Extraction de l'alumine
Lâextraction de lâalumine est un procĂ©dĂ© chimique qui permet dâextraire lâoxyde dâaluminium appelĂ© alumine contenu dans la bauxite. Lâalumine est la principale matiĂšre premiĂšre qui permettra la fabrication de lâaluminium mĂ©tal par un procĂ©dĂ© d'Ă©lectrolyse.
La mise au point du procĂ©dĂ© a Ă©tĂ© faite au cours de la deuxiĂšme moitiĂ© du XIXe siĂšcle. Plusieurs procĂ©dĂ©s ont Ă©tĂ© Ă©laborĂ©s : le procĂ©dĂ© Deville, le procĂ©dĂ© Peniakoff Sapeck, le procĂ©dĂ© Petersen Haglund. Câest finalement le procĂ©dĂ© inventĂ© par Karl Josef Bayer qui sera universellement utilisĂ©. Le procĂ©dĂ© Orbite semble offrir une alternative moins polluante au procĂ©dĂ© Bayer, mais doit faire ses preuves dans l'industrie.
Le procédé Deville
Ce procédé a été inventé en 1860 par Henri Sainte-Claire Deville. Il a été breveté sous le nom de Louis Le Chatelier (brevet français no 37682, )[1]. Il est souvent appelé « procédé Deville Pechiney ». Il est basé sur l'extraction de l'alumine contenu dans la bauxite par du carbonate de sodium[2].
La premiĂšre opĂ©ration consiste Ă calciner Ă 1 200 °C un mĂ©lange de bauxite broyĂ© avec du carbonate de sodium et un peu de charbon. L'alumine se transforme en aluminate de sodium. L'oxyde de fer reste inchangĂ© et la silice forme un silicate double. Par addition de soude (NaOH), il y a dissolution de lâaluminate de sodium alors que les autres composĂ©s restent sous forme solide. La quantitĂ© de soude utilisĂ©e dĂ©pend de la quantitĂ© de silice contenue dans le minerai.
Par filtration, on sĂ©pare la liqueur dâaluminate de sodium des autres corps. On fait barboter du dioxyde de carbone gazeux dans la liqueur afin de prĂ©cipiter de lâalumine hydratĂ©e et de reconstituer du carbonate de sodium. Ce dernier peut ĂȘtre rĂ©utilisĂ©.
Lâalumine hydratĂ©e est ensuite calcinĂ©e pour obtenir de lâalumine.
Ce procĂ©dĂ© a Ă©tĂ© largement utilisĂ© en France dans lâusine de Salindres jusquâen 1923. En Grande-Bretagne et en Allemagne, ce procĂ©dĂ© a Ă©tĂ© utilisĂ© jusquâĂ la Seconde Guerre mondiale[2].
Procédé Bayer
Le procédé
Il a été mis au point par Karl Josef Bayer en 1887 afin d'extraire l'alumine provenant de la bauxite. Le procédé est basé sur (i) la dissolution à chaud de l'alumine contenue dans la bauxite à l'aide de soude, (ii) l'élimination des impuretés par décantation, (iii) la re-précipitation d'un hydrate d'alumine purifié lors du refroidissement, (iv) l'obtention de l'alumine aprÚs calcination[3].
Dans la bauxite, lâalumine (Al2O3) est prĂ©sente sous forme de monohydrate Al2O3·(H2O) dans la boehmite ou le diaspore, et de trihydrate Al2O3·(H2O)3 dans la gibbsite. Ă 150-200 °C, l'alumine de ces minĂ©raux est dissoute par les ions hydroxyde basiques de la soude selon l'Ă©quation suivante[4] :
- Al2O3 + 2NaOH â 2 NaAlO2 + H2O.
Pour ĂȘtre efficace, la dĂ©composition demande la prĂ©sence dâhydrate dâalumine fraĂźchement extrait.
Les impuretĂ©s autres que la silice (oxyde de fer, hydroxyde de fer, silice, etc.) restent insolubles dans la soude, et sont sĂ©parĂ©es de la liqueur dâalumine par dĂ©cantation et filtration, formant un dĂ©chet appelĂ© la boue rouge[4]. Ce dĂ©chet trĂšs alcalin riche en hydroxyde de sodium est considĂ©rĂ© toxique. Le silicium est Ă©liminĂ© par la suite, lorsqu'il prĂ©cipite Ă nouveau[4].
En refroidissant et en diluant la liqueur, de la gibbsite purifiée précipite. Le trihydrate d'alumine est alors calciné entre 1010 et 1 260 °C afin d'en extraire l'alumine[4] :
- .
Un procédé toujours utilisé
Le dĂ©marrage est difficile. Il ne deviendra rĂ©ellement viable quâen 1907. Le passage des travaux de laboratoire Ă la rĂ©alisation industrielle pose de nombreux problĂšmes.
