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Famine au Tibet (1960-1962)

Le Grand Bond en avant de Mao Zedong a provoquĂ© une grande famine en Chine entre 1958 et 1962 et aurait fait 15 millions de morts.

Famine au Tibet (1960-1962)
Pays Drapeau de la RĂ©publique populaire de Chine Chine
Lieu Tibet
PĂ©riode 1960-1962
Victimes 343 000 TibĂ©tains

Selon des tĂ©moignages de TibĂ©tains, dont certains sont maintenant en exil, et divers auteurs occidentaux, le Tibet, sous son acception d'aire gĂ©ographique et culturelle tibĂ©taine [1], a connu une famine entre 1960 et 1962. Selon le gouvernement tibĂ©tain en exil, la mortalitĂ© due Ă  la famine a touchĂ© l'ensemble des rĂ©gions tibĂ©taines (Ü-Tsang, Kham et Amdo).

En 1962, dans un rapport connu sous le nom de PĂ©tition en 70 000 caractĂšres et dĂ©nommĂ© initialement « Rapport sur les souffrances du Tibet et des rĂ©gions tibĂ©taines et propositions pour le travail futur du ComitĂ© central sous la direction du prĂ©sident ministre Zhou Enlai », le 10e panchen-lama, de retour d'une mission d'enquĂȘte dans le Qinghai [2] dĂ©nonce la famine qui y sĂ©vit Ă  la suite du Grand bond en avant [3].

Des témoignages d'anciens prisonniers tibétains attestent d'une mortalité liée à la pénurie de nourriture et à la famine dans les prisons de la région de Lhassa au début des années 1960.

Selon Ngabo Ngawang Jigme, un des signataires de l'Accord en 17 points sur la libĂ©ration pacifique du Tibet et le plus ancien responsable tibĂ©tain de la rĂ©gion autonome du Tibet, s'il y a eu des morts de la famine dans la province du Qinghai, en revanche aucune personne n'est morte de faim dans la rĂ©gion autonome proprement dite. Mais l’historien Tsering Shakya et le propre fils de Ngagpo Ngawang JigmĂ© affirment que c'est un mensonge.

Des travaux universitaires (Yan Hao, 2000, Barry Sautman, 2005) soulignent l'improbabilitĂ© d'une telle famine dans l'Ü-Tsang, c'est-Ă -dire les parties centrale, centre-ouest et nord-ouest de la rĂ©gion autonome du Tibet crĂ©Ă©e en 1965. Si le chiffre de 413 000 morts des Ă©migrĂ©s Ă©tait exact, le taux de dĂ©cĂšs chez les TibĂ©tains aurait Ă©tĂ© quatre fois plus Ă©levĂ© que le taux national. Or plus de la moitiĂ© de la population tibĂ©taine est constituĂ©e de nomades auto-suffisants jusqu'Ă  ce jour, et leurs moyens de subsistance dĂ©pendent rarement d'une source extĂ©rieure d'approvisionnement ; ensuite les TibĂ©tains de l'Ü-Tsang, loin de subir les politiques menant Ă  la famine, venaient de bĂ©nĂ©ficier d'un programme de distribution des terres et de suppression d'impĂŽts se soldant par un accroissement de la production. Selon la Commission sociale et Ă©conomique de l'ONU pour l'Asie et le Pacifique (UNESCAP), la population de l'Ü-Tsang lors du grand bond en avant (1959-1962), passa de 1 228 000 habitants en 1959 Ă  1 301 700 en 1962; les chiffres de 1958 et 1969 sont de 1 206 200 et 1 480 300. Le fort taux de croissance dĂ©mographique (plus de 2 % l'an) ne cadre guĂšre avec la famine.

Les origines de la famine au Tibet

L’impact de l’occupation militaire du Tibet

Soldats chinois de Armée populaire de libération et un tank M3A3 Stuart, prÚs de la riviÚre du Yangtze en 1949.

AprĂšs l'Intervention militaire chinoise au Tibet (1950-1951) et la signature de l'Accord en 17 points, l’ArmĂ©e populaire de libĂ©ration (APL) entra le 9 septembre 1951 Ă  Lhassa. Selon Philippe Hayez, la nĂ©cessitĂ© de nourrir les 5 000 soldats Ă  Lhassa et 10 000 soldats des garnisons situĂ©es le long de routes stratĂ©giques, entraĂźna une dĂ©stabilisation de la modeste Ă©conomie tibĂ©taine provoquant augmentation du prix des cĂ©rĂ©ales et famines [4].

Selon Thomas Laird, du fait de l’absence de ravitaillement des troupes de l’APL depuis la Chine, le gouvernement tibĂ©tain fut contraint de lui fournir des cĂ©rĂ©ales, tout d'abord payĂ©es. Le nombre de soldats a augmentĂ©, vidant les rĂ©serves des entrepĂŽts de cĂ©rĂ©ales. Finalement, l’APL cessa de payer, et rĂ©quisitionna des logements et des terres. La situation de dĂ©tĂ©riora, entraĂźnant une crise de l’économie du Tibet, et une famine qui toucha soldats et civils[5].

Le ravitaillement des 10 000 soldats de l'ArmĂ©e populaire de libĂ©ration auprĂšs des populations tibĂ©taines entraĂźna une rarĂ©faction des denrĂ©es alimentaires. Devant ces problĂšmes d'approvisionnement l'armĂ©e chinoise installĂ©e Ă  Lhassa rĂ©quisitionna les stocks de cĂ©rĂ©ales [6]. La population de Lhassa connut des restrictions [7].

De plus comme la monnaie chinoise n'avait pas cours au Tibet avant 1959, les communistes chinois introduisirent au Tibet les dollars d'argent qu'ils utilisaient pour payer leur logement et leur nourriture ainsi que les travaux nĂ©cessaires Ă  leur installation. Ils octroyaient par ailleurs aux fonctionnaires un salaire complĂ©mentaire. Selon Jampa Panglung, les taux d'inflation augmentĂšrent Ă  prĂšs de 3 000 % entre 1950 et 1959. À titre d'exemple, une mesure d'orge coĂ»tait en 1950 environ 12 srang (le srang est la monnaie tibĂ©taine mise en place pendant la pĂ©riode de l'indĂ©pendance de facto) et en 1959 cette mĂȘme mesure coĂ»tait 350 srang [8].

Selon Jean Dif, aprÚs le soulÚvement tibétain de 1959, les soldats de l'armée populaire de libération, devant la disette et la fuite des paysans tibétains, doivent cultiver les champs [9].

Dans un livre publié en 1972, Michel Peissel mentionne que la famine a frappé le Tibet également en 1961, et que depuis le soulÚvement de Lhassa, les soldats chinois s'étaient vus contraints en de nombreux endroits de cultiver les champs abandonnés par les Tibétains ayant fui [10].

L’impact du grand bond en avant sur la famine au Tibet

Mao Tsé-toung, portrait en buste, assis, faisant face à Nikita Khrouchtchev, pendant la visite du chef russe début août 1958 à Pékin

Le Grand Bond en avant voulu par le dirigeant chinois Mao Zedong, a provoquĂ© une grande famine dans l'ensemble de la Chine entre 1958 et 1962 : selon les donnĂ©es officielles, elle aurait fait 15 millions de morts. Le journaliste chinois Yang Jisheng, aprĂšs 10 ans d'Ă©tudes, estime le nombre de victimes Ă  36 millions. Concernant les origines de cette famine, le gouvernement chinois a dans un premier temps dĂ©signĂ© celle-ci sous l'appellation « Les trois annĂ©es de catastrophes naturelles ». Puis dans les annĂ©es 1980, il a reconnu l'importance des orientations politiques dans ce dĂ©sastre[11].

