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Colonne (architecture)

La colonne est, en architecture, ameublement, sculpture et ingénierie des structures, un support vertical dont le plan est un cercle (colonne cylindrique) ou un polygone régulier à plus de quatre côtés (colonne polygonale). Elle se distingue du pilier et du pilastre.

Colonnes monumentales datant de l'Antiquité romaine du temple de Bel à Palmyre, Syrie.
Colonnes engagées et baguées à bossages vermiculés.

Elle est composée en principe d'une base, d'un fût et d'un chapiteau. Dans l'architecture classique (inspirée par l'Antiquité gréco-latine), les proportions et les ornements de ces éléments sont régis par les ordres architecturaux. Dans l'architecture antique et classique, les colonnes soutiennent souvent un portique en façade.

La colonnade, quant à elle, est constituée d'une succession de colonnes.

Étymologie

« Colonne » est un terme qui vient du latin columna lui-mĂŞme dĂ©rivĂ© du radical indo-europĂ©en *kel (« haut »). Cette racine a aussi donnĂ© les termes latins cellere (qui se retrouve dans « exceller Â» et le participe passĂ© celsus, « Ă©levĂ©, Ă©lancĂ©, haut, grand »), collis (« colline »), columen (« faĂ®te, sommet »), culmen (« point culminant »), celare (« cacher », sens qui se retrouve dans les mots cellule, cellier, cil, clandestin, recel)[1].

Un doublet lexical de colonne donne colombe qui désigne une solive de charpente[2].

Colonne est d'abord employée métaphoriquement au début du XIIe siècle en parlant d'un élément de forme verticale et étirée (colonne de nuée) puis vers 1170 pour désigner en architecture une « pièce cylindrique verticale servant généralement de support dans une construction »[3].

Ă€ noter que la racine indoeuropĂ©enne *kwel (« tourner en rond ») proche de *kel a donnĂ© le terme latin colere (« habiter » qui se retrouve dans « colon Â», les suffixes -cole, le supin cultum qui a donnĂ© « culte, culture Â»), les termes grecs polos (« pĂ´le ») et kulindros (« cylindre » bien reprĂ©sentĂ© dans les mots quenouille, cycle). Or on retrouve ces influences des deux racines indoeuropĂ©ennes dans les termes cou[4] et calandre (du bas latin colendra, adaptation avec changement de genre, probablement d'après columna, du grec kulindros)[5].

Le sens initial d'élément cylindrique permet ainsi de distinguer la colonne du pilier dont le corps a un plan massé non circulaire et du pilastre, support carré incrusté dans un mur.

  • Colonnes ioniques grecques du temple d’Apollon de Didymes.
    Colonnes ioniques grecques du temple d’Apollon de Didymes.
  • Pilier composĂ© gothique, formĂ© d'une colonne et de colonnettes engagĂ©es, cathĂ©drale de Laon.
    Pilier composé gothique, formé d'une colonne et de colonnettes engagées, cathédrale de Laon.
  • Pilastre cornier.
    Pilastre cornier.
  • Colonnes romaines en granite rouge et marbre clair, Skiropolis, IsraĂ«l.
    Colonnes romaines en granite rouge et marbre clair, Skiropolis, Israël.

Nomenclature

Composants d'une colonne

Composants d'une colonne.

Une colonne est composée du :

Exemples de colonnes dont les composants diffèrent selon les styles architecturaux :

  1. hindoue
  2. perse
  3. Ă©gyptienne
  4. crétoise
  5. romaine
  6. gothique
  7. Renaissance
  8. Baroque

Relation par rapport à d'autres éléments d'un édifice

On distingue[6] - [7] :

