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Benny Wenda

Benny Wenda, né le dans la vallée de Baliem[1], est un activiste papou, président du Mouvement uni pour la libération de la Papouasie occidentale qui mÚne campagne pour une indépendance pacifique de la Papouasie occidentale vis-à-vis de l'Indonésie. Reconnu comme prisonnier politique, il vit en exil au Royaume-Uni.

Benny Wenda
Illustration.
Benny Wenda au Parlement du Royaume-Uni en octobre 2008.
Fonctions
Président du Mouvement uni pour la libération de la Papouasie occidentale
En fonction depuis le
(5 ans, 11 mois et 24 jours)
Prédécesseur Octo Mote
Biographie
Date de naissance
Lieu de naissance vallée de Baliem

Biographie

Jeunesse

Issu du peuple lani (en), il grandit dans un village des Hautes Terres de Nouvelle-Guinée occidentale, sa famille pratiquant une agriculture de subsistance[2]. La Nouvelle-Guinée occidentale, ancienne Nouvelle-Guinée néerlandaise, est annexée par l'Indonésie en 1962, par la force des armes et sans consultation de la population autochtone papoue. L'Organisation pour une Papouasie libre déclenche un conflit séparatiste armé au début des années 1970, auquel l'Indonésie répond par le déploiement de forces armées et par une intense répression. Dans le cadre de ce conflit en Papouasie occidentale, les forces armées indonésiennes se livrent durant des décennies et en toute impunité à des massacres, des viols et de nombreuses autres atrocités[3] - [4] - [5] - [6] - [7].

En 1977, les soldats indonĂ©siens atteignent le village oĂč vit Benny Wenda, et soumet la population Ă  un rĂ©gime de contrĂŽles quotidiens de leur identitĂ© et de leurs mouvements. Selon Benny Wenda, les soldats rĂ©duisent de fait les femmes du village en esclavage, les contraignant Ă  les nourrir et Ă  laver leur linge, et soumettant certaines d'entre elles Ă  des viols rĂ©pĂ©tĂ©s et Ă  des actes de mutilation gĂ©nitale. Trois des tantes de Benny Wenda en meurent. AprĂšs quelques mois, les Lani se rebellent. Les forces indonĂ©siennes bombardent et dĂ©truisent leurs villages. GriĂšvement blessĂ© Ă  la jambe lors de ce bombardement, le jeune garçon est emmenĂ© dans la jungle par sa famille avec les autres villageois, et souffrira dĂšs lors d'un boitement prononcĂ©. Durant cinq ans, les villageois subsistent dans la jungle. Des soldats indonĂ©siens tuent sa cousine ĂągĂ©e de deux ans, et violent sa tante, qui en mourra. Sa grand-mĂšre meurt des difficultĂ©s de la vie en milieu sauvage. Pour le bien du garçon et de ses frĂšres et sƓurs, la famille se rend finalement aux autoritĂ©s indonĂ©siennes[2].

Le garçon est scolarisĂ© dans le systĂšme Ă©ducatif indonĂ©sien, qui vise Ă  imposer aux Papous une identitĂ© et un mode de vie indonĂ©siens. À l'instar des autres Ă©lĂšves papous, il subit les brimades d'enseignants et d'Ă©lĂšves indonĂ©siens qui qualifient les Papous d'ĂȘtres primitifs, sales et attardĂ©s. Il Ă©tudie Ă  l'universitĂ© Cenderawasih Ă  Jayapura, et discute avec d'autres Ă©tudiants papous des discriminations Ă  leur encontre, tentant de s'intĂ©resser Ă  l'histoire de la Papouasie malgrĂ© l'absence de textes accessibles Ă  ce sujet[2].

