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Fusobacterium nucleatum

Fusobacterium nucleatum est une espÚce de bactéries de la famille des Fusobacteriaceae et du genre Fusobacterium. Elle est anaérobie invasive, adhérente et inflammatoire. TrÚs présente dans la plaque dentaire, elle a été retrouvée dans le microbiote intestinal ainsi que dans le microbiote de tumeurs colorectales. Connaissant le lien entre certains agents infectieux et le risque de développer un cancer, des chercheurs nord-américains[1] ont montré la présence de Fusobacterium nucleatum dans des tissus adénomateux précancéreux mais aussi dans des résidus adénomateux de tumeurs cancéreuses, laissant suspecter son rÎle dans la tumorigenÚse des cancers colorectaux.

Fusobacterium

Le Fusobacterium est une bactĂ©rie vivant en anaĂ©robie. Ces bactĂ©ries appartiennent Ă  la flore normale des muqueuses humaines ou animales. Les rĂ©servoirs principaux de ces bactĂ©ries sont la bouche, le tube digestif, la peau et les voies gĂ©nitales fĂ©minines. Les bactĂ©ries anaĂ©robies sont des micro-organismes qui nĂ©cessitent pour leur croissance une faible pression en oxygĂšne et qui ne peuvent croĂźtre Ă  la surface d’un milieu solide dans une atmosphĂšre contenant 10 % de CO2.

Dans le cĂŽlon, la quantitĂ© de bactĂ©ries anaĂ©robies augmente, comme l’ensemble des bactĂ©ries, de façon significative. Il y a 1011 Ă  1012 germes par gramme de selles dans le cĂŽlon. L’infection par ces bactĂ©ries peut toucher n’importe quel point du corps dĂšs l’instant oĂč la barriĂšre muqueuse ou la peau sont lĂ©sĂ©es par un acte chirurgical, un traumatisme, une tumeur, une ischĂ©mie ou une nĂ©crose qui rĂ©duisent le potentiel local d’oxydorĂ©duction des tissus. Les sites qui sont colonisĂ©s par les bactĂ©ries anaĂ©robies contiennent de nombreuses espĂšces de bactĂ©ries, et la rupture d’une barriĂšre anatomique permet la pĂ©nĂ©tration de nombreux micro-organismes, responsables d’infections mixtes.

Fusobacterium nucleatum

Fusobacterium nucleatum est une bactĂ©rie anaĂ©robique invasive[2], adhĂ©rente[3] et inflammatoire[4]. Cette bactĂ©rie est particuliĂšrement prĂ©sente dans la plaque dentaire et serait associĂ©e aux parodontites qui peuvent causer la perte des dents ou des structures de soutien, ex. : les gencives[5]. Elle a Ă©galement Ă©tĂ© trouvĂ©e comme Ă©tant une des causes d’abcĂšs cĂ©rĂ©braux et de pĂ©ricardite[6]. C’est aussi une des espĂšces fusobactĂ©riennes tenue responsable du syndrome de Lemierre, une forme rare de thrombophlĂ©bite (inflammation d’une veine due Ă  un caillot sanguin). Plus rĂ©cemment les FusobactĂ©ries et particuliĂšrement Fusobacterium nucleatum ont Ă©tĂ© impliquĂ©es dans des cas d’appendicites aigĂŒes. De surcroĂźt, une analyse a Ă©tĂ© effectuĂ©e par des chercheurs nord-amĂ©ricains sur des Ă©chantillons de tissus colorectaux touchĂ©s par une tumeur et prĂ©sentant une abondance de Fusobacterium nucleatum. PubliĂ©e le , cette recherche[7] permet de fournir une hypothĂšse concernant la cause de cancer du cĂŽlon.

