Conflit dans l'Ătat d'Arakan (depuis 2016)
Le conflit dans l'Ătat d'Arakan, aussi appelĂ© crise des Rohingya, est un conflit armĂ© situĂ© dans l'Ătat d'Arakan en Birmanie, entre les forces militaires birmanes et les forces armĂ©es rohingya de l'ArmĂ©e du salut des Rohingya de l'Arakan. Ce conflit a dĂ©marrĂ© en , mais il fait Ă©cho au conflit de 2012 et aux insurrections (en) des populations rohingya qui existent durant une grande partie du XXe siĂšcle.
Date |
â en cours (6 ans, 8 mois et 21 jours) |
---|---|
Lieu |
Ătat d'Arakan (principalement)[1] ; Sud de l'Ătat Chin (dĂ©bordements)[2] |
Issue |
|
Birmanie
| Armée de l'Arakan (en) | ARSA
RSO (en) |
Min Aung Hlaing Soe Tint Naing[6] Aung Myat Moe[7] Anciennement : Maung Maung Soe (jusqu'en 2017) Sein Lwin (jusqu'en 2017)[7] Sein Win (en) (jusqu'en 2021) | Twan Mrat Naing (en)[8] - [9] Nyo Twan Awng (en)[10] | Ataullah abu Ammar Jununi (en)[11] |
2016-2019 : 109 tués[alpha 1] 21 blessés[alpha 2] 100+ capturés[alpha 3] | Inconnu | 2016-2017 : 475 tués[alpha 4] |
+ de 24 000 civils tués[31] - [32] - [33]
128 000 déplacés internes[34] - [35]
+ de 950 000 réfugiés à l'étranger[alpha 5]
Depuis 2016, le conflit aurait fait plusieurs milliers de morts et a amenĂ© une partie de la population Rohingya Ă fuir l'Ătat d'Arakan en Birmanie pour se rĂ©fugier Ă l'Ă©tranger. On compte 950 000 rĂ©fugiĂ©s, principalement installĂ©s dans des campements au Bangladesh. Pour ces faits, le gouvernement birman fait l'objet d'accusations de gĂ©nocide[44].
Chronologie
2016
Face aux persĂ©cutions, des organisations armĂ©es se forment, comme en , l'ArmĂ©e du salut des Rohingya de l'Arakan (ARSA)[45]. En , des postes frontiĂšres sont attaquĂ©s, ce qui provoque de fĂ©roces reprĂ©sailles de la part de l'armĂ©e : viols, tortures et massacres. La situation rĂ©elle sur place reste difficile Ă Ă©valuer, puisque la Birmanie interdit aux Nations unies et aux ONG l'accĂšs du nord de l'Arakan oĂč 150 000 personnes dĂ©pendent de leurs distributions alimentaires[46]. Elle n'a autorisĂ© leur retour qu'Ă la fin d'[47].
En , l'Organisation internationale pour les migrations estime Ă environ 30 000 le nombre de Rohingya qui doivent fuir au Bangladesh, Ă la suite des violences en Birmanie, entre octobre et [48].
De nombreux Rohingyas subissent par ailleurs des arrestations arbitraires[49], y compris des enfants[50], certains d'entre eux seront condamnés à mort pour leurs responsabilités dans les attaques organisées par les milices rohingyas d'[51].
