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Franklin D. Roosevelt et les droits civiques

Cet article traite de la gestion par Franklin D. Roosevelt de la question des droits civiques durant sa présidence, qui s'étale de 1933 à 1945.

Décret présidentiel 8802

Décret Présidentiel no 8802 : Équité des pratiques d'embauches dans l'industrie de la défense.

En juin 1941, Roosevelt Ă©mis le dĂ©cret prĂ©sidentiel 8802, instituant le ComitĂ© des pratiques d'emploi Ă©quitables (FEPC). Ce fut la dĂ©cision fĂ©dĂ©rale la plus importante en faveur des droits des Afro-AmĂ©ricains entre la Reconstruction et le Civil Rights Act de 1964. Ce dĂ©cret prĂ©sidentiel statuait que le gouvernement fĂ©dĂ©ral n'embauchait pas une personne sur la base de la race, la couleur, la croyance, ou l'origine nationale. Le FEPC appliqua cette ordonnance contre la discrimination Ă  l'embauche au sein du gouvernement fĂ©dĂ©ral et dans les entreprises sous contrats fĂ©dĂ©raux. Ceci rĂ©sulta en l'accès Ă  de meilleurs emplois et de meilleurs salaires pour des millions de noirs et de femmes.

La guerre amena la question raciale sur le devant de la scène. L'ArmĂ©e et la Marine avaient mis en place une politique de sĂ©grĂ©gation depuis la Guerre Civile. Mais en 1940, le vote afro-amĂ©ricain s'orienta largement vers les dĂ©mocrates au dĂ©pit des rĂ©publicains. De plus des leaders afro-amĂ©ricains, comme Walter Francis White de la NAACP et T. Arnold Hill de la Ligue Urbaine Ă©taient reconnu comme faisant partie de la coalition soutenant Roosevelt. En juin 1941, Ă  la demande du syndicaliste afro-amĂ©ricain A. Philip Randolph,  Roosevelt signa le dĂ©cret instituant le ComitĂ© des Pratiques d'Emploi Équitables et l'interdiction de politique discriminatoires par une agence gouvernementale, y compris pour les forces armĂ©es. Dans la pratique, les diffĂ©rents services, en particulier la Navy et les US Marines, trouvèrent des façons de contourner cet ordre : le Corps des Marines est restĂ© uniquement blanc jusqu'en 1942[1]. En septembre 1942, Roosevelt dĂ©cida de son propre chef de rencontrer une dĂ©lĂ©gation de leaders afro-amĂ©ricains, exigeants la pleine intĂ©gration dans les forces armĂ©es, y compris le droit de servir dans des postes de combat et dans la Navy, le Marine Corps et de l'US Army Air Forces. Roosevelt approuva, mais ne fit ensuite rien pour mettre en Ĺ“uvre sa promesse. Il fallut attendre son successeur, Harry S. Truman, pour abolir la sĂ©grĂ©gation dans les forces armĂ©es.

Décret présidentiel 9066

L'opinion publique était furieuse contre les Nippo-Américains pour avoir déclenché la guerre.

Suivant le dĂ©clenchement de la Guerre du Pacifique, le Ministère de la Guerre exigea que tous les ressortissants d'un pays ennemi et les citoyens japonais-amĂ©ricains soient retirĂ©s des zones de guerre sur le front ouest. La question se posa donc de savoir comment emprisonner environ 120 000 personnes de citoyennetĂ© japonaise et amĂ©ricaine, vivant en Californie. Le , Roosevelt rencontra le SecrĂ©taire de la Guerre Stimson, qui le persuada d'approuver une Ă©vacuation immĂ©diate forcĂ©e. Roosevelt consulta des documents secrets, disponibles Ă  lui seul[2] : les Japonais des Philippines avaient collaborĂ© avec les troupes d'invasion japonaises ; les Japonais de Californie avaient Ă©tĂ© de fervents partisans du Japon dans la guerre contre la Chine. Des preuves d'espionnage furent compilĂ©es par des cryptanalystes concernant des messages chiffrĂ©s envoyĂ©s au Japon par des agents en AmĂ©rique du Nord et Ă  HawaĂŻ avant et après Pearl Harbor. Ces câbles MAGIC Ă©taient secrets sauf pour ceux au plus au niveau d'habilitation, comme Roosevelt, de peur que les Japonais dĂ©couvrent le dĂ©chiffrement et modifient leur code. C'est le que Roosevelt signa le dĂ©cret 9066 demandant au SecrĂ©taire de la Guerre et commandants militaires de dĂ©signer des zones militaires dans lesquelles un individu ou l'ensemble des personnes peuvent ĂŞtre exclues. Roosevelt libĂ©ra les prisonniers Japonais en 1944. Le , lors de l'activation de la 442e Regimental Combat Team — une unitĂ© composĂ©e en grande majoritĂ© de citoyens amĂ©ricains d'origine japonaise vivant Ă  Hawaii, il dit : « Aucun loyal citoyen des États-Unis ne devrait se voir refuser le droit dĂ©mocratique d'exercer les devoirs de sa citoyennetĂ©, quelles que soient ses origines. Le principe sur lequel ce pays a Ă©tĂ© fondĂ© et par lequel il a toujours Ă©tĂ© rĂ©gi est que l'amĂ©ricanisme est une question de cĹ“ur et d'esprit ; l'amĂ©ricanisme n'est pas, et n'a jamais Ă©tĂ© une question de race ou d'origine. »

