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Civilian Pilot Training Program

Le Civilian Pilot Training Program, ou CPTP, pour « programme d'entraînement de pilotes civils », était un programme de vols d'entraînement sponsorisé par le Gouvernement des États-Unis s'étant déroulé de 1938 à 1944, avec pour objectif à court terme de fortement augmenter le nombre de pilotes civils disponibles, donc d'avoir un effet positif sur la préparation militaire des Américains en prévision d'une future guerre[1].

Élèves pilotes aux côtés de Piper J-3, participant au Civilian Pilot Training Program. Photo prise au Congressional Airport (en) de Rockville, dans le Maryland.

Établissement

Dans les années précédant immédiatement la Seconde Guerre mondiale, plusieurs pays européens, en particulier l'Italie et l'Allemagne nazie, commencèrent à former et entraîner des milliers de jeunes personnes à devenir pilotes. Sous des apparences officielles assez innocentes de programmes purement civils, ces programmes sponsorisés par des gouvernements européens n'étaient en fait rien d'autre que des académies d'entraînement au vol militaire.

En , le gĂ©nĂ©ral Henry « Hap » Arnold convoqua les reprĂ©sentants des trois meilleures Ă©coles d'aviation et leur demanda d'Ă©tablir la mise en place d'Ă©coles d'entraĂ®nement civiles sans soutien financier, Ă  leurs propres risques. Ces personnes Ă©taient Oliver Parks (en), du Parks Air College (en), C. C. Moseley, du Curtiss-Wright Technical Institute, et Theopholis Lee, de la Boeing School of Aeronautics (en). Tous furent d'accord pour commencer le travail[2]. L'autoritĂ© aĂ©ronautique civile (en anglais : Civil Aeronautics Authority, ou CAA), dirigĂ©e par Robert Hinckley, crĂ©a le Civil Aeronautics Act of 1938, qui contenait les autorisations de langue et les fonds d'un programme d'essai de ce qui allait Ă©voluer en Civilian Pilot Training Program (CPTP)[1]. Le prĂ©sident Franklin D. Roosevelt dĂ©voila le programme le , annonçant lors d'une confĂ©rence de presse Ă  la Maison Blanche qu'il avait signĂ© une proposition pour fournir un soutien accĂ©lĂ©rĂ© Ă  l'aviation gĂ©nĂ©rale, en procurant de l'entraĂ®nement au pilotage Ă  20 000 Ă©tudiants par an.

Suivant le prĂ©cĂ©dent Ă©tabli par les EuropĂ©ens, le CPTP fut Ă©tabli comme Ă©tant un programme civil, mais son potentiel pour la dĂ©fense nationale ne fut pas particulièrement dissimulĂ©. Le programme dĂ©buta en 1939, avec deux lois passĂ©es par le Congrès en avril et juin[3], le gouvernement payant pour une formation au sol de 72 heures, suivie par 35 Ă  50 heures de formation en vol sur des installations situĂ©es près de onze lycĂ©es et universitĂ©s. Le programme fut un succès formidable et s'avĂ©ra ĂŞtre une exceptionnelle rĂ©ussite pour ses plus fervents dĂ©fenseurs, permettant alors Ă  l'AmĂ©rique de largement gonfler sa population de pilotes civils en formant des milliers de lycĂ©ens aux bases du vol.

Controverse

L'armée fut initialement peu enthousiaste au sujet du concept du CPTP[1], étant peu impressionnée par un quelconque programme initié et administré par des civils. De son côté, le Congrès lui aussi était divisé sur la plupart des points concernant la valeur de ce programme. Les Isolationnistes présentèrent le programme comme une exhibition de force provocante qui menaçait la neutralité de la nation, d'autres le qualifièrent de gâchis d'argent provenant des contribuables, alors que les partisans du programme vantaient ses impacts positifs sur l'industrie aéronautique et la valeur ajoutée importante pour la Défense, disposant alors d'une importante source de pilotes entraînés.

Après l'invasion de la Pologne par les Nazis du , qui déclencha la Seconde Guerre mondiale, la valeur militaire du CPTP devint évidente, même aux yeux des détracteurs du programme[1]. Les États-Unis commencèrent à évaluer leur capacité à engager une guerre aérienne et les résultats furent consternants. Les pilotes, les instructeurs de vol et les avions d'entraînement étaient tous en pénurie. Reconnaissant le manque de pilotes entraînés, l'US Army Air Corps (USAAC) et l'US Navy renoncèrent à contrecœur à certains cours « éliminatoires » pour les diplômés du CPTP et les autorisèrent à continuer directement vers des cours de pilotage.

