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Assassinat d'Olof Palme

L'assassinat d'Olof Palme est un assassinat non élucidé ayant visé le Premier ministre de SuÚde Olof Palme et survenu le vendredi 28 février 1986, à 23 h 21, au croisement des rues SveavÀgen et Tunnelgatan (en), dans le centre de Stockholm.

Assassinat d'Olof Palme
Image illustrative de l’article Assassinat d'Olof Palme
Des passants venant déposer des roses sur les lieux du crime, dans les jours ayant suivi l'assassinat.

Localisation Stockholm, SuĂšde
Cible Olof Palme
CoordonnĂ©es 59° 20â€Č 12″ nord, 18° 03â€Č 46″ est
Date
23 h 21 (UTC+1)
Type Assassinat
Armes Revolver Smith & Wesson Model 28, calibre .357 Magnum
Morts 1 (Olof Palme)
Blessés 1 (Lisbet Beck-Friis, son épouse)
Auteurs Inconnu
Auteurs présumés Stig Engström

L'affaire marque profondĂ©ment la sociĂ©tĂ© suĂ©doise et continue Ă  ce jour Ă  faire l'objet de nombreuses spĂ©culations. L'hypothĂšse d'un complot impliquant possiblement le Parti des Travailleurs du Kurdistan (PKK), les services secrets d'Afrique du Sud ou bien encore l'extrĂȘme droite suĂ©doise a Ă©tĂ© Ă©voquĂ©e, sans pour autant ĂȘtre Ă©tayĂ©e par des arguments probants. Des interrogations subsistent Ă©galement quand au comportement de la police suĂ©doise le soir de l'assassinat.

En dĂ©cembre 1988, un certain Christer Pettersson est arrĂȘtĂ© en raison d'un faisceau d'indices prouvant sa prĂ©sence sur les lieux au moment du crime. Il est reconnu coupable en juillet 1989 et condamnĂ© Ă  l'emprisonnement Ă  perpĂ©tuitĂ© mais finalement relaxĂ© en appel, bien que la veuve du Premier ministre l'ait identifiĂ© comme l'assassin. L'enquĂȘte, l'une des plus vastes au monde, reste cependant ouverte mais sans permettre d'avancĂ©e majeure.

Le 10 juin 2020, le procureur gĂ©nĂ©ral Krister Petersson indique que tout pointe vers la culpabilitĂ© d'un certain Stig Engström, dĂ©cĂ©dĂ© en 2000 et dont le cas avait Ă©tĂ© Ă©cartĂ© Ă  l'Ă©poque par la police. L'homme, qui dĂ©testait Olof Palme, travaillait Ă  proximitĂ© du lieu du crime et aurait agi par opportunitĂ©. L'affaire est donc close aprĂšs trente quatre ans d'enquĂȘte, sans que la culpabilitĂ© du suspect ne puisse ĂȘtre appuyĂ©e par des preuves matĂ©rielles[1]. L'arme du crime n'a Ă  ce jour jamais Ă©tĂ© retrouvĂ©e.

Contexte

Né le à Stockholm, Olof Palme dirige le Parti social-démocrate suédois des travailleurs depuis 1969. AprÚs une premiÚre période en tant que Premier Ministre de 1969 à 1976, il revient au pouvoir à la suite des élections parlementaires de 1982.

Connu pour ses positions de gauche affirmĂ©es, Palme est un homme politique clivant dans la sociĂ©tĂ© suĂ©doise. Sa critique virulente du colonialisme et de l'impĂ©rialisme ainsi que son engagement pour la paix lui ont valu d'acquĂ©rir une stature internationale. Il dĂ©fend notamment une position non alignĂ©e face aux États-Unis et Ă  l'Union SoviĂ©tique, et critique violemment le rĂ©gime d'Apartheid en Afrique du Sud.

Olof Palme au début des années 1970.

Dans les annĂ©es 1980, la SuĂšde est rĂ©putĂ©e pour sa vie politique apaisĂ©e. Le pays n'a pas connu d'assassinat politique depuis deux siĂšcles. Olof Palme lui-mĂȘme, souhaitant s'afficher comme un citoyen normal, a l'habitude de sortir dans la rue sans gardes du corps car il s'estime en sĂ©curitĂ©.

Déroulement des événements

Le soir du 28 fĂ©vrier 1986, Olof Palme et son Ă©pouse Lisbet rentrent chez eux Ă  pied aprĂšs ĂȘtre allĂ©s au cinĂ©ma Grand dans le centre de Stockholm, sans gardes du corps. Ils viennent d'assister Ă  une projection du film Bröderna Mozart. À 23 h 21, au croisement des rues SveavĂ€gen et Tunnelgatan, Olof Palme est mortellement blessĂ© d'une balle dans le dos, et Lisbet Palme est blessĂ©e d'une balle de revolver tirĂ©e Ă  bout portant par un homme qui quitte rapidement les lieux. Olof Palme dĂ©cĂšde immĂ©diatement, mais est conduit Ă  l'hĂŽpital de Sabbatsberg oĂč il est dĂ©clarĂ© mort Ă  00 h 06. Lisbet Palme s'en sort avec des blessures lĂ©gĂšres.

