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François Jousselin

François Jousselin né à Laval le et mort à Issy-les-Moulineaux le est un peintre français.

François Jousselin
François Jousselin devant une de ses toiles en 2007.
Naissance
Décès
Nationalité
Activité
Formation
Mouvement
Art abstrait (années 1950), Nouvelle figuration (à partir de 1961)

Il vécut à Vanves de 1955 à 2009.

Biographie

À la mort de son père des suites d'une maladie « contractée sur le front en service commandé », François Jousselin est adopté par la Nation en 1932. Sa famille se déplace à Metz en 1935, puis réside à Toulouse à partir de 1937. Une bourse d’État acquise sur concours en 1937 ans lui permet d’entreprendre ses humanités au lycée Pierre-de-Fermat.

En 1943, pendant la Seconde Guerre mondiale, il lit la biographie de Paolo Uccello Ă©crite par Philippe Soupault oĂą il apprend que la perspective chère Ă  ce peintre du quattrocento recèle des intentions cachĂ©es, sans doute indĂ©chiffrables, mais assez claires cependant pour lui valoir un nom d’oiseau[1]. Cette dĂ©couverte dĂ©cide alors de sa vocation dans la mesure oĂą il lui semble possible de cacher, au sein de ses Ĺ“uvres picturales, sa haine du mensonge d’État, crĂ©ateur de formules creuses telles que « Mort pour la France Â» d’oĂą il rĂ©sulte que la Nation, nombreuse et illusoirement protectrice, n’est selon lui qu’un leurre visant Ă  donner bonne conscience Ă  chaque citoyen. Cette obsession poursuivra l’artiste jusqu'Ă  un âge avancĂ©, au point qu’il rĂ©dige un mĂ©moire en 1975 dans lequel il avance la preuve de l’existence d’une perspective aĂ©rienne commune Ă  certains peintres du passĂ© et dialectiquement opposĂ©e Ă  celle que nous a transmis la tradition. Ă€ l’évidence, les historiens auraient nĂ©gligĂ© d’examiner les traces clandestines des hĂ©rĂ©sies au point de se laisser abuser par les effets d’une Inquisition triomphante.

L’œuvre entière de Jousselin est conditionnée par une sémiologie empruntée à la linguistique de Roland Barthes, comme lui pupille de la Nation, avec qui il entretient une importante relation épistolaire, dont il partage le besoin de décrypter un message second derrière les apparences et dont il brosse plusieurs portraits[2].

Il achève ses études en partageant son temps entre l’École supérieure des beaux-arts de Toulouse et l’université où il obtient deux certificats de licence : archéologie du Moyen Âge - histoire de l’art moderne, et antiquités gréco-latines - religions grecques.

En 1950, il rejoint l’École de Paris en compagnie d'André Marfaing et de Pierre Igon[3]. Après un séjour aux Pays-Bas dont il visite les musées grâce à une bourse du Gouvernement néerlandais[3], il expose ses premières peintures abstraites au Salon des réalités nouvelles de 1954 : des lignes de force rouges, noires et blanches qui explosent au milieu de la toile comme autant de lances dans une bataille d’Uccello. Les manifestations, émeutes et affrontements liés aux événements d'Algérie que connaît la ville de Paris en 1958 lui donnent l’idée de transformer ces lances en bâtons qui pleuvent sur les têtes selon une distance psychique actualisant ce que fut une centauromachie dans la Grèce antique.

Du mariage, le , de François Jousselin avec Élisabeth Varty (1926-2006), Britannique née en France, naissent deux enfants : David Jousselin, né en 1958, qui sera photographe et Joseph Jousselin (1962-2021) qui sera sous la signature de Joseph Varty peintre et sculpteur, illustrant notamment des textes de son maître Jacques Grinberg[4].

Le glissement insensible de l’informel à l'information dans la peinture de François Jousselin se généralise dans les rangs de l’abstraction au point qu’en 1961, Jean-Louis Ferrier donne à ce mouvement l'appellation de Nouvelle figuration. En 1962, peu soucieux de la censure qui sévit dans la presse ou le cinéma, Jousselin expose à l’intention du public parisien des tableaux où s’expriment les horreurs de la guerre, la violence urbaine, leurs victimes, sujets d’attentats par accident de voiture ou ensanglantées dans des salles de torture. Il peint des natures mortes dont la charge explosive se manifeste par le moucheté d'une bouteille de gaz connectée à un réveille-matin ou un billet de banque qui s’enflamme près d’une boîte d’allumettes.