L'USAAC estima la situation si grave qu'elle proposa que l'aviation privée soit suspendue et que tous les entraînements de pilotes — en particulier le CPTP — soient placés sous le contrôle des militaires. Le , un numéro d'American Aviation Daily publia ce communiqué sur les intentions de l'US Army :

« Des plans préliminaires seraient déjà mis en place par l'Army pour clouer au sol tous les vols privés aux États-Unis pour la durée de l'état d'urgence nationale... L'armée va prendre le contrôle de tous les programmes d'entraînement (incluant le CPTP). »

La proposition de l'US Army dut faire face Ă  une forte rĂ©sistance. Seulement deux semaines après la parution de l'article d'American Aviation Daily, 83 compagnies ayant un intĂ©rĂŞt acquis dans l'aviation gĂ©nĂ©rale organisèrent la National Aviation Training Association (NATA). Les membres de cette association reconnurent que, si rien n'Ă©tait fait, le plan de l'Army — pour toute raison pratique — supprimerait les avions privĂ©s du ciel amĂ©ricain. La NATA et d'autres acteurs importants de l'Aviation mirent des bâtons dans les roues de l'Army avec une campagne de lobbying efficace auprès du Congrès. Leurs actions ont sauvĂ© non-seulement le CPTP, mais pourraient probablement avoir sauvĂ© la totalitĂ© de l'industrie de l'aviation gĂ©nĂ©rale aux États-Unis.

Mise en place du programme

Un Aeronca L-3 Grasshopper, exemple typique d'appareil utilisé pour le Civilian Pilot Training Program.
Un Waco UPF-7, lors de son arrivée au RIAT de à Fairford, au Royaume-Uni.

Le rĂ©sultat fut un CPTP revitalisĂ© et une extension de son domaine d'activitĂ©s Ă  une plus vaste portion des lycĂ©es et universitĂ©s du pays. En , les neuf premières Ă©coles furent sĂ©lectionnĂ©es ; neuf autres furent ajoutĂ©es en — alors que la Bataille d'Angleterre faisait rage —, onze autres en et encore quinze autres en — quatre mois après la formation de l'United States Army Air Forces (USAAF) — et seulement deux mois avant l'entrĂ©e des États-Unis dans la Seconde Guerre mondiale. Ă€ l'apogĂ©e du programme, 1 132 institutions Ă©ducationnelles et 1 460 Ă©coles de pilotage participaient au CPTP. Des institutions telles que l'universitĂ© du Michigan, l'universitĂ© de Virginie, l'universitĂ© de Virginie, l'universitĂ© de Washington, le Georgia Institute of Technology, le Pomona Junior College, l'universitĂ© d'État de San JosĂ©, et plus notablement le Tuskegee Institute, inclurent tous le CPTP dans leur programme.

L'inclusion de l'université Tuskegee dans les rangs des participants au CPTP, en parallèle avec l'université d'Hampton, l'université d'État de Virginie, l'université d'État du Delaware et l'université Howard, permit d'ouvrir les portes aux premiers pilotes militaires afro-américains (les célèbres « Tuskegee Airmen »)[1]. Le début de la Seconde Guerre mondiale et la pression politique se combinèrent pour contraindre l'US Army Air Corps — comme elle était encore désignée à l'époque, avant de devenir l'US Army Air Forces, le — à accepter d'employer des Afro-américains comme officiers ou pilotes[1], la majorité de son personnel étant des diplômés du CPTP.

La décision d'entraîner des pilotes civiles produisit également un effet secondaire inattendu — mais bienvenu — sur l'industrie de l'aviation générale[1]. En fin de compte, les États-Unis firent face à un manque d'avions d'entraînement aussi important que le manque de pilotes civils. Les régulations de l'Autorité fédérale de l'aviation civile (CAA, ancêtre de la Federal Aviation Administration actuelle, ou FAA) demandaient à chaque école participant au programme CPTP de posséder au-moins un avion pour chaque lot de dix étudiants enrôlés dans le programme.

