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Bugle rampante

Ajuga reptans

La bugle rampante (Ajuga reptans) est une plante vivace de la famille des Lamiacées qui pousse dans les endroits frais[2]. C'est une plante qui émet de longs stolons feuillés[2].

DĂ©nomination

Le nom vulgaire de la bugle « provient du latin mĂ©diĂ©val bugula, peut-ĂȘtre dĂ©rivĂ© de bugillo, qui dĂ©signait une plante indĂ©terminĂ©e[3] ».

Le nom botanique Ajuga a deux origines possibles : tiré du grec a, privatif et du latin jugum, joug, en référence à la corolle qui semble dépourvue de lÚvre supérieure ; déformation du latin abigere, chasser, allusion aux prétendues vertus de ces plantes qui faciliteraient l'accouchement. L'épithÚte spécifique reptans fait référence au stolon rampant[4].

Cette bugle porte Ă©galement des noms vernaculaires, Petite Consoude, Consoude moyenne, Herbe de Saint-Laurent, Herbe au charpentier, Herbe Ă  la coupasse, cette plante Ă©tant connue pour ses vertus cicatrisantes et astringentes[4].

Description

Les tiges sont partiellement pubescentes et portent des feuilles vert foncĂ©, ovales Ă  oblongues, spatulĂ©es d'environ 10 cm de long.

Floraison : en mai-juin[2], fleurs bleu foncĂ© de 1 Ă  cm sur des Ă©pis pouvant atteindre 15 cm.

Taille : 10 Ă  40 cm de haut[2]. Son Ă©talement peut aller jusqu'Ă  m de diamĂštre.

Originaire de l'Europe, du Caucase et de l'Iran, elle est trĂšs rustique. Commune en France jusque 2 000 mĂštres d'altitude mais plus rare en rĂ©gion mĂ©diterranĂ©enne[2].

La plante ressemble assez fortement à la Bugle de GenÚve qui préfÚre de son cÎté les sols plus secs et moins riches[2].

Utilisations

Pharmacopée

Cette plante est connue pour ses vertus mĂ©dicinales : sa richesse en tanins explique son utilisation depuis des siĂšcles : usage interne (antidiarrhĂ©ique, anti-inflammatoire, antifongique) et externe (hĂ©mostatique, cicatrisant, qui l'a fait aussi appeler "herbe des charpentiers")[5] - [6]. Cette rĂ©putation au Moyen Âge lui vaut le distique « Qui a la bugle et la sanicle, fait au chirurgien la nique[7] ».
L'herbe Ajuga reptans a aussi été utilisée en médecine traditionnelle (en Autriche et dans les Balkans par exemple), en interne ; sous forme de thé/infusion, pour traiter les troubles des voies respiratoires[8] - [9].

Pharmacochimie

En 1990, une étude a montré qu'en culture in vitro, les cals de Bugle rampant produisent des anthocyanines (jusqu'à 2,5% du poids sec sous un cycle lumiÚre-obscurité) et qu'il s'agit d'une des rares espÚces capable d'en produire dans le noir total (1% du poids sec)[10].
Des anthocyanines triacylĂ©es sont aussi produites par la fleur[11] ; En 1996 quatre anthocyanes diffĂ©rents avaient Ă©tĂ© isolĂ©es des fleurs d' Ajuga reptans (de mĂȘme que de leurs cultures cellulaires), et un cinquiĂšme anthocyane a Ă©galement Ă©tĂ© dĂ©couvert par spectromĂ©trie de masse HPLC. Celui qui est le plus prĂ©sent (anthocyanine cyanidine 3-(di-p-coumaroyl)sophoroside-5-malonylglucoside) s'est montrĂ© plus stable que la cyanidine 3-glucoside, et aussi plus efficace pour prĂ©venir les rĂ©actions de pĂ©roxidation. Selon M.-PiaCalcagno & al. (1996), les cultures de cellules de fleurs du Bugle rampant produisent assez d'anthocyanines pour prĂ©senter un intĂ©rĂȘt comme source de colorant alimentaire ou pour d'autres usages[12].

