Ă leurs objets du quotidien une dimension symbolique[28].
Voir aussi
Bibliographie
: document utilisé comme source pour la rédaction de cet article.
- [Bourgon & Bordes 1950] Maurice Bourgon et François Bordes, « Le gisement du Pech de l'AzĂ©-Nord, prise de date et observations prĂ©liminaires », Bulletin de la SociĂ©tĂ© prĂ©historique française, vol. 47, nos 6-8,â , p. 381-383 (lire en ligne [sur persee]).
- [Bourgon & Bordes 1951] Maurice Bourgon et François Bordes, « Le gisement du Pech de l'AzĂ© Nord. Campagnes 1950-1951. Les couches infĂ©rieures Ă Rhinoceros Mercki », Bulletin de la SociĂ©tĂ© prĂ©historique française, t. 48, nos 11-12,â , p. 520-538 (lire en ligne [sur persee], consultĂ© en ).
- [Bordes 1954] François Bordes, « Les gisements du Pech de l'AzĂ© (Dordogne). 1. Le MoustĂ©rien de tradition acheulĂ©ene », L'Anthropologie, vol. 58, nos 5-6,â , p. 401-432.
- [Bordes 1971] François Bordes, « Observations sur L'AcheulĂ©en des grottes en Dordogne », Munibe, Sociedad de Ciencias Naturales Aranzadi, no 1,â , p. 5-23 (lire en ligne [PDF] sur aranzadi.eus, consultĂ© en ).
- [Bordes 1975] François Bordes, « Le gisement du Pech de l'AzĂ© IV. Note prĂ©liminaire », Bulletin de la SociĂ©tĂ© prĂ©historique française, vol. 72, no 1,â , p. 293-308 (lire en ligne [sur persee]).
- [Maureille & Soressi 2000] Bruno Maureille et Marie Soressi, « Ă propos de la position chronostratigraphique de l'enfant du Pech-de-l'AzĂ© I (commune de Carsac, Dordogne) : la rĂ©surrection du fantĂŽme », PalĂ©o, no 12,â , p. 339-352 (lire en ligne [sur persee]).
- [McPherron & Dibble 2000] (en) Shannon P. McPherron et Harold L. Dibble (en), « The Lithic Assemblages of Pech de l'AzĂ© IV (Dordogne, France) », PrĂ©histoire EuropĂ©enne, no 15,â , p. 9-43 (lire en ligne [sur academia.edu], consultĂ© en ).
- [Richter et al. 2017] (en) Daniel Richter, Harold L. Dibble (en), Shannon P. McPherron, Dennis Sandgathe et Paul Goldberg, « Additional chronometric data for the small flake assemblages (âAsinipodian') from Pech de l'AzĂ© IV (France) and a comparison with similar assemblages at the nearby site of Roc de Marsal », dans D. Wojtczak, M. Al Najiar, R. Jagher, H. Elsuede, F. WegmĂŒller et M. Otte, Vocation prĂ©histoire. Hommage Ă Jean-Marie Le Tensorer, coll. « ERAUL (Ătudes et Recherches archĂ©ologiques de l'UniversitĂ© de LiĂšge) » (no 148), , sur researchgate.net (rĂ©sumĂ©), p. 323-335.
- [Soressi 2002] Marie Soressi, Le Moustérien de tradition acheuléenne du Sud-Ouest de la France : Discussion sur la signification du faciÚs à partir de l'étude comparée de quatre sites : Pech-de-l'Azé I, Le Moustier, La Rochette et la Grotte XVI, thÚse de doctorat, Université de Bordeaux I, , 345 p. (lire en ligne [PDF] sur grenet.drimm.u-bordeaux1.fr).
- [Soressi et al. 2002] Marie Soressi, Dominique Armand, Francesco D'Errico et al., « Pech-de-l'AzĂ© I (Carsac, Dordogne) : nouveaux travaux sur le MoustĂ©rien de tradition acheulĂ©enne », Bulletin de la SociĂ©tĂ© prĂ©historique française, vol. 99, no 1,â , p. 5-11 (lire en ligne [sur persee]).
- [Soressi et al. 2007] (en) Marie Soressi, Heather L. Jones, William Jack Rink, Bruno Maureille et Anne-Marie Tillier, « The Pech-de-l'Aze I Neandertal child: ESR, uranium-series, and AMS C-14 dating of its MTA type B context », Journal of Human Evolution, vol. 52, no 4,â , p. 455-466 (lire en ligne [PDF] sur citeeerx.ist.psu.edu, consultĂ© en ).
- [Soressi et al. 2008] Marie Soressi, Jean-Pierre Texier, William Rendu, Anne-Marie Tillier et al., « Pech-de-l'AzĂ© I (Dordogne, France) : nouveau regard sur un gisement moustĂ©rien de tradition acheulĂ©enne connu depuis le XIXe siĂšcle », SociĂ©tĂ© prĂ©historique française « MĂ©moire XLVII »,â , p. 96-132 (lire en ligne [sur researchgate.net], consultĂ© en ).
