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Edmond Jouhaud

Edmond Jules René Jouhaud, né le à Bou-Sfer (Algérie française) et mort le à Royan, est un général d'armée aérienne. Il participe au putsch d'Alger d'avril 1961 puis à l'Organisation de l'armée secrÚte (OAS), ce qui lui vaut une condamnation à mort puis une grùce présidentielle en 1962. Il est amnistié en 1968.

Biographie

Origine

NĂ© de parents instituteurs[1], Ă  Bou-Sfer (future base aĂ©rienne française), prĂšs d’Oran en AlgĂ©rie, il est le benjamin d'une famille de six enfants, dont les grands parents originaires de Limoges se sont Ă©tablis en 1870 en AlgĂ©rie, colonisĂ©e par la France depuis 1830. Il fait ses Ă©tudes primaires Ă  Oran puis obtient le baccalaurĂ©at au lycĂ©e LamoriciĂšre d'Oran.

CarriĂšre militaire

Edmond Jouhaud entre Ă  Saint-Cyr en 1924 ; il en sort en 1926 et est affectĂ© au 35e rĂ©giment d’aviation. Il sert de 1930 Ă  1932 en Afrique Occidentale Française (A.O.F.). Promu capitaine en 1935, il sert de nouveau en A.O.F. jusqu’en 1937. Admis en 1938 Ă  l’École supĂ©rieure de guerre aĂ©rienne, il est promu commandant le 3 septembre 1939. AffectĂ© Ă  l’état-major des forces aĂ©riennes et des forces terrestres antiaĂ©riennes du nord-est, il prend par la suite le commandement d’un groupe aĂ©rien de reconnaissance. AffectĂ© en 1942 au cabinet militaire du SecrĂ©taire d’État Ă  l’aviation, il est placĂ© en 1943, sur sa demande, en congĂ© d’armistice. AprĂšs avoir tentĂ© sans succĂšs de rejoindre l’Angleterre, il entre dans la rĂ©sistance, dans la rĂ©gion de Bordeaux, sous les ordres du gĂ©nĂ©ral Revers, chef de l’Organisation de rĂ©sistance de l'ArmĂ©e (O.R.A.), comme chef de la rĂ©gion bordelaise.

Plogoff : monument commémoratif de l'échouage du Jouet des Flots le à Feunteun Aod

En fĂ©vrier 1944, il fait une nouvelle tentative pour rejoindre l'Angleterre, depuis l'Île-Tudy, Ă  bord du Navire "Le Jouet des Flots", Ă  l'issue de laquelle Emile Bollaert, Pierre Brossolette et Yves Le HĂ©naff sont faits prisonniers[2] - [3]. Commandant des FFI situĂ©s au sud de la Gironde, fin aoĂ»t 1944. RappelĂ© en activitĂ© en novembre 1944, il prend le commandement du groupe aĂ©rien spĂ©cial 1/36[4], puis est affectĂ© au commandement des transports aĂ©riens militaires. Colonel en 1946, il est sous-chef d’état-major de l’air en 1947 et est appelĂ© au commandement de l’armĂ©e de l’air en Tunisie en 1948.

Promu gĂ©nĂ©ral de brigade aĂ©rienne en 1949, il commande les forces aĂ©riennes tactiques en Afrique du nord, puis l'Ă©cole des mĂ©caniciens de l’armĂ©e de l'air. En 1951, il est nommĂ© commandant de la 1re rĂ©gion aĂ©rienne, puis dĂ©signĂ© auditeur au Centre des hautes Ă©tudes militaires. En 1952, il est nommĂ© commandant de la 1re division aĂ©rienne puis commandant des forces aĂ©riennes françaises en Allemagne.

En 1954, promu gĂ©nĂ©ral de division aĂ©rienne, il dirige l'armĂ©e de l'air en Indochine[5] dans le contexte de la derniĂšre annĂ©e de la guerre d'Indochine. De retour en mĂ©tropole, il est nommĂ© major gĂ©nĂ©ral de l’armĂ©e de l’air puis, le , chef d’état-major des forces de l’armĂ©e de l’air. Il est promu gĂ©nĂ©ral de corps aĂ©rien en 1956. Il prend le commandement de la 5e rĂ©gion aĂ©rienne en AlgĂ©rie en 1957, au temps de la guerre d'AlgĂ©rie, et devient adjoint interarmĂ©es au gĂ©nĂ©ral Salan, commandant supĂ©rieur interarmĂ©es en AlgĂ©rie.

AprĂšs le putsch d'Alger du 13 mai 1958, il devient vice-prĂ©sident du ComitĂ© de salut public AlgĂ©rie-Sahara, oĂč il joue un rĂŽle modĂ©rateur[6].