La journée du crime

La sortie au cinĂ©ma est dĂ©cidĂ©e peu de temps Ă  l'avance et est Ă©voquĂ©e pour la premiĂšre fois par Lisbet Palme sur son lieu de travail l'aprĂšs-midi du 28 fĂ©vrier. Elle discute ensuite du choix du cinĂ©ma Grand avec la petite amie de son fils au cours d'une conversation tĂ©lĂ©phonique qui a lieu vers 17 heures. Olof Palme, qui avait plus tĂŽt dans l'aprĂšs-midi donnĂ© congĂ© Ă  ses gardes du corps, n'est informĂ© du projet qu'Ă  son arrivĂ©e chez lui vers 18 h 30. Au tĂ©lĂ©phone avec son fils MĂ„rten, qui est dĂ©jĂ  en possession de tickets pour le Grand, il parle d'aller soit au Grand, soit au Spegeln (un autre cinĂ©ma du centre de Stockholm), mais rien n'est encore dĂ©cidĂ©. La dĂ©cision de se rendre au Grand est finalement prise par les Ă©poux Palme aux environs de 20 h. Les enquĂȘteurs chercheront Ă  savoir si le lieu de travail de Lisbet Palme, le domicile des Ă©poux Palme ainsi que le tĂ©lĂ©phone Ă©taient sur Ă©coute mais ne trouveront aucun Ă©lĂ©ment concret. Selon la police, il n'existe pas non plus d'Ă©lĂ©ment permettant d'affirmer que les Ă©poux Palme ont Ă©tĂ© suivis entre leur domicile et le cinĂ©ma[sou 1].

Le cinéma Grand, rue SveavÀgen à Stockholm.
Carrefour SveavĂ€gen-Tunnelgatan. Le meurtre a eu lieu Ă  l'endroit oĂč se tiennent les trois femmes, un peu Ă  cĂŽtĂ© de l'enseigne du magasin Kreatima. À l'Ă©poque et jusqu'en 1995, le magasin s'appelait Dekorima.

Le vendredi 28 fĂ©vrier 1986, Olof Palme rentre chez lui au numĂ©ro 31 de la rue VĂ€sterlĂ„nggatan dans la vieille ville de Stockholm Ă  environ 18 h 30, aprĂšs une journĂ©e de travail ordinaire. Il effectue quelques appels tĂ©lĂ©phoniques et dine avec son Ă©pouse. Peu aprĂšs 20 h 30, le couple quitte son domicile et se rend Ă  pied Ă  la station de mĂ©tro Gamla Stan. Ils prennent le mĂ©tro jusqu'Ă  la station RĂ„dmansgatan et, de lĂ , marchent jusqu'au cinĂ©ma Grand de la rue SveavĂ€gen. Ils y rejoignent leur fils MĂ„rten et sa petite amie. Il est alors un peu moins de 21 h 00. C'est Palme lui-mĂȘme qui achĂšte les tickets pour le film Bröderna Mozart de Suzanne Osten, dont la sĂ©ance dĂ©bute Ă  21 h 15[sou 2].

L'assassinat

AprĂšs la sĂ©ance, tous les quatre s'attardent devant le cinĂ©ma jusqu'Ă  23 h 15. Palme reconnaĂźt un dirigeant syndical et discute un moment avec lui. AprĂšs cela, la famille se sĂ©pare et le couple Palme marche vers le sud le long de la rue SveavĂ€gen. À hauteur de la rue Adolf Fredriks Kyrkogata, ils traversent la rue SveavĂ€gen et poursuivent sur le trottoir opposĂ©. Alors qu'ils s'apprĂȘtent Ă  traverser la rue Tunnelgatan et se trouvent devant le magasin Dekorima, un homme surgit derriĂšre Palme et lui tire une balle dans le dos Ă  bout portant. Il est environ 23 h 21 min 30 s. Palme s'Ă©croule sur le trottoir neigeux et meurt sur le coup. Une deuxiĂšme balle Ă©rafle Lisbet Palme dans le dos. Le meurtrier prend alors la fuite dans la rue Tunnelgatan et gravit les escaliers vers la rue Malmskillnadsgatan. Il traverse cette rue et poursuit le long de la rue David Bagares Gata. On perd alors sa trace[sou 3].

RĂ©action de la police

Dans les minutes qui suivent l'assassinat, la chronologie des Ă©vĂ©nements peut dans certains cas ĂȘtre connue Ă  la seconde prĂšs : les appels aux urgences sont enregistrĂ©s automatiquement et on y entend les annonces de l'horloge parlante. Pour les autres Ă©vĂ©nements, il est possible de donner une estimation[sou 4].