  • colonne isolĂ©e du mur ou de l'Ă©difice ;
  • colonne adossĂ©e dont la base ou le chapiteau sont engagĂ©s dans un mur ou un Ă©lĂ©ment d'un Ă©difice ;
  • colonne engagĂ©e (de moins d'un tiers, du tiers, de plus d'un tiers, de la moitiĂ© — appelĂ©e demi-colonne —) dont le fĂ»t est partiellement encastrĂ© dans un mur ou un Ă©lĂ©ment d'un Ă©difice ;
  • colonne nichĂ©e partiellement ou totalement logĂ©e dans une niche d'un mur. Les colonnes nichĂ©es ont Ă©tĂ© ressuscitĂ©es par Michel-Ange Ă  la bibliothèque Laurentienne de Florence, l'artiste s'inspirant d'un exemple antique[8].
  • Demi-colonne adossĂ©e.
    Demi-colonne adossée.
  • Colonne engagĂ©e.
    Colonne engagée.
  • Colonne nichĂ©e entièrement.
    Colonne nichée entièrement.
  • Colonnes toscanes nichĂ©es partiellement.
    Colonnes toscanes nichées partiellement[9].
  • Colonne cantonnĂ©e d'une colonnette engagĂ©e.
    Colonne cantonnée d'une colonnette engagée.

Selon la forme et la surface du fût

  • Colonne lisse : sans cannelure ou ornements
  • Colonne cannelĂ©e : entièrement ou partiellement ornĂ©e de cannelures rondes, plates, rudentĂ©es, en zigzag, torses, Ă  listels, Ă  arĂŞtes vives, etc.
  • Colonne baguĂ©e : ceinturĂ©e Ă  un ou plusieurs endroits de moulures saillantes en anneau
  • Colonne câblĂ©e : fĂ»t qui paraĂ®t formĂ© de brins tordus comme une corde
  • Colonne torse : fĂ»t contournĂ© en hĂ©lice
  • Colonne salomonique : fĂ»t contournĂ© en spirales articulĂ©es sur elles-mĂŞmes
  • Autel avec deux colonnes torsadĂ©es, deux colonnes Ă  fĂ»ts lisses et une colonne Ă  fĂ»t hexagonal.
    Autel avec deux colonnes torsadées, deux colonnes à fûts lisses et une colonne à fût hexagonal.
  • Colonnes cannelĂ©es.
    Colonnes cannelées.
  • Colonne baguĂ©e.
    Colonne baguée.
  • Colonnes câblĂ©es engagĂ©es dans un pilier.
    Colonnes câblées engagées dans un pilier.
  • Colonnes torses cannelĂ©es.
    Colonnes torses cannelées.
  • Colonne salomonique baroque.
    Colonne salomonique baroque.

Selon l'appareil

On distingue selon la technique de pose et la taille de la pierre[10] :

  • colonne monolithe : fĂ»t d'un seul morceau posĂ© en dĂ©lit ;
  • colonne Ă  tronçons : fĂ»t formĂ© de deux ou trois tronçons (blocs de pierre taillĂ©s en dĂ©bit, de forme cylindrique, de hauteur supĂ©rieure Ă  la largeur du diamètre de la partie infĂ©rieure de la colonne, appelĂ©s aussi d'assises), posĂ©s gĂ©nĂ©ralement en dĂ©lit ;
  • colonne Ă  tambours : fĂ»t formĂ© d'au moins quatre tambours (hauteur infĂ©rieure ou Ă©gale Ă  la largeur du diamètre de la partie infĂ©rieure de la colonne) gĂ©nĂ©ralement en pose sur lit ;
  • colonne appareillĂ©e : fĂ»t formĂ© d'assises Ă  plusieurs Ă©lĂ©ments en cylindre.

Selon les matériaux

Colonnes en béton, Lloyd's of London.

Les premières colonnes sont en bois, en pierre naturelle par la suite. Les colonnes en fonte font une brève apparition au XIXe siècle pour être remplacées par le béton.

Ordre

Ordres architecturaux des colonnes.

Le style des colonnes est appelé ordre, chaque époque a eu ses ordres.

Ordre en Grèce

L'aspect des colonnes est très variable selon les styles architecturaux, en effet il existe trois ordres architecturaux de colonnes.

L'ordre dorique est le plus ancien (seconde moitié du XIe siècle). Les colonnes doriques se caractérisent notamment par leur chapiteau à échine plate (nue, sans décors), par leur fût (partie d'une colonne située entre la base et le chapiteau) orné de 20 cannelures et par l'absence de base (pour le dorique grec) ; la frise dorique se caractérise par ses triglyphes (ornement en relief qui sépare les métopes) et ses métopes (panneau architectural de forme rectangulaire).