Cancer colorectal

Le cancer colorectal (CRC) est la 4e cause de mort par cancer dans le monde. Selon la World Health Organization 2011[8], il serait responsable de 610 007 morts par an dans le monde entier. Quelques agents infectieux ont Ă©tĂ© explicitement reliĂ©s au cancer, comme le papillomavirus humain dans le cancer du col de l’utĂ©rus, les virus de l'hĂ©patite B et C dans le cancer primitif du foie, l’Helicobacter pylori dans le cancer gastrique. À eux seuls, ils sont responsables, selon une estimation[9], de 15 % des cas de cancer. Ainsi, comme des bactĂ©ries peuvent ĂȘtre la cause de cancers, il se pourrait que ce soit Ă©galement le cas pour le cancer du cĂŽlon. Une Ă©tude IsraĂ©lienne a effet, explicitĂ© en , un processus qui expliquerait l'inhibition des cellules immunitaires[10]. L’origine du cancer colorectal reste indĂ©terminĂ©e mais l’inflammation est un facteur de risque bien reconnu[11]. C’est pourquoi, sur base du lien entre l'inflammation d’Helicobacter pylori et le cancer gastrique[12], des chercheurs se sont demandĂ© si l’inflammation provoquĂ©e par des micro-organismes n’était pas associĂ©e avec d’autres cancers gastro-intestinaux. Ils ont donc commencĂ© leur travail en effectuant une analyse mĂ©tagĂ©nomique du cancer colorectal.

La mĂ©tagĂ©nomique[13] est ce qui vient aprĂšs la gĂ©nomique (Ă©tude des sĂ©quences d’ADN et des propriĂ©tĂ©s globales du gĂ©nome). Son but est d’étudier le contenu gĂ©nĂ©tique trouvĂ© dans un environnement complexe comme l’intestin.

Observation

Afin de rĂ©aliser leur analyse, ils ont isolĂ©, par mĂ©canisme de congĂ©lation, de l’ARN provenant de onze prĂ©lĂšvements de cancer colorectal associĂ©s Ă  onze prĂ©lĂšvements de tissu non cancĂ©reux. L’analyse gĂ©nomique a rĂ©vĂ©lĂ© que des sĂ©quences de Fusobacterium nucleatum Ă©taient prĂ©sentes dans des Ă©chantillons prĂ©sentant une tumeur, Ă  un niveau au moins deux fois supĂ©rieur Ă  ceux rencontrĂ©s dans les Ă©chantillons normaux de neuf des onze sujets. La moyenne de sur-expression Ă©tait de 79 fois.

Quant Ă  l’observation effectuĂ©e sur les Ă©chantillons de tissus colorectaux touchĂ©s par une tumeur et prĂ©sentant une abondance de Fusobacterium nucleatum, le rĂ©sultat Ă©tait tout simplement inattendu Ă©tant donnĂ© que cette bactĂ©rie est un agent pathogĂšne oral et non un constituent de la flore microbienne des intestins[14]. Pourtant, il est prouvĂ© que les infections fusobactĂ©riennes sont rĂ©pandues dans le cancer colorectal. Mais, il faut encore dĂ©terminer s'il y a une quelconque implication des fusobactĂ©ries dans la tumorigenĂšse ou pour le dire plus simplement, dans la constitution d’une tumeur[15].