Israili & Lyoussi (2009) ont publié une étude ethnopharmacologique sur le genre Ajuga[13]

Selon une étude récente (2017), la fleur contient des composés actifs potentiellement intéressants : antioxidants et antibactériens[14].

La plante produit des phyto-ecdystéroïdes, in vitro (cultures de cellules de tissus de racines), par contre aucun ecdystéroïde n'a été observé dans les pousses cultivées en l'absence de racine[15]. Et « la concentration d'ecdystéroïdes était plus élevée dans les cultures supplémentées en hormones que dans le milieu basal et augmentait pendant la période de croissance ». Les types d'ecdystéroïdes dominants changent selon que la culture soit faite in vitro ou in vivo[15]; les ecdystéroïdes du Bugle rampant A. reptans sont donc biosynthétisés dans les racines[15] - [16]. Selon la saison, les conditions environnementales, mais aussi selon les variétés (sous-espÚces, dont par exemple A. reptans var. atropurpurea. ) les ecdystéroïdes peuvent varier (en termes de molécules et de quantité). Ces molécules pourraient jouer un rÎle de protection contre les arthropodes en perturbant leur cycle de mues.

Les tiges et feuilles contiennent aussi une quantité importante d'oligosaccharide (s) de la famille du raffinose et dans le phloÚme et les feuilles)[17] et c'est le stachyose qui est, de loin, la forme la dominante (pour rappel, les raffinoses sont des sucres impliqués dans le transport et le stockage des carbohydrates dans la plante, décomposés par nos bactéries intestinales, ils sont sources de sensation de ballonnement et de flatulences, présent dans de nombreux légumes dont le haricot)[18] ; dans les feuilles, le taux de raffinoses est plus bas en été (75 mg/g de poids frais) et le plus élevées en automne/hiver (200 mg/g de poids frais), alors que le saccharose et l'amidon ne sont que des composants mineurs. Le raffinoses pourraient expliquer la résistance au gel de cette plante[18].

Dans les jardins

Sur sols riches et frais, en mi-ombre, cette plante peut ĂȘtre cultivĂ©e comme couvre-sol et plante dĂ©corative ; de nombreux cultivars en ont Ă©tĂ© sĂ©lectionnĂ©s, dont «Catlin's Giant» qui a remportĂ© le prix du mĂ©rite du jardin de la Royal Horticultural Society[19] - [20].

Plante alimentaire

La Bugle rampante fait partie des plantes sauvages comestibles autrefois consommées, par exemple cuite, en Italie[21] ou dans les Balkans en Bosnie-Herzégovine. La feuille en est comestible, consommée crue (en salade, généralement) ou cuite (dans une soupe, une sauce verte, des galettes végétales...).

Il est aussi utilisé comme fourrage pour les animaux en Australie[22].

La plante n'a aucun effet toxique décrit chez l'homme, ni chez le chien, le chat, le cheval ou le bétail (bovins, ovins) ni chez les oiseaux[23].

Pollen

La morphologie du pollen des plantes du genre Ajuga a été étudiée ; elle présente une valeur taxinomique[24].

Écologie

La bugle rampante est appréciée de nombreux papillons de jour en voie de régression : elle est la principale source de nectar pour le Grand collier argenté et le Petit collier argenté. C'est aussi une source (secondaire) de nectar pour le Citron, l'Hespérie du brome,Argus bleu, Azuré du serpolet, Azuré des nerpruns, Point-de-Hongrie, Lucine, Piéride de Réal, Piéride du chou, Piéride du navet, Piéride de la rave, Hespérie de la mauve, Mélitée du mélampyre, Leptidea sinapis, Sylvaine, Damier de la succise, Aurore, Belle-Dame[25].