  • 23 h 21 min 30 s. Deux coups de feu sont tirĂ©s sur les Ă©poux Palme.
  • 23 h 22 min 20 s. DĂ©but de l'enregistrement d'un appel aux urgences. Un tĂ©moin oculaire qui se trouvait dans une voiture rue SveavĂ€gen dit Ă  l'opĂ©rateur qu'il y a eu « un meurtre rue SveavĂ€gen Â». L'appel est transfĂ©rĂ© Ă  la police, mais aprĂšs avoir attendu en vain une rĂ©ponse de la police pendant une minute et demie, le tĂ©moin raccroche.
  • 23 h 23 min 40 s. L'opĂ©ratrice du central de la compagnie JĂ€rfĂ€lla Taxi appelle les urgences. Cette opĂ©ratrice a auparavant reçu un appel d'un tĂ©moin qui est chauffeur de taxi, qui se trouvait sur les lieux du crime, et qui a demandĂ© Ă  son central de prĂ©venir les urgences. L'opĂ©ratrice a alors appelĂ© directement le central de la police. Elle n'a pu cependant rien dire sinon que quelqu'un a Ă©tĂ© abattu au croisement des rues SveavĂ€gen et Tunnelgatan. Il lui a Ă©tĂ© intimĂ© de rappeler le chauffeur de taxi et de lui demander de rester sur place jusqu'Ă  l'arrivĂ©e d'une patrouille, ce qu'elle a fait. Elle appelle ensuite Ă  23 h 23 min 40 s les urgences pour s'assurer qu'une ambulance est envoyĂ©e. Le dialogue se poursuit jusqu'Ă  23 h 24 min 20 s.
  • 23 h 24 min 40 s. Un opĂ©rateur des urgences appelle le central de la police. Il entre en communication avec un opĂ©rateur radio et lui demande si le central de la police a connaissance d'une alerte au coup de feu rue SveavĂ€gen. L'opĂ©rateur radio affirme que le central de la police n'a pas connaissance de cette alerte. Le dialogue se poursuit jusqu'Ă  23 h 25 min 10 s.
La rue Tunnelgatan, par laquelle le meurtrier s'est vraisemblablement enfui.
  • À environ 23 h 24, une premiĂšre patrouille de police (vĂ©hicule 2520) arrive sur les lieux. Un deuxiĂšme chauffeur de taxi de la compagnie JĂ€rfĂ€lla Taxi, qui a entendu le message d'alerte de son collĂšgue, se trouvait rue Kungsgatan Ă  environ 100 mĂštres de l'intersection des rues Kungsgatan et SveavĂ€gen, et Ă  proximitĂ© de la patrouille qu'il a informĂ© des Ă©vĂ©nements. La patrouille s'est rendu immĂ©diatement sur les lieux du crime et a entendu pendant son trajet l'alerte du central de la police. Dans la voiture se trouve le commissaire Gösta Söderström qui prend le commandement des opĂ©rations sur les lieux du crime.
  • 23 h 25 min 30 s est l'heure la plus tardive Ă  laquelle la patrouille de police du quartier de Södermalm (vĂ©hicule 3230) serait arrivĂ©e sur les lieux, mais il est possible qu'elle arrive dĂšs 23 h 23. Cette patrouille venait juste de passer rue Malmskillnadsgatan prĂšs des escaliers qui surplombent la rue Tunnelgatan lorsqu'elle entend le message d'alerte du central de la police. Elle arrive sur les lieux du crime un peu aprĂšs la premiĂšre patrouille (vĂ©hicule 2520), mais en fait pratiquement au mĂȘme moment. Le commissaire Söderström ordonne Ă  cette seconde patrouille de se lancer Ă  la poursuite du meurtrier sans faire part d'un quelconque signalement.
  • Entre 30 et 60 secondes aprĂšs la patrouille de Södermalm (vĂ©hicule 3230), une ambulance de Sollentuna (banlieue nord de Stockholm) arrive sur les lieux du crime. Elle se trouvait par hasard dans les environs et n'Ă©tait pas en service.
  • 23 h 26 min 00 s. L'opĂ©rateur du central de la police rappelle les urgences et dĂ©clare que le central de la police a connaissance de l'alerte. Le dialogue se poursuit jusqu'Ă  23 h 26 min 20 s.
  • Peu aprĂšs, une patrouille de police du quartier de Norrmalm (vĂ©hicule 1230) arrive sur les lieux. Cette patrouille faisait le plein dans une station-service Ă  proximitĂ© de la place Norra Bantorget lorsqu'elle a entendu l'alerte.
  • Peu aprĂšs, une ambulance arrive en provenance de l'hĂŽpital de Sabbatsberg. Les ambulanciers qui en sortent viennent en aide Ă  leurs collĂšgues de la premiĂšre ambulance.
  • 23 h 28 min 00 s. Les ambulanciers informent les urgences que l'ambulance transportant Olof Palme a quittĂ© les lieux du crime et se dirige vers l'hĂŽpital de Sabbatsberg.
  • 23 h 31 min 40 s. Les ambulanciers informent les urgences que l'ambulance est arrivĂ©e Ă  l'hĂŽpital de Sabbatsberg.

Il convient de signaler que la chronologie soumise par le commissaire Gösta Söderström et son chauffeur Ingvar Windén contredit la chronologie officielle pour ce qui est du message d'alerte du central de la police et de l'arrivée des policiers sur les lieux du crime. Selon eux, ces événements sont survenus six minutes plus tard que dans la chronologie officielle.

Gösta Söderström est lui-mĂȘme convaincu que des policiers ont participĂ© Ă  l'assassinat en permettant entre autres la fuite du meurtrier. Si le message d'alerte du central de la police n'a Ă©tĂ© diffusĂ© qu'Ă  23 h 29, alors la prĂ©sence du vĂ©hicule de police 1520 quatre minutes plus tĂŽt sur le chemin de fuite du meurtrier apparait comme particuliĂšrement suspecte. AprĂšs avoir enquĂȘtĂ© personnellement pendant plus de 10 ans, Gösta Söderström conclut qu'Ă  23 h 23 un premier message d'alerte a Ă©tĂ© diffusĂ© par le central de la police mais avec une diffusion restreinte Ă  « certains personnels Â», c'est-Ă -dire aux deux fourgonnettes de police 1230 et 3230, qui se trouvaient Ă  proximitĂ© des lieux du crime au moment de l'assassinat. Gösta Söderström affirme avoir vu sur un listing du central de la police qu'effectivement seules ces deux fourgonnettes ont Ă©tĂ© appelĂ©es Ă  23 h 23.