RĂ©sultats

La prĂ©sence de cette bactĂ©rie peut simplement reprĂ©senter une infection opportuniste au niveau d’un site immunocompromis mais la possibilitĂ© d’un rĂŽle dans l’étiologie d’une tumeur, peut-ĂȘtre par ses mĂ©canismes proinflammatoires, mĂ©rite d’ĂȘtre approfondie. L’analyse des cancers colorectaux Ă  partir d’échantillons en association avec des maladies inflammatoires chroniques de l’intestin devrait ĂȘtre intĂ©ressante. De plus, comme le cancer colorectal se dĂ©veloppe typiquement Ă  partir de polypes adĂ©nomateux bĂ©nins, il pourrait ĂȘtre intĂ©ressant de dĂ©pister les lĂ©sions Ă  un stade prĂ©coce pour dĂ©tecter la prĂ©sence de cette bactĂ©rie. Dans cette Ă©tude[1], les plus grandes concentrations de Fusobacterium nucleatum ont Ă©tĂ© retrouvĂ©es dans les prĂ©lĂšvements de tissus cancĂ©reux dans lesquels il persistait du tissu adĂ©nomateux. Cela supporte le fait qu’une Ă©tude comprĂ©hensive des stades prĂ©coces du cancer pourrait dĂ©terminer si l’infection par Fusobacterium nucleatum est en relation avec l’origine de la croissance tumorale. Si oui, elle pourrait ĂȘtre la cible d’une vaccination spĂ©cifique ou d’une antibiothĂ©rapie. Finalement, si le lien Ă©tiologique fait dĂ©faut ou n’est pas retrouvĂ©, l’association hautement significative de la Fusobacterium nucleatum avec le cancer colorectal peut toujours ĂȘtre d’une utilitĂ© clinique. Par exemple, il pourrait ĂȘtre possible d’exploiter cette association en vue d’un dĂ©pistage, bien que la flore bactĂ©rienne des sujets cancĂ©reux et sains n’a pas encore Ă©tĂ© analysĂ©e et comparĂ©e. Ce lien spĂ©culatif souligne cependant le regain d’intĂ©rĂȘt dans l’utilitĂ© d’une thĂ©rapie bactĂ©rienne du cancer[16].

Systématique

L'espÚce est décrite en premier par le médecin et bactériologiste allemand Maximilian Knorr (d) (1895-1985), qui, en 1922, la classe dans le genre Fusobacterium sous le nom binominal Fusobacterium nucleatum[17].

Liste des taxons de rang inférieur

Liste des sous-espĂšces selon la List of Prokaryotic names with Standing in Nomenclature[18] :

  • Fusobacterium nucleatum subsp. animalis Gharbia and Shah 1992
  • Fusobacterium nucleatum subsp. fusiforme (ex Veillon and Zuber 1898) Gharbia and Shah 1992
  • Fusobacterium nucleatum subsp. nucleatum (Knorr 1922) Dzink et al. 1990
  • Fusobacterium nucleatum subsp. vincentii (ex Knorr 1922) Dzink et al. 1990
  • Fusobacterium nucleatum subsp. polymorphum (ex Knorr 1922) Dzink et al. 1990

Synonymes

Selon l'IRMNG (8 juillet 2021)[19], Fusobacterium nucleatum a pour synonymes :

  • Bacillus fusiformis Veillon & Zuber, 1898
  • Corynebacterium fusiforme (Veillon & Zuber, 1898) Lehmann & Neumann, 1907
  • Fusiformis fusiformis (Veillon & Zuber, 1898) Topley & Wilson, 1936
  • Fusiformis nucleatus (Knorr, 1922) Bergey et al., 1930
  • Fusobacterium plauti-vincentii Knorr, 1922
  • Fusobacterium polymorphum Knorr, 1922
  • Sphaerophorus fusiformis (Veillon & Zuber, 1898) Sebald, 1962

