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Convection mantellique

La convection mantellique est un phĂ©nomĂšne physique se produisant Ă  l’intĂ©rieur du manteau terrestre. Il peut avoir lieu sur d'autres planĂštes ou satellites telluriques sous certaines conditions. La convection mantellique est une composante essentielle de la thĂ©orie de la tectonique des plaques.

Une des visions modernes de la convection mantellique (selon Kevin C. A. Burke (en)).

Il existe une différence notable de température entre le manteau lithosphérique et l'asthénosphÚre sous-jacente, qui est responsable d'une descente de manteau froid lithosphétique (au niveau des zones de subduction) dans l'asthénosphÚre plus dense[1]. Une remontée plus anecdotique de matériel mantellique profond chaud est observée au niveau des points chauds. Ces deux mécanismes sont autorisés par le comportement ductile des roches à grande échelle, qui permet au réseau cristallin de se déformer sans se briser (fluage plastique).

Le nombre de Rayleigh Ra, sans dimension, exprime le rapport des forces impliquées dans la convection, qui débute si Ra dépasse une valeur critique, caractéristique d'un milieu donné. Le calcul du nombre de Rayleigh pour le manteau montre une possibilité de convection, en accord avec les observations.

Estimation du nombre de Rayleigh

Le calcul du nombre de Rayleigh permet d’affirmer que le manteau est effectivement en convection. La difficultĂ© rĂ©side dans la dĂ©termination des paramĂštres intervenant dans la formule de Ra. La valeur calculĂ©e couramment est de Ra = 5 Ă— 108, dĂ©passant de loin le nombre de Rayleigh critique Rac proche de 1 000, ce qui tĂ©moigne de l’existence rĂ©elle d’une convection mantellique dynamique mais lente.

Estimation du coefficient d'expansion thermique et de la diffusivité thermique

Ils sont obtenus Ă  l’aide d’expĂ©riences de gĂ©ophysique rĂ©alisĂ©es en laboratoire sur les minĂ©raux constitutifs du manteau (olivine, pyroxĂšnes), trouvĂ©s dans des roches mantelliques exhumĂ©es par tectonique ou par le volcanisme. Ces expĂ©riences thermodynamiques sont faites Ă  haute pression et haute tempĂ©rature pour simuler les conditions du manteau.

Expérimentalement on trouve des valeurs de l'ordre de :

L’estimation de ces paramĂštres permet de calculer la diffusivitĂ© thermique : 10−6 m2/s.

Estimation de ΔT

ΔT est la diffĂ©rence de tempĂ©rature entre la base (2 885 km) et la surface du manteau (30 km), soit une profondeur de l'ordre de 2 900 km. Ce paramĂštre est difficile Ă  estimer car il est impossible d’effectuer des mesures directes, mais il est possible de l’estimer par le flux de chaleur du manteau.

Si l’on ne considĂšre une Terre sans convection, la tempĂ©rature du manteau est due Ă  plusieurs phĂ©nomĂšnes :

  • la dĂ©sintĂ©gration d’élĂ©ments radioactifs naturels contenus dans les minĂ©raux mantelliques comme l’uranium (U), le thorium (Th) et le potassium (K). Les quantitĂ©s estimĂ©es pour ces Ă©lĂ©ments sont 24 ppm pour K, 0,006 ppm pour U et 0,002 ppb pour Th. Le flux de chaleur H produit par unitĂ© de masse avoisine 5 Ă— 10−12 W/kg. Ce flux de chaleur Ă©tait bien plus important dans la jeunesse de la Terre, du fait de la diminution progressive des teneurs en Ă©lĂ©ments radioactifs instables avec le temps et leur dĂ©sintĂ©gration ;
  • la libĂ©ration de chaleur initiale de la Terre lors de son accrĂ©tion.

Si la chaleur Ă©tait uniquement transfĂ©rĂ©e par conduction dans le manteau, l’estimation de ΔT serait proche de 21 000 K. Les Ă©tudes expĂ©rimentales montrent qu'une telle tempĂ©rature ne permettrait pas l'Ă©tat solide du manteau jusqu'Ă  sa base.

La tempĂ©rature terrestre Ă  660 km de profondeur peut ĂȘtre estimĂ©e Ă  l’aide des transitions de phase de l’olivine. L’olivine α subit diverses transformations avec la profondeur qui tĂ©moignent de conditions prĂ©cises de tempĂ©rature et de pression. Ces transitions sont dĂ©celables en profondeur par l’étude des ondes sismiques, dont la vitesse change au niveau de ces transitions. À la limite manteau supĂ©rieur – manteau infĂ©rieur, l’olivine Îł se transforme en pĂ©rovskite + magnĂ©siowĂŒstite, ce qui correspond d’aprĂšs le diagramme de phase de l’olivine Ă  une tempĂ©rature de 1 830 K.