Cette plante est naturellement consommé par certains rongeurs forestiers[26]

Photos

  • Bugle rampante
    Bugle rampante
  • Ajuga reptans
    Ajuga reptans
  • Inflorecence
    Inflorecence

Illustrations

  • Jan Kops - Flora Batava, Volume 16, (1800)
    Jan Kops - Flora Batava, Volume 16, (1800)
  • Otto Wilhelm ThomĂ©, Flora von Deutschland, (1885)
    Otto Wilhelm Thomé, Flora von Deutschland, (1885)
  • Martin CilenĆĄek: NaĆĄe ĆĄkodljive rastline,(1892)
    Martin CilenĆĄek: NaĆĄe ĆĄkodljive rastline,(1892)
  • Flora Batava, vol. 20,(1898)
    Flora Batava, vol. 20,(1898)

Variétés

L'espÚce sauvage est parfois envahissante, et des variétés horticoles en sont cultivées, qui forment d'excellents couvre-sol. Leurs feuilles et fleurs sont de diverses couleurs. Les principales variétés sont :

  • A. reptans 'Burgundi Glow' : feuilles vert argentĂ© ou vert dorĂ© avec du rouge vineux foncĂ© ;
  • A. reptans 'Catlin's Giant' : grandes feuilles bronze pourprĂ© foncĂ©. Les inflorescences sont un peu plus grandes ;
  • A. reptans 'Multicolor' ou A. reptans 'Rainbow' : tapissant, aux feuilles vert bronze foncĂ© marquĂ©es de crĂšme et de rose ;
  • A. reptans 'Pink Elf' : compact, fleurs rose foncĂ© sur des hampes courtes (cm de haut) ;
  • A. reptans 'Variegata' : dense et Ă  pousse lente. Feuilles gris-vert marginĂ©es et Ă©claboussĂ©es de crĂšme.

Voir aussi

Articles connexes

Liens externes

Bibliographie

  • Ghita G., Cioanca O., Gille E., Necula R., Zamfirache M.M., Stanescu U., Contributions to the phytochemical study of some samples of Ajuga reptans L. and Ajuga genevensis L.. Medical Sciences, 2011; 4(53): 7-14

