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Encrassement biologique

L’encrassement biologique ou bio-encrassement (anglais biofouling) est la formation d'une couche gênante d'êtres vivants sur une surface artificielle en contact permanent ou fréquent avec de l'eau[1] - [2].

Vers tubicoles, éponges, algues, actinies et autres organismes dans les eaux de Redwood City, États-Unis.
Biofouling mort, sous la coque d'un bateau de pêche en bois mis au sec pour carénage et rénovation (Bretagne France)

Il peut s'agir d'une surface immergée (ex : coque de bateau, chaine immergée, bouée, corps-mort, etc. colonisés par des organismes marins) ou contenant de l'eau (ex : intérieur d'un tuyau ou d'une vanne ou d'un système de filtration par exemple colonisé par Plumatella rugosa, Fredericella indica, Cordylophora caspia ou Paludicella articulata, face interne d'une vitre d'aquarium, etc.).

Ce phénomène s'observe surtout dans le milieu marin, où le périphyton est naturellement relativement divers et abondant, mais se retrouve, bien qu'en moindres proportions, en milieu dulcicole.

Des traitements mécaniques (brossage, grattage) et/ou chimiques (« antifouling », biocides) sont utilisés pour limiter ce phénomène. Le fait de faire régulièrement passer un bateau d'une zone salée à une zone d'eau douce et inversement permet de limiter l'encrassement.

Description

L'encrassement biologique (biofouling) peut être constitué, sur une même zone, de centaines d'espèces différentes d'êtres vivants. Une partie du plancton, constitué de larves d'invertébrés (porifères, cnidaires, bivalves, brachiopodes, tuniciers, urochordés, vers tubicoles...), de végétaux et de bactéries finira par devenir sessile, c'est-à-dire ancrée sur le substrat (fond de sable, vase, roche) ou sur un support convenable (autre animal ou autre végétal, sessile ou non, mort ou vivant, récif artificiel dû à des constructions humaines...etc) pour :

  • soit y ĂŞtre ancrĂ© dĂ©finitivement (Certaines algues et plantes aquatiques, foraminifères, Eponges, coraux, quelques hydraires, tuniciers, vers tubicoles, balanes, pouce-pieds...etc). Ces ĂŞtres vivants sont appelĂ©s Ă©pibiontes. La plupart du temps, si l'on retire l'Ă©pibionte de son substrat et que l'on le laisse en pleine eau, il ne se raccroche pas de nouveau Ă  un substrat et finit par dĂ©pĂ©rir, Ă  la merci des prĂ©dateurs.
  • soit y ĂŞtre accrochĂ© mais tout en pouvant se dĂ©placer, bien que lentement, que ce soit sur le substrat ou, dans certains cas, en pleine eau (Bivalves, brachiopodes, actinies…). Ces ĂŞtres vivants, s'ils sont enlevĂ©s de leur substrat initial et laissĂ©s en pleine eau, peuvent, s'ils rejoignent de nouveau un substrat, s'y accrocher et y vivre normalement.

La formation de biofilms est la première étape de l'encrassement[3].

Cas particuliers

  • Les cnidaires possĂ©dant une phase polype/phase mĂ©duse : la larve du cnidaire (Planula) retombe sur le substrat et devient un polype sessile : le polype se divise (Bourgeonnement) en plusieurs petits disques : une fois libĂ©rĂ©s, ils deviendront autant de petites mĂ©duses, qui, une fois adultes, se reproduiront et recommenceront le cycle.
  • Certaines espèces animales, vĂ©gĂ©tales et autre n'attendent pas toujours de lâcher du sperme et des Ĺ“ufs dans l'eau qui, une fois fĂ©condĂ©s, donneront des larves planctoniques qui se fixerons au substrat; si cet ĂŞtre vivant se casse pour une raison ou pour une autre, le "membre" sectionnĂ© dĂ©rivera dans l'eau jusqu'Ă  ce qu'il finisse sur un substrat ou il se fixera et donnera un individu Ă  part (Ou une nouvelle colonie dans le cas d'animaux coloniaux). c'est le cas de certains cnidaires, comme le corail fouet, ou de certaines algues, comme les caulerpes.
  • Certains dĂ©pĂ´ts sont dus Ă  des espèces introduites et devenues invasives (ex : Cordylophora caspia) ou qui trouvent (par exemple dans des effluents industriels riches en nutriments les conditions d'une pullulation (ex : PĂ©ritriches).
  • Des Ă©tudes portent sur la colonisation de certains matĂ©riaux (ex : surfaces de ciments immergĂ©s en eau de mer ou en eau douce[4]) et sur leurs consĂ©quences Ă©ventuelles sur la durĂ©e de vie de ces matĂ©riaux.