GĂ©nĂ©ral d’armĂ©e aĂ©rienne en 1958, il est nommĂ© en septembre de la mĂȘme annĂ©e chef d'Ă©tat-major de l'ArmĂ©e de l'air, puis, en 1960, inspecteur gĂ©nĂ©ral de l’armĂ©e de l’air. Ce poste honorifique l'Ă©carte de toute responsabilitĂ© et il lui est interdit de se rendre en AlgĂ©rie. Sur sa demande, il est mis en disponibilitĂ© en septembre et devient prĂ©sident d'honneur du Rassemblement national des Français d'Afrique du Nord et d'outre-mer[7].

Putsch des généraux et OAS

Partisan de l'Algérie française, il appelle publiquement à voter non au référendum sur l'autodétermination de l'Algérie de janvier 1961 voulu par le général de Gaulle[8].

Jouhaud est l'un des quatre gĂ©nĂ©raux cinq Ă©toiles organisateurs du coup d’état d’Alger du 22 au 25 avril 1961, avec Challe, Salan et Zeller. Il est le seul pied-noir parmi eux. AprĂšs son Ă©chec, il est condamnĂ© par contumace Ă  la peine de mort le 11 juillet 1961, vit dans la clandestinitĂ© et devient l’adjoint du gĂ©nĂ©ral Salan Ă  la tĂȘte de l’OAS, responsable de la rĂ©gion d’Oran.

Il est arrĂȘtĂ© le 25 mars 1962 Ă  Oran, amenĂ© en mĂ©tropole et incarcĂ©rĂ© Ă  la prison de la SantĂ©[9]. À la suite de son arrestation, le gĂ©nĂ©ral Jouhaud est remplacĂ© Ă  la tĂȘte de l'OAS d'Oranie par le gĂ©nĂ©ral Paul Gardy[10].

ProcÚs, condamnation à mort et grùce présidentielle

JugĂ© Ă  Paris par un tribunal d'exception, le Haut Tribunal militaire, Ă  partir du 11 avril, il est dĂ©fendu par deux avocats, Yves Perrussel et Jacques Charpentier. De nombreux tĂ©moins dĂ©posent en sa faveur, parmi lesquels la veuve d'Albert Camus. Il est dĂ©clarĂ© coupable des cinq chefs d'accusation retenus contre lui et condamnĂ© Ă  mort le 13 avril 1962, pour avoir participĂ© au putsch de 1961 mais aussi pour avoir couvert certains assassinats de l'OAS comme celui du lieutenant-colonel Rançon, chef de la sĂ©curitĂ© militaire Ă  Oran, mĂȘme s'il en a dĂ©savouĂ© certains lors de son procĂšs[11]. Le gĂ©nĂ©ral Partiot, qui fut Ă  Saint-Cyr le « binĂŽme » de Jouhaud, refuse de dĂ©signer le peloton d'exĂ©cution qu'il aurait dĂ» diriger[12]. Edmond Jouhaud Ă©chappe finalement de trĂšs peu Ă  l’exĂ©cution : le gĂ©nĂ©ral de Gaulle, pourtant dĂ©sireux de ne pas gracier Jouhaud Ă  la suite du verdict qu'il juge trop clĂ©ment visant le gĂ©nĂ©ral Salan (arrĂȘtĂ© le 20 avril 1962 et condamnĂ© par le Haut Tribunal militaire le 23 mai Ă  la prison Ă  vie), se serait dĂ©cidĂ© Ă  le gracier aprĂšs l'intervention de Jean Foyer[13] et en raison des menaces de dĂ©mission de plusieurs membres du gouvernement (Pierre Sudreau, ValĂ©ry Giscard d'Estaing, Louis Joxe, Pierre Messmer, Edgard Pisani) et du nouveau Premier ministre, Georges Pompidou[14] - [15] - [16]. Sa peine de mort est commuĂ©e en peine de dĂ©tention criminelle Ă  perpĂ©tuitĂ© le 28 novembre 1962, aprĂšs plus de sept mois passĂ©s dans une cellule d'abord Ă  la prison de la SantĂ© au rĂ©gime pĂ©nitentiaire des condamnĂ©s Ă  mort, puis au Centre pĂ©nitentiaire de Fresnes. Il est alors transfĂ©rĂ© Ă  la prison de Tulle, Ă  l'instar du gĂ©nĂ©ral Salan[17].

Amnistie

Libéré de la prison de Tulle en décembre 1967[18], il est amnistié en 1968, et réintégré dans ses grades et prérogatives en 1982 à la suite de la loi du 3 décembre 1982, votée par le Parlement à l'initiative personnelle du président de la République François Mitterrand, contre l'avis de certains parlementaires socialistes[19].