Le Grand Bond en avant, campagne politique dĂ©butĂ©e en 1957 par Mao Zedong, a gonflĂ© puis Ă©puisĂ© les prisons et camps de travaux forcĂ©s. Au Tibet, la rĂ©pression y fut plus puissante, rĂ©pondant Ă  des troubles armĂ©s qui s’étendaient depuis 1956 et culminĂšrent avec l’écrasement du soulĂšvement tibĂ©tain de 1959. Au Tibet mĂȘme, les dĂ©tenus furent Ă©puisĂ©s par la multiplication des chantiers mis en place. À proximitĂ© de Lhassa, on rapporte qu’à la prison de Nagchen Trang, les conditions furent Ă©pouvantables : 14 Ă  16 heures de travail par jour et 3h d’étude, pour seulement 3 Ă  4 h de sommeil et une alimentation de famine. Un ancien dĂ©tenu dĂ©clara : « Nous savions qu’ils ne gardaient jamais les malades, pas plus qu’ils ne les nourrissaient. Ils les tuaient peut-ĂȘtre ou les gardaient pour faire des expĂ©riences mĂ©dicales. Tous ce que nous savons, c’est qu’on ne revoyait jamais les blessĂ©s. » [12] - [13].

Jean Dif indique : « Le Grand bond en avant provoque au Tibet, comme en Chine, une famine qui va faire des dizaines de milliers de victimes. Jamais auparavant de telles difficultĂ©s alimentaires n'auraient Ă©tĂ© rencontrĂ©es au Tibet. Â»[14].

Selon l'historien Warren W. Smith Jr, si aucune des rĂ©gions du Tibet n’eut de mauvaises rĂ©coltes, la nourriture Ă©tait prise aux TibĂ©tains pour les Chinois au Tibet et pour les provinces adjacentes du Tibet. Les Chinois affirmĂšrent aux TibĂ©tains qu’ils appartenaient maintenant aux masses chinoises, qu’ils portaient la responsabilitĂ© de partager le sort des Chinois donc devaient aussi soutenir l’APL et les cadres chinois au Tibet en retour de l’aide qu’ils avaient apportĂ© au Tibet. Des milliers de TibĂ©tains qui avaient Ă©tĂ© emprisonnĂ©s aprĂšs la rĂ©volte ont Ă©tĂ© confinĂ©s dans des camps de travail agricole oĂč ils ont produit de la nourriture pour les Chinois, tandis qu’eux Ă©taient affamĂ©s [15]

Le tibétologue Robert Barnett déclare en 2002 que dans les années suivant le Grand Bond en avant, de nombreuses preuves basées sur des témoignages démontrent que le nombre des décÚs liés à la famine fut considérable dans l'ensemble du Tibet[16]. En 2008, il déclare que le nombre de personnes tuées ou mortes de faim depuis l'annexion du Tibet demeure invérifié, bien qu'il existe des estimations avancées par les exilés de plusieurs centaines de milliers[17].

L'impact des réformes de collectivisation

Les yaks sont toujours utilisés pour labourer des champs au Tibet

Dans les annĂ©es 1980, Thomas Laird interviewa des paysans tibĂ©tains pauvres d’une rĂ©gion isolĂ©e sous administration du parti communiste chinois de la rĂ©gion autonome du Tibet. Selon le chef du village, les champs de sa rĂ©gion furent collectivisĂ©s dans les annĂ©es 1960 et les paysans ont connu des annĂ©es de famine, ce qui n’était pas arrivĂ© sous les nobles[18].

Le point de vue des exilés tibétains

Avant 1950, l'orge Ă©tait la base de l'alimentation des TibĂ©tains, ils en tiraient la tsampa. Cette cĂ©rĂ©ale est adaptĂ©e aux rĂ©gions tibĂ©taines car elle rĂ©siste bien au froid. Les autoritĂ©s chinoises imposĂšrent aux agriculteurs tibĂ©tains de cultiver un blĂ© ne supportant pas le climat rigoureux des hauts plateaux tibĂ©tains. Le blĂ© n'arrivait pas Ă  maturitĂ© et l'essentiel des rĂ©coltes gelait dans les champs [19]. Les moissons Ă©chouĂšrent comme les agriculteurs l’avaient prĂ©dit et des milliers de TibĂ©tains moururent de faim [20] - [21].

Les Chinois exigÚrent que l'ensemble des terres soit utilisé pour la culture du blé. Ainsi les jachÚres utilisées comme pùturage par des troupeaux de yaks devinrent des champs labourés, semés de blé. L'essentiel des troupeaux périrent et les champs s'appauvrirent, faute de fumier.

Les conclusions de travaux universitaires

Dans son étude "Demographic Annihilation" and Tibet, le professeur Sautman fait remarquer que le CongrÚs de la jeunesse tibétaine, dans un ouvrage sur l'évolution du Tibet, ne fait pas mention de famine associée au Grand bond en avant [22].

Sautman fait Ă©tat des travaux de l'historien Ă©migrĂ© Tsering Wangdu Shakya, auteur d'une histoire du Tibet moderne [23], lequel donne une estimation bien plus faible du nombre des morts de famine que le gouvernement tibĂ©tain en exil, et Ă©crit que dans le Qinghai, Sichuan, et le Gansu, des « milliers de TibĂ©tains... furent tuĂ©s dans la rĂ©pression de la rĂ©volte, ou pĂ©rirent Ă  la suite d’un dĂ©sastre Ă©conomique » [24].

L'organisation sociale

Selon Patrick French, avec le Grand Bond en avant, la mise en place des communes populaires, permettant la collectivisation des structures agraires, contribua à cette famine. Ce fut dans la province du Qinghai, qui comprend la plus grande partie de la région tibétaine appelée l'Amdo, et, au sud de la province, le nord du Kham, province du Tibet historique. En effet la propriété privée y avait été abolie pour créer, sans aucune transition, des communes populaires.

« La quantitĂ© de cĂ©rĂ©ales n'Ă©tant pas suffisante pour nourrir mĂȘme ceux qui avaient les exigences les plus limitĂ©es [...], si bien que les restes de graisse, la balle des grains et des produits similaires, jusqu'ici nourriture rĂ©servĂ©e aux chevaux, aux Ăąnes et au bĂ©tail, devinrent difficiles Ă  trouver et finirent par ĂȘtre considĂ©rĂ©s comme des aliments nourrissants et goĂ»teux. De plus afin de faire apparaĂźtre plus grande la quantitĂ© de nourriture, les responsables de cantines, en plus de mettre quantitĂ© de graisse plus ou moins mangeable, y ajoutaient de l'Ă©corce d'arbre, des feuilles, des herbes et des graines...»

Par ailleurs le 10e panchen-lama indique qu'en 1959 et 1960, les Chinois interdirent la pratique tibétaine du troc, si bien qu'il ne put y avoir d'échange de grains et de viande entre paysans et éleveurs [25].

Régions affectées par la famine

Préfecture autonome tibétaine de Golog

Selon Bianca Horlemann, la préfecture autonome tibétaine de Golog dans la province du Qinghai a été affectée par la famine dÚs la fin des années 1950[26].

Témoignages de réfugiés

Fin janvier 1961, un article (non signé) de la revue américaine Time fait état de l'essor, le mois précédent, du nombre de réfugiés arrivant en Inde : de deux ou trois depuis la révolte de mars 1959, on est passé à des vingtaines, voire des centaines d'arrivants. La raison évoquée : la faim et la famine au Tibet. Les autorités chinoises ont confisqué les céréales et aliments d'origine végétale dans les villages sous leur contrÎle et fait l'inventaire de tous les ovins, bovins et yaks. Les villageois reçoivent des rations de grains variables et ne peuvent manger leurs animaux morts de mort naturelle. D'aprÚs les réfugiés, dans certains villages, on mange de l'herbe et des tubercules sauvages. L'article estime le nombre de morts imputables à ce régime de famine à 5000 [27].

Une pénurie alimentaire inédite depuis l'essor du bouddhisme

Dans sa Pétition en 70 000 caractÚres le 10e panchen-lama affirme que le Tibet n'avait pas connu de telles pénuries alimentaires depuis que le bouddhisme s'est développé au Tibet [28]. Le Tibet avait une économie autosuffisante, et possédait des réserves conservées dans des entrepÎts du Gouvernement tibétain ainsi que dans les monastÚres.