Le ministre de l'intérieur Ickes fit pression sur Roosevelt tout au long de 1944 pour la libération des prisonniers nippo-américains, mais Roosevelt ne pris une décision qu'après l'élection présidentielle de novembre. Une lutte pour les droits civiques nippo-américains signifiait un combat avec des démocrates influents, l'Armée, et William Randolph Hearst et aurait mis en danger Roosevelt pour se faire réélire en Californie en 1944. Les détracteurs de Roosevelt pensent que ses actions ont été motivées en partie par la ségrégation raciale. En 1925, Roosevelt écrivait à propos de l'immigration Japonaise : « Les californiens ont justement, et avec des arguments raisonnables, protesté que les immigrants Japonais ne sont pas capables d'assimilation au sein de la population américaine... Quiconque a voyagé en Extrême-Orient sait que le mélange du sang asiatique avec du sang européen et américain produit, dans neuf cas sur dix, un résultat des plus malheureux[3]. »

En 1944, la Cour SuprĂŞme soutint la lĂ©galitĂ© du dĂ©cret prĂ©sidentiel lors du cas Korematsu v. États-unis. Le dĂ©cret resta en vigueur jusqu'en dĂ©cembre de cette mĂŞme annĂ©e.

Les relations avec la population juive

Certains de ses associés politiques les plus proches, dont Felix Frankfurter, Bernard Baruch et Samuel I. Rosenman, étaient juifs. Roosevelt nomma Frankfurter à la Cour Suprême, et Henry Morgenthau Jr fut le premier Juif à être nommé Ministre des finances. L'historienne Doris Kearns Goodwin démontre que les nominations de FDR à des postes de hauts fonctionnaires favorisaient des juifs (15 % des nominations à des postes clefs, à une période où 3 % de la population des États-Unis était de confession juive) ce qui faisait de Roosevelt le sujet de critiques fréquentes. The White Knight publia dans son édition d'août 1936 un article renommant en « Jew Deal » le New Deal. Des essais tel que « What Every Congressman Should Know » (« Ce que tous les membres du congrès devraient savoir ») en 1940 (montrant un dessin du Capitole avec une étoile de David au sommet de son dôme) proclamèrent que les Juifs contrôlaient le gouvernement. Financier et confident de FDR, Bernard Baruch était surnommé le « Président officieux » dans la littérature antisémite de l'époque. La revue Liberation par exemple, accusa Roosevelt de ne remplir son gouvernement que de juifs.

Au cours de son premier mandat, Roosevelt condamna la persĂ©cution des Juifs allemands par Hitler. Alors que l'exode des Juifs d'Allemagne augmenta après 1937, Roosevelt fut contactĂ© par des organisations juives amĂ©ricaines et des membres du congrès afin de permettre Ă  ces rĂ©fugiĂ©s de s'installer aux États-Unis. Au dĂ©but, il suggĂ©ra que ces rĂ©fugiĂ©s soient « rĂ©installĂ©s » ailleurs, et suggĂ©ra le Venezuela, l'Éthiopie ou l'Afrique de l'Ouest, partout sauf aux États-Unis. Morgenthau, Ickes et Eleanor le pressèrent d'adopter une politique plus bienveillante, mais il avait peur de provoquer des hommes comme Charles Lindbergh qui exploitait l'antisĂ©mitisme comme un moyen d'attaquer les politiques mises en place par Roosevelt. Cela conduit Ă  une augmentation des tensions.

En pratique, très peu de rĂ©fugiĂ©s juifs sont venus aux États-Unis : seulement 22 000 rĂ©fugiĂ©s allemands furent admis en 1940, et tous n'Ă©taient pas juifs. L'agent du dĂ©partement d'État chargĂ© de la question des rĂ©fugiĂ©s, Breckinridge Long, se tiendra Ă  la lettre aux lois très restrictives concernant l'immigration. Ă€ titre d'exemple, en 1939, le dĂ©partement d'État sous Roosevelt refusa un bateau de Juifs fuyant les Nazis pour les États-Unis. Lorsque le navire de passagers Saint-Louis approcha de la cĂ´te de Floride avec près d'un millier de Juifs allemands fuyant la persĂ©cution sous le rĂ©gime hitlĂ©rien Ă  son bord, Roosevelt ne rĂ©pondit pas aux tĂ©lĂ©grammes de passagers demandant l'asile, et le dĂ©partement d'État refusa l'entrĂ©e dans ses eaux au navire[4]. ForcĂ© de retourner vers Anvers[5], de nombreux passagers moururent finalement dans des camps de concentration[6].

Notes et références

  1. (en) History - Montford Point Marine Association
  2. (en) Keith Robar, Intelligence, Internment & Relocation: Roosevelt's Executive Order 9066: How Top Secret MAGIC Intelligence Led to Evacuation, 2000.
  3. (en) Franklin D. Roosevelt's editorials for the Macon Telegraph - 30 avril 1925, GeorgiaInfo.
  4. (en) Voyage of the St. Louis - United States Holocaust Memorial Museum
  5. (en) Return to Europe of the St. Louis - United States Holocaust Memorial Museum
  6. (en) Wartime Fate of the Passengers of the St. Louis - United States Holocaust Memorial Museum
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