Premiers engagements et exil

La chute de la dictature militaire du prĂ©sident indonĂ©sien Soeharto en 1998, suivie du rĂ©fĂ©rendum d'autodĂ©termination du Timor oriental en 1999, crĂ©e une lueur d'espoir pour le mouvement indĂ©pendantiste papou. Des manifestations ont lieu en Nouvelle-GuinĂ©e occidentale ; des activistes organisent des cĂ©rĂ©monies de lever du drapeau de l'Étoile du matin. Durant le « Printemps papou Â» de 1999 Ă  2001, le prĂ©sident indonĂ©sien Abdurrahman Wahid accepte de discuter avec des nationalistes papous. Benny Wenda s'engage, devenant membre puis secrĂ©taire gĂ©nĂ©ral du mouvement Demmak, crĂ©Ă© par les anciens des peuples koteka (en) des Hautes Terres pour promouvoir leurs cultures tribales autochtones et pour soutenir l'indĂ©pendance de la Papouasie occidentale[2].

La nouvelle prĂ©sidente indonĂ©sienne Megawati Sukarnoputri en 2001 reprend la campagne de rĂ©pression Ă  l'encontre des indĂ©pendantistes papous. Le 6 juin 2002, Benny Wenda est arrĂȘtĂ© et emprisonnĂ©. Maintenu Ă  l'isolement, torturĂ©, il est dĂ©tenu plusieurs mois sans ĂȘtre informĂ© de quelque accusation Ă  son encontre. Il s'Ă©chappe de prison le 27 octobre et, aidĂ© par d'autres activistes, il parvient Ă  traverser la frontiĂšre entre l'IndonĂ©sie et la Papouasie-Nouvelle-GuinĂ©e, se rĂ©fugiant dans cette derniĂšre. De lĂ , il se rend au Royaume-Uni, oĂč son Ă©pouse et lui obtiennent l'asile politique en 2003[2]. Le gouvernement indonĂ©sien lancera en 2011 une notice rouge via Interpol pour obtenir son arrestation et son extradition, jusqu'Ă  ce qu'Interpol en 2012 annule la notice, reconnaissant que l'IndonĂ©sie souhaite l'arrestation de l'activiste pour des raisons « politiques Â»[8].

Porte-parole des indépendantistes papous

Benny Wenda au lancement du mouvement des Parlementaires internationaux pour la Papouasie occidentale, au Parlement du Royaume-Uni en octobre 2008.

En 2004, il co-fonde la Campagne pour la libĂ©ration de la Papouasie occidentale (Free West Papua Campaign) et devient son porte-parole. En 2005, il est accueilli et entendu aux Nations unies par le Groupe de travail sur les populations autochtones (en). En 2008 il co-fonde l'association des Parlementaires internationaux pour la Papouasie occidentale, qui rassemble notamment des parlementaires britanniques, papou-nĂ©o-guinĂ©ens et vanuatais qui soutiennent le droit de la population de Papouasie occidentale Ă  l'autodĂ©termination. En 2010 il est reçu par Abdoulaye Wade, le prĂ©sident du SĂ©nĂ©gal, qui lui exprime son soutien. En 2014, lorsque le Mouvement uni pour la libĂ©ration de la Papouasie occidentale est fondĂ© pour fĂ©dĂ©rer les divers mouvements indĂ©pendantistes papous, il en devient le porte-parole[2]. Cette mĂȘme annĂ©e il est nominĂ© (sans succĂšs) pour le prix Nobel de la Paix par l'ancien Premier ministre vanuatais Maxime Carlot Korman et par l'Ă©vĂȘque d'Oxford John Pritchard, entre autres[9].

En septembre 2017, Benny Wenda prĂ©sente une pĂ©tition au ComitĂ© spĂ©cial de la dĂ©colonisation des Nations unies, demandant la tenue d'un rĂ©fĂ©rendum d'indĂ©pendance en Nouvelle-GuinĂ©e occidentale sous supervision de l'ONU[10]. Le ComitĂ© refuse la pĂ©tition, arguant qu'il ne peut se pencher que sur les territoires dĂ©finis comme « non-autonomes Â» par l'AssemblĂ©e gĂ©nĂ©rale des Nations unies, et qu'il ne remettra pas en cause la souverainetĂ© ni l'intĂ©gritĂ© territoriale de l'IndonĂ©sie[11]. En dĂ©cembre, il est Ă©lu prĂ©sident du Mouvement uni pour la libĂ©ration de la Papouasie occidentale[12].