RĂ©actions

Gerbe de fleurs à la mémoire d'Olof Palme, le 3 mars 1986.

Information des autorités

À 23 h 30, le commissaire Gösta Söderström informe le central de la police que la victime est le Premier ministre. Dix minutes plus tard un informateur anonyme appelle l'agence de presse TT et affirme que le premier ministre a Ă©tĂ© abattu dans la rue SveavĂ€gen. Olof Palme est officiellement dĂ©clarĂ© mort Ă  00 h 06 Ă  l'hĂŽpital de Sabbatsberg. À 00 h 20 l'agence de presse TT, qui a obtenu confirmation, envoie une dĂ©pĂȘche spĂ©ciale annonçant la mort d'Olof Palme. Le vice-premier ministre Ingvar Carlsson est informĂ© ; il arrive Ă  00 h 45 au siĂšge du gouvernement Ă  Stockholm. L'ensemble des forces de police suĂ©doises est placĂ© en Ă©tat d'alerte Ă  02 h 05.

Annonce dans les médias

En 1986, la radio nationale suĂ©doise ne diffuse pas de journal d'information la nuit. Peu aprĂšs 01 h 00 le 1er mars, la station nationale P3 entame la diffusion d'un programme musical sans animateur. À 01 h 10 ce programme est interrompu et le journaliste Jan Ström lit le communiquĂ© suivant :

Le premier ministre Olof Palme est mort. Il a été mortellement blessé par balle ce soir dans le centre de Stockholm. Olof Palme a été abattu à l'intersection des rues Tunnelgatan et SveavÀgen et est mort ultérieurement à l'hÎpital de Sabbatsberg. Le gouvernement a été informé. Le ministre des finances Kjell-Olof Feldt et le vice-premier ministre Ingvar Carlsson ont été informés et tous deux ont confirmé la mort d'Olof Palme.
La police est à la recherche d'un homme ùgé de 35 à 40 ans, aux cheveux foncés et portant un manteau de couleur sombre. La police est donc à la recherche du meurtrier et une importante chasse à l'homme est en cours à Stockholm. C'est le central de taxi de Stockholm qui a communiqué le signalement. D'aprÚs le central de la police, c'est un chauffeur de la compagnie JÀrfÀlla Taxi qui a constaté qu'une personne a été abattue. Ce chauffeur de taxi a alerté son central qui à son tour a alerté la police. Des forces de police ont été envoyées sur place. Olof Palme a été abattu à 23 heures 30, c'est-à-dire à 11 heures et demie, il y a une heure et demie.
Le gouvernement a eu
 s'est rĂ©uni en conseil des ministres extraordinaire. C'est le vice-premier ministre Ingvar Carlsson qui dirige cette rĂ©union. Son seul commentaire lors de son arrivĂ©e Ă  Rosenbad ce soir a Ă©tĂ© de dire "c'est effroyable"
 c'est ce qu'il a dit Ă  l'agence de presse TT Ă  son arrivĂ©e au siĂšge du gouvernement. Olof Palme allait fĂȘter son 59e anniversaire dans quelques mois. Il Ă©tait premier secrĂ©taire du parti social-dĂ©mocrate depuis 1969 et a Ă©tĂ© premier ministre de 1969 Ă  1976 et depuis 1982.[2]
Du fait de cet événement nous allons bien entendu modifier nos programmes cette nuit. Et la rédaction du matin reviendra bien entendu avec de nouvelles informations lorsque nous en aurons à notre disposition.

À 04 h 00, un journal tĂ©lĂ©visĂ© spĂ©cial dĂ©bute sur la chaĂźne nationale TV2. Le gouvernement suĂ©dois tient une confĂ©rence de presse Ă  05 h 15. À 08 h 00 la chaĂźne TV1 commence Ă  son tour une Ă©dition spĂ©ciale consacrĂ©e Ă  l'assassinat. Au cours des journĂ©es du samedi et dimanche, la tĂ©lĂ©vision nationale suĂ©doise suspend tous les programmes de divertissement. Il est Ă©galement question d'annuler la cĂ©lĂšbre course de ski de fond Vasaloppet, qui se tient traditionnellement le premier dimanche de mars, mais les responsables de la course dĂ©cident finalement le maintien de la compĂ©tition[3].

RĂ©actions politiques

Dans la matinée du samedi, le roi Carl XVI Gustaf qui se trouvait à la montagne rentre à Stockholm. Le président du parlement Ingemund Bengtsson revient d'Espagne et Hans Holmér, préfet de police de la région de Stockholm arrive de Dalécarlie. Le président du parlement dissout le gouvernement mais demande aux ministres de rester en place pour gérer les affaires courantes. Lors d'une réunion à 09 h 00, la direction du parti social-démocrate choisit Ingvar Carlsson comme premier secrétaire par intérim.

