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Claire Sainte-Soline

Nelly Fouillet dite Claire Sainte-Soline, née le à Melleran et morte le à Paris, est une femme de lettres française.

Claire Sainte-Soline
Claire Sainte-Soline vers 1920.
Biographie
Naissance
Décès
Nom de naissance
Nelly Fouillet
Nationalité
Activités

Entre 1934 et 1967, elle écrit 19 romans et 4 recueils de nouvelles[1]. Son premier ouvrage suscite l'admiration d'André Gide. Un travail assidu, presque infatigable, lui permet de publier à un rythme régulier, quasiment annuel.

Elle siège au jury du Prix du Roman populiste, du PEN Club de France et du Prix Femina, dont elle assure la vice-présidence.

Biographie

Nelly Éva Marguerite Fouillet naît le à Melleran, village des Deux-Sèvres.

Ses parents[2], Pierre Fouillet (La Ferrière-en-Parthenay 1867 - Niort 1950) et Henriette Léontine Barbeau (Melleran 1864 - Niort 1932), sont instituteurs. Radical-socialiste proche du Centre droit, son père est maire de Niort de 1932 à 1935.

Elle fréquente les lycées de Niort et de Bordeaux puis entre en 1912 à l'École normale supérieure de Sèvres. Étudiante brillante, elle obtient une double agrégation de sciences physiques et naturelles et de physique-chimie. Assistante de Camille Matignon (élève de Marcellin Berthelot), elle participe à la recherche scientifique en chimie[3].

Malgré ces remarquables dispositions, elle obéit à son père et embrasse une carrière de professeur pour enseigner successivement à :

Sous le pseudonyme de Claire Sainte-Soline inspiré par la commune éponyme de son département natal, elle publie en 1934 son premier roman, Journée, qui évoque la vie d'un village poitevin et lui vaut l'année suivante le Prix Minerva[4]. Parmi une vingtaine d'œuvres, Le Dimanche des Rameaux (1952), D'amour et d'anarchie (1955) et La Mort de Benjamin (1957) passent pour ses plus belles réussites.

En 1950, elle devient membre du jury du Prix du Roman populiste.

La parution du recueil de nouvelles Mademoiselle Olga, en 1954, suscite les éloges des critiques littéraires[5]. En 1957, elle manque d'une voix le Prix Femina, ce qui lui vaut la notoriété. Mais dès l'année suivante, elle entre au jury de ce prix.

Elle est vice-présidente du PEN Club de France et chevalier de la Légion d'honneur. Elle voyage dans toute l'Europe, visite l'Inde et le Japon[3].

Souffrant d'un cancer du sein depuis une dizaine d'années, elle meurt le à l'hôpital de la Cité universitaire (Paris - 14e arrondissement).

Elle est inhumée le au cimetière des Sablières à Niort, auprès de ses parents (2e division - carré D - tombe 43).

Immeuble sis 34 rue du Cotentin (Paris - 15e arrondissement), où vécut Claire Sainte-Soline. Août 2015.

Vie privée

En 1918, Nelly Fouillet épouse l'artiste-peintre Louis Coquard (Ambrault 1895 - Noirmoutier-en-l'Île 1989), dont elle se sépare assez tôt puis divorce en 1941.

À Paris, elle réside 34 rue du Cotentin.

Sa fille Paulette Coquard (Saint-Romans-lès-Melle 1919 - Noirmoutier-en-l'Île 1999) est la première épouse du romancier et académicien Pierre Moinot.

Elle noue une amitié durable avec des personnes aussi diverses que la pédagogue Angela Medici (1902-2001), l'écrivain Alexandre Vialatte, le dramaturge Jean-Claude Brisville, le philosophe Jean Hyppolite ou l'antiquaire Robert Capia.

Style littéraire

Claire Sainte-Soline pratique une écriture précise et rigoureuse, héritée de sa formation scientifique et propre à son métier d'enseignante. Sobre, dense et incisif, son style s'inspire des romanciers français de la fin du XIXe siècle. Derrière des vies ou lieux d'apparence banale, elle traque un monde de mystère et de secrets avec un art qu'admirera François Nourissier[6]. D'une lucidité méticuleuse, elle analyse sans complaisance, avec ironie et même dureté, l'âpreté et l'immoralité humaines. Elle met volontiers en scène des personnages laissés pour compte, que l'adversité a rendus veules ou méchants. Ses récits se déroulent dans une atmosphère souvent sombre et glacée, voire cruelle. Pour la plupart, ils exposent le dénouement rapide - en une seule journée - d'un conflit de longue date mais larvé. Leur lecture déstabilise et questionne :

« C'est une œuvre dérangeante, aux personnages ambivalents, où la grisaille du quotidien laisse entrevoir des fractures douloureuses de révoltes non abouties, de lâchetés inavouées, de violence sourde. Une œuvre où les seules douceurs semblent venir d'un amour de la nature qui fait entendre, en opposition à l'ambiguïté des rapports humains, ses harmonies sereines de lumière, de couleurs, de parfums »[7].