À partir de 1965, sa facture faite de hachures hâtives et nerveuses s’assagit dans la mesure où les coups du sort touchant sa vie privée lui font entendre raison. Il cache le caractère séditieux de ses sujets derrière une conception onirique de la réalité. Des objets d’usage courant tels que téléphones, machines à écrire, annuaires occupent l’espace d’un bureau sous la surveillance discrète d’ouverture pratiquée dans le mur. Il affectionne l’atmosphère confinée des caves, des sous-sols, des couloirs de métro aux destinations incertaines. En 1975, l’artiste quitte les grandes profondeurs de la psychanalyse quand il découvre, au grand air, une réalité cachée : dans des chantiers inondés de soleil, des Nord-Africains, sobres et pacifiques, s’emploient à la reconstruction de la capitale.

Dans les années 1980, sa vue faiblit. Il décide que la réalité n’existe pas : il n’y a que des points de vue. Jousselin peint alors ce qu’il voit de sa fenêtre « pour ne plus avoir à mentir », dit-il : un piéton qui traverse la rue mais dans les clous, une assiette de cerises sur une table mais posée sur un journal aux titres inquiétants[5].

Jousselin laisse un œuvre secret et atypique, pour une part conservé au musée d'Art moderne de Paris (Les Distances psychiques), au Musée cantonal des beaux-arts de Lausanne (La Guerre), au Beaux-Arts Mons (dix tableaux), au musée d'Art à la mer d’Ostende (Le Déluge), se constituant de témoignages des plus singuliers sur la vie d’artiste face à la création.

Gérard Xuriguera a défini cette œuvre, la rangeant en cela avec celles de Jean Couy, Claude Garache, Louttre B., Xavier Valls ou encore Jacques Vimard, comme une « approche de l'observé » basée, dit-il pour rappeler qu'elle fut à contre-courant de l'abstraction dominante, sur la résistance d'un « métier combattu ces dernières décades, que d'aucuns taxeraient de passéiste », la singularité de François Jousselin consistant alors à « recomposer une réalité ordinaire avec une verve plus acérée »[6].

Contributions bibliophiliques

  • Joseph Aribaut (prĂ©face de Michel Roquebert), Maurice Magre, un mĂ©ridional universel, illustrations de François Jousselin, Toulouse, Midia, 1987.

Expositions

Expositions personnelles

  • Galerie Jacques Massol, 12, rue La BoĂ©tie, Paris, 1962 (Les manifestations), 1963, 1966, 1968, mars-avril 1970[7], 1972, 1975, 1977, 1981.
  • Galerie Simone Boudet, Toulouse, 1968.
  • Galerie Norland, Ostersund, 1968.
  • Galerie Numaga, Auvernier, 1968.
  • Galerie Nord, Lille, 1969.
  • Galerie Jean Peyrolle, Paris, 1988, 1990, 1992, avril-juillet 1993 (Jousselin - Quarante ans de peinture).
  • François Jousselin - RĂ©trospective, théâtre de Vanves, septembre-novembre 2011[8].
  • Galerie des Patriarches, Paris, octobre-novembre 2016[9], 2017.
  • François Jouselin - RĂ©trospective, espace Jacques-PrĂ©vert, Mers-les-Bains, juin-aoĂ»t 2020[2].

Expositions collectives

RĂ©ception critique

  • « Ces couloirs, ces chambres closes baignent dans une atmosphère dense, lourde, angoissante. Univers ocre, fermĂ©, calfeutrĂ©, plus onirique que surrĂ©aliste. Derrière les silhouettes, des lignes, des perspectives fuient vers le nĂ©ant, vers l'infini, et l'on songe Ă  De Chirico. Mais c'est surtout l'indiffĂ©rence que les personnages semblent se tĂ©moigner qui est troublante. » - C.B., Univers des Arts, 1968.
  • « L'Ĺ“uvre de François Jousselin offre Ă  voir des corps douloureusement Ă©mergĂ©s du chaos, livrĂ©s Ă  d'Ă©tranges ballets somnanbulesques qui Ă©voquent les dĂ©sastres et la guerre, la famine et la peur. Elle tĂ©moigne avec une efficacitĂ© rĂ©elle et un lyrisme prenant du "mal Ă  vivre" contemporain. » - Jean-Jacques LĂ©vĂŞque[11]
  • « Jousselin se dĂ©fend, bien entendu, de relever du surrĂ©alisme. Il s'affirme seulement peintre onirique. Un Ă©rotisme certain, le peintre ne pouvait le nĂ©gliger. MaĂ®tre de sa matière comme de sa puissance de rĂŞveur Ă©veillĂ©, Jousselin pourrait procĂ©der d'un Georges de La Tour pour ses chandelles Ă  la lumière dardĂ©e, d'un Roger de La Fresnaye avec ces mĂŞmes touches hachurĂ©es et d'un Georges Braque dans ses seules harmonies en noir, beige et brun. Jacques Massol a le don de dĂ©couvrir, avec le courage pour les suivre, des peintres particulièrement singuliers. » - FrĂ©dĂ©ric MĂ©gret[7]
  • « Après une première pĂ©riode abstraite, qui correspond Ă  ses premières participations au Salon des rĂ©alitĂ©s nouvelles, avec des grands signes totĂ©miques, noir, gris blancs, dans l'esprit de Pierre Soulages, il revint rĂ©solument Ă  un langage figuratif, dont l'expression graphique s'accommode aussi bien du dessin et du lavis que de la gouache et de l'huile... Il serait peut-ĂŞtre plus intĂ©ressant d'observer, au long de son Ĺ“uvre, l'Ă©volution du choix des thèmes, parmi lesquels le corps fĂ©minin, souvent dĂ©nudĂ© dans ses attributs vestimentaires Ă©rotiques, la prĂ©sence fĂ©minine dans le folklore urbain, l'homme seul face Ă  lui-mĂŞme ou confrontĂ© dans le miroir, rĂ©apparaissent rĂ©gulièrement sous des formes diverses, avec des implications diffĂ©rentes dans leurs rapports avec l'angoisse existentielle. » - Jacques Busse[3]