L'ordre ionique (appelé également colonne ionique) se caractérise notamment par son chapiteau à volutes, par son fût (expliqué ci-dessus) orné de 24 cannelures (sillon ou strie causé dans un matériau) et par sa base moulurée.

L'ordre corinthien est caractérisé par une décoration essentiellement constituée de feuilles d'acanthe.

Le nombre de colonnes en façade varie selon les temples, il peut être distyle (deux colonnes), tétrastyle (quatre), hexastyle (six), octostyle (huit) comme le Parthénon, décastyle (dix) ou dodécastyle (douze) dont le seul exemple connu est le temple d'Apollon à Didyme. Les colonnes présentent dans leur partie médiane un galbe, l'entasis.

Ordre en Égypte

  • Ordre palmiforme
    • De l'Ancien Empire, ces colonnes sont très massives.
    • Le chapiteau comprend neuf feuilles de palmier ligaturĂ©es.
    • Le fĂ»t est lisse.
    • La base est simple.
  • Ordre proto-dorique
    • Du Moyen Empire, ces colonnes sont très massives.
    • Le chapiteau gĂ©omĂ©trique très simple se confond avec l'abaque.
    • Le fĂ»t possède des cannelures.
    • La base est très petite ou totalement inexistante.
  • Ordre lotiforme
    • En forme de lotus fermĂ©.
  • Ordre papyriforme
    • Il se manifeste Ă  partir du Moyen Empire.
    • Les tiges sont ligaturĂ©es sur le chapiteau et se prolongent dans le fĂ»t.
    • L'abaque peut contenir un cartouche.
    • La base est simple.
  • Ordre campaniforme
    • Il existe Ă  partir du Moyen Empire.
    • Le fĂ»t est lisse, mais peut ĂŞtre couvert de bas-reliefs.
    • Le chapiteau s'Ă©vase en forme de cloche inversĂ©e couvert de bas-relief (quand le bas-relief reprĂ©sente des papyrus, on l'appelle parfois « papyrus ouvert »).
    • La base est simple.
    • L'abaque ne se voit pas d'en bas, car le chapiteau Ă©vasĂ© le dissimule.
  • Ordre hathorique
    • Le chapiteau reprĂ©sente la dĂ©esse Hathor vue de face sur les quatre cĂ´tĂ©s.
    • Le fĂ»t est lisse, mais peut ĂŞtre couvert de bas-reliefs.
    • La base est simple.
    • L'abaque est assez grand.

Ordre Ă  Rome

Histoire

Une colonne peut être assimilée à un tronc d'arbre sur lequel s'appuierait un toit, la base correspondant à la souche de cet arbre, le fût au tronc et le chapiteau à la naissance des plus grosses branches. Selon cette analogie, des auteurs comme Vitruve pensent que les colonnes primitives sont des arbres bruts, non façonnés ou au contraire des poutres issues du tronc ou des grosses branches[11], poussant l'analogie à voir dans l'écorce de l'arbre les cannelures sur les fûts[12]. D'autres imaginent que les premiers Égyptiens conçoivent leurs colonnes en roseaux liés[13].

Toutes les civilisations importantes de l'âge du fer du Proche-Orient et de la Méditerranée ont utilisé des colonnes.

L'architecture de l'Égypte antique est une des premières Ă  employer de nombreuses colonnes (la stylophilie, du grec stylos, « colonne Â» et philia, « qui aime », dĂ©signant la caractĂ©ristique d'utiliser plus de colonnes que le poids du plafond en nĂ©cessite) qui sont parfois gravĂ©es pour raconter une histoire. GĂ©nĂ©ralement en blocs de granit empilĂ©s, elles prĂ©sentent une base arrondie vers le haut, un fĂ»t reprĂ©sentant une tige florale plus ou moins stylisĂ©e et un chapiteau aux formes variĂ©es.

Certaines des colonnes les plus élaborées du monde antique sont celles des Perses, en particulier les colonnes massives de Persépolis dont les chapiteaux sont ornés de protomé de taureau.

Les Égyptiens, les Perses et d'autres civilisations de l'Antiquité se servent des colonnes comme support des toits à l'intérieur de leurs édifices, utilisant plutôt des murs décorés de reliefs ou de peintures à l'extérieur. La civilisation gréco-romaine en fait un usage aussi bien à l'intérieur qu'à l'extérieur, notamment au niveau des portiques.