D'esprit humaniste mais indépendant, voire frondeur, peu soucieuse des modes et même volontiers anticonformiste, Claire Sainte-Soline refuse les thèses du Nouveau roman.

Dans son Journal, André Gide écrit, admiratif, que certaines pages de Journée lui font penser aux meilleures de Marguerite Audoux.

Ĺ’uvres

Romans

  • JournĂ©e (1934, Rieder) - dĂ©diĂ© Ă  ses parents ; serait inspirĂ© d'un meurtre familial aux environs de Lezay ;
  • Antigone ou l'Idylle en Crète (1936, Rieder) ;
Claire Sainte-Soline Ă  la fin de sa vie.
  • Les Sentiers dĂ©tournĂ©s (1937, Rieder) ;
  • Le Haut du Seuil (1938, Rieder) - dĂ©diĂ© Ă  son frère RenĂ© ;
  • La Montagne des Alouettes (1940, Presses universitaires de France) - chronique villageoise ;
  • Irène Maurepas (1942, Presses universitaires de France) ;
  • Et l'enfant que je fus... (1944, Presses universitaires de France). Probable rĂ©Ă©dition de L'enfance de Manelle (sans date, entre 1941 et 1944, Éditions de la Toison d'Or) - dĂ©diĂ© Ă  Angela Medici ; autobiographie inspirĂ©e de souvenirs de jeunesse Ă  Rom et Ă  Montalembert[1] ;
  • Belle (1947, Presses universitaires de France) ;
  • Le Mal venu (1950, Éditions Stock) ;
  • Le dimanche des Rameaux (1952, Éditions Grasset) - une femme prend soudain conscience de la tyrannie de son Ă©poux et s'en libère ;
  • Reflux (1953, Éditions Grasset) ;
  • La mort de Benjamin (1957, Grasset) - qui manque d'une seule voix le Prix Femina ;
  • Castor et Pollux (1959, Grasset)[alpha 1] ;
  • Le Menteur (1961, Grasset) ;
  • Si j'Ă©tais hirondelle (1964, Grasset) - dĂ©diĂ© Ă  Louis Blaizot ; tragĂ©die oĂą les personnages accomplissent un destin qu'ils rĂ©prouvent ;
  • Les annĂ©es fraĂ®ches (1966, Grasset) - souvenirs autobiographiques d'une enfant solitaire et mal-aimĂ©e.

Nouvelles

  • Mademoiselle Olga (12 nouvelles - 1954, Grasset) ;
  • De la rive Ă©trangère (9 nouvelles - 1962, Grasset) ;
  • NoĂ©mie Strauss (9 nouvelles, dont celle du titre Ă©voque une femme perverse qui conduit ses amies au suicide - 1965, Grasset) ;
  • En souvenir d'une marquise, prĂ©facĂ© par Robert Kanters (dix nouvelles - 1969, Grasset).

Essai

Recueils de témoignages

  • D'une haleine - rĂ©cit d'une femme du peuple de Paris (1935, Rieder) ;
  • D'amour et d'anarchie (1955, Grasset) - vie d'un couple d'artisans avant la Première Guerre mondiale.

RĂ©cits de voyage

  • Grèce (1952, Pierre Cailler Ă©diteur, Genève) ;
  • Maroc (1954, Pierre Cailler Ă©diteur, Genève).

Vulgarisation scientifique

  • Petite physique pour les non physiciens (1943, Presses universitaires de France).

Traduction

  • HĂ©cube Ă©chevelĂ©e, traduction française d'un roman de l'Ă©crivain grec Vassilis Loulis[1].

Citations

  • Je suis trop paresseuse pour ĂŞtre ambitieuse (La Nouvelle RĂ©publique - , après avoir manquĂ© d'une seule voix le Prix Femina).
  • Je suis l’étrangère, celle qui n’est pas Ă  sa place.
  • Il y a trop d'inĂ©galitĂ©s par le monde. La misère des autres pèse sur moi. J'en arrive Ă  ne plus respirer Ă  l'aise (D'une haleine).
  • La seule chose, c'est d'aller Ă  fond dans son propre sens (conseil donnĂ© Ă  un jeune Ă©crivain)[6].
  • Un Ă©crivain n'a pas droit Ă  plus de considĂ©ration qu'un boulanger[8].
  • L'art est un guet-apens.
  • J'ai eu deux vies : celle de professeur et celle d'Ă©crivain (propos tenus Ă  la fin de son existence)[5].
  • Je n'ai aucune imagination et tout ce que j'Ă©cris c'est Ă  partir de ma vie (affirmation citĂ©e par La Nouvelle RĂ©publique - ).
  • Les profondeurs sourdes et noires du sommeil me sont depuis longtemps refusĂ©es (Le dimanche des Rameaux).
  • Je me plais dans la brume et le crachin (Les annĂ©es fraĂ®ches).
  • Qu'on me laisse ; je n'ai plus besoin de rien ni de personne. BientĂ´t, je vais ĂŞtre une chose ; je ne veux pas que l'on voie cette chose Ă  ma ressemblance qui laissera toute question, toute tendresse, tout regard sans rĂ©ponse (Mon dernier quart d'heure).
  • Les vrais Ă©loges, ceux qui encouragent et vont au cĹ“ur, parviennent ainsi d'inconnus. On est alors certain que l'Ă©cho est sincère, certain d'avoir Ă©tĂ© compris et d'avoir apportĂ© quelque chose, si peu que ce soit (en rĂ©ponse Ă  un lecteur de son pays natal, qui lui exprime son admiration)[9].