De plus, les exigences pour ces avions réduisirent leur nombre à seulement quelques modèles disponibles à cette période, avec la plupart des écoles de pilotage préférant la configuration à sièges en tandem du Piper Cub[1]. Saisissant l'opportunité inattendue s'offrant à eux, plusieurs fabricants d'avions légers s'empressèrent de combler le vide de marché avec des avions « CPTP-compatibles » de leur conception, tels les biplans UPF-7 de WACO et Meyers OTW[1]. Aeronca et Taylorcraft Aircraft (en) produisirent aussi des versions à sièges en tandem de leurs monoplans à aile haute existants à sièges côte-à-côte, chacun donnant naissance à un équivalent militaire, par exemple le Taylorcraft L-2.

Entrée en guerre

Après l'attaque de Pearl Harbor et l'entrée en guerre des États-Unis dans la Seconde Guerre mondiale, le CPTP changea définitivement, y-compris son nom. Le Civilian Pilot Training Program devint alors le War Training Service[1] (WTS, « service d'entraînement de guerre ») et, de 1942 à 1944, servit essentiellement de programme écran pour les candidats potentiels au statut de pilote. Les étudiants effectuaient toujours leurs classes dans les lycées et universités et leur entraînement au pilotage était toujours effectué par des écoles de pilotage privées, mais tous les diplômés du WTS devaient signer un contrat attestant leur engagement dans l'armée après l'obtention de leur diplôme. Il existe une liste complète des lycées et universités ayant participé au programme CPTP dans l'ouvrage They Flew Proud, de l'as de l'aviation Jane G. Birch[4].

Le programme CPTP/WTS fut abandonnĂ© Ă  l'Ă©tĂ© 1944, mais 435 165 personnes, incluant des centaines de femmes et d'Afro-amĂ©ricains, avaient Ă©tĂ© formĂ©s au pilotage[1]. Des pilotes lĂ©gendaires ayant appartenu au programme CPTP incluent : l'astronaute/sĂ©nateur John Glenn, le quatrième plus grand as de la Navy Alexander Vraciu, le pilote d'essai de Douglas Robert Rahn, le plus grand as de l'aviation amĂ©ricaine Richard Bong, le triple as Bud Anderson, l'ancien sĂ©nateur George McGovern, la WASP Dora Dougherty et le major afro-amĂ©ricain Robert W. Deiz. Le CPTP accomplit Ă  merveille la mission pour laquelle il fut mis en place, une devise restituĂ©e Ă  la perfection par le titre de l'ouvrage de l'historien aĂ©ronautique Dominick Pisano To Fill the Skies with Pilots[5], qui dĂ©crit en dĂ©tail l'aventure du Civilian Pilot Training Program.

Deux des plus importantes Ă©coles du WTS Ă©taient Piemont Aviation, gĂ©rĂ©e par Tom Davis, et Southern Airways, gĂ©rĂ©e par Frank W. Hulse. L'Ă©cole Piemont Ă©tait basĂ©e Ă  Winston-Salem, en Caroline du Nord, alors que la compagnie Southern possĂ©dait des Ă©coles Ă  Charlotte, en Caroline du Nord, Greenville et Camden, en Caroline du Sud, et Ă  Birmingham et Decatur, en Alabama. Les deux compagnies entraĂ®nèrent plus de 60 000 pilotes de guerre, incluant des jeunes hommes en provenance du BrĂ©sil (Ă©cole Piemont) et un grand nombre de pilotes britanniques de la Royal Air Force (compagnie Southern). En 1947, Davis transforma son Ă©cole en la compagnie Piemont Airlines, effectuant des vols passagers rĂ©guliers entre la Caroline du Nord et l'Ohio. En 1949, la compagnie Southern Airways de Hulse effectuait un service commercial entre Jacksonville, en Floride, et Memphis, dans le Tennessee, ainsi qu'entre Atlanta et Charlotte. Les deux compagnies commencèrent leur service avec des Douglas DC-3 issus des surplus militaires, modifiĂ©s en avions de ligne dans les hangars qui servirent d'installations de maintenance pendant les programmes CPTP et WTS.

L'une des rares femmes instructrices du CPTP Ă©crivit plus tard Ă  propos de ses expĂ©riences. Avec la menace de la guerre montrant le bout de son nez, Opal Kunz (en) renouvela sa licence de pilote après avoir suivi des cours de recyclage Ă  Hagerstown, dans le Maryland, puis commença Ă  enseigner le pilotage aux Ă©tudiants du lycĂ©e d'Ă©tat de l'Arkansas (dĂ©sormais l'universitĂ© d'État de l'Arkansas). Elle s'installa ensuite Ă  Rhode Island, et au dĂ©marrage de la Seconde Guerre mondiale devint instructrice au Rhode Island State Airport Terminal (en) pour les cadets de l'US Navy. Grâce au CPTP, elle put pendant la guerre enseigner Ă  plus de 400 jeunes comment voler pour l'Air Corps. Elle put rĂ©aliser d'un vieux rĂŞve qu'elle avait depuis son engagement dans le Betsy Ross Air Corps (en), en entraĂ®nant les hommes qui piloteraient plus tard des chasseurs au combat. Un article de l'Ă©poque dĂ©crivit le travail qu'elle accomplit en disant :