En France, lâusine qui utilisera la premiĂšre ce procĂ©dĂ© est lâusine de Gardanne Ă partir de 1894. Karl Bayer viendra aider au dĂ©marrage de lâusine. MalgrĂ© sa prĂ©sence, la production nâatteint pas les espĂ©rances[5]. Il faudra de nombreux perfectionnements avant d'obtenir les rendements espĂ©rĂ©s.
Le procédé Bayer détrÎnera les autres méthodes de production de l'alumine à partir de la bauxite. Il est toujours utilisé aujourd'hui.
Le procédé Orbite
Le procédé Orbite a été breveté initialement par l'entreprise canadienne Orbite Technologies en 2008[6]. Il est présenté comme moins énergivore et moins polluant, et censé remplacer le procédé Bayer. Il permettrait aussi de valoriser les boues rouges issues du procédé Bayer. Ce procédé n'a cependant jamais été industrialisé.
Le procédé
Le procĂ©dĂ© Orbite peut ĂȘtre divisĂ© ainsi : la prĂ©paration du minerai, la lixiviation, lâextraction de lâalumine, lâextraction du fer, et finalement la calcination. Le procĂ©dĂ© intĂšgre Ă©galement un systĂšme de rĂ©gĂ©nĂ©ration de l'acide utilisĂ© (pertes minimes). Le minerai (le procĂ©dĂ© a Ă©tĂ© conçu au dĂ©part pour les argiles alumineuses) doit ĂȘtre broyĂ© pour produire de fines particules. Cette Ă©tape permet de maximiser la surface de contact. Ensuite, on procĂšde Ă la « lixiviation » qui consiste Ă lessiver le minerai Ă trĂšs haute tempĂ©rature avec de l'acide chlorhydrique (HCl), ce qui a pour effet de dissoudre tous les atomes des mĂ©taux contenus dans l'argile alumineuse et dans les boues rouges en molĂ©cules chlorurĂ©es en solution (Ă l'exception du groupe IVB; titane, zirconium et hafnium et du groupe IVA; germanium et Ă©tain si l'oxygĂšne est assez abondant). Lâalumine et le fer forment respectivement du trichlorure dâaluminium AlCl3 et du chlorure de fer FeCl3. La silice dioxyde de silicium ainsi que les dioxydes, hydroxydes et silicates de titane, zirconium, hafnium, germanium et l'Ă©tain, sont retirĂ©s par filtration et constituent le seul dĂ©chet du procĂ©dĂ© Ă ce stade[7].
Du « lixiviat », le mĂ©lange restant, le trichlorure dâaluminium est prĂ©cipitĂ© sous forme d'hexahydrate d'alumine. La calcination Ă trĂšs haute tempĂ©rature le transforme en alumine. Le chlorure de fer qui reste dans le lixiviat, est ensuite soumis Ă une hydrolyse Ă basse tempĂ©rature, prĂ©cipitant de l'oxyde de fer trĂšs pur, tout en rĂ©gĂ©nĂ©rant de lâacide chlorhydrique. Il ne reste alors dans le lixiviat que des ions mĂ©talliques en solution : du magnĂ©sium, du gallium, des alcalins et des terres rares rĂ©cupĂ©rables par les mĂ©thodes d'extractions habituelles. Le procĂ©dĂ© ne produit pas de boue rouge ni de dĂ©chet acide. Orbite Aluminae a dĂ©montrĂ© que le procĂ©dĂ© fonctionne sur diverses argiles alumineuses, sur la bauxite de qualitĂ© trĂšs variĂ©e, la nĂ©phĂ©line, le kaolin, les cendres volantes provenant du charbon, et les boues rouges. Cette derniĂšre application fait du procĂ©dĂ© Orbite une mĂ©thode de traitement des dĂ©chets des alumineries utilisant le procĂ©dĂ© Bayer[8].
Bibliographie
- Philippe Voisin in « Métallurgie extractive de l'aluminium », Techniques de l'ingénieur, traité matériaux métalliques, M2 340.
- G. A. Baudart in « Histoire française de l'alumin », Revue de l'aluminium, no 217, janvier 1955, page 35.
- (en) EncyclopÊdia Britannica, « Bayer process », sur www.britannica.com (consulté le )
- (en) « Manufacturing of alumina through Bayer process », sur www.worldofchemicals.com (consulté le )
- Olivier Raveux in « Les débuts de l'alumine à Gardanne (1892 - 1899) », Cahiers d'histoire de l'aluminium, no 13, hiver 1993 - 1994, page 7
- Brevet US 7837961 « Processes for extracting aluminum and iron from aluminous ores », déposé le 7 mai 2008, expiré le 31 décembre 2018.
- https://www.google.com/patents/WO2012065253A1?cl=en&dq=inassignee:%22Orbite+Aluminae+Inc.%22&hl=en&sa=X&ei=-VMFU_3eFum9yAHFy4CIAg&ved=0CGYQ6AEwBw., consulté le 19 février 2014
- « Procédé de remédiation des boues rouges et de récupération des minéraux d'Orbite »(Archive.org ⹠Wikiwix ⹠Archive.is ⹠Google ⹠Que faire ?) (consulté le )