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Combourgeoisie

Au Moyen Âge, une combourgeoisie (en allemand : Burgrecht) est un traité temporel ou perpétuel par lequel une ville étend son droit de cité à une autre entité géographique, soit aux villages qui l'entourent, soit à une autre ville ou à un couvent[1].

Traité de combourgeoisie de 1243 entre les villes de Berne et Fribourg.

Histoire et Ă©tymologie

La notion de combourgeoisie (dont le mot vient du latin comburgensis est tout d'abord utilisĂ©e pour la première fois vers l'an 1000 pour dĂ©signer la citoyennetĂ© romaine avant de prendre son sens actuel au XIIIe siècle sur le territoire de la Suisse actuelle. La première occurrence reconnue du terme « conburgensis Â» date de 1330[2]. En allemand, le terme Landrecht (traduit en français par l'expression droits territoriaux) est Ă©galement utilisĂ© lorsque le traitĂ© implique un territoire qui n'est pas une ville ou une seigneurie[3]

Forme juridique

Présentés sous la forme d'un parchemin muni des sceaux et signatures des différentes parties, un traité de combourgeoisie détaille généralement précisément les limites du traité ainsi que les réserves faites, en particulier sur des traités ou alliances conclues antérieurement par l'une ou l'autre des parties et qui ont prédominance sur le nouveau traité. Ces réserves s'appliquent en particulier aux obligations offensive et/ou défensive d'assistance militaire réciproque. Si la plupart des traités sont conclus pour une durée illimitée, certains sont toutefois limités temporellement soit selon une durée fixée (10 ou 15 ans renouvelable), soit jusqu'à la mort de l'un des signataires[2].

Techniquement, les traités de combourgeoisie sont généralement un prélude au rattachement (volontaire ou non) de la plus petite entité à la plus grande. Ainsi, à la suite de tels traités, des territoires seront progressivement inclus dans la Confédération suisse comme nouveaux cantons dans le cas de Fribourg, Soleure ou Schaffhouse ou comme alliés pour Bienne, Genève, le Haut-Valais ou les Grisons[4]. Par exemple, la ville de Saint-Gall va passer de combourgeois à allié avant d'être finalement admis comme nouveau canton le [nhss 1].

Les combourgeoisies suisses

Sceau du traité de combourgeoisie signé entre Lausanne, Berne et Fribourg le 7 décembre 1525.

Au début du XVIe siècle, les premiers cantons de Suisse centrale utilisent la combourgeoisie pour augmenter leur influence sur des territoires adjacents soit en leur offrant une quasi-égalité de traitement comme dans le cas d'Urseren par le canton d'Uri[5] ou d'Arth par le canton de Schwytz[6], soit en les prenant complètement sous leur domination, comme c'est le cas de Schwytz avec Appenzell en 1403[nhss 2] et Einsiedeln en 1414[7] ou d'Uri et d'Obwald avec la Léventine en 1403[nhss 3]

La combourgeoisie est par la suite largement utilisée par les villes du plateau suisse à partir du début du XVe siècle : Bâle accorde sa combourgeoisie à la prévôté de Moutier-Grandval dès 1406 alors que Soleure en fait autant avec le Landeron en 1449.

C'est cependant la ville de Berne qui va en faire le plus large usage : successivement Bienne en 1344, l'ErguĂ«l en 1352, Soleure en 1345, Valangin et la Gruyère en 1401, Fribourg en 1403, et enfin Neuchâtel en 1406 vont se voir offrir des traitĂ©s de combourgeoisie. Auparavant, la ville bernoise avait dĂ©jĂ  conclu de tels traitĂ©s avec les communautĂ©s du Hasli et de Gessenay, avec les Ă©vĂŞchĂ©s de Sion, Bâle et Lausanne ainsi qu'avec les villes de Morat, d'Avenches et de Payerne[4]. Enfin, le , les villes de Berne et de Soleure offrent un traitĂ© de combourgeoisie doublĂ© d'un traitĂ© militaire Ă  celle de Mulhouse, alors menacĂ©e par les visĂ©es habsbourgoises[nhss 4]. Ce rĂ©seau d'alliances dont la ville de Berne reprĂ©sente le centre a Ă©tĂ© appelĂ© la « ConfĂ©dĂ©ration bourguignonne Â» par les historiens[8].