Collections publiques

Belgique
France
Macédoine du Nord
Monténégro
  • Budva, musĂ©e de Budva.
Suisse

Notes et références

  1. Uccello : « oiseau » en italien.
  2. Anne-Sophie Marquetty, « Mers-les-Bains : une rĂ©trospective des Ĺ“uvres de François Jousselin Â», L'Informateur, n°3936, 26 juin 2020, page 13.
  3. Jacques Busse, « François Jousselin », in: Dictionnaire Bénézit, vol.7, Gründ, 1999, p. 619.
  4. La Coopérative collection Cérès Franco, Joseph Varty.
  5. David et Joseph Jousselin, « François Jousselin - Biographie Â», in: François Jousselin, catalogue d'exposition, Mers-les-Bains, espace Jacques-PrĂ©vert, 2020.
  6. Gérard Xuriguera, Regard sur la peinture contemporaine - La création picturale de 1945 à nos jours, Arted, 1983, pp. 154-155.
  7. Frédéric Mégret, « Sur les cimaises : Jousselin », Le Figaro littéraire, n°1244, 23 mars 1970, page 29.
  8. David Jousselin, Rétrospective François Jousselin, théâtre de Vanves, film. Source : YouTube ; durée : 7'05".
  9. Robert LĂ©vy, « François Jousselin Ă  la galerie des Patriarches Â», Quartier Latin - Paris, 11 octobre 2016
  10. Domitille d'Orgeval, Abstraction, création, art concret, art non figuratif, réalités nouvelles de 1946 à 1965, catalogue de l'exposition, 2008
  11. Jean-Jacques Lévêque, François Jousselin, éditions Galerie Jacques Massol, 1968.
  12. Anne-Sophie Marquetty, « Mers-les-Bains : un tableau de François Jousselin offert Ă  la ville Â», L'Informateur, no 3941, , p. 15.
  13. « Mers-les-Bains : une Ĺ“uvre de François Jousselin offerte Ă  la commune Â», Le Courrier Picard, , p. 14.
  14. Anne-Sophie Marquetty, « Mers-les-Bains - Peinture : une rĂ©ception en l'honneur de François Jousselin Â», L'Informateur, no 3947, , p. 18.
  15. David Jousselin, La collection - La "Dame assise", 2020.
  16. Musée d'art moderne de la ville de Paris, François Jousselin dans les collections.

Annexes

Bibliographie

  • Jacques Massol et Jean-Robert Arnaud, De la rive droite Ă  la rive gauche, Paris, co-Ă©dition galerie Jacques Massol et galerie Arnaud, 1962.
  • Jean-Jacques LĂ©vĂŞque, François Jousselin, [catalogue monographique d'exposition], Paris, Galerie Jacques Massol, 1968.
  • Philippe d'Arschot, Jousselin, Semser, Vandercam, Weiss, Éditions du musĂ©e des beaux-arts d'Anvers, 1969.
  • GĂ©rard Xuriguera, Regard sur la peinture contemporaine, Arted, 1983.
  • Yves Roullière, Un portrait de Jousselin, Paris, Éditions de la galerie Jean Peyrole, 1993.
  • Emmanuel BĂ©nĂ©zit, Dictionnaire des peintres, sculpteurs, dessinateurs et graveurs, GrĂĽnd, 1999.
  • Jean-Pierre Delarge, Dictionnaire des arts plastiques modernes et contemporains, 2014.
  • Robert LĂ©vy (texte) et Chantal Marfaing (photographies), Photos et Ĺ“uvres de…, Éditions de la galerie Convergences, 2017 ([PDF] en ligne).

Liens externes

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