RĂ´le de l'encrassement biologique dans la nature

Le biofouling constitue une part importante dans l’écosystème marin et dulcicole. Les constituants biologiques du phénomène sont autant d’écosystèmes, de refuges, de garde manger et d’éléments symbiotiques pour de nombreuses espèces aquatiques :

  • Une grande partie du plancton est constituĂ© de larves d’espèces sessiles et de spores d’algues, elles-mĂŞmes lâchĂ©es par des constituants des communautĂ©s de l'encrassement ;
  • La grande majoritĂ© des constituants biologiques sont des filtreurs planctonivore, et dĂ©pendent donc de cette ressource pour survivre ;
  • Les rĂ©cifs organiques sont dus au biofouling : Les rĂ©cifs de coraux d’eaux chaudes ou froides, les fonds coralligènes en MĂ©diterranĂ©e, les rĂ©cifs d’éponges, de vers tubicoles, de cyanobactĂ©ries, d’huitres, etc., sont autant de constructions organiques causĂ©es par le biofouling (voir rĂ©cif) ;
  • De très nombreuses espèces du dĂ©pĂ´t vivent en association, que ce soit entre elles (Plusieurs espèces d’éponges s’associent avec d’autres, ou avec des tuniciers ou des cnidaires ; de nombreuses algues et plantes Alismatales s’associent entre elles… etc. On appelle cela l’episymbiose) ou avec des espèces non sessiles. (les exemples sont pratiquement innombrables mais l’on peut citer : Le poisson clown ou certaines crevettes avec des actinies ; quelques Ă©ponges avec des crevettes sociables ; de nombreux ĂŞtres vivants Ă©pibiontes qui vivent fixĂ©s sur le corps ou la coquilles de certaines espèces animales… etc). En milieu marin tropical, chez les coraux par exemple, la symbiose avec des algues zooxanthelles permet de pallier le problème majeur de la carence de plancton dĂ» Ă  la tempĂ©rature des eaux. Certains ĂŞtres vivants peuvent ĂŞtre des parasites, parfois potentiellement mortels leurs hĂ´tes. L’éponge clione, par exemple, peut se fixer sur la coque de certains mollusques bivalves, la transpercer et tuer l’animal.

De manière plus générale, des espèces animales et végétales dont le stade juvénile est planctonique peuvent se fixer sur le corps d’animaux, fixés ou non, et de manière symbiotique ou non. Il n’est pas rare de trouver sur les coquilles et corps de mollusques, crustacé, tortues marines ou mammifères marin (pour ne citer que ces groupes taxinomiques) des balanes, pouce pieds, vers tubicoles calcaires, bivalves (y compris sur la coquille d’espèces de bivalves de taille plus grande), cnidaires (Les actinies, mais aussi certains hydrozoaires qui ne se fixent que sur la coquille de certaines espèces de mollusque gastéropodes, utilisés par des bernards l’hermites, en sont un bon exemple) algues, bryozoaires… etc.

L'encrassement biologique et l'homme

L'introduction d'espèces aquatiques envahissantes dans de nouveaux milieux par le biais des navires représente une grande menace pour les océans et la biodiversité. Les eaux de ballast ou la coque des navires transportent des espèces qui peuvent survivre au voyage et se reproduire dans le milieu hôte. Elles deviennent alors envahissantes en se développant plus vite que les espèces indigènes. Avec l'accroissement du volume du trafic, la question des espèces envahissantes ainsi transportées amène un problème en croissance et prend déjà des proportions inquiétantes dans de nombreuses régions du globe[5].

Ces espèces provoquent une destruction considérable de la biodiversité et des précieuses ressources naturelles desquelles les populations sont tributaires. À cela s'ajoutent des retombées économiques très négatives sur les secteurs dont les activités reposent sur l’exploitation du milieu marin et du littoral, telles que le tourisme, l'aquaculture et la pêche[5]. De plus, l'encrassement cause dégâts matériels aux infrastructures telles les prises d'eau potable, les quais, les ponts, etc.

En vue de prévenir le transfert d'espèces envahissantes, la Convention des Nations unies sur le droit de la mer fournit un cadre légal international, en prescrivant que les États doivent œuvrer à prévenir, réduire et maîtriser la pollution du milieu marin résultant des activités de l'homme, y compris l'introduction intentionnelle ou accidentelle en une partie du milieu marin d'espèces nuisibles ou allogènes. L'Organisation maritime internationale coordonne les efforts déployés à l'échelle internationale pour traiter la question du transfert d'espèces aquatiques envahissantes par le biais des transports maritimes[5].

Le bio-encrassement est également le fait d'espèces bactériennes locales ou exotiques qui peuvent affecter la qualité de l'eau potable. Le chlore et les chloramines servent de biocides, afin de réduire l'encrassement biologique dans les tours de refroidissement à l'eau et les systèmes de refroidissement des centrales électriques de même que dans les ateliers de fabrication des métaux, des peintures, les usines pétrochimiques et les usines de dessalement. La chloration supprime aussi les films biologiques et les algues, les bactéries et leurs excrétions extracellulaires ou détruit les hydraires, les anatifes, les moules, les myes et les huîtres à la hauteur des prises d'eau[1].