De son cÎté, le gouvernement tibétain en exil, dans sa réponse à un livre blanc du gouvernement chinois publié en 2001, affirme : « selon des voyageurs étrangers tels que Charles Bell, Hugh Richardson, et Heinrich Harrer (donc dans la premiÚre moitié du XXe siÚcle, le niveau de vie des Tibétains était impressionnant comparé à celui d'autres pays asiatiques. La famine et la faim étaient inconnues dans l'ancien Tibet avant l'invasion chinoise »[29].

Pour le professeur Grunfeld, au contraire, la vie de la vaste majoritĂ© des TibĂ©tains Ă©tait tout sauf enviable. Ils vivaient dans de petites cahutes froides, mal Ă©clairĂ©es et faisaient leur ordinaire d'un mĂ©lange de tsampa, de beurre et de thĂ©, et, la chance aidant, de la viande. Un rĂ©fugiĂ© rapporte que lorsque sa famille, d'un niveau assimilable Ă  la petite bourgeoisie, vivait au Tibet, il lui arrivait de subir jusqu'Ă  deux crises alimentaires par an. Le rĂ©gime des nomades Ă©tait toutefois un peu meilleur car il Ă©tait Ă  forte teneur de protĂ©ines animales (viande, fromage, lait, yaourt) mais Ă©tait pauvre en lĂ©gumes et cĂ©rĂ©ales [30]. Paul O. Ingram fait toutefois remarquer que la citation complĂšte est : « Dans l’ancien Tibet, une famille moyenne comme la nĂŽtre Ă©tait confrontĂ©e au plus Ă  deux crises alimentaires par an », directement suivi de : « Nous emmagasinions assez de provisions pour l'annĂ©e entiĂšre, et nous n'avions pas Ă  nous inquiĂ©ter chaque semaine pour notre prochain repas » [31].

La pétition du 10e panchen-lama en 1962

Choekyi Gyaltsen, detail de "Xe et XIe Panchen Lama", gouache du peintre Claude-Max Lochu

Depuis des dĂ©cennies, le texte de ce rapport n'Ă©tait connu qu'au niveau le plus Ă©levĂ© de la direction chinoise lorsqu'un exemplaire parvint, en 1996, entre les mains de l'organisation non gouvernementale Tibet Information Network (TIN)[32]. En janvier 1998, Ă  l'occasion du 60e anniversaire de la naissance du 10e panchen lama, une traduction rĂ©alisĂ©e par le tibĂ©tologue Robert Barnett et intitulĂ©e A Poisoned Arrow: The Secret Report of the 10th Panchen Lama [33], fut publiĂ©e par le groupe Tibet Information Network [34] - [35]. Lors de sa publication, son authenticitĂ© n'a pu ĂȘtre confirmĂ©e de façon indĂ©pendante et les responsables chinois se sont abstenus de tout commentaire [36]. Quelques mois tard, Ngabo Ngawang Jigme, un ancien responsable tibĂ©tain Ă  la retraite ayant eu des fonctions politiques au Tibet entre 1964 et 1993, critiqua officiellement la pĂ©tition mais sans mettre en doute son authenticitĂ© ni en critiquer la publication [37].

AprĂšs le dĂ©part en exil du 14e dalaĂŻ-lama, en 1959, le 10e panchen-lama s'Ă©tait vu offrir la prĂ©sidence du comitĂ© prĂ©paratoire pour l'Ă©tablissement de la RĂ©gion autonome du Tibet [38]. En 1960, les Chinois lui donnĂšrent la vice-prĂ©sidence du CongrĂšs national du Peuple afin qu'il y soit le porte parole de leur politique au Tibet. À ce titre le 10e panchen-lama visita plusieurs rĂ©gions chinoises, « partout il ne vit que misĂšre et dĂ©solation Â». DĂ©but 1962, il inspecta les rĂ©gions tibĂ©taines du Qinghai, du Sichuan et du Yunan, puis se rendit au Gansu et au Xinjiang. Au Sichuan, il remit en question le rapport des autoritĂ©s locales, selon lui mensonger, concernant les prĂ©fĂ©ctures de KardzĂ© et de Ngaba, dĂ©clarant : « les conditions d'existence et de production des masses ne sont pas aussi bonnes que vous le prĂ©tendez. Des hommes, des femmes, des enfants sont morts de faim en grand nombre Â». En 1962, il rencontra des Occidentaux Ă  Lhassa la capitale de l'actuelle RĂ©gion autonome du Tibet. Il leur confia son dĂ©sir d'« accomplir son devoir rĂ©volutionnaire envers le peuple Â» et de « vivre la vie d'un bon bouddhiste Â». Le panchen-lama rejoignit PĂ©kin sur l'ordre de Mao. Pendant ce voyage, des foules de TibĂ©tains l'implorĂšrent de « mettre fin Ă  leurs souffrances et aux privations endurĂ©es Â». À PĂ©kin il demanda directement au Grand Timonier de « faire cesser les exactions commises Ă  l'encontre du peuple tibĂ©tain, Ă  augmenter les rations alimentaires, Ă  faire donner des soins aux personnes ĂągĂ©es et aux infirmes et Ă  respecter la libertĂ© religieuse ». Mao l'Ă©couta poliment mais aucune mesure ne fut prise [39].

Le panchen-lama n'avait que 24 ans quand il se permit de s'opposer au parti communiste chinois (dont il n'Ă©tait pas membre). Il fut encouragĂ© Ă  Ă©crire un rapport par Li Weihan, du Front Uni, qui relevait de Deng Xiaoping et qui pensait peut-ĂȘtre pouvoir se servir du document comme arme contre les ultra-gauchistes de toute la Chine. Le dirigeant tibĂ©tain Ngabo Ngawang Jigme, de son cĂŽtĂ©, avait conseillĂ© au jeune homme de ne rien mettre par Ă©crit [40]. Son entourage essaya de le convaincre de tempĂ©rer le ton de sa pĂ©tition, il refusa, indiquant qu'il parlait au nom du peuple tibĂ©tain et que les dirigeants chinois avaient droit Ă  une critique rigoureuse [41]. Cependant, le moment n'Ă©tait pas opportun, le climat libĂ©ral des annĂ©es prĂ©cĂ©dentes n'Ă©tait plus qu'un souvenir et des mesures avaient dĂ©jĂ  Ă©tĂ© prises pour trouver des solutions aprĂšs son intervention auprĂšs de Mao lui-mĂȘme [42].

Ainsi en 1962 le panchen-lama a adressĂ© au premier ministre chinois Zhou Enlai, un document intitulĂ© la pĂ©tition en 70 000 caractĂšres oĂč il dĂ©nonce la politique draconienne et les actions de la RĂ©publique populaire de Chine au Tibet. Il critique le Grand Bond en avant; une multitude d'« ordres ineptes » de la part des autoritĂ©s du Parti communiste chinois a entraĂźnĂ© une pĂ©nurie alimentaire chronique :

« Vous devez avant tout garantir que le peuple ne mourra pas de faim. Dans de nombreuses rĂ©gions du Tibet, les habitants sont morts de faim. Des familles entiĂšres ont pĂ©ri et le taux de mortalitĂ© est extrĂȘmement Ă©levĂ©. C'est inacceptable, terrible et grave. Le Tibet vivait autrefois un Ăąge obscur de fĂ©odalisme barbare, mais il n'y a jamais eu de telles pĂ©nuries de nourriture, notamment aprĂšs l'essor du bouddhisme. Dans les rĂ©gions tibĂ©taines, les masses vivent actuellement dans une telle pauvretĂ© que les personnes ĂągĂ©es et les enfants meurent de faim, ou bien sont si affaiblis qu'ils ne peuvent rĂ©sister aux maladies et meurent. Jamais rien de tel n'a eu lieu auparavant dans toute l'histoire du Tibet. Personne ne peut imaginer des famines aussi terribles, pas mĂȘme dans un cauchemar. Dans certaines rĂ©gions, si quelqu'un attrape un refroidissement, il contamine inĂ©vitablement des centaines de personnes et la plupart en meurent... »

Ainsi le rapport du Panchen Rinpoche traite la question de la famine en des termes clairs, s'en prenant au projet de Mao Zedong : « Bien que sur le papier et dans les discours, il y ait eu un grand bond en avant, il n'est pas certain qu'il se soit traduit dans la réalité. »

Le 10e panchen-lama rencontra le Premier ministre Zhou Enlai et Ă©voqua avec lui son rapport remis le 18 mai. La rĂ©action initiale fut positive, Zhou Enlai convoqua les responsables des territoires tibĂ©tains Ă  PĂ©kin. Zhou Enlai « avait admis que des fautes avaient Ă©tĂ© commises au Tibet Â», mais n'autorisait pas une opposition ouverte au pouvoir en place [43].