L'enquĂȘte

Plaque commĂ©morative Ă  l'intersection des rues SveavĂ€gen et Olof Palmes Gata. On peut y lire « Ă  cet endroit fut assassinĂ© le premier ministre suĂ©dois Olof Palme le 28 fĂ©vrier 1986 Â».

L'enquĂȘte criminelle sur l'assassinat d'Olof Palme est la plus importante et la plus chĂšre jamais conduite en SuĂšde. En 2011, le directeur d'enquĂȘte Stig Edqvist dĂ©clare que « le coĂ»t de l'enquĂȘte a atteint il y a dĂ©jĂ  quelques annĂ©es un demi-milliard (de couronnes suĂ©doises) Â». En 2011, les enquĂȘteurs reçoivent encore trois appels par jour et l'ensemble du dossier occupe un total de 3600 classeurs. Environ 130 personnes ont Ă  ce jour avouĂ© ĂȘtre les auteurs du meurtre avant d'ĂȘtre blanchies par les enquĂȘteurs[4]. L'enquĂȘte criminelle est par ailleurs l'une des plus importantes au monde[5].

Une récompense allant jusqu'à 50 millions de couronnes suédoises est toujours promise pour toute information conduisant à l'arrestation du meurtrier[sou 5].

L'enquĂȘte est dirigĂ©e par :

  • Hans HolmĂ©r, prĂ©fet de police, de 1986 Ă  1987
  • Ulf Karlsson, directeur de dĂ©partement, en 1987
  • Hans Ölvebro, commissaire de police, de 1988 Ă  1997
  • Stig Edqvist, commissaire de police, depuis 1997

En 1996 l'enquĂȘte avait dĂ©jĂ  coĂ»tĂ© plus de 500 millions de couronnes suĂ©doises[sou 6].

Au total prÚs de cent trente individus ont avoué le meurtre d'Olof Palme[5].

Recherche de l'arme du crime

Les seuls indices que le meurtrier laisse derriÚre lui sont deux balles de type 357 magnum Winchester-Western. Ces deux balles correspondent aux fragments de plomb que l'on retrouve sur les habits des époux Palme. L'arme de loin la plus commune pour ce type de munition est le Smith & Wesson 357 et des efforts considérables sont effectués pour retrouver cette arme[sou 7].

Au cours de l'enquĂȘte, la police teste 500 revolvers 357 magnum. L'enquĂȘte se concentre particuliĂšrement sur la recherche des 10 revolvers de ce type qui Ă©taient dĂ©clarĂ©s volĂ©s au moment du meurtre. Les enquĂȘteurs retrouvent l'ensemble de ces 10 revolvers Ă  l'exception d'un seul, volĂ© en 1977 au rĂ©alisateur Arne Sucksdorff. Un autre des 10 revolvers, volĂ© en 1983 Ă  un particulier, est recherchĂ© pendant presque 20 ans avant d'ĂȘtre enfin retrouvĂ© en 2006, mais dans un Ă©tat tel qu'il n'est pas possible aux enquĂȘteurs de dĂ©terminer s'il s'agit de l'arme du crime[6] - [ndt 1].

Profil de l'assassin

En rĂ©unissant les informations fournies par les diffĂ©rents tĂ©moins, les enquĂȘteurs parviennent Ă  la conclusion que le meurtre a Ă©tĂ© commis par un homme mesurant entre 1,75 mĂštre et 1,90 mĂštre, vĂȘtu d'une veste ou d'un manteau de couleur sombre, dont les mouvements sont dĂ©crits par certains tĂ©moins comme maladroits, saccadĂ©s, nerveux et par d'autres comme agiles, et ĂągĂ© de 30 Ă  50 ans. Aucun entretien formel n'est organisĂ© avec Lisbet Palme pour recueillir un signalement du meurtrier, et les informations qu'elle fournira viendront par vagues successives[sou 8].

Le profil du meurtrier qui commence Ă  ĂȘtre Ă©laborĂ© en 1993 et qui est finalement rendu public en 1994[7] propose quatre scĂ©narios hypothĂ©tiques pour le soir du crime, mais conclut dans tous les cas que le meurtre a Ă©tĂ© commis par un homme agissant seul qui a rencontrĂ© Palme au cinĂ©ma Grand. Le meurtrier est, selon ce profil, un homme souffrant de troubles de la personnalitĂ© qui a agi par haine de Palme. Il a vraisemblablement eu des difficultĂ©s relationnelles toute sa vie, en particulier avec l'autoritĂ© sous toutes ses formes. Il est introverti, seul, et il souffre de troubles de la personnalitĂ©, mais n'est pas psychotique. Sa condition est intimement liĂ©e au fait qu'il a Ă©chouĂ© dans la vie. Ses Ă©checs le rendent dĂ©pressif et cette dĂ©pression en s'aggravant se transforme en paranoĂŻa. Lorsqu'une telle personne commence Ă  manifester un comportement criminel, c'est gĂ©nĂ©ralement entre 35 et 45 ans[sou 9].

Ce profil du meurtrier reçoit de nombreuses critiques au cours des ans, en particulier parce qu'il tend à conforter l'hypothÚse d'un homme ayant agi seul aux dépens de toute autre hypothÚse.