Notes et références

  1. IPNI. International Plant Names Index. Published on the Internet http://www.ipni.org, The Royal Botanic Gardens, Kew, Harvard University Herbaria & Libraries and Australian National Botanic Gardens., consulté le 13 juillet 2020
  2. (fr) Guide complet de la nature - Michael Lohmann - p.312 - (ISBN 2-8034-4019-9) - Éditions Chantecler - Aartselaar - Belgique
  3. François Couplan, Les plantes et leurs noms. Histoires insolites, éditions QuÊ, , p. 34
  4. Jean-Claude Rameau, Dominique Mansion, GĂ©rard DumĂ©, Flore forestiĂšre française. Plaines et collines, ForĂȘt privĂ©e française, , p. 831
  5. (en) V.A. Kurkin, « Phenylpropanoids from medicinal plants: distribution, classification, structural analysis, and biological activity », Chem Nat Compd., vol. 39, no 2,‎ , p. 123-153 (DOI 10.1023/A:1024876810579)
  6. Howard, Michael (1987). Traditional Folk Remedies Century. p.108
  7. Annick Montel-Kowalyszin, Contons fleurettes ! histoires et légendes des fleurs sauvages, TheBookEdition, , p. 5
  8. (en) « Ethnopharmacological in vitro studies on Austria's folk medicine—An unexplored lore in vitro anti-inflammatory activities of 71 Austrian traditional herbal drugs », Journal of Ethnopharmacology, vol. 149, no 3,‎ , p. 750–771 (ISSN 0378-8741, PMID 23770053, PMCID PMC3791396, DOI 10.1016/j.jep.2013.06.007, lire en ligne, consultĂ© le )
  9. Jman Redzic S (2006) Wild edible plants and their traditional use in the human nutrition in Bosnia‐Herzegovina ; Ecology of Food and Nutrition, 45(3), 189-232 (voir p 197 et 224). URL=https://www.bastabalkana.com/wp-content/uploads/2013/03/Wild-edible-plants-and-their-traditional-use-in-the-human-nutrition-in-Bosnia-and-Herzegovina.pdf
  10. (en) A. Callebaut, G. Hendrickx, A. M. Voets et J. C. Motte, « Anthocyanins in cell cultures of Ajuga reptans », Phytochemistry, vol. 29, no 7,‎ , p. 2153–2158 (ISSN 0031-9422, DOI 10.1016/0031-9422(90)83027-X, lire en ligne, consultĂ© le )
  11. Terahara, N., Callebaut, A., Ohba, R., Nagata, T., Ohnishi-Kameyama, M., & Suzuki, M. (1996). Triacylated anthocyanins from Ajuga reptans flowers and cell cultures. Phytochemistry, 42(1), 199-203 (résumé).
  12. (en) M.-Pia Calcagno, Francisco Camps, Josep Coll et Enric MelĂ©, « New phytoecdysteroids from roots of Ajuga reptans varieties », Tetrahedron, vol. 52, no 30,‎ , p. 10137–10146 (DOI 10.1016/0040-4020(96)00536-4, lire en ligne, consultĂ© le )
  13. Israili Z.H., Lyoussi B., Ethnopharmacology of the plants of genus Ajuga. Pak. J. Pharm. Sci., 2009; 22: 425-462
  14. Toiu, A., Vlase, L. A. U. R. I. A. N., Gheldiu, A. M., Vodnar, D., & Oniga, I. (2017). Evaluation of the antioxidant and antibacterial potential of bioactive compounds from Ajuga reptans extracts. Farmacia, 65, 351-355.
  15. (en) Jaime TomĂĄs, Francisco Camps, Josep Coll et Enric MelĂ©, « Phytoecdysteroid production by Ajuga reptans tissue cultures », Phytochemistry, vol. 32, no 2,‎ , p. 317–324 (DOI 10.1016/S0031-9422(00)94988-4, lire en ligne, consultĂ© le )
  16. (en) Jaime TomĂĄs, Francisco Camps, Elisabet Claveria et Josep Coll, « Composition and location of phytoecdysteroids in Ajuga reptans in vivo and in vitro cultures », Phytochemistry, vol. 31, no 5,‎ , p. 1585–1591 (DOI 10.1016/0031-9422(92)83112-C, lire en ligne, consultĂ© le )
  17. (en) Norbert Sprenger et Felix Keller, « Allocation of raffinose family oligosaccharides to transport and storage pools in Ajuga reptans: the roles of two distinct galactinol synthases », The Plant Journal, vol. 21, no 3,‎ , p. 249–258 (ISSN 0960-7412 et 1365-313X, DOI 10.1046/j.1365-313x.2000.00671.x, lire en ligne, consultĂ© le )
  18. Bachmann, M., Matile, P., & Keller, F. (1994). Metabolism of the raffinose family oligosaccharides in leaves of Ajuga reptans L.(cold acclimation, translocation, and sink to source transition: discovery of chain elongation enzyme). Plant physiology, 105(4), 1335-1345.
  19. "Unnatural Histories - Amazon [archive]". BBC Four.
  20. familiale Shrestha et al., 2002
  21. Ranfa A & Bodesmo M (2017) An Ethnobotanical investigation of traditional knowledge and uses of edible wild plants in the Umbria Region, Central Italy. Journal of Applied Botany and Food Quality, 90, 246-258 (voir p 249)|URL=https://www.researchgate.net/profile/Mara_Bodesmo/publication/318654341_An_Ethnobotanical_investigation_of_traditional_knowledge_and_uses_of_edible_wild_plants_in_the_Umbria_Region_Central_Italy/links/5975cf46a6fdcc834893c460/An-Ethnobotanical-investigation-of-traditional-knowledge-and-uses-of-edible-wild-plants-in-the-Umbria-Region-Central-Italy.pdf.
  22. Boxell V (2014) Edible and Useful Plants for the Swan Coastal Plain. Lulu. com.
  23. (en) « Ajuga reptans 'Black Scallop' », sur BBC Gardeners' World Magazine (consulté le )
  24. Kose, Y. B., Erkara, I. P., & Alan, S. (2011) Pollen morphology of some Turkish Ajuga L.(Lamiaceae) and its taxonomic value. Bangladesh Journal of Botany, 40(1), 29-33. URL=https://www.banglajol.info/index.php/bjb/article/download/7994/5981
  25. "Nectar Sources". UKButterflies.co.uk. 2002–2014
  26. DrĂłĆŒdĆŒ D (1966) Food habits and food supply of rodents in the beech forest. Acta theriologica, 11(15), 363-384.
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