Au début du Moyen Âge, les architectes réemploient les colonnes antiques puis l'architecture byzantine, romane et gothique abandonne progressivement les ordres classiques pour adopter des formes propres[14].

Ces ordres grecs et romains réapparaissent dans l'architecture Renaissance, classique alors que l'architecture baroque privilégie les colonnes torses, salomoniques et que le romantisme du XIXe siècle fait appel aux styles néogothiques et néoromans.

Avec l'évolution des techniques et des matériaux, la colonne contemporaine, « souvent perçue comme le symbole révolu d'une culture académique, continue pourtant à exister essentiellement sous la forme du segment vertical d'une structure complexe visant à libérer le plan ». En acier, béton, maçonnerie ou toujours en bois, en pierre, elle est rarement décorée et ne joue plus qu'un rôle structurel[15].

Exemples de colonnes doriques des temps modernes

Exemple de colonnes ioniques des temps modernes

Exemples de colonnes romanes

Exemples de colonnes gothiques

Exemples de colonnes dans les monuments islamiques

La colonne, en tant qu'élément architectural en soi, est inconnue dans la tradition islamique proprement dite (Arabie). Dans les monuments islamiques, il s'agit d'un élément architectural provenant, en général, soit de l'art préexistant d'un peuple local qui a adopté l'islam, soit d'architectes non musulmans, notamment byzantins, au service d'un prince musulman (cas de la mosquée-cathédrale de Cordoue), soit d'apports subsistants de l'Antiquité gréco-romaine qui ont été réappropriés.

Colonnes torses et colonnes salomoniques

À l'âge baroque, les colonnes torses apparaissent dans toute l'Europe. On parle de tournage tors pour décrire un tournage hélicoïdal, à la différence du tournage salomonique qui désigne des spirales articulées sur elles-mêmes. Les colonnes salomoniques tirent leur nom des colonnes similaires qui auraient orné le temple de Salomon à Jérusalem, les plus célèbres sont probablement celles érigées par Le Bernin pour soutenir le baldaquin du maître-autel de la basilique Saint-Pierre de Rome.

Notes et références

  1. Alain Rey, Dictionnaire historique de la langue française, Le Robert, , p. 806.
  2. « Colombage », sur cnrtl.fr, Centre national de ressources textuelles et lexicales (consulté le ).
  3. « Colonne », sur cnrtl.fr, Centre national de ressources textuelles et lexicales (consulté le ).
  4. Alain Rey, Dictionnaire historique de la langue française, Le Robert, , p. 912.
  5. Alain Rey, Dictionnaire historique de la langue française, Le Robert, , p. 585.
  6. Mathilde Lavenu et Victorine Mataouchek, Dictionnaire d'architecture, Éditions Jean-Paul Gisserot, (lire en ligne), p. 37.
  7. Aubin L. Millin, Dictionnaire de beaux-arts, Crapelet, (lire en ligne), p. 535.
  8. Jean-Pierre Babelon, Châteaux de France au siècle de la Renaissance, Flammarion, , p. 384.
  9. Cour de l'hôtel de Sully, vue vers le sud avec le revers du portail orné de ces deux colonnes nichées.
  10. Antoine Quatremère de Quincy, Dictionnaire historique d'architecture, le Clere, (lire en ligne), p. 409.
  11. Antoine Quatremère de Quincy, op. cit., p. 75-78.
  12. Antoine Quatremère de Quincy, op. cit., p. 294.
  13. Joseph Malliot, Recherches sur les costumes, les mœurs, les usages religieux, civils et militaires des anciens peuples d'après les auteurs célebres, et les monuments antiques, Imprimerie de P. Didot, (lire en ligne), p. XIV.
  14. Eugène-Emmanuel Viollet-le-Duc, Colonne, Dictionnaire raisonné de l’architecture française du XIe au XVIe siècle.
  15. Roberto Gargiani, La Colonne : nouvelle histoire de la construction, PPUR presses polytechniques, , 538 p. (lire en ligne).

Voir aussi

Articles connexes

Liens externes

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