Une analyse critique du profil, prĂ©sentĂ©e en 1996 par deux experts de la cour des comptes, affirme que ce profil semble avoir « Ă©tĂ© trĂšs influencĂ© par la thĂšse selon laquelle Christer Pettersson est le meurtrier Â»[sou 10] - [8]. On a Ă©galement mis en doute la pertinence mĂȘme d'Ă©laborer un profil, dans la mesure oĂč les profils sont rĂ©alisĂ©s gĂ©nĂ©ralement pour les meurtriers rĂ©cidivistes, par exemple les tueurs en sĂ©rie, pour lesquels il est possible de dĂ©gager des similitudes entre les diffĂ©rents meurtres. Dans son rapport final publiĂ© en 1999, la commission d'Ă©valuation de l'enquĂȘte sur l'assassinat du premier ministre Olof Palme estime nĂ©anmoins que l'important est la quantitĂ© d'information disponible et non pas le nombre de crimes commis[sou 11].

Les portraits-robots

Avec l'aide d'un appareil empruntĂ© Ă  l'office fĂ©dĂ©ral de la police criminelle de Wiesbaden (RFA), les enquĂȘteurs Ă©tablissent un portrait-robot du meurtrier avec l'aide d'un tĂ©moin. Entre 23h30 et 23h40 le soir du meurtre, le tĂ©moin en question est « pratiquement entrĂ© en collision Â» avec un homme rue Smala GrĂ€nd devant le restaurant Alexandra. Apercevant le tĂ©moin, l'homme aurait eu l'air effrayĂ©, se serait retournĂ© et aurait pressĂ© le pas. ArrivĂ© rue Snickarbacken, il aurait tournĂ© Ă  droite vers la rue Birger Jarlsgatan[sou 12]. Ce portrait-robot est publiĂ© le 6 mars 1986, et en retour les enquĂȘteurs reçoivent quantitĂ© de tĂ©moignages, entre 7 000 et 8 000.

En 1986 et 1987, les enquĂȘteurs obtiennent six tĂ©moignages au sujet d'un individu habitant Ă  proximitĂ© des lieux du crime. Cet individu qui souffre de troubles mentaux a dĂ©veloppĂ© une fascination pour Olof Palme. Il se dĂ©crit lui-mĂȘme comme « le prince hĂ©ritier de Palme Â» ou « le bras droit de Palme Â». Lors d'une confrontation, le tĂ©moin de la rue Smala GrĂ€nd identifie cet individu comme Ă©tant le plus ressemblant Ă  l'homme qu'il a rencontrĂ© le soir du meurtre. L'individu indique aux enquĂȘteurs qu'il se trouvait le soir du meurtre dans un Ă©tablissement nocturne entre 21h00 et 02h00 du matin. Il n'est pas en mesure de fournir un alibi. Il n'y a cependant jamais eu d'Ă©lĂ©ment Ă  charge suffisant pour croire que cet individu est le meurtrier[sou 13].

Un deuxiĂšme portrait-robot est publiĂ© le 24 mars 1986. Ce portrait est basĂ© sur des informations fournies par un tĂ©moin qui aurait vu un homme suivre Olof Palme place Sergels Torg le 27 fĂ©vrier 1986. Aujourd'hui, l'opinion des enquĂȘteurs est que ce tĂ©moin aurait volontairement fourni des informations inexactes — c'est-Ă -dire que l'homme qui suivait Olof Palme n'a jamais existĂ©[sou 14]

Suspects officiels

Christer Petterson

Christer Pettersson, un marginal nĂ© en 1947 qui a Ă©tĂ© condamnĂ© pour meurtre en 1974[ndt 2], est entendu pour la premiĂšre fois le 28 mai 1986 sur son emploi du temps le soir du meurtre. L'homme, qui souffre de toxicomanie et d'alcoolisme, est soupçonnĂ© d'avoir Ă©tĂ© prĂ©sent Ă  Stockholm au moment du crime. À partir d'octobre 1988, la police commence Ă  s'intĂ©resser particuliĂšrement Ă  lui, et Ă  partir du 16 novembre 1988, son tĂ©lĂ©phone est placĂ© sur Ă©coute. Le 14 dĂ©cembre 1988 il est entendu une nouvelle fois et Ă  cette occasion, il est identifiĂ© par Lisbet Palme comme Ă©tant le meurtrier au cours d'une confrontation. Pettersson est mis en examen et Ă©crouĂ©. Une instruction est ouverte par le parquet de Stockholm le 29 mai 1989[sou 15].

DĂšs le dĂ©but de l'instruction, Pettersson affirme s'ĂȘtre rendu le soir du meurtre dans une salle de jeu de la rue OxtorgsgrĂ€nd dans le voisinage de la rue SveavĂ€gen dont il serait sorti aux environs de 22h30. Il aurait alors pris le train Ă  22h45 ou 23h15 pour rentrer chez lui Ă  Rotebro (dans la banlieue nord de Stockholm). S'Ă©tant endormi Ă  bord du train, il ne se serait rĂ©veillĂ© qu'une fois arrivĂ© Ă  MĂ€rsta (terminus de la ligne). Il aurait alors pris un train dans le sens opposĂ© pour revenir sur Rotebro. Il serait rentrĂ© chez lui juste avant minuit, ce qui selon lui peut ĂȘtre confirmĂ© par un ami qui se trouvait dans son appartement Ă  son retour. Lors de son interrogatoire, cet ami affirme que Pettersson est vraisemblablement rentrĂ© chez lui entre 00h15 et 01h00, mais il indique Ă©galement que, ce soir-lĂ , Pettersson est sorti de chez lui Ă  une heure qui ne lui aurait pas permis de voir les Ă©poux Palme se rendre au cinĂ©ma Grand. Les contradictions dans ces tĂ©moignages sont peut-ĂȘtre dues Ă  ce que les interrogatoires se sont dĂ©roulĂ©s plusieurs annĂ©es aprĂšs les faits[sou 16].