On ne connaĂźt pas la tempĂ©rature de la transition manteau infĂ©rieur – noyau externe, mais un ordre de grandeur peut ĂȘtre obtenu par dĂ©duction : en profondeur, le fer cristallise Ă  la limite graine – noyau externe Ă  une tempĂ©rature de 5 000 K, ce qui signifie que la tempĂ©rature de la base du manteau est comprise entre 2 000 K et 5 000 K.

Note : si on considĂšre que la Terre est en convection idĂ©ale (adiabatique), on peut calculer en toute profondeur la tempĂ©rature grĂące au gradient adiabatique, mais cette partie cherche Ă  estimer le nombre de Rayleigh du manteau pour savoir s’il y a convection ou non.

Estimation de la viscositĂ© Îœ

On peut estimer la viscositĂ© d’une roche mantellique en laboratoire, mais les conditions thermodynamiques du manteau sont trĂšs difficiles Ă  obtenir en laboratoire.

Elle est aussi possible par l’étude des remontĂ©es isostatiques post-glaciaires, qui renseigne sur la valeur de la viscositĂ© de l’asthĂ©nosphĂšre. Lors d’une glaciation, le poids d’une calotte glaciaire sur un continent crĂ©e une dĂ©pression dans la lithosphĂšre sous-jacente, du fait du principe d’isostasie. AprĂšs la fonte de la glace, qui est un Ă©vĂšnement trĂšs rapide, la lithosphĂšre n’est plus soumise Ă  ce poids et remonte par rebond isostatique. La vitesse de la remontĂ©e dĂ©pend directement de la viscositĂ© de l’asthĂ©nosphĂšre et de la lithosphĂšre. Les donnĂ©es historiques, des mesures de nivellement etc. permettent de retracer l’historique du rebond, et par application aux Ă©quations de la mĂ©canique des fluides, il est possible de dĂ©terminer la viscositĂ©.

La viscositĂ© dynamique η est estimĂ©e Ă  environ 1021 Pa s, ce qui donne une viscositĂ© de 3 Ă— 1017 m2 s−1, en accord avec les Ă©tudes thĂ©oriques de la dĂ©formation de l’olivine Ă  haute tempĂ©rature.

Le nombre calculĂ© est trĂšs Ă©levĂ© en comparaison avec un fluide « classique » gazeux ou liquide : le manteau en convection est Ă  l’état solide et dĂ©formable.

ModĂšle de la convection

Carte des seismes de 1963 Ă  1998.

Les hypothĂšses faites pour l’étude de la convection mantellique sont les suivantes : il s’agit d’un systĂšme convectif dont la viscositĂ© dĂ©pend fortement de la tempĂ©rature, possĂ©dant deux couches limites dans le cas d’une surface « libre », oĂč la couche limite supĂ©rieure trĂšs visqueuse se dĂ©coupe en plaques, gĂ©nĂ©rant une faible dĂ©formation intraplaque et beaucoup de dĂ©formation interplaque, comme le montre la carte de rĂ©partition des sĂ©ismes sur la surface du globe terrestre. Les zones de subduction oĂč du matĂ©riel froid et dense plonge en profondeur constitue le flux descendant, alors que les dorsales ocĂ©aniques constituent le flux ascendant.

Du fait du nombre de Rayleigh trĂšs grand (Ra = 108), on estime que la convection possĂšde une structure chaotique, Ă  savoir que les mouvements ascendants et descendants ne se situent pas aux mĂȘmes endroits avec le temps, mais ceci ne s’observe pas en pratique : les plaques seraient parsemĂ©es de volcans, les panaches chauds pouvant remonter en n’importe quel endroit, alors que l’on sait que les points chauds sont relativement immobiles. L’étude des flux de chaleur montre que l’énergie Ă©vacuĂ©e par le manteau sort principalement au niveau des dorsales (100 mW/m2 en moyenne), et beaucoup moins au niveau des plaques lithosphĂ©riques plutĂŽt isolantes (12 mW/m2 en moyenne). Les remontĂ©es de panaches s’accumuleraient sous la lithosphĂšre ocĂ©anique (par exemple la plaque pacifique pour la chaĂźne Hawaii – Empereur) ou bien continentale (cas des trapps). Si une trop forte accumulation de matĂ©riel se fait sous un continent, la lithosphĂšre continentale va s’amincir dans le cadre d’un rifting pour donner naissance Ă  un nouvel ocĂ©an, c’est ce que l’on suppose dans la rĂ©gion actuelle de l'Afar.

