Bataille d'Elbistan
La bataille d'Elbistan oppose les Mongols il-khanides et les Mamelouks dâĂgypte du au [4]. Câest une dĂ©faite pour les Mongols et la fin de leur domination sur lâAnatolie.
Il-kanides | Mamelouks |
11 000 mongols 3 000 géorgiens et Arméniens du Caucase, et Turcs du sultanat de Roum[2] | Au moins 10 000 mamelouks |
Campagnes mameloukes en Anatolie
CoordonnĂ©es | 38° 12âČ 05âł nord, 37° 11âČ 18âł est |
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Le contexte
Les Mongols ont pris possession de lâAnatolie aux dĂ©pens des Seldjoukides de Roum aprĂšs la victoire de BaĂŻdju Ă la bataille de Köse DaÄ en . LâAnatolie est dominĂ©e par de multiples souverains locaux qui se dĂ©clarent vassaux des Mongols, câest lâĂ©poque des beylicats. Certains de ces souverains musulmans cherchent lâalliance avec la grande puissance musulmane de lâĂgypte mamelouke. Depuis la cuisante dĂ©faite des Mongols Ă AĂŻn Djalout en 1260 contre Baybars, ceux-ci nâapparaissent plus comme invincibles. Baybars a dĂ©jĂ fait plusieurs incursions en Cilicie, ravageant le royaume armĂ©nien de Cilicie, fidĂšle alliĂ© des Mongols.
En 1265, le sultan de Roum le vizir Mu`in ad-DĂźn Suleyman dit « PervĂąne » se constitue une petite principautĂ© personnelle en conquĂ©rant Sinope. Sans doute Ă son instigation, le sultan seldjoukide de Roum Kılıç Arslan est assassinĂ©. PervĂąne est tentĂ© de placer son fils de trois ans sur le trĂŽne des sultans. Il prĂ©fĂšre Ă©pouser la veuve de Kılıç Arslan et pouvoir exercer les fonctions de rĂ©gent auprĂšs du jeune GhiyĂąth ad-DĂźn Kay Khusraw quâil nomme sultan bien qu'il ait moins de trois ans[5]. Ce ministre intrigant semble bien avoir nouĂ© des relations secrĂštes avec Baybars quâil invite sans doute Ă dĂ©livrer le pays de la tutelle mongole[1].
Lâil-khan mongol Abaqa est occupĂ© par les incursions djaghataĂŻdes au nord-est de ses territoires, ce qui le tient Ă©loignĂ© de lâAnatolie (1269-1270)[6]. Vers , le djaghataĂŻde Baraq vainc un frĂšre dâAbaqa Ă HĂ©rat. Il occupe la province et oblige le prince Chams al-DĂźn Kert dâHĂ©rat Ă venir lui rendre hommage Ă Nishapur et Ă payer un tribut. Abaqa vient alors depuis lâAzerbaĂŻdjan et inflige Ă Baraq une sĂ©vĂšre dĂ©faite prĂšs dâHĂ©rat (). Baraq se replie en Transoxiane et appelle Ă son aide son suzerain QaĂŻdu qui arrive avec 20 000 hommes. Baraq meurt peu aprĂšs, QaĂŻdu donne le trĂŽne Ă Douwa, fils de Baraq. Abaqa, vient se venger de lâagression de 1270. Ă la fin de 1272 il envoie au Khwarezm et en Transoxiane une armĂ©e qui saccage Ourguentch et Khiva et entre dans Boukhara le . Pendant sept jours tout est pillĂ© et brĂ»lĂ© et la partie de la population qui nâavait pas pris la fuite est dĂ©cimĂ©e. En rentrant en Perse lâarmĂ©e houlagide ramĂšne 50 000 captifs[7].
En 1275, Baybars pille les principales villes du royaume arménien de Cilicie : Sis (Kozan), Adana, Tarse, Lajazzo (Yumurtalık)[1].
La bataille
Baybars part du Caire Ă la tĂȘte de son armĂ©e. Il arrive Ă Alep en trente-huit jours. Il envoie un dĂ©tachement sur les rives de lâEuphrate avec la mission dâempĂȘcher les troupes mongoles de le franchir. DâAlep, le sultan passe Ă AĂŻntab (Gaziantep). Il envoie en avant-garde le gĂ©nĂ©ral Sunqur al-Achqar qui doit affronter un corps de 3 000 mongols quâil met en dĂ©route. Baybars se dirige vers les rives du Ceyhan oĂč sâĂ©tait concentrĂ©e lâarmĂ©e mongole avec des troupes du sultanat de Roum. Il trouve lâarmĂ©e mongole rangĂ©e en ordre de bataille dans la plaine dâElbistan. La cavalerie mongole est formĂ©e de onze corps de mille hommes. Les troupes turques sont sĂ©parĂ©es des troupes mongoles. Ă ces deux groupes sâajoute une troupe de 3 000 gĂ©orgiens. La bataille dĂ©bute le par temps froid[2].