2017
Le , l'ArmĂ©e du salut des Rohingya de l'Arakan (ARSA) lance des attaques avec au moins 150 hommes contre une trentaine de postes frontiĂšres et de postes de police[52] - [53]. Selon l'armĂ©e birmane, douze membres des forces de sĂ©curitĂ© et 59 insurgĂ©s sont tuĂ©s[53]. Selon Amnesty International, 53 villageois hindous, dont 20 hommes, 10 femmes et 23 enfants, sont Ă©galement massacrĂ©s par des hommes de l'ARSA Ă Kha Maung Seik, prĂšs de Maungdaw, le 25 aoĂ»t 2017[54] - [55]. Et le mĂȘme jour, 46 autres villageois sont portĂ©s disparus au village voisin de Ye Bauk Kyar et pourraient Ă©galement avoir Ă©tĂ© tuĂ©s par l'ARSA[56] - [55]. Ces attaques entraĂźnent de fĂ©roces reprĂ©sailles contre les rohingyas, menĂ©es par les 33e et 99e divisions de l'armĂ©e birmane[53]. Des villages entiers sont incendiĂ©s. Le 27 aoĂ»t, les soldats de la 33e division massacrent 200 personnes et commettent de nombreux viols dans le village de Chut Pyin. Le 30 aoĂ»t, la 99e division assassine Ă son tour par balles ou Ă la machette 200 civils Ă Min Gyi ; les femmes sont obligĂ©es d'observer le massacre des hommes, avant d'ĂȘtre violĂ©es, puis Ă©gorgĂ©es ou tuĂ©s Ă coups de crosse. Un autre massacre de civils a lieu le mĂȘme jour dans le village de Tula Toli[57]. Le , l'armĂ©e birmane affirme que les combats font plus de 400 morts, dont 370 rebelles, 13 militaires ou policiers et 14 civils[58]. Le projet Arakan, une organisation de dĂ©fense des droits des Rohingyas, Ă©voque pour sa part prĂšs de 130 morts, dont des femmes et des enfants[59]. Selon l'ONU, en seulement huit jours, prĂšs de 90 000 personnes gagnent le Bangladesh[60], oĂč plus de 400 000 rĂ©fugiĂ©s rohingyas sont prĂ©sents le [61]; mais le pays ne veut pas en accueillir davantage et ferme sa frontiĂšre, bloquant ainsi 20 000 civils[58]. L'organisation revoit d'ailleurs Ă la hausse le bilan fourni par les autoritĂ©s birmanes, Ă©voquant dĂ©but septembre un bilan humain potentiellement supĂ©rieur Ă 1 000 morts[62]. La situation d'extrĂȘme insĂ©curitĂ© qui rĂšgne dans les villages rohingyas de l'Arakan, mais aussi l'attitude hostile de l'administration birmane envers elles ont obligĂ© plusieurs ONG, mais aussi le Programme alimentaire mondial Ă cesser leurs activitĂ©s dans ces zones[63].
Fin octobre, la situation des Rohingyas demeurait toujours critique : alors que l'ONU estime que prĂšs de 603 000 rĂ©fugiĂ©s rohingyas ont fui au Bangladesh depuis le dĂ©but des affrontements deux mois plus tĂŽt[64] - [65], le pape François avance quant Ă lui le chiffre de 800 000 rĂ©fugiĂ©s[66]. En tout prĂšs d'un million de rohingyas se trouveraient au Bangladesh, en comptant ceux dĂ©jĂ prĂ©sents dans les camps de rĂ©fugiĂ©s avant les violences du mois d'aoĂ»t et qui fuyaient les persĂ©cutions anciennes dont cette minoritĂ© fait l'objet[66]. Une situation que l'ambassadeur du Bangladesh Ă l'ONU dĂ©crit comme « intenable » pour son pays[66], qui envisage de stĂ©riliser les femmes rohingyas afin d'Ă©viter une explosion dĂ©mographique[67] et qui cherche Ă©galement, en concordance avec les autoritĂ©s birmanes, Ă rapatrier une partie des rĂ©fugiĂ©s rohingyas dans l'Ă©tat d'Arakan[68]. Un retour pĂ©rilleux pour les Rohingyas, qui ont vu le riz cultivĂ© dans leurs champs abandonnĂ©s ĂȘtre rĂ©coltĂ©s par lâĂtat birman[64], et qui pour la trĂšs large majoritĂ© d'entre eux ne possĂšdent aucun document officiel attestant qu'ils vivaient dans l'Ă©tat d'Arakan avant le dĂ©but des violences Ă©tant donnĂ© leur apatridie[68].
Le , au cours d'un entretien tĂ©lĂ©phonique avec le prĂ©sident turc Recep Tayyip ErdoÄan, Aung San Suu Kyi, dirigeante de facto du gouvernement civil (mais qui ne contrĂŽle pas l'armĂ©e), a dĂ©noncĂ© la couverture mĂ©diatique internationale faite au sujet de la crise en Arakan, y voyant un parti pris pro-rohingya et prĂ©sentant celle-ci comme un « iceberg de dĂ©sinformation », orchestrĂ© par des « terroristes rohingyas », dans le but de diaboliser le rĂ©gime birman[69].