Mao, qui passait l'été dans la station balnéaire de Beidaihe, intervint. Il décréta que la pétition du panchen-lama était :

« une flÚche empoisonnée tirée sur le parti communiste par un seigneur féodal réactionnaire »

À ses yeux, le panchen lama prenait ouvertement le parti du camp rĂ©formiste emmenĂ© par Liu Shaoqi et Deng Xiaoping [44].

En 1964, lors des cérémonies de la nouvelle année, le 10e panchen-lama dénonça publiquement l'utilisation que les Chinois avaient fait de sa personne et apporta son soutien au dalaï-lama [45]. C'est ainsi qu'il subit d'abord des séances de rééducation en août 1964, fut emprisonné pendant 13 ans puis placé en résidence surveillée 5 ans à Pékin.

Critiques adressées à la Pétition

Critique politique de Ngabo Ngawang Jigme

PrĂ©fecture de Haidong, Ă  la bordure est de la province du Qinghai, oĂč se trouve le xian autonome de Xunhua dont est originaire le 10e panchen-lama.

En 1998, le plus ancien responsable tibĂ©tain de la rĂ©gion autonome du Tibet[46], Ngabo Ngawang Jigme (un des signataires de l'Accord en 17 points sur la libĂ©ration pacifique du Tibet), dĂ©nonça l'inexactitude de la pĂ©tition, affirmant que s'il y avait eu des morts de la famine dans la province du Qinghai, en revanche aucune personne n'Ă©tait morte de faim dans la rĂ©gion autonome proprement dite. L’historien tibĂ©tain Tsering Shakya et l’un des fils de Ngagpo Ngawang Jigme, tous deux en exil, affirment que ce n’est qu’un mensonge, et que de nombreuses personnes sont mortes de faim dans la rĂ©gion autonome du Tibet[47].

DĂšs 1961, Ngabo Ngawang Jigme avait Ă©tĂ© mis au courant par le 10e panchen-lama lui-mĂȘme de son projet de pĂ©tition. Il avait conseillĂ© Ă  ce dernier de se contenter d'un rapport oral auprĂšs des dirigeants du gouvernement central plutĂŽt que de diffuser un document Ă©crit[48] - [49].

Critique universitaire de Barry Sautman

Selon Barry Sautman, professeur associĂ© en sciences sociales Ă  l'universitĂ© de science et de technologie de Hong Kong, le 10e panchen-lama est censĂ© avoir visitĂ© trois xian (« comtĂ©s Â») de la bordure est de la province du Qinghai avant la rĂ©daction de ce rapport : Ping'an, Hualong et Xunhua, et sa description d'une famine ne concerne que le xian dont il est originaire, Xunhua. Ces trois xian se trouvent dans la prĂ©fecture de Haidong, une zone dont la population est Ă  90 % non tibĂ©taine et ne relĂšve pas du Tibet « culturel »[50].

De plus, un ancien dirigeant de la région autonome du Tibet (non nommé par Sautman) conteste le fait que le panchen-lama ait visité une quelconque zone tibétaine avant son rapport[51].

Le rapport de la commission internationale de juristes de 1964

Un rapport de la commission internationale de juristes intitulĂ© « Violations continues des droits de l'homme au Tibet », a Ă©tĂ© publiĂ© en dĂ©cembre 1964. Il est fondĂ© sur les comptes-rendus des rĂ©fugiĂ©s tibĂ©tains fuyant en Inde, le rapport a dĂ©voilĂ© « la continuation de mauvais traitements de nombreux de moines, de lamas, et d'autres personnalitĂ©s religieuses, ayant pour rĂ©sultat la mort par la torture excessive, les coups, la famine et le travail forcé  » À la suite de ce rapport et d'un appel du DalaĂŻ Lama, la question du Tibet a Ă©tĂ© introduite sous la forme d'une nouvelle RĂ©solution Ă  l'ONU soutenue par les mĂȘmes pays qu'en 1961, auxquels se sont joints le Nicaragua et les Philippines [52].

Les liens entre la CIA et la commission internationale de juristes Ă  ses dĂ©buts sont signalĂ©s par Dorothy Stein dans son livre People Who Count. Population and Politics, Women and Children, paru en 1995. Elle accuse la Commission d'ĂȘtre issue d'une officine crĂ©Ă©e par des agents du renseignement amĂ©ricain Ă  des fins de propagande anticommuniste et d'avoir reçu des fonds de la CIA, ajoutant qu'il est notoire que cette derniĂšre n'est pas une organisation humanitaire ni n'est intĂ©ressĂ©e Ă  la manifestation de la vĂ©ritĂ©[53].

Les chiffres avancés du nombre de victimes

L'évolution démographique tibétaine entre 1953 et 2000 (R. A. du Tibet + régions hors R.A. du Tibet) [54] - [55]

On trouve, dans la bibliographie du sujet, des chiffres trĂšs variables.

Chiffres des exilés tibétains et de divers auteurs

Selon le gouvernement tibĂ©tain en exil, la mortalitĂ© due Ă  la famine a touchĂ© les 3 anciennes provinces tibĂ©taines. Le dĂ©nombrement des morts liĂ©s Ă  la famine donne pour l'Ü-Tsang : 131 072, pour le Kham : 89 916 et pour l'Amdo : 121 982, soit au total : 342 970.

En 1993, Bernard Kouchner Ă©voque 413 000 TibĂ©tains morts de faim pendant une de ces « rĂ©formes agraires » dont les thĂ©oriciens marxistes Ă©taient friands [56].

Le mĂȘme chiffre est citĂ© par le dĂ©mographe Yan Hao [57] et repris dans un ouvrage de Barry Sautman [58]. Il ne correspond pas cependant Ă  l'addition des chiffres donnĂ©s pour les trois provinces dans le tableau rĂ©capitulatif : il semble que, dans la somme totale, le 4 ait Ă©tĂ© interverti avec le 3, car les chiffres correspondant aux 3 provinces sont corrects et leur addition donne bien 343 000.

Selon Barry Sautman, fournissant la rĂ©fĂ©rence d'une interview publiĂ©e le [59], mais pas de citation, en 1991, le dalaĂŻ-lama aurait dĂ©clarĂ© que 200 000 TibĂ©tains Ă©taient morts de faim, soit moins de la moitiĂ© du chiffre initialement avancĂ©. Pour le professeur Sautman, ces discordances ne sont guĂšre surprenantes : certaines des statistiques reposent sur des citations renvoyant Ă  des documents qui ne contiennent aucun chiffre ou qui n'ont pas Ă©tĂ© rendus publics par les Ă©migrĂ©s [60].