- [Turq et al. 2011] Alain Turq, Harold L. Dibble (en), Paul Goldberg et al., « Les fouilles rĂ©centes du Pech de l'AzĂ© IV (Dordogne) », Gallia PrĂ©histoire, no 53,â , p. 1-58 (lire en ligne [sur persee]).
Liens externes
- Ressource relative Ă l'architecture :
Notes et références
Notes
- Ne pas confondre Maurice Bourgon avec Maurice Bourlon (1875-1914), également archéologue.
Références
- [Texier 2006] Jean-Pierre Texier, « Nouvelle lecture gĂ©ologique du site palĂ©olithique du Pech-de-l'AzĂ© II (Dordogne, France) », PalĂ©o, no 18,â , p. 217-236 (lire en ligne, consultĂ© le ).
- Texier 2006, p. 1.
- Texier 2006, p. 2.
- Texier 2006, p. 5.
- Texier 2006, p. 9.
- Texier 2006, p. 8.
- Texier 2006, p. résumé.
- Autres références
- « Gisement préhistorique du Pech de l'Azé », notice no PA00082436, base Mérimée, ministÚre français de la Culture.
- Soressi et al. 2008, p. 97.
- Bourgon & Bordes 1950, p. 381.
- Soressi et al. 2008, p. résumé.
- [Martinez et al. 2014] Maria Lorenzo Martinez, Jean-Guillaume Bordes et Jacques Jaubert, « L'industrie lithique du PalĂ©olithique moyen rĂ©cent de Roc de Combe (Payrignac, Lot, France), un nouvel exemple de MoustĂ©rien DiscoĂŻde Ă denticulĂ©s », PalĂ©o, no 25,â , p. 101-124 (lire en ligne, consultĂ© le ), p. 5.
- « Location de la grotte, carte interactive » sur Géoportail., carte « Géologie » activée. Vous pouvez bouger la carte (cliquer et maintenir puis bouger la souris), zoomer (molette de souris ou échelle de l'écran), moduler la transparence, désactiver ou supprimer les couches (= cartes) avec leurs échelles d'intensité dans l'onglet de "sélection de couches" en haut à droite, et en ajouter depuis l'onglet "Cartes" en haut à gauche. Les distances et surfaces se mesurent avec les outils dans l'onglet "Accéder aux outils cartographiques" (petite clé à molette) sous l'onglet "sélection de couches".
- Soressi et al. 2008, p. 110.
- Bordes 1971, p. 1.
- « La vallée de la VézÚre, capitale de l'archéologie préhistorique », sur pole-prehistoire.com (consulté le ).
- Soressi et al. 2008, p. 99.
- Bourgon & Bordes 1950.
- Bourgon & Bordes 1951.
- Bordes 1954.
- [McPherron 2007] Shannon P. McPherron, Tools versus cores: alternative approaches to stone tool analysis, Newcastle, Cambridge Scholars Publishing, , 279 p. (ISBN 978-1-84718-117-6 et 1-84718-117-1, lire en ligne), p. 77.
- Richter et al. 2017.
- [Gorldberg 1979] Paul Goldberg, « Micromorphology of Pech de l'AzĂ© Sediments », Journal of Archaeological Science, no 6,â , p. 17-47 (lire en ligne [sur researchgate.net]).
- Soressi et al. 2002.
- Turq et al. 2011.
- Soressi et al. 2008, p. 98.
- Soressi 2002, p. 10.
- [d'Errico et al. 1998] Francesco d'Errico (en), JoaĂ” ZilhaĂ” (es), MichĂšle Julien, Dominique Baffier et Jacques Pelegrin, « Neanderthal Acculturation in Western Europe : a critical review of the Evidence and its interpretation », Current Anthropology, vol. 39, no supplĂ©ment,â , p. 14 (lire en ligne [PDF], consultĂ© le ).
- Maureille & Soressi 2000.
- Soressi et al. 2007.
- Bordes 1971, p. 12.
- Bordes 1975, p. 142.
- [Bordes 1969] François Bordes, « Os percĂ© moustĂ©rien et os gravĂ© acheulĂ©en du Pech de l'AzĂ© II », Quaternaria, no 11,â , p. 1-6.
- [Soressi & DâErrico 2007] Marie Soressi et Francesco DâErrico, « Pigments, gravures, parures : les comportements symboliques controversĂ©s des NĂ©andertaliens », dans Les NĂ©andertaliens. Biologie et cultures, Paris, Ăditions du CTHS, coll. « Documents prĂ©historiques » (no 23), , sur researchgate.net (lire en ligne), p. 297-309, p. 297, 299. Photo et dessin de l'os « gravĂ© » p. 298.
- [Salomon et al. 2008] HĂ©lĂšne Salomon, Colette Vignaud, Yvan Coquinot, Sandrine PagĂšs-Camagna, Marie-Pierre PomiĂšs, Jean-Michel Geneste, Michel Menu, MichĂšle Julien et Francine David, « Les matiĂšres colorantes au dĂ©but du PalĂ©olithique supĂ©rieur : caractĂ©risation chimique et structurale, transformation et valeur symbolique », PN RC,â , p. 15-21 (lire en ligne, consultĂ© le ), p. 20.