Lâaile gauche mongole charge le centre de lâarmĂ©e mamelouke oĂč se trouve lâĂ©tendard du sultan et le repousse vers lâaile droite. Lâaile gauche des Ă©gyptiens est aussi bousculĂ©e. Baybars envoie du soutien Ă son aile droite qui parvient Ă se reprendre, puis il charge sur toute la ligne. Les mongols mettent pied Ă terre pour pouvoir mieux viser les adversaires avec leurs arcs. Ils ne peuvent cependant pas rĂ©sister Ă lâavance de lâarmĂ©e mamelouke. LâarmĂ©e mongole est en dĂ©route et les mamelouks exterminent les fuyards. Les GĂ©orgiens laissent deux mille hommes sur le champ de bataille. Baybars installe son camp sur le champ de bataille et fait tuer tous les prisonniers mongols, il Ă©pargne quelques officiers et Ă©pargne aussi les turcs du sultanat de Roum tout en leur faisant le reproche dâavoir combattu aux cĂŽtĂ©s des infidĂšles. Baybars fait enterrer la plupart des Mamelouks tombĂ©s pendant le combat afin quâon puisse croire quâil y a eu peu de victimes Ă©gyptiennes pendant cette bataille, il laisse les cadavres des Mongols sur place. Parmi les prisonniers se trouvent le fils de Mu`in ad-DĂźn Suleyman « PervĂąne » et sa mĂšre. Sunqur al-Achqar reçoit lâordre de les ramener Ă Kayseri et de les remettre aux magistrats de la ville[2].
AprĂšs la bataille
Baybars part vers Kayseri et traverse des rĂ©gions dĂ©vastĂ©es. Il reçoit lâallĂ©geance de trois commandants de places fortes. Baybars est accueilli favorablement par la population de Kayseri. Au palais, Baybars reçoit toutes les notabilitĂ©s de la ville, il fait distribuer Ă ses officiers les richesses laissĂ©es lĂ par le PervĂąne. Celui-ci envoie de Tokat un message de fĂ©licitations. Il sâĂ©tait enfui du champ de bataille dâElbistan alors quâil commandait les troupes seldjoukides vassales des mongols. Il Ă©tait alors allĂ© Ă Kayseri pour inciter le sultan GhiyĂąth ad-DĂźn Kay Khusraw Ă quitter la ville et Ă se rĂ©fugier Ă Tokat, mais son Ă©pouse Ă©tait morte en chemin. Baybars, dans sa rĂ©ponse au PervĂąne, lui demande de venir Ă Kayseri pour y prendre le gouvernement de lâAnatolie. PervĂąne demande un dĂ©lai de rĂ©flexion de deux semaines, mais Baybars part de Kayseri le 28 avril. Il espĂ©rait ĂȘtre soutenu par les princes musulmans, mais ceux-ci restaient sur la rĂ©serve craignant la vengeance dâAbaqa. Baybars fait tuer des chrĂ©tiens en particulier des ArmĂ©niens et commande Ă lâun de ses gĂ©nĂ©raux dâaller chĂątier les habitants de Roman qui avaient abritĂ© une troupe mongole. Les Mamelouks tuent les hommes et mettent en captivitĂ© les femmes et les enfants[8].
Pendant son sĂ©jour Ă Kayseri, Baybars reçoit la visite dâun karamanide qui lui demande des lettres dâinvestiture pour lui et ses frĂšres. Le bey karamanides Shams al-DĂźn Muhammad Ier (Ćemseddin Mehmed Ier) essaie de prendre Konya Ă la tĂȘte de 3 000 cavaliers. La ville lui ferme ses portes. Shams al-DĂźn Muhammad arbore alors les Ă©tendards de Baybars que son frĂšre lui a envoyĂ©. Il prend la ville puis la citadelle (fin mai 1277). Ă la nouvelle de cette dĂ©faite, le khan mongol Abaqa accourt en Anatolie (juillet 1277)[9]. Ă Konya, Shams al-DĂźn Muhammad apprend lâarrivĂ©e dâAbaqa en Anatolie, il quitte la ville avec ses Turcomans pour se retirer dans ses montagnes aprĂšs avoir Ă©tĂ© maĂźtre de cette capitale pendant trente sept jours[8].