Lors d'un discours prononcĂ© le devant le CongrĂšs amĂ©ricain, le dalaĂŻ-lama parle de la mort, en 30 ans, de 1,2 million de TibĂ©tains [61] - [62].Patrick French met en doute ce chiffre. Il affirme que l’historien et journaliste de radio Free Asia Warren W. Smith Jr qui a Ă©tudiĂ© les dĂ©ficits de croissance de la population a Ă©crit que les statistiques chinoises « confirment les thĂšses tibĂ©taine d'un nombre massif de morts et rĂ©futent les dĂ©nĂ©gations chinoises ». Selon ses estimations plus de 200 000 TibĂ©tains « manqueraient » Ă  la population de la RĂ©gion autonome du Tibet. Le nombre de morts tibĂ©tains semble aussi Ă©levĂ© dans les rĂ©gions du Gansu, du Sichuan et du Qinghai, trois rĂ©gions oĂč les taux de mortalitĂ© au dĂ©but des annĂ©es 1960 sont Ă©levĂ©s et vĂ©rifiables. Si cela est exact, on peut estimer qu'environ un demi-million de TibĂ©tains sont directement morts en raison de la politique appliquĂ©e au Tibet par la RĂ©publique populaire de Chine[63]. Il indique qu'il n'existe pas de statistiques pour le Tibet central, tout en affirmant que « la sauvagerie qui prĂ©sida Ă  la rĂ©pression de la rĂ©volte contre le pouvoir chinois ne permet pas de savoir si les morts ont Ă©tĂ© provoquĂ©es par la faim, par la maladie, par la guerre ou par les persĂ©cutions ». Il indique en revanche qu'il existe des statistiques pour les trois autres provinces chinoises partiellement tibĂ©taines. Ainsi, pendant la pĂ©riode 1959-1962 (par rapport aux annĂ©es 1956-1958), le taux global de mortalitĂ© augmenta de 115 % en Chine, alors que celui des trois provinces augmenta en moyenne de 233 % [64].

Dans sa biographie de Mao, l'historien Michael J. Lynch, faisant référence à des sources chinoises, avance les chiffres de 0,9 million de morts au Qinghai, et 1 million au Tibet, et en comparant en proportion des provinces chinoises, il écrit que le Tibet a souffert le plus, perdant 25 % de sa population qu'il estime à 4 million[65].

Dans un ouvrage publié en 1996, Dali Yang, professeur en Sciences politiques de l'Université de Chicago, analyse les taux de mortalité relatifs des différentes régions de la Chine durant la famine du grand bond en avant, et montre qu'ils sont parmi les plus élevés du pays dans le Qinghai, le Gansu, et le Sichuan, les données pour la Région autonome du Tibet en revanche ne sont pas disponibles pour cette période [66].

Selon Lillian M. Li, professeur d’histoire au Swarthmore College, si la famine a touchĂ© l’ensemble de la Chine durant la pĂ©riode du Grand Bond en avant, le Tibet et le Sichuan, ainsi que le Anhui et le Henan furent les provinces les plus durement touchĂ©es comme cela est montrĂ© par l’analyse dĂ©mographique et d’autres preuves [67].

Selon Jasper Becker, la famine fut particuliÚrement sévÚre pour les prisonniers tibétains dans des régions comme le Gansu [68].

Critiques et objections

Réagissant aux chiffres avancés du nombre de victimes, Barry Sautman note qu'ils ne reposent pas sur des données vérifiables :

« Les chiffres employés réguliÚrement par les milieux exilés ne reposent sur aucune base. Ils avancent le chiffre de 1,2 million de Tibétains morts à partir des années 1950 jusqu'aux années 1970, mais sans donner aucune source. En tant que juriste, je n'accorde aucun crédit à des statistiques non étayées par des données, par des sources visibles » [69].

Le professeur Sautman fait en outre remarquer que les chiffres provenant des parties orientales du plateau tibétain incluent principalement des non-Tibétains, les Tibétains y étant minoritaires [70].

Pour le professeur Sautman, l'affirmation selon laquelle le Tibet aurait été la région de Chine la plus touchée par la famine, repose non pas sur des statistiques recueillies dans les zones tibétaines mais sur des récits anonymes de réfugiés ne comportant pas de données numériques précises[71].

Contestation d'une quelconque famine dans l'Ü-Tsang

Dans son article "Demographic Annihilation" and Tibet[72], le professeur Sautman conteste l'existence d'une quelconque famine dans l'Ü-Tsang (les parties centrale, centre-ouest et nord-ouest du Tibet).

Il se fonde tout d'abord sur les travaux de Yan Hao, un dĂ©mographe sino-australien relevant de l'Institut de recherche Ă©conomique Ă  PĂ©kin[73]. Faisant appel Ă  une mĂ©thode indirecte pour Ă©valuer le nombre total de victimes tibĂ©taines (en l'absence d'une mĂ©thode directe), ce chercheur note que si le chiffre de 413 000 morts donnĂ© par les Ă©migrĂ©s Ă©tait exact, cela voudrait dire que le taux de dĂ©cĂšs chez les TibĂ©tains Ă©tait quatre fois plus Ă©levĂ© que le taux national. Cela est en contradiction avec deux facteurs propres aux rĂ©gions habitĂ©es par des TibĂ©tains : tout d'abord le fait que plus de la moitiĂ© de la population tibĂ©taine est constituĂ©e de nomades auto-suffisants jusqu'Ă  ce jour, et que leurs moyens de subsistance dĂ©pendent rarement d'une source extĂ©rieure d'approvisionnement ; ensuite le fait que les TibĂ©tains de l'Ü-Tsang, loin de subir les politiques menant Ă  la famine, venaient de bĂ©nĂ©ficier d'un programme de distribution des terres Ă  ceux qui les cultivaient et de suppression d'impĂŽts se soldant par un accroissement de la production [74]. Bien plus, les politiques appliquĂ©es dans les autres provinces comme les communes populaires, le systĂšme centralisĂ© d'achat et d'approvisionnement des grains et l'impĂŽt agricole ne furent instaurĂ©s en rĂ©gion autonome qu'en 1965. Pour citer Yan Hao :

« First, over half of the Tibetan population is made up of self-sufficient nomads to this day, and their livelihood seldom depends on external food supply. Second, in the farming areas of Tibet proper, the land of former aristocrat landowners had been distributed to individual farmers just after the 1959 Land Reform. Policies that became routine in other provinces, such as the commune system, the central grain purchase and supply system, and the agricultural tax system, were not introduced to the TAR until 1965. Farmers, working on their own land for the first time, were enthusiastic to raise output, and there were no reports of any crop failures » (Han Yao, Tibetan Population in China: Myths and Facts Re-examined, op. cit., p. 21).

Une Ă©tude du village de Yid-Chab dans le comtĂ© d'Amdo (RĂ©gion autonome actuelle), Ă  environ 500 km au nord de Lhassa, montre qu'il y avait 56 bĂȘtes par personne avant la rĂ©forme de 1959, et une moyenne de 93 aprĂšs la rĂ©forme. La taille moyenne des familles, de 5,2 membres avant la rĂ©forme, passa Ă  5,6 dans les annĂ©es qui suivirent pour atteindre le pic de 6,1 pendant la pĂ©riode des Communes populaires. Par contre, lors de la famine dans le reste de la Chine, le taux de fertilitĂ© chuta de 45 %. Il n'y a donc aucune indication de famine dans cette pĂ©riode.

Le professeur Sautman poursuit sa dĂ©monstration Ă  l'aide des chiffres fournis par la Commission sociale et Ă©conomique de l'ONU pour l'Asie et le Pacifique (UNESCAP). La population de l'Ü-Tsang lors du grand bond en avant (1959-1962), Ă©poque oĂč nombre de rĂ©gions chinoises connurent la famine, passa de 1 228 000 habitants en 1959 Ă  1 301 700 en 1962; les chiffres de 1958 et 1969 sont de 1 206 200 et 1 480 300. Le fort taux de croissance dĂ©mographique durant ces pĂ©riodes (plus de 2 % l'an), malgrĂ© l'Ă©migration de dizaines de milliers de TibĂ©tains de l'Ü-Tsang, ne cadre guĂšre avec la famine. De plus, nombre de TibĂ©tains rĂ©sidant hors de l'Ü-Tsang se trouvaient dans des situations similaires Ă  ceux qui y habitaient : c'Ă©taient des paysans ou des pasteurs dans des rĂ©gions trĂšs Ă©loignĂ©es oĂč les politiques du Grand bond en avant ne pouvaient guĂšre s'appliquer.