« Mlle Kunz est Ă  Providence depuis comme membre de l'Ă©quipe d'E. W. Wiggins (en). Elle a une confiance maternelle en ses « garçons » et ils le lui rendent avec respect et enthousiasme. Rien ne la rend plus heureuse que de les voir voler en solo, de savoir qu'elle les a amenĂ© un pas plus en avant vers la ligne de dĂ©fense aĂ©rienne de l'Oncle Sam. »

Plus tard, revenue chez elle en Californie, elle se remémora ses expériences avec tendresse :

« J'ai entraĂ®nĂ© 400 hommes et ce fut facilement le point culminant de ma carrière. Je suis vraiment devenue une sorte de mère adoptive pour eux. Vous seriez surpris de savoir combien de mes hommes m'ont amenĂ© leurs femmes et leurs enfants après la guerre[6]. »

Elle indiqua également dans une lettre qu'elle avait entraîné des pilotes de combat :

« [...] J'étais instructrice de vol pendant toute la durée de la guerre. Plus de 300 de mes étudiants ont servi de pilotes militaires pendant la guerre[7]. »

Au-moins une diplômée du CPTP, Betty Tackaberry Blake (en), servit comme pilote dans le Women Airforce Service (WASP)[8].

Notes et références

  1. (en) Roger Guillemette, « Civilian Pilot Training Program (CPTP) », US Centennial of Flight Commission (consulté le ).
  2. (en) Craven 1955.
  3. (en) « Black Americans in Defense of Our Nation » [archive du ], Sam Houston State University (consulté le ).
  4. (en) Birch 2007.
  5. (en) Pisano 2001.
  6. (en) Lu Hollander, Executive Director of the 99's. Private Communication, 18 septembre 1999.
  7. (en) Librairie John F. Kennedy, Boston, « White House Central Name File, Box 1532, Folder: KUNZ », Lettre d'Opal Kunz au Président Kennedy, datée du 14 avril 1961.
  8. (en) « Betty C.G.T. Blake », Veteran Tributes, Gulfport, MS (consulté le ).

Voir aussi

Articles connexes

Bibliographie

Document utilisé pour la rédaction de l’article : document utilisé comme source pour la rédaction de cet article.

  • (en) Wesley Frank Craven, The Army Air Forces in World War II, vol. 6 : Men and Planes, The University of Chicago Press, 1re Ă©d., 808 p. (ASIN B000BVZJ0Y, prĂ©sentation en ligne). Document utilisĂ© pour la rĂ©daction de l’article
  • (en) Jane Gardner Birch, They Flew Proud, Jane G. Birch, , 192 p. (ISBN 1-93385-825-7, EAN 978-1933858258, prĂ©sentation en ligne). Document utilisĂ© pour la rĂ©daction de l’article
  • (en) Dominick A. Pisano, To Fill the Skies with Pilots : The Civilian Pilot Training Program, 1939–1946, Smithsonian Institution Scholarly Press, coll. « Smithsonian History of Aviation and Spaceflight Series », , 197 p. (ISBN 1-56098-918-1 et 978-1-56098-918-9, prĂ©sentation en ligne). Document utilisĂ© pour la rĂ©daction de l’article
  • (en) Donald M. Pattillo, A History in the Making : 80 Turbulent Years in the American General Aviation History, McGraw-Hill Professional, , 1re Ă©d., 300 p. (ISBN 0-07049-448-7 et 978-0-07049-448-0, prĂ©sentation en ligne).
  • (en) Roger E. Bilstein, Flight in America : From the Wrights to the Astronauts, Johns Hopkins University Press, , 3e Ă©d., 416 p. (ISBN 0-80186-685-5 et 978-0-80186-685-2, prĂ©sentation en ligne).
  • (en) Patricia Strickland, The Putt-Putt Air Force : The Story of the Civilian Pilot Training Program and The War Training Service (1939–1944), Federal Aviation Administration, , 1re Ă©d. (ASIN B000X1X3BY, prĂ©sentation en ligne).


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