Le , les villes de Zurich, Berne, Lucerne, Fribourg et Soleure signent un traitĂ© de « combourgeoisie perpĂ©tuelle Â» sous la forme d'une alliance offensive et dĂ©fensive dans le but d'initier une rĂ©flexion au sein de la ConfĂ©dĂ©ration des VIII cantons sur le remplacement des nombreux traitĂ©s antĂ©rieurs par une alliance gĂ©nĂ©rale et commune[nhss 5]. Cette alliance, source d'une importante crise au sein de la ConfĂ©dĂ©ration des XIII cantons, est dissoute par la Diète fĂ©dĂ©rale en 1481 par le convenant de Stans[1].

Après la signature, en 1525, d'un traitĂ© de combourgeoisie entre Lausanne, Berne et Fribourg, c'est au tour de Genève de signer un mĂŞme traitĂ© avec les deux villes suisses le sous l'influence des Eidguenots, parti politique genevois favorable Ă  un rapprochement de Genève avec la ConfĂ©dĂ©ration des XIII cantons pour Ă©chapper Ă  la menace d'invasion causĂ©e par le duc Charles III de Savoie[9]. Ce traitĂ© sera renouvelĂ© avec Berne le puis en 1584 ; dans ce dernier cas, la ville de Zurich remplace celle de Fribourg qui, restĂ©e fidèle au catholicisme, refuse de renouveler le traitĂ© avec la « Rome protestante Â»[10]

Au sein de la ConfĂ©dĂ©ration suisse, le rĂ©seau extrĂŞmement dense des traitĂ©s de combourgeoisie est une des raisons de plusieurs conflits armĂ©s, tels quel la guerre de Berthoud en 1382, celle de Sempach en 1386 ou encore l'ancienne guerre de Zurich en 1440. Ă€ la suite de ces Ă©vĂ©nements, les combourgeoisies vont progressivement disparaitre au cours du XVIe siècle, bien que de nouvelles « combourgeoisies chrĂ©tiennes Â» soient encore conclues de 1527 Ă  1531 entre des villes du Sud de l'Allemagne et du Nord de la Suisse dans le but de dĂ©fendre la nouvelle rĂ©forme protestante[1].

Références

  1. p. 266
  2. p. 244
  3. p. 249
  4. p. 267
  5. p. 292
  • Autres rĂ©fĂ©rences
  1. Andreas WĂĽrgler, « Combourgeoisie » dans le Dictionnaire historique de la Suisse en ligne.
  2. « Les traités de combourgeoisies en pays romand », sur Atrium (consulté le )
  3. Anne-Marie Dubler, « Droits territoriaux » dans le Dictionnaire historique de la Suisse en ligne.
  4. « Une Suisse francophone - Les combourgeoisies », sur memo.fr (consulté le )
  5. (de) « Geschichte live - Schwierige Zukunft », sur woz.ch (consulté le )
  6. (de) [PDF] « 650 Jahre Unterallmeind-Korporation Arth - Wer sind die Unterällmiger », sur uak.ch (consulté le ). Page 1
  7. (de) [PDF] « Einsiedeln - Geschichte », sur pfadihus.ch (consulté le ). Page 4
  8. Urs Martin Zahnd, « ConfĂ©dĂ©ration bourguignonne » dans le Dictionnaire historique de la Suisse en ligne.
  9. « De la combourgeoisie au blocus », sur etat.geneve.ch (consulté le )
  10. « Les traités de la République », Journal de Genève,‎ (lire en ligne)

Bibliographie

  • Collectif, Nouvelle Histoire de la Suisse et des Suisses, Lausanne, Payot [dĂ©tail des Ă©ditions]
  • (de) Peter Bierbrauer, Freiheit und Gemeinde im Berner Oberland 1300-1700, Berne, Historischer Verein des Kantons Bern, , 453 p.
  • (de) Peter Blickle, Landschaften im alten Reich, Munich, Beck, , 609 p.
  • Claude Cuendet, Les traitĂ©s de combourgeoisie en pays romands, et entre ceux-ci et les villes de Berne et Fribourg, Lausanne, Bibliothèque historique vaudoise, , 170 p.
    Thèse de droit passée à l'Université de Lausanne
  • Jean Jeanjaquet, TraitĂ©s d'alliance et de combourgeoisie de Neuchâtel avec les villes et cantons suisses 1290-1815, Neuchâtel, P. Attinger,
  • (de) Pius Kistler, Das Burgrecht zwischen Bern und dem MĂĽnstertal, Gebr. Leemann,
    Thèse passée à l'Université de Berne
  • Michel Salamin, Documents d'histoire suisse, Impr. sierroise,
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