TĂ©moignages d'anciens prisonniers

Palden Gyatso, en juillet 2000, en France

Selon le témoignage de Gyeten Namgyal, un tailleur de Lhassa, l'année 1960 fut marquée à Lhassa par l'apparition d' « une terrible famine ».

« Les denrées dans les magasins, déjà rares, avaient disparu et on nous servait des haricots que nous devions moudre pour faire de la farine. Le broyage n'était pas approprié et la nourriture insuffisante perturbait notre systÚme digestif. Beaucoup tombÚrent malades, certains moururent. Les décÚs étaient tenus secrets. [...] Nous tenions un compte précis. Il y en eut soixante et un » [75].

Dans son autobiographie, Tubten KhĂ©tsun, un ancien prisonnier qui a passĂ© 4 ans en camp de rĂ©forme par le travail dans la rĂ©gion de Lhassa, Ă©voque lui aussi la faim et les cadavres d’autres dĂ©tenus morts de faim [76].

« les décÚs dus à la famine étaient constants dans chaque groupe [de prisonniers] à cette époque ».

Selon Tubten Khétsun, la pénurie de nourriture à Lhassa en 1962-1963 a aussi produit des ravages sur la faune, les animaux sauvages étant devenus les proies des colons et des soldats chinois [76].

Le moine PÀldÚn Gyatso qui a survécu 32 ans dans les laogaï[77] , indique qu'en 1961 alors qu'il était dans un camp de travail dans la vallée de Lhassa la nourriture devint rapidement le problÚme essentiel [78]:

« On nous servait du thĂ© noir le matin et un bol de soupe claire oĂč nageaient quelques lambeaux de chou le soir. Dans la soirĂ©e, on nous donnait aussi une portion de tsampa de cent grammes. [...] J'arrivais Ă  peine Ă  supporter le poids de mon propre corps. C'est ainsi qu'on commence Ă  mourir de faim. En me rĂ©veillant un matin, je m'aperçus que deux prisonniers Ă©taient morts dans la nuit et bientĂŽt, nous ne nous couchions plus jamais sans nous demander lequel d'entre nous vivraient encore au rĂ©veil. [...] Nous faisions bouillir le cuir de nos bottes pour concocter un porridge Ă©pais. Certains dĂ©voraient mĂȘme de l'herbe qui leur gonflait le ventre et les rendait trĂšs malades. »

D'autres TibĂ©tains furent emmenĂ©s en Chine continentale, et moururent en grand nombre. Tenzin Choedrak rapporte que sur les 76 prisonniers qui l’accompagnaient en Chine seuls 21 ont survĂ©cu.