En , un plan proposé par la Chine visant à résoudre la crise des Rohingyas[70] est approuvé par le Bangladesh et la Birmanie[71]. à la fin du mois, le Bangladesh compte 620 000 réfugiés rohingyas présents sur son territoire[72] - [73].
Le , l'ONG MSF tire la sonnette d'alarme à propos de la situation humanitaire des Rohingyas et estime que 6 700 d'entre eux ont été tués en un mois de combats entre le 25 août et le [74] - [75].
Le , à la suite d'une résolution soumise par l'Organisation de la coopération islamique (OCI), l'Assemblée générale de l'ONU appelle la Birmanie à cesser son opération militaire contre les Rohingyas, à autoriser l'envoi d'un émissaire et de travailleurs humanitaire, à faciliter le retour des réfugiés et à doter cette minorité d'un statut de citoyenneté à part entiÚre[76].
2018
Le , les forces birmanes ont subi une embuscade tendue par des rebelles rohingyas, faisant plusieurs blessés. C'est la premiÚre opération de ce genre depuis [77].
Le mĂȘme mois, l'armĂ©e birmane reconnaĂźt que des forces de sĂ©curitĂ© et des villageois ont tuĂ© et enterrĂ© dans une fosse commune dix civils en [78]. Aung San Suu Kyi salue l'enquĂȘte de l'armĂ©e et indique qu'une telle situation n'est plus d'actualitĂ©[79].
Des photos prises par l'ambassadeur de l'UE ainsi que des clichés satellitaires publiés par Human Rights Watch (HRW) en indiquent que des dizaines de villages ont été rasés autour de la ville de Maungdaw, épicentre des violences ; le gouvernement birman affirme que ces opérations ont été réalisées dans la perspective de rapatriements[80] - [81]. Mais Amnesty International rapporte qu'à l'emplacement de ces villages disparus sont construites des installations pour les forces armées birmanes[82].
En , deux journalistes locaux de l'agence Reuters, arrĂȘtĂ©s pour dĂ©tention de documents relatifs aux opĂ©rations militaires en Arakan, sont condamnĂ©s Ă sept ans de prison par un tribunal de Rangoon pour « atteinte au secret dâĂtat »[83]. Ă la suite de pressions internationales, les deux journalistes de Reuters sont graciĂ©s le par le prĂ©sident birman.
2020
L'armĂ©e d'Arakan a frappĂ© un avant-poste temporaire de la Tatmadaw au mont Mayu prĂšs du village d'Inn Din (en) et un avant-poste de la police des gardes-frontiĂšres (en) prĂšs du village d'Ahtet Nan Yar du canton de Rathedaung le 26 octobre. Le porte-parole de l'armĂ©e, le gĂ©nĂ©ral de division Zaw Min Tun, a dĂ©clarĂ© qu'ils avaient subi des pertes, sans prĂ©ciser le nombre de morts[84]. L'armĂ©e d'Arakan a annoncĂ© un cessez-le-feu unilatĂ©ral fin novembre afin que les Ă©lections gĂ©nĂ©rales, qui avaient Ă©tĂ© annulĂ©es auparavant dans neuf cantons du nord de l'Ătat d'Arakan, puissent avoir lieu d'ici la fin de l'annĂ©e[85]. La Tatmadaw a Ă©galement entamĂ© un dialogue, les affrontements ayant cessĂ© aprĂšs les Ă©lections[86].
Articles connexes
Notes et références
Notes
- En 2019 : 54 soldats[5] - [15] - [16] - [17] - [18] - [19], 54 policiers[16] - [20] - [21] et 1 officier du service d'immigration[22] - [23].
- Voir[16] - [18] - [21] - [24].
- Voir[25] - [26] - [27] - [28].
- L'armée du Myanmar prétend n'avoir tué que des insurgés dans ses opérations ; leurs nombres n'ont pas été vérifiés de maniÚre indépendante[22] - [29].
- Voir[36] - [37] - [38] - [39] - [40] - [41] - [42] - [43].
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