Couche limite supérieure

Dans tous les modĂšles de convection, on considĂšre que la couche limite supĂ©rieure du systĂšme est constituĂ©e par la lithosphĂšre ocĂ©anique rigide, « flottant » sur l’asthĂ©nosphĂšre moins visqueuse et plus dense. Ceci est confirmĂ© thĂ©oriquement par l’étude du profil de tempĂ©rature et du flux de chaleur au niveau de la croĂ»te ocĂ©anique, qui suivent les lois physiques de la convection, Ă  savoir une augmentation trĂšs rapide de la tempĂ©rature moyenne dans les premiĂšres dizaines de kilomĂštres de profondeur, c'est-Ă -dire que la couche limite supĂ©rieure fixe une grande partie de la diffĂ©rence de tempĂ©rature du systĂšme convectif. Ceci est confirmĂ© par la diffĂ©rence de tempĂ©rature de plus de 1 000 K existant entre les roches Ă  la dorsale et celles qui constituent le plancher ocĂ©anique - qui s'en Ă©loignent symĂ©triquement.

Centre de la cellule

ConformĂ©ment aux modĂšles, la variation de tempĂ©rature est relativement faible vis-Ă -vis de la profondeur. On l’estime de l’ordre de quelques centaines de degrĂ©s.

La tomographie sismique permet de mettre en évidence des hétérogénéités de température dans le manteau, dues aux mouvements ascendants (panaches) et descendants (croûte océanique subductée).

Couche limite inférieure

Selon les modĂšles, elle est placĂ©e soit a 660 km de profondeur, Ă  la limite manteau supĂ©rieur – manteau infĂ©rieur, soit Ă  la limite manteau – noyau Ă  2 900 km de profondeur, jusqu’à une couche hypothĂ©tique nommĂ©e d″.

ModĂšles de la convection mantellique

Une simulation numérique de la convection mantellique[2].

Plusieurs modÚles ont été imaginés pour rendre compte de la structure des cellules de convections du manteau.

ModĂšle Ă  une couche

Dans ce modĂšle, la lithosphĂšre continentale subduite plonge en profondeur jusqu’à la couche limite infĂ©rieure Ă©tant ici l’interface manteau – noyau. Ce matĂ©riel peut se transformer en un panache ascendant moins visqueux que les roches l’entourant et remontant en surface par les volcans de points chauds. Les mouvements ascendants et descendants dĂ©crivent des cellules de convection. Du matĂ©riel peut ressortir au niveau des dorsales ocĂ©aniques de façon passive. Il n’y a qu’un type de cellule de convection brassant l’ensemble de l’épaisseur du manteau : ce modĂšle est dit « Ă  une couche ».

ModĂšle Ă  deux couches

Contrairement au modĂšle prĂ©cĂ©dent, on imagine dans le modĂšle « Ă  deux couches » qu’il existe des cellules de convection dans le manteau infĂ©rieur gĂ©nĂ©rĂ©es par les panaches ascendants, et d’autres Ă  l’intĂ©rieur du manteau supĂ©rieur, permettant la sortie de matĂ©riel au niveau des dorsales ocĂ©aniques, du fait de la discontinuitĂ© de phases de l’olivine Ă  660 km de profondeur.

ModÚle actuellement accepté

Le modĂšle le plus vraisemblable est un modĂšle intermĂ©diaire entre les deux prĂ©cĂ©dents, plus en accord avec les observations tomographiques que ceux-ci. La croĂ»te ocĂ©anique subduite peut descendre jusqu’à la couche d″ et ĂȘtre Ă  l’origine de panaches ascendants, ou bien glisser le long de l’interface manteau supĂ©rieur – manteau infĂ©rieur, et gĂ©nĂ©rer aussi des panaches. Les cellules de convection se limitent au manteau infĂ©rieur. Du matĂ©riel peut sortir passivement au niveau des dorsales en extension, qui ne sont pas enracinĂ©es en profondeur.

Références

  1. http://planet-terre.ens-lyon.fr/article/convection-mantellique-tectonique-plaques.xml
  2. (en) M. Kronbichler, T. Heister et W. Bangerth, « High accuracy mantle convection simulation through modern numerical methods », Geophysical Journal International (en), vol. 191, no 1,‎ , p. 12-29 (DOI 10.1111/j.1365-246X.2012.05609.x, lire en ligne).

Voir aussi

Bibliographie

  • GĂ©odynamique, L. Jolivet et H.-C. Nataf, ed. Dunod, 1998, 226 p.
  • Dossier de confĂ©rence du 01 - 04 - 2005 : La convection mantellique, mythes, rĂ©alitĂ©s et questions par Pierre Thomas, 100 diapositives.
  • La gĂ©ochimie, Francis AlbarĂšde, Gordon & Breach, 2001

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