Bibliographie

Notes et références

  1. Correspondant approximativement à l'ensemble des entités administratives autonomes tibétaines de la République populaire de Chine.
  2. (en) Jen Lin-Liu et al., Frommer's China, p. 747 : « The Panchen Lama (...) was sent to Qinghai on a fact-finding mission in 1962. Upon his return, he penned a 70,000-word tract (...) ».
  3. (en) China's top Tibetan official criticises Panchen Lama report (TIN), site World Tibet News, 9 avril 1998, Kathmandu (Népal), 91 p. ; citation : « In the petition, he gave a graphic description of the starvation that was widespread in eastern Tibet during the early 1960s as a result of the Chinese policy known as the Great Leap Forward ».
  4. Philippe Hayez, Mourir pour Lhassa. Un Ă©pisode mĂ©connu de la guerre froide : « La nĂ©cessitĂ© de nourrir les 5 000 hommes cantonnĂ©s Ă  Lhassa et les 10 000 hommes des garnisons situĂ©es le long des routes stratĂ©giques suffit Ă  dĂ©stabiliser la modeste Ă©conomie tibĂ©taine, provoquant hausse du prix des cĂ©rĂ©ales et famines ».
  5. Une histoire du Tibet : Conversations avec le dalaĂŻ-lama, de Thomas Laird, DalaĂŻ-Lama, Christophe Mercier, Plon, 2007, (ISBN 2259198910).
  6. site du SĂ©nat.
  7. Irenees.
  8. Contribution de Jampa Panglung, in Anne-Marie Blondeau et Katia Buffetrille (sous la dir. de), Le Tibet est-il chinois ?, Ă©d. Albin Michel, coll. Sciences des religions, p. 123-124
  9. Site de Jean Dif.
  10. Michel Peissel, Les Cavaliers du Kham, guerre secrĂšte au Tibet, (ISBN 9782221034446)
  11. Chine Informations.
  12. Jean-Luc Domenach, Chine : l'archipel oublié, Paris, Fayard, 1992, p. 227-228.
  13. Isabelle van Geem, Crier avant de mourir, la tragĂ©die du Tibet, Éditions Robert Laffont, Paris, 1977, p. 178-183.
  14. Jean Dif : Chronologie de l'histoire du Tibet et de ses relations avec le reste du monde
  15. Warren W. Smith Jr, The Nationalities Policy of the Chinese Communist Party and the Socialist Transformation of Tibet. In (en) Robert Barnett et Shirin Akiner, Resistance and Reform in Tibet, Londres, C. Hurst & Co. Publishers, , 320 p. (ISBN 1-85065-161-2, lire en ligne).
  16. Robert Barnett, in Le Tibet est-il chinois ?, Anne-Marie Blondeau et Katia Buffetrille, Albin Michel, coll. Sciences des religions, 2002, p. 145 « Ainsi, bien que des chiffres prĂ©cis soient impossibles Ă  obtenir, il y a d'amples preuves, fournies par des rĂ©cits individuels, que le nombre des exĂ©cutions, des morts en prison et des dĂ©cĂšs dus Ă  la famine fut extrĂȘmement Ă©levĂ© durant cette pĂ©riode, Ă  travers le Tibet »
  17. (en) Robert Barnett, Thunder for Tibet, compte rendu du livre de Pico Iyer, The Open Road: The Global Journey of the Fourteenth Dalai Lama, Knopf, 275 p., in The New York Review of Books, vol. 55, no 9, 29 mai 2008 : « the number killed or starved to death since Chinese annexation remains unverified, although estimates by exiles run into the hundreds of thousands ».
  18. Une histoire du Tibet : Conversations avec le dalaĂŻ-lama, de Thomas Laird, DalaĂŻ-Lama, Christophe Mercier, Plon, 2007, (ISBN 2259198910), « Au cours des annĂ©es soixante, le Parti communiste chinois collectivisa les champs caillouteux, et tous les villageois se mirent Ă  travailler la terre en commun (
) « Nous partagions tout, et il n’y avait rien pour personne. Nous avons connu des annĂ©es de famine, ce qui n’était jamais arrivĂ© sous les nobles. (
) Personne ne veut plus travailler gratuitement pour les nobles, mais tout le monde veut que les Chinois s’en aillent et que le DalaĂŻ Lama revienne. » »
  19. Gilles Van Grasdorff Ramsay, Panchen Lama, Otage de PĂ©kin, 1999, page 231.
  20. (en) Tsering Shakya, The Dragon in the Land of Snows, Columbia University Press, (1999), (ISBN 978-0712665339).
  21. (en) Stein, Rolf (1972) Tibetan Civilization, Stanford University Press, (ISBN 0-8047-0806-1).
  22. (en) Barry Sautman, "Demographic Annihilation" and Tibet, in Contemporary Tibet. Politics, Development, and Society in a Disputed Region (sous la direction de Barry Sautman, June Teufel Dreyer), M.E. Sharpe, 2006, p. 230-257 ; citation : « The pro-independance Tibetan Youth Congress, in a work on development in Tibet, fails to mention a famine associated with the Great Leap Forward », p. 243. Le CongrĂšs de la jeunesse tibĂ©taine affirme cependant que vers la fin de la rĂ©volution culturelle, des dizaines de milliers de TibĂ©tains pĂ©rirent de faim dans l'Ü-Tsang en raison de la surculture des terres semĂ©es en blĂ©. « It does claim that during the late Cultural Revolution period in U-Tsang, "tens of thousands of Tibetans" died as a result of overcultivation of land sown with wheat (TYC 1995, 18-19) ».
  23. (en) Tsering Wangdu Shakya, The Dragon in the Land of Snows : A History of Modern Tibet Since 1947, Pimlico, London, 1999, p. 356.
  24. Barry Sautman, op. cit.; citation, p. 243 « The most serious history of modern Tibet by an émigré scholar advances a much smaller estimate of famine deaths than the TGIE. Shakya (1999, 504 fn. 91) states that in Qinghai, Sichuan, and Gansu, « thousands of Tibetans... were either killed in suppression of the revolt or died as the result of economic disaster ».
  25. de Patrick French, Tibet, Tibet, une histoire personnelle d'un pays perdu, traduit de l'anglais par William Oliver Desmond, Albin Michel, 2005, page 81.
  26. Bianca Horlemann, Modernisation Efforts in Mgo log: A Chronicle, 1970-2000, 2002.
  27. (en) Tibet: Starvation Diet, Time (magazine), 27 janvier 1961 : « Ever since Tibet's brave but abortive revolt against Red China in 1959, refugees have straggled across the border into India by two and threes. Last month they came by the scores and even the hundreds. They were driven by hunger. (...) the Chinese confiscated all the cereal and vegetable foods in all the villages under their control and made an inventory of all sheep, cattle and yaks. (...) In many villages, the refugees reported, Tibetans have been reduced to eating grass weeds and wild tubers. Estimated deaths due to Tibet's enforced starvation diet: 5,000. »
  28. Pétition en 70 000 caractÚres : « Il n'y a jamais eu de telles pénuries de nourriture, notamment aprÚs l'essor du bouddhisme »
  29. (en) Height of Darkness: Chinese Colonialism on the World’s Roof, Tibetan Response to Beijing’s White Paper of 8 November 2001 on Tibet’s March Toward Modernization, Department of Information and International Relations, Central Tibetan Administration, Dharamsala 176215, December 2001, page 11.
  30. A. Tom Grunfeld, The Making of Modern Tibet, M. E. Sharpe, 1996, (ISBN 1-56324-714-3), p. 16 : « The life of the vast majority of the Tibetans was not "enviable" by any stretch of the imagination. They lived "in small, badly lighted, cold hovels" and ate a mixture of tsampa, butter, and tea, and if they were lucky, some meat. (...) One refugee reports that when his family lived in Tibet, at a level that could be considered lower-middle class in Tibetan terms, they could experience, at most, "two food crises a year". The nomad diet was slightly better in that it had a high concentration of protein (meat, cheese, milk, yogurt), but it lacked vegetables and grains (citant "Hungarians in Tibet: The Genesis of Revolt, Eastern Europe 8:8 (August 1959) :18") ».
  31. (en) Paul O. Ingram, Tibet, the facts, Scientific Buddhist Association (London, England), United Nations. Commission on Human Rights - 1990 : « An example of selective quotation can be found in the following passage. Mr. Grunfeld writes: "One refugee reports that when his family lived in Tibet at a level that could be considered lower middle class in Tibetan terms, they regularly suffered 'two food crises a year'" (p. 14). However, the full quotation reads as follows, "In the old Tibet, an average family such as ours faced at most two food crises a year," and then directly continues, " We stored enough provisions for the whole year, and we were not worried every week as to where our next meal would come from." »
  32. (en) Elaine Kurtenbach, 1962 report by Tibetan leader tells of mass beatings, starvation, Associated Press, 11 février 1998 ; citation : (en) « The report (...) apparently circulated in China's top echelons for decades until a copy was delivered anonymously to the (Tibet Information Network) group ».
  33. (en) A Poisoned Arrow: The Secret Report of the 10th Panchen Lama, Bskal-Bzan-Tshe, Tibet Information Network (TIN), 31 décembre 1998, paperback, 348 p., (ISBN 0953201112 et 978-0953201112).
  34. (en) Secret Report on 1960s Tibet Published (TIN).
  35. (en) The Secret Report Of Tibet's 10th Panchen Lama Available Online For The First Time (TIN).
  36. Elaine Kurtenbach, op. cit.; citation : « Its authenticity could not be independently confirmed, and Chinese officials refused comment ».
  37. (en) China's top Tibetan official criticises Panchen Lama report (TIN), site World Tibet Network News, 9 avril 1998 ; citation : « Ngabo's comments on the famine are a criticism of the information in the Panchen Lama's petition, but he does not challenge its authenticity or express any criticism of its publication ».
  38. Laurent Deshayes, Histoire du Tibet, de 1997, Fayard, p. 332 (ISBN 9782213595023).
  39. Gilles Van Grasdorff Ramsay, Panchen Lama, Otage de PĂ©kin, 1999, pages 235 et 236.
  40. (en) Late Panchen Lama's 70,000-character petition revealed, in Tibetan Review, November 1996.
  41. Patrick French, Tibet, Tibet, une histoire personnelle d'un pays perdu, traduit de l'anglais par William Oliver Desmond, Albin Michel, 2005, p. 78.
  42. Late Panchen Lama's 70,000-character petition revealed, op. cit. ; citation : « The Panchen Lama was not a party member and faced considerable risks, especially since the relatively liberal climate of the previous years had already receded, and since steps had already been taken to address his complaints after he had raised many of them directly with Mao Â».