Il devient le porte-drapeau des associations de rapatriés, lutte pour l'amnistie et l'indemnisation et publie plusieurs livres justifiant son combat en faveur de l'Algérie française[20] - [21]. Il préside le Comité national des rapatriés et spoliés, formé en 1970[22] et le Front national des rapatriés, fondé en 1969[23], qui cherche à unifier tous les groupements de rapatriés mais qui coexiste cependant avec d'autres associations comme l'Association nationale des Français d'Afrique du Nord, d'Outre-Mer et de leurs amis (ANFANOMA) et le Rassemblement national des Français d'Afrique du Nord et d'outre-mer (RANFRAN), plus anciennes[24].

Il meurt en 1995 à 90 ans, dernier survivant du « quarteron de généraux en retraite » (selon la formule du général de Gaulle) responsable du putsch d'avril 1961.

DĂ©corations

ƒuvres

  • Histoire de l’Afrique du Nord, Les deux coqs d’or,
  • Ô mon pays perdu - De Bou-Sfer Ă  Tulle, Fayard, 1969,
  • La vie est un combat - Souvenirs : 1924-1944, Fayard, 1975,
  • Ce que je n’ai pas dit - Sakiet, OAS, Évian, Fayard, 1977,
  • Youssouf, esclave, mamelouk et gĂ©nĂ©ral de l’ArmĂ©e d’Afrique, Robert Laffont, 1980
  • Serons-nous enfin compris ?, Albin Michel, 1984 (Lire en ligne le dĂ©but).