Galerie

  • Clavelina lepadiformis (gros tuniciers jaunes) avec Clavelina nana (petits tuniciers transparents), algues, actinies, hydrozoaires, et deux planaires roses Prostheceraeus giesbrechtii (non sessile)
    Clavelina lepadiformis (gros tuniciers jaunes) avec Clavelina nana (petits tuniciers transparents), algues, actinies, hydrozoaires, et deux planaires roses Prostheceraeus giesbrechtii (non sessile)
  • Tunicier Halocynthia papillosa, actinies, Ă©ponges, corralligènes, peut ĂŞtre des ascidies coloniales.
    Tunicier Halocynthia papillosa, actinies, éponges, corralligènes, peut être des ascidies coloniales.
  • Ici, sur un fond corralligène en Croatie : Ă©ponge Clathrina clathrus, corralligènes, autres Ă©ponges, hydrozoaires...
    Ici, sur un fond corralligène en Croatie : éponge Clathrina clathrus, corralligènes, autres éponges, hydrozoaires...
  • Idem ici : Tunicier Halocynthia papillosa, Ă©ponges, corralligènes, algues vertes, hydrozoaires, dent de chien.
    Idem ici : Tunicier Halocynthia papillosa, éponges, corralligènes, algues vertes, hydrozoaires, dent de chien.
  • Ici : des vers tubicoles Serpula vermicularis, des algues corralligènes encroĂ»tantes, un chiton (Non epibionte) des hydrozoaires minuscules...
    Ici : des vers tubicoles Serpula vermicularis, des algues corralligènes encroûtantes, un chiton (Non epibionte) des hydrozoaires minuscules...
  • En milieu tempĂ©rĂ©, y compris en MĂ©diterranĂ©e (Ci contre) les dĂ©pĂ´ts biologiques sont très diversifiĂ©s, concentrĂ©s et nombreux. Sur cette photo prise sur un fond corralligène, on peut y voir : Plusieurs espèces de bryozoaire (RamifiĂ© au centre, divers encroĂ»tants), des actinies, des algues corralligènes encroĂ»tantes, des Ă©ponges et des hydrozoaires (Ramifications transparentes blanchâtres entourant le bryozoaire jaune). Notez aussi la castagnole Chromis chromis rĂ©fugiĂ© dans la cavitĂ© en arrière-plan (non sessile)
    En milieu tempéré, y compris en Méditerranée (Ci contre) les dépôts biologiques sont très diversifiés, concentrés et nombreux. Sur cette photo prise sur un fond corralligène, on peut y voir : Plusieurs espèces de bryozoaire (Ramifié au centre, divers encroûtants), des actinies, des algues corralligènes encroûtantes, des éponges et des hydrozoaires (Ramifications transparentes blanchâtres entourant le bryozoaire jaune). Notez aussi la castagnole Chromis chromis réfugié dans la cavité en arrière-plan (non sessile)
  • Ce clichĂ© pris dans les eaux du Timor montre bien ici la diversitĂ© des communautĂ©s coralliennes que l'on peut retrouver au sein des mers tropicales du globe.
    Ce cliché pris dans les eaux du Timor montre bien ici la diversité des communautés coralliennes que l'on peut retrouver au sein des mers tropicales du globe.
  • Les Ă©pibiontes peuvent aussi servir de camouflage pour de nombreuses espèces; ce poisson pierre, dont la peau et les excroissances imitent des incrustations et des ramifications d'organismes Ă©pibiontes, peut ainsi passer inaperçu aux yeux des proies dont il se nourrit.
    Les épibiontes peuvent aussi servir de camouflage pour de nombreuses espèces; ce poisson pierre, dont la peau et les excroissances imitent des incrustations et des ramifications d'organismes épibiontes, peut ainsi passer inaperçu aux yeux des proies dont il se nourrit.

Notes et références

  1. Service de traduction, « Encrassement biologique », Travaux publics et Services gouvernementaux Canada, (consulté le ).
  2. « Encrassement biologique », grand dictionnaire, Office québécois de la langue française, (consulté le ).
  3. [vidéo] Biofilms sur YouTube à 9:15.
  4. Ahmed K.B (2016). Etude de l'encrassement biologique de matériaux cimentaires en eau de rivière : analyse de l'influence des paramètres de surface des pâtes cimentaires (Doctoral dissertation, Université de Strasbourg)
  5. « Encrassement biologique », Organisation maritime internationale, (consulté le ).

Voir aussi

Articles connexes

Liens externes

  • Ressource relative Ă  la santĂ© :
  • V. Stiger-pouvreau. Le biofouling: notions d'interactions entre organismes marins. Master Sciences Technologies SantĂ©, Mention Biologie, santĂ©, UE RĂ©actions de dĂ©fense. LEBHAM-IUEM-UBO. Lire le document pdf
  • "Don't move a mussel (or a clam, or a snail)." Cary Institute of Ecosystem Studies. ScienceDaily. ScienceDaily, 2 April 2014. www.sciencedaily.com/releases/2014/04/140402133949.htm

Bibliographie

  • Daisuke Nakano, David L Strayer (2014) Biofouling animals in fresh water: biology, impacts, and ecosystem engineering. Frontiers in Ecology and the Environment, ; 12 (3): 167 DOI: 10.1890/130071
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