Notes et références

  1. {Mauro Castellarin, ReneÂŽ L. Warren, J. Douglas Freeman, Lisa Dreolini, Martin Krzywinski, Jaclyn Strauss, Rebecca Barnes, Peter Watson, Emma Allen-Vercoe, Richard A. Moore, and Robert A. Holt, }« Fusobacterium nucleatum infection is prevalent in human colorectal carcinoma », sur ‘‘le journal de recherche centrĂ© sur les organismes biologiques et la mĂ©decine’’ {29 juillet 2011, date de publication} {(consultĂ© le 12 janvier 2014)}.
  2. (en) Han YW, Shi W, Huang GT, Kinder Haake S, Park NH, Kuramitsu H, Genco RJ. « Interactions between periodontal bacteria and human oral epithelial cells: Fusobacterium nucleatum adheres to and invades epithelial cells Â» Infect Immun. 2000;68:3140–3146. PMID 10816455
  3. (en) Weiss EL, Shaniztki B, Dotan M, GaneshkumarN, Kolenbrander PE, Metzger Z, « Attachment of Fusobacterium nucleatum PK1594 to mammalian cells and its coaggregation with periodontopathogenic bacteria are mediated by the same galactose-binding adhesin Â» Oral Microbiol Immunol. 2000;15:371–377. PMID 11154434
  4. (en) Krisanaprakornkit S, Kimball JR, Weinberg A, Darveau RP, Bainbridge BW, Dale BA, « Inducible expression of human b-defensin 2 by Fusobacterium nucleatum in oral epithelial cells: Multiple signaling pathways and role of commensal bacteria in innate immunity and the epithelial barrier Â» Infect Immun. 2000;68:2907–2915. PMID 10768988
  5. {Straumann, } «Qu’est-ce que la parodontite?», sur ‘’une solution de professionnels dentaires Ă  l’égard des patients’’ {(consultĂ© le 18 janvier 2014)}.
  6. {Doctissimo.be, }«pĂ©ricardites aiguĂ«s», sur l’encyclopĂ©die mĂ©dicale {(consultĂ© le 18 janvier 2014)}.
  7. (en) Mauro Castellarin, René L. Warren, J. Douglas Freeman, Lisa Dreolini, Martin Krzywinski, Jaclyn Strauss, Rebecca Barnes, Peter Watson, Emma Allen-Vercoe, Richard A. Moore, and Robert A. Holt, }« Fusobacterium nucleatum infection is prevalent in human colorectal carcinoma », Le journal de recherche centré sur les organismes biologiques et la médecine, 29 juillet 2011, consulté le 12 janvier 2014.
  8. World Health Organization. 2011. Fact sheet no. 297. World Health Organization, Geneva, Switzerland.«Cancer».
  9. Parkin D. 2006. The global health burden of infection-associated cancers in the year 2002. Int J Cancer 118: 3030–3044.
  10. "Bacteria identified which protects intestinal tumours from immune cells"
  11. Wu S, Rhee KJ, Albesiano E, Rabizadeh S, Wu X, Yen HR, Huso DL, Brancati FL, Wick E, McAllister F, et al. 2009. A human colonic commensal promotes colon tumourigenesis via activation of T helper type 17 T cell responses. Nat Med 15: 1016–1022.
  12. Marshall B, Warren J. 1984. Unidentified curved bacilli in the stomach of patients with gastritis and peptic-ulceration. Lancet 1: 1311–1315.
  13. {Futura-sciences, }« Métagénome », {(consulté le 19 janvier 2014)}.
  14. Qin J, Li R, Raes J, ArumugamM, Burgdorf KS, Manichanh C, Nielsen T, Pons N, Levenez F, Yamada T, et al. 2010. A human gut microbial gene catalogue established by metagenomic sequencing. Nature 464: 59–65.
  15. {Reverso, }« tumorigenĂšse », sur ‘‘dictionnaire français de dĂ©finitions et de synonymes’’ {2007, date des donnĂ©es} {(consultĂ© le 04 janvier 2014)}.
  16. (en) Forbes N, « Engineering the perfect (bacterial) cancer therapy Â» Nat Rev Cancer 2010;10:784–793.
  17. (de) M. Knorr, « Über die fusospirillare Symbiose, die Gattung Fusobacterium (K.B. Lehmann) und Spirillum sputigenum. Zugleich ein Beitrag zur Bakteriologie der Mundhöhle. II. Mitteilung. Die Gattung Fusobacterium », Zentralblatt fĂŒr Bakteriologie, Parasitenkunde, Infektionskrankheiten und Hygiene, Abteilung I, vol. 89,‎ , p. 4-22.
  18. (en) « Species: Fusobacterium nucleatum », sur lpsn.dsmz.de (consulté le )
  19. Rees, T. (compiler). The Interim Register of Marine and Nonmarine Genera. Available from https://www.irmng.org at VLIZ, consulté le 8 juillet 2021

Liens externes

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