Toponymie

Notes et références

  1. Acte de naissance numérisé par les ANOM d'Aix en Provence, page 8/20
  2. "Le procĂšs d'Edmond Jouhaud, Google books"
  3. "Association des services spéciaux de la défense nationale: bibliographie, Yves Le Henaff"
  4. "Inventaire archives, p301/426"
  5. "L'Algérie, De Gaulle et l'armée: 1954-1962"
  6. LES BIOGRAPHIES DES PROMOTEURS DU COUP DE FORCE D'ALGER, Le Monde, 24 avril 1961
  7. Jean Planchais, Edmond Jouhaud, Le Monde, 6 septembre 1995 ; LE GÉNÉRAL JOUHAUD fait ses adieux Ă  l'armĂ©e de l'air, Le Monde, 15 octobre 1960
  8. LE GÉNÉRAL JOUHAUD : je dirai " non " pour ne pas trahir les pauvres gens de mon AlgĂ©rie natale, Le Monde, 6 janvier 1961
  9. L'ex-gĂ©nĂ©ral Jouhaud, chef de l'O.A.S. Ă  Oran, est arrĂȘtĂ©. Une fusillade entre manifestants europĂ©ens et service d'ordre fait plusieurs morts Ă  Alger, Le Monde, 27 mars 1962 : « L'ex-gĂ©nĂ©ral Edmond Jouhaud, un des trois " gĂ©nĂ©raux " de l'O.A.S. et un des " quatre " du putsch d'avril 1961, condamnĂ© Ă  mort par contumace, a Ă©tĂ© arrĂȘtĂ© dimanche aprĂšs-midi Ă  la suite d'une opĂ©ration montĂ©e par les forces de l'ordre dans le centre d'Oran. L'ex-gĂ©nĂ©ral, qui a Ă©tĂ© transfĂ©rĂ© lundi matin en mĂ©tropole, a Ă©tĂ© incarcĂ©rĂ© et mis au secret ce matin Ă  10 h. 30 Ă  la prison de la SantĂ©, ainsi que son adjoint, l'ex-commandant Camelin, et l'aspirant Jean-Claude Jourdain. Une secrĂ©taire, arrĂȘtĂ©e en mĂȘme temps, Mlle Raymond, a Ă©tĂ© de son cĂŽtĂ© incarcĂ©rĂ©e Ă  la Petite-Roquette. Deux gendarmes, dont un officier, ont Ă©tĂ© tuĂ©s au cours de l'opĂ©ration qui a permis l'arrestation de Jouhaud ; vingt-cinq autres, dont deux officiers, ont Ă©tĂ© blessĂ©s ainsi qu'un lieutenant d'infanterie de marine. »
  10. « Le général Paul Gardy est mort en Argentine », Le Monde,
  11. " Il ne saurait y avoir deux justices, une pour les chefs et une pour les tueurs " avait dit l'avocat gĂ©nĂ©ral RaphaĂ«l en requĂ©rant la peine capitale, Le Monde, 16 avril 1962 ; L'avocat gĂ©nĂ©ral requiert la peine de mort, Le Monde, 14 avril 1962 ; J'ai voulu dĂ©fendre une terre qui Ă©tait la mienne et celle de ma famille DÉCLARE E. JOUHAUD A SON PROCÈS, Le Monde, 12 avril 1962. Extrait du rĂ©quisitoire de l'avocat gĂ©nĂ©ral : « On a fait les Ă©loges de Jouhaud, le procĂšs du F.L.N., le procĂšs du gouvernement, celui de l'autodĂ©termination, que la nation a faite sienne ! Mais c'est l'autre procĂšs que vous avez Ă  faire. C'est celui de Jouhaud, l'organisateur de la sĂ©dition militaire puis chef de l'organisation de l'armĂ©e secrĂšte qui visait Ă  renverser les institutions de la RĂ©publique ! (...) Ces actes, donc, Jouhaud dĂ©clare en assumer la responsabilitĂ© en les " couvrant ", selon sa propre expression. S'il a dĂ©savouĂ© les plus graves, les crimes de droit commun, vous retiendrez que jamais il ne les a dĂ©savouĂ©s publiquement, qu'il n'a jamais rien fait ou tentĂ© pour les faire cesser. La violence appelle la violence, c'est lui qui l'a dit, pour tenter d'expliquer les excĂšs qu'il est bien obligĂ© de reconnaĂźtre. Mais pourquoi alors l'O.A.S., dont il Ă©tait le chef, incitait-elle Ă  cette violence dans ses tracts et ses Ă©missions ? Bien sĂ»r, il n'allait pas dĂ©poser lui-mĂȘme les bombes ni le plastic ; ni actionner les mortiers, ni piloter les avions sur Oujda, ni abattre au pistolet les malheureux magistrats, policiers, fonctionnaires, qui furent les victimes. Mais combien plus coupable, Ă  mon sens, celui qui en tant que chef ordonne, couvre et ne dĂ©savoue pas. Oui, celui qui, se croyant sĂ»r de l'impunitĂ©, arme le bras qui frappe, est infiniment plus coupable que celui qui tue. C'est donc la peine de mort qu'encourt Jouhaud si vous ne le faites pas bĂ©nĂ©ficier de circonstances attĂ©nuantes. »
  12. Il n'avait pas voulu désigner le peloton qui aurait exécuté Edmond Jouhaud, Le Monde, 30 mai 1962
  13. Sur les chemins du droit avec le Général
  14. Au-delĂ  de toutes les frontiĂšres, Pierre Sudreau
  15. JOUHAUD ET CANAL SONT GRACIÉS PAR LE GÉNÉRAL DE GAULLE, Le Monde, 29 novembre 1962
  16. Éric Roussel, Georges Pompidou, 1911-1974, Jean-Claude Lattùs, 1994
  17. Les anciens généraux Salan et Jouhaud ont été transférés à la prison de Tulle, Le Monde, 8 décembre 1962
  18. LE GÉNÉRAL JOUHAUD EST LIBÉRÉ ainsi que cinq autres condamnĂ©s activistes. Des quatre chefs du putsch d'Alger seul Raoul Salan demeure dĂ©tenu, Le Monde, 25 dĂ©cembre 1967 ; Le dĂ©part de Tulle, Le Monde, 24 dĂ©cembre 1967 (Lire en ligne)
  19. Le dernier du quarteron, Le Monde, 30 juin 1987
  20. Jean Planchais, op. cit.
  21. DerniÚre mission pour le général Jouhaud, Le Monde, 21 mai 1984
  22. UN APPEL DU GÉNÉRAL JOUHAUD POUR L'AMNISTIE ET L'INDEMNISATION, Le Monde, 11 mars 1972, LE GÉNÉRAL JOUHAUD A LA PRÉSIDENCE DU COMITÉ NATIONAL qui regroupe neuf associations, Le Monde, 24 dĂ©cembre 1970
  23. Le gĂ©nĂ©ral Jouhaud : j'ai acceptĂ© la prĂ©sidence du F.N.R. pour rĂ©aliser la fusion des diffĂ©rentes associations, Le Monde, 2 dĂ©cembre 1969 ; LA CONVENTION NATIONALE DES RAPATRIÉS A PLACÉ LE GÉNÉRAL JOUHAUD Ă  la tĂȘte du Front national, qui a profondĂ©ment remaniĂ© ses structures, Le Monde, 30 septembre 1969
  24. Le gĂ©nĂ©ral Jouhaud fait approuver le principe de l'unification des associations nationales, Le Monde, 21 octobre 1969 ; LE CONSEIL NATIONAL DE L'ANFANOMA DÉCIDE DE GARDER SES STRUCTURES, Le Monde, 1er octobre 1969
  25. Voir le site d'Henri Pouillot

Voir aussi

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