RĂ©pression dâAbaqa
Abaqa est parti de Tabriz dans le courant du mois de juillet. Il suit les traces de Baybars et verse des larmes Ă l'aspect du champ de bataille dâElbistan couvert de cadavres mongols et voit avec surprise le petit nombre des morts seldjoukides et Ă©gyptiens. Dans sa colĂšre il fait mourir plusieurs gĂ©nĂ©raux seldjoukides quâil considĂšre comme les premiers auteurs de ce dĂ©sastre. Il reproche au PervĂąne qui lâaccompagne de ne lâavoir pas informĂ© plus exactement de la force de l armĂ©e Ă©gyptienne. Le Khan ayant examinĂ© le champ de bataille dit que lâarmĂ©e quâil avait avec lui Ă©tait moins nombreuse que celle de lâennemi et cependant il avait trente mille hommes. Ses troupes se rĂ©pandent sur son ordre dans le pays entre dâErzurum jusquâĂ Kayseri quâelles mettent Ă feu et Ă sang. En une semaine deux-cent-mille personnes sont tuĂ©es, mais les chrĂ©tiens sont Ă©pargnĂ©s. De retour dans sa rĂ©sidence dâĂ©tĂ© Ă Alatag[n 1]. Abaqa traduit PervĂąne devant un conseil de gĂ©nĂ©raux qui le jugent coupable dâavoir fui devant lâennemi, dâavoir trop tardĂ© Ă informer Abaqa de lâinvasion des mamelouks et de ne pas sâĂȘtre rendu immĂ©diatement auprĂšs dâAbaqa aprĂšs la dĂ©faite. PervĂąne est condamnĂ© Ă mort et exĂ©cutĂ© Ă Alatag le [9]. Abaqa le fait couper par le milieu du corps et ordonne que dans tous les mets quâon lui servira on mette de la chair de PervĂąne[11].
Référencement
Notes
- Alatag, AladaÄ ou Alatac Ă©tait la rĂ©sidence d'Ă©tĂ© d'Houlagou et celle de plusieurs de ses successeurs. L'AlataÄ est la chaĂźne de montagnes oĂč le Murat Sou (Murat Nehri/Murat Ăayı) l'une des deux riviĂšres qui constituent l'Euphrate, prend sa source au Koçbası Tepe (3 510 m). AladaÄ est un toponyme assez rĂ©pandu en Turquie qui signifie « montagne bigarrĂ©e »[10].
Références
- René Grousset (1965) p. 466 (pdf)
- Constantin dâOhsson (1852) p. 481-484
- Constantin dâOhsson (1852) p. 488
- La RĂ©daction, « 1er Juillet 1277 : dĂ©cĂšs de Baybars, sultan mamelouk dâEgypte », sur al-manach.com, (consultĂ© le ).
- M Th Houtsma (1993) p. 639.
- René Grousset (1965) p. 465-466
- René Grousset (1965) p. 421-422
- Constantin dâOhsson (1852) p. 484-491
- Constantin dâOhsson (1852) p. 495-498
- Constantin d'Ohsson (1852) p. 380 (note 1)
- Constantin dâOhsson (1852) p. 498-499 (note 2)
Bibliographie
- RenĂ© Grousset, Lâempire des steppes, Attila, Gengis-Khan, Tamerlan, Paris, Payot, , 4e Ă©d. (1re Ă©d. 1938), 669 p. (prĂ©sentation en ligne, lire en ligne [PDF]).
- (en) Martijn Theodoor Houtsma, T. W. Arnold et A. J. Wensinck, E.J. Brill's First Encyclopaedia of Islam, 1913-1936 (9 volumes), vol. IV, BRILL, , 42 p. (ISBN 978-90-04-09796-4, présentation en ligne).
- Constantin dâOhsson, Histoire des Mongols, depuis Tchinguiz-Khan jusqu'Ă Timour Bey ou Tamerlan (4 volumes), vol. III, F. Muller, (prĂ©sentation en ligne, lire en ligne).
- (en) Nagendra Kr Singh (dir.) et F. SĂŒmer, International encyclopaedia of islamic dynasties a continuing series (accĂšs partiel), vol. IV, Anmol Publications PVT. LTD., (ISBN 978-81-261-0403-1, prĂ©sentation en ligne, lire en ligne), « ážČarÄmÄn-oghullari ».
Annexes
Articles connexes
Liens externes