En juillet 2019, la ville d'Oxford l'honore des clés de la ville, ce qui provoque la colÚre du gouvernement indonésien[13].

Années 2020 : chef de gouvernement en exil

Le , le Mouvement uni pour la libĂ©ration de la Papouasie occidentale adopte une « Constitution provisoire Â» pour la « future RĂ©publique de Papouasie occidentale Â» et fait de Benny Wenda le prĂ©sident d'un « gouvernement provisoire Â» du pays. Le gouvernement sera constituĂ© durant les premiers mois de l'annĂ©e 2021 et visera Ă  obtenir un rĂ©fĂ©rendum d'indĂ©pendance, Ă  la suite duquel il souhaite organiser des Ă©lections pour faire du pays « le premier État vert au monde et un modĂšle de droits de l'homme - Ă  l'opposĂ© des dĂ©cennies de colonisation indonĂ©sienne sanglantes Â». Le gouvernement indonĂ©sien dĂ©clare « illĂ©gitime Â» ce dĂ©but de gouvernement papou[14] - [15].

En Ă  la COP 26 Ă  Glasgow, Benny Wenda annonce sa « vision pour un État vert », s'engageant Ă  ce que l'indĂ©pendance de son pays signifie l'adoption d'une loi contre l'Ă©cocide, qui s'imposerait Ă  toutes les entreprises opĂ©rant en Papouasie occidentale. Il exprime sa volontĂ© d'atteindre « une Papouasie occidentale libre du colonialisme indonĂ©sien gĂ©nocidaire et Ă©cocidaire »[16].

En février 2023, Benny Wenda est reçu à Nadi par le Premier ministre des Fidji, Sitiveni Rabuka. Ce dernier exprime publiquement son soutien à la candidature du Mouvement uni pour la libération de la Papouasie occidentale qui souhaite devenir membre à part entiÚre du Groupe Fer de lance mélanésien. Le gouvernement indonésien proteste formellement contre cette rencontre, qui marque une rupture avec la position du gouvernement fidjien précédent dirigé par Frank Bainimarama de 2006 à 2022[17].

Références

  1. (id) "Benny Wenda, Aktivis Papua Merdeka di Seberang", Cable News Network, 4 septembre 2019
  2. (en) "Benny Wenda’s Story", Campagne pour la LibĂ©ration de la Papouasie occidentale
  3. (en) Elizabeth Brundige et al., "Indonesian Human Rights Abuses in West Papua: Application of the Law of Genocide to the History of Indonesian Control", École de droit de Yale, avril 2004
  4. (en) Robert Courts, "West Papua: Human Rights", 8 mai 2019, Hansard
  5. (en) "Villages Torched, Villagers Tortured: Extreme human rights violations in West Papua", Special Broadcasting Service, 12 août 2019
  6. (en) "Papua Digest", Amnesty International
  7. (en) "'Don't bother, just let him die': Killing with impunity in West Papua", Amnesty International
  8. (en) "UK West Papuan tribal leader removed from Interpol list", BBC News, 6 août 2012
  9. (en) "W Papua's Wenda up for Nobel Peace Prize", Radio New Zealand, 7 octobre 2014
  10. (en) "1.8 million West Papuans petition UN for independence vote", Radio New Zealand, 27 septembre 2017
  11. (en) "West Papua independence petition is rebuffed at UN", The Guardian, 30 septembre 2017
  12. (en) "Wenda elected as new head of West Papuan liberation movement", Radio New Zealand, 4 décembre 2017
  13. (en) "Benny Wenda Oxford honour condemned by Indonesia", BBC News, 19 juillet 2019
  14. (en) "West Papua independence leaders declare 'government-in-waiting'", The Guardian, 1er décembre 2020
  15. (en) "West Papua liberation movement announces provisional govt", Radio New Zealand, 3 décembre 2020
  16. (en) "Benny Wenda: ‘Green State Vision’ our pathway to saving world’s third-largest rain-forest", Vision pour un État vert, 4 novembre 2021
  17. (en) "Indonesia protests Fiji PM’s meeting with Papua independence figure", Radio Free Asia, 1er mars 2023


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