Dans un premier temps, Lisbeth Palme avait affirmĂ© ne pas se souvenir du visage de l'assassin. Elle revient nĂ©anmoins sur sa position aprĂšs une confrontation vidĂ©o avec Christer Pettersson, qu'elle identifie formellement. Cependant ce tĂ©moignage ne suffit par Ă  lui seul Ă  prouver sa culpabilitĂ©. En outre, Pettersson a Ă©tĂ© dĂ©signĂ© par un tĂ©moin comme se trouvant devant le cinĂ©ma Grand vers 23h00 le soir du meurtre. Pettersson lui-mĂȘme a affirmĂ© qu'il se trouvait Ă  proximitĂ© de la scĂšne de crime le soir du meurtre, ce qui est confirmĂ© par l'enquĂȘte policiĂšre. N'ayant pas d'alibi, Pettersson avait dans un premier temps demandĂ© Ă  des connaissances de lui en fournir un, ce qui renforce encore les suspicions Ă  son encontre. Enfin, le meurtrier a Ă©tĂ© dĂ©crit par certains tĂ©moins comme ayant une dĂ©marche saccadĂ©e, caractĂ©ristique que l'on retrouve chez Pettersson. Il faut nĂ©anmoins noter que d'autres tĂ©moins ont dĂ©crit l'assassin comme agile.

Il est incertain que Pettersson avait un mobile pour tuer Olof Palme. Quelques tĂ©moins ont bien entendu Pettersson exprimer son mĂ©contentement envers les autoritĂ©s mais seulement en des termes vagues. Lors du procĂšs, Pettersson exprime au contraire son admiration pour Olof Palme qu'il qualifie de « seul homme d'Ă©tat suĂ©dois Â»[9]. Par ailleurs, Pettersson souffrait de claudication et buvait Ă©normĂ©ment, alors que selon Lisbeth Palme le meurtrier s'Ă©tait enfui avec agilitĂ©. Les policiers, dans leurs dĂ©positions, tentent de dĂ©montrer que Pettersson avait la connaissance et l'expĂ©rience requises pour faire usage d'une arme Ă  feu, et qu'il Ă©tait en mesure de se procurer une telle arme, par exemple au sein de la salle de jeu qu'il avait l'habitude de frĂ©quenter dans le voisinage du lieu de l'assassinat. Il n'est toutefois pas dĂ©montrĂ© au cours de l'audience que Pettersson avait Ă  sa disposition une arme au moment oĂč Olof Palme a Ă©tĂ© assassinĂ©. La cour d'appel estimera elle aussi qu'aucun Ă©lĂ©ment ne confirme que Pettersson avait accĂšs Ă  une arme le soir du 28 fĂ©vrier 1986[10].

Christer Pettersson décÚde le 29 septembre 2004 des suites d'une fracture crùnienne consécutive à une chute qui aurait été provoquée par une crise d'épilepsie[11].

Le 18 octobre 2018, l'épouse d'Olof Palme et témoin direct de l'assassinat, Lisbeth Palme, souffrant d'une maladie, meurt à l'ùge de 87 ans[12]. Elle affirmera jusqu'à sa mort que Christer Petterson était l'assassin de son mari.

Victor Gunnarsson

DĂšs le lendemain du meurtre, les enquĂȘteurs reçoivent le tĂ©moignage d'une femme qui raconte qu'elle se trouvait la veille au cafĂ© Mon ChĂ©ri, rue Kungsgatan, et qu'elle y aurait conversĂ© avec un homme qui aurait exprimĂ© sa haine d'Olof Palme. L'homme lui aurait laissĂ© une carte de visite au nom de Vic G ainsi qu'un numĂ©ro de tĂ©lĂ©phone. D'autre tĂ©moins se font connaĂźtre avec des informations sur les propos hostiles Ă  Palme du mĂȘme homme, et affirment que cet homme possĂšderait une arme correspondant Ă  l'arme recherchĂ©e par les enquĂȘteurs dans le cadre de l'assassinat[sou 17].

Le 8 mars 1986, un certain Victor Gunnarsson est interrogĂ©, puis est relĂąchĂ© le soir mĂȘme. Le 12 mars, il est Ă  nouveau interrogĂ© et il lui est signifiĂ© qu'il est soupçonnĂ© pour complicitĂ© dans l'assassinat d'Olof Palme. Il est mis en garde Ă  vue le soir mĂȘme. Lors d'une perquisition Ă  son domicile sont saisis des Ă©crits hostiles Ă  Palme ainsi que la parka qu'il portait le soir du meurtre. Lors de l'examen de cette parka par la police scientifique, on retrouve des traces provenant d'une arme Ă  feu, mais qui ne correspondent pas Ă  l'arme recherchĂ©e dans le cadre de l'enquĂȘte[sou 18].