  43. Gilles Van Grasdorff, L'enfant oublié du tibet. La véritable histoire du Panchen Lama Guendun, préface de Harry Wu, Presse de la Renaissance, 1999, page 124 (ISBN 2266104837).
  44. (en) Claude Arpi, Remembering a War. The 1962 India-China Conflict, sur Rediff.com, 15 novembre 2002.
  45. (en) The Panchen Lama ; citation : « The panchen lama was arrested after a 1964 speech supporting the exiled Dalai Lama Â».
  46. (en) China's top Tibetan official criticises Panchen Lama report (TIN), in World Tibet Network News, op. cit., 9 avril 1998 : « China's most senior Tibetan official Â».
  47. (en) Interview with Ngapoi Ngawang Jigme, SCMP, Jasper Becker, 4 avril 1998
  48. Cette histoire a déjà été mentionnée plus haut dans l'article, répétition
  49. (en) China's top Tibetan official criticises Panchen Lama report (TIN), in World Tibet Network News, op. cit., 9 avril 1998 ; citation : « (...) Ngabo Ngawang Jigme claims: I can tell you for sure that not a single man died of hunger in Tibet. I heard that some people died in Qinghai but I don't know how many." In his reference to Tibet, Ngabo is referring only to the Tibet Autonomous Region. The Chinese authorities have stated that the TAR was not affected by the famine, and that only Qinghai and some parts of Sichuan were affected Â».
  50. (en) Barry Sautman, June Teufel Dreyer (eds), Contemporary Tibet: politics, development, and society in a disputed region, M. E. Sharpe, 2006, 360 p., (ISBN 0765613549 et 9780765613547), en particulier Barry Sautman, "Demographic Annihilation" and Tibet, p. 230-257, en part. p. 242 : « it is worth noting that the Panchen Lama, upon whose writings the charges of a massive famine among Tibetans mainly rest, is said to have only visited three counties in "Tibet" prior to writing his report in 1962. These were Ping'an, Hualong, and Xunhua, and his comments on the famine pertain to his home county, Xunhua (Becker 1996b; Panchen Lama 1962, 112-113). All three counties are in Haidong Prefecture, an area whose population is 90 percent non Tibetan and not in "cultural" Tibet. »
  51. Barry Sautman, "Demographic Annihilation" and Tibet, op. cit. : « A former TAR leader, moreover, disputes that the Panchen Lama visited any Tibetan areas during the famine (Becker 1998). »
  52. (en) Tibet : Human Rights and the Rule of Law, International Commission of Jurists, Geneva, December 1997.
  53. (en) Dorothy Stein, People Who Count. Population and Politics, Women and Children, Earthscan Publications, London, 1995, XI + 239 p., en part. p. 193-104, note 27 : « The ICJ itself grew out of a group created by American intelligence agents whose purpose was dissiminating anti-communist propaganda. It too has received funds from the CIA, which is not a notable rights organization, nor, which is more to the point, particularly noted for its interest in truth. »
  54. Source (le document n'est plus disponible sur le site tibetology.ac.cn) : (zh) 1950—1990ćčŽè—æ—äșșćŁè§„æšĄć˜ćŠšćŠć…¶ćœ°ćŒșć·źćŒ‚ç ”ç©¶ (les chiffres de la RAT en 1953 et 1964 prĂ©sentĂ©s dans cette Ă©tude correspondent Ă  des Ă©valuations, tous les autres chiffres proviennent de recensements)
  55. (en) Department of Population, Social, Science and Technology Statistics of the National Bureau of Statistics of China (ć›œćź¶ç»ŸèźĄć±€äșșćŁć’Œç€ŸäŒšç§‘æŠ€ç»ŸèźĄćž) and Department of Economic Development of the State Ethnic Affairs Commission of China (ć›œćź¶æ°‘æ—äș‹ćŠĄć§”ć‘˜äŒšç»æ”Žć‘ć±•ćž), eds. Tabulation on Nationalities of 2000 Population Census of China (《2000ćčŽäșșćŁæ™źæŸ„äž­ć›œæ°‘æ—äșșćŁè”„æ–™ă€‹). 2 vols. Beijing: Nationalities Publishing House (民族ć‡ș版瀟), 2003 (ISBN 7-105-05425-5).
  56. Bernard Kouchner Ă©voque plus de 1 million de victimes.
  57. (en) Yan Hao, Tibetan Population in China: Myths and Facts Re-examined), in Asian Ethnicity, vol. 1, Number 1, March 2000, p. 28-29.
  58. Barry Sautman, June Teufel Dreyer, op. cit.
  59. (en) McLaughlin's One on One : Interview with the Dalai Lama", Federal News Service, April 19, 1991.
  60. (en) Barry Sautman, June Teufel Dreyer (eds), Contemporary Tibet: politics, development, and society in a disputed region, M. E. Sharpe, 2006, 360 p., (ISBN 0765613549 et 9780765613547), en particulier Barry Sautman, "Demographic Annihilation" and Tibet, p. 230-257 ; citation : « In 1991, the Dalai Lama stated that 200 000 Tibetans had died from starvation (McLaughlin's One on One" 1991), less than half of what had originally been claimed. The discrepancies are not surprising; some of the statistics are based on citation to documents that do not contain the figure at all, or have not been made public by the emigres ».
  61. (en) Address to the Members of the United States Congress in the Rotunda of the Capital Hill in Washington, D.C. Dalai Lama, 18 avril 1991 : « For almost three decades, Tibet was sealed from the outside world. In that time, as a result of China's efforts to remake our society, 1.2 million Tibetans - one fifth of the population - perished. »
  62. (en) Human rights.
  63. Patrick French, opus cité, « L'historien Warren Smith, travaillant sur les déficits dans la croissance des populations, a écrit que les statistiques du gouvernement chinois « confirment les thÚses tibétaine d'un nombre massif de morts et réfutent les dénégations chinoises ». D'aprÚs ses estimations, ce sont plus de 200 000 Tibétains qui « manqueraient » à la population de la Région autonome du Tibet. Avec les taux élevés et vérifiables de mortalité dans le Ganzou, le Sichuan et le Qinghai, au début des années soixante, il semble que le nombre de morts tibétains ait été aussi élevé dans ces régions que dans le Tibet central. Si cela est vrai, on peut avancer avec un certain degré de probabilité qu'environ un demi-million de Tibétains sont directement morts à cause de la politique appliquée au Tibet par la République populaire de Chine. Chiffre de toute façon terrifiant, en conséquence, et qui ne diminue en rien l'horreur de ce qui a été fait au Tibet. »
  64. Patrick French, Tibet, Tibet, une histoire personnelle d'un pays perdu, traduit de l'anglais par William Oliver Desmond, Albin Michel, 2005, pages 83, 84, 326 et 327.
  65. (en) « Chinese sources now show that at least 50 million Chinese died from hunger in the period 1958-62. Few provinces escaped the famine entirely, but the greatest number of deaths occurred in a great arc of misery that swept from east to west through central China: Shandong — 7.5 million, Anhui — 8 million, Henan — 7.8 million, Sichuan — 9 million, Qinghai — 0.9 million, Tibet — 1 million. In proportional terms, it was Tibet that suffered most, losing an estimated 25 per cent of its population of 4 million. », Michael J. Lynch, Mao, Routledge Historical Biographies, 2004 (ISBN 978-0-415-21577-0), p. 171 (voir en ligne).
  66. (en) Yang, Dali, Calamity and Reform in China: State, Rural Society and Institutional Change since the Great Leap Famine, Stanford University Press, 1996.
  67. (en) Lillian M. Li, Fighting famine in North China: state, market, and environmental decline, 2007, 520 p., en part. p. 358 ; citation : « The famine was experienced al over China, but more severely in some provinces than in others. Sichuan, Anhui, Henan, and also Tibet were the most seriously affected provinces, as seen from the demographic record and other evidence Â».
  68. (en) New ghosts, old ghosts: prisons and labor reform camps in China, note de la page 127, par James D. Seymour, Richard Anderson.
  69. (en) Leslie Evans, How repressive is the Chinese government in Tibet?, sur le site UCLA International Institute, 4 décembre 2002, compte rendu d'une conférence du professeur Barry Sautman à l'université de Californie à Los Angeles; citation : « There are no bases at all for the figures used regularly by the exile groups. They use the figure of 1.2 million Tibetans dying from the 1950s to the 1970s, but no source for this is given. As a lawyer, I give no credence to statistics for which there is no data, no visible basis ».
  70. (en) Barry Sautman, Tibet: Myths and Realities; citation : « Only anecdotal evidence for all deaths by starvation among Tibetans is available and comes from the eastern edge of the plateau, where the Tibetan share of the population has long been minimal and where most of those who died were non-Tibetans Â».
  71. Barry Sautman, "Demographic Annihilation" and Tibet, op. cit. ; citation : « Others claim that Tibet was the region most hit by China's famine of 1959-1962 ("Secret Panchen Lama Report" 1996), based not on statistics gathered in Tibetan areas, but on anonymous refugee reports lacking in numerical specificity ».
  72. Barry Sautman, "Demographic Annihilation" and Tibet, op. cit., p. 242.
  73. (en) Yan Hao (Commission du dĂ©partement de planification d'État Ă  l'Institut de recherche Ă©conomique Ă  PĂ©kin), Tibetan Population in China: Myths and Facts Re-examined, Asian Ethnicity, vol. 1, no 1, mars 2000, p. 22-26.
  74. Barry Sautman, "Demographic Annihilation" and Tibet, op. cit., p. 242 : « Tibetans in U-Tsang (the central-western Tibetan area) were not exposed to the policies that induced the famine, but were beneficiaries of a land-to-the-tiller program and tax exemptions that increased production »
  75. Kim Yeshi, Tibet. Histoire d'une tragĂ©die, Édition La MartiniĂšre, fĂ©vrier 2009, page 250 - (ISBN 978-2-7324-3700-2).
  76. Françoise Robin, compte rendu de Tubten Khétsun, Memories of Life in Lhasa Under Chinese Rule (traduit du tibétain et présenté par Matthew Akester, New York, Columbia University Press, 2008, 344 p., dans Perspectives chinoises, 2008/2.
  77. Charlie Buffet, « PÀldÚn Gyatso, 66 ans, a survécu à trente-deux ans de goulag chinois. Libre, ce moine tibétain témoigne de l'oppression infligée à son pays. », 21 novembre 1997 à 12h33.
  78. Le Feu sous la neige, Palden Gyatso avec l'historien tibétain Tsering Shakya, Actes Sud, 1997, page 127 (ISBN 2-7427-1358-1).

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