Postérité

Ă€ Niort :

  • une allĂ©e du quartier de la Milaterie reçoit son nom en ;
  • la MĂ©diathèque Pierre Moinot dĂ©tient un fonds d'archives Claire Sainte-Soline ;
  • l'allĂ©e du cimetière des Sablières oĂą elle repose porte son nom.

Le , deux manifestations locales marquent le cinquantenaire de sa mort :

  • Melleran, sa ville natale, donne son nom Ă  l'Ă©cole maternelle et primaire oĂą enseignèrent ses parents. Les plaques commĂ©moratives apposĂ©es Ă  cette occasion citent l'Ă©crivaine : « Tout enfant possède plus de science qu'on ne croit, mais une science qu'il a peine Ă  extraire des profondeurs et qu'il est encore incapable d'exprimer, faute de vocables » ;
  • l'animatrice littĂ©raire Nathalie Jaulain lit certains de ses textes Ă  la MĂ©diathèque Pierre Moinot de Niort.

Sources

  • Le Courrier de l'Ouest du : J'adore les Mellois, nous dĂ©clare la nouvelle vice-prĂ©sidente du "Femina", par LĂ©on Lelong.
  • Le Courrier de l'Ouest du : Grâce Ă  Mme Claire Sainte-Soline les cyprès vont Ă  nouveau "spiritualiser" et "hellĂ©niser" le paysage des Deux-Sèvres.
  • Le Courrier de l'Ouest du : La mort continue de faucher (...) Claire Sainte-Soline (du FĂ©mina) disparaĂ®t Ă©galement, par LĂ©on Lelong.
  • Le Courrier de l'Ouest du : L’UniversitĂ© et les Lettres ont dit un dernier adieu Ă  Claire Saine-Soline.
  • Le Soir du : Adieu, Claire Sainte-Soline par Constant Burniaux, de l'AcadĂ©mie royale de langue et de littĂ©rature françaises de Belgique).
  • Le Figaro littĂ©raire du : La mort de Claire, par Maurice Chapelan.
  • La Nouvelle RĂ©publique du (date Ă  prĂ©ciser) : La romancière Claire Sainte-Soline n'est plus.
  • La Nouvelle RĂ©publique du : EnquĂŞte sur un Ă©crivain disparu, par Yves Revert.
  • La Nouvelle RĂ©publique du : Le filleul de Claire Sainte-Soline tĂ©moigne, interview du docteur Jean-Charles Medici.
  • La Nouvelle RĂ©publique du : Une romancière Ă  l'honneur - Jean-Pierre Giraudoux (fils de Jean) Ă©voque son amie Claire Sainte-Soline.
  • La Nouvelle RĂ©publique du : Plus de 100 auteurs mellois Ă  dĂ©couvrir avec la Vestegaille, par Jean-Claude Pommier.
  • La Nouvelle RĂ©publique du : Claire Sainte-Soline au Toit aux livres.
  • Le Courrier de l'Ouest du : Comme une chanson douce.
  • La Nouvelle RĂ©publique du : Le souvenir de Claire Sainte Soline.

Bibliographie

  • Jean-Claude Pommier, Claire Sainte-Soline, rebelle et indomptable, Chef-Boutonne, , 256 p.

Notes et références

Notes

  1. Un exemplaire est dédicacé à Alexandre Vialatte (archives personnelles).

Références

  1. Lettre de sa fille Paulette Coquard du 8 juillet 1994 (archives personnelles).
  2. Ascendance sur Geneanet.
  3. Notice biographique des Éditions Grasset.
  4. Fernand Lot, « Les prix littéraires - Grosses révélations sur le Prix Minerva suivies d'une petite visite à Claire Sainte-Soline la nouvelle lauréate », Comœdia,‎ , p. 1 (lire en ligne).
  5. Notice biographique de la Conservation des cimetières de Niort.
  6. Article de la Nouvelle RĂ©publique du 24 janvier 1997.
  7. À propos de L'enfance de Manelle.
  8. Préface du Dimanche des Rameaux - Éditions Grasset. Les Cahiers rouges. Avril 1997.
  9. Carte adressée de Paris au décorateur et galeriste niortais Eugène Magneron (1902-1978) le 6 janvier 1962 (archives personnelles).

Liens externes

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