Lors de son interrogatoire, Gunnarsson affirme s'ĂȘtre rendu au cafĂ© Mon ChĂ©ri et y avoir discutĂ© avec trois femmes. AprĂšs le dĂ©part de ces trois femmes, il se serait entretenu avec deux jeunes. Par la suite, il serait allĂ© au cinĂ©ma Rigoletto pour y voir un film puis au restaurant McDonald's de la rue Kungsgatan. Les deux jeunes ont Ă©tĂ© entendus par les enquĂȘteurs et ont affirmĂ© que Gunnarsson Ă©tait sorti du cafĂ© entre 23h00 et 23h30. D'autres tĂ©moins l'ont vu au McDonald's.

Aucun des tĂ©moins du meurtre ne peut avec certitude identifier Gunnarsson et la description des vĂȘtements du meurtrier fournie par Lisbet Palme ne correspond pas aux vĂȘtements que portait Gunnarson.

Gunnarsson est Ă©crouĂ© le 17 mars 1986 et remis en libertĂ© le 11 avril 1986. Il fait cependant l'objet d'Ă©coutes tĂ©lĂ©phoniques entre mai 1987 et juin 1987, entre aoĂ»t 1987 et novembre 1987 et en janvier 1988. AprĂšs le procĂšs de Christer Pettersson, l'enquĂȘte sur Gunnarsson est abandonnĂ©e.

Le portrait de Gunnarsson dressĂ© par les enquĂȘteurs est celui d'une personne extravertie, ayant grandi Ă  JĂ€mjö (dans le sud de la SuĂšde), qui a beaucoup voyagĂ© et qui a vĂ©cu d'emplois occasionnels. Il dĂ©teste Palme, aime les armes, est intĂ©ressĂ© par la politique et les dĂ©bats de sociĂ©tĂ©, et est un sympathisant de mouvements extrĂ©mistes, notamment du parti EAP, connu pour ses positions de haine viscĂ©rale envers Palme. Gunnarsson a dĂ©clarĂ© Ă  des tĂ©moins avoir combattu au cĂŽtĂ© des AmĂ©ricains pendant la guerre du ViĂȘt Nam (ce qui est absurde compte tenu de son Ăąge[ndt 3]), avoir Ă©tĂ© formĂ© par le FBI et la CIA et avoir Ă©tĂ© agent de la CIA. AprĂšs vĂ©rification, il ressort cependant qu'il a Ă©tĂ© objecteur de conscience. Son entourage le dĂ©crit comme « non violent Â», « influençable Â», « rĂȘveur Â», « affabulateur Â» et comme « vivant dans son propre monde Â»[sou 19].

L'inspecteur Börje Wingren, qui a conduit l'interrogatoire de Gunnarsson, publie en 1993 un livre écrit en collaboration avec le journaliste Anders Leopold. Wingren estime que Gunnarsson est le meurtrier tandis que Leopold suggÚre que selon toute probabilité Gunnarsson faisait partie d'un complot piloté entre autres par la CIA. Gunnarsson aurait été présent sur les lieux du crime lorsque Palme a été abattu mais ne serait pas l'assassin. Le plan aurait donc été de faire de Gunnarsson un bouc émissaire[13].

En janvier 1994, Gunnarsson est retrouvĂ© mort en Caroline du Nord (États-Unis). Pour ce meurtre dont le mobile serait la jalousie, un ancien policier a Ă©tĂ© condamnĂ©, bien qu'il ait toujours clamĂ© son innocence.

Stig Engström : «l'homme de Skandia»

Bùtiment Skandia sur SveavÀgen.

En 2018, le journaliste et enquĂȘteur Thomas Petterson publie une sĂ©rie d'articles dans le magazine suĂ©dois Filter et plus tard un livre, Den osannolika mördaren (L'assassin improbable), basĂ© sur une enquĂȘte de longue date sur le meurtre de Palme[14]. Les conclusions de Petterson sont Ă©galement couvertes ailleurs dans les mĂ©dias suĂ©dois, par exemple par Expressen[15] et Aftonbladet[16]. La thĂ©orie de «l'homme de Skandia» avait dĂ©jĂ  Ă©tĂ© suggĂ©rĂ©e en 2016 par Lars Larsson dans son livre Nationens fiende (littĂ©ralement, « L'ennemi de la nation Â»), mais l'attention n'avait Ă©tĂ© que limitĂ©e Ă  l'Ă©poque[17].

La théorie de Petterson est que Palme a été abattu par Stig Engström, un individu auparavant connu sous le surnom de « l'homme de Skandia » (« Skandiamannen »). L'employeur d'Engström, la compagnie d'assurance Skandia, a son siÚge social situé non loin de la scÚne du meurtre. L'homme avait mené une brÚve carriÚre politique au niveau local et se montrait trÚs critique d'Olof Palme en privé. Il présentait un profil mégalomaniaque, estimant qu'il avait raté sa vie et aurait dû accomplir de grandes choses. Engström s'est suicidé le à l'ùge de 66 ans à TÀby, dans la banlieue de Stockholm[18].

À l'Ă©poque du crime, Engström s'Ă©tait prĂ©sentĂ© comme le premier tĂ©moin oculaire arrivĂ© sur les lieux du meurtre. Il avait Ă©galement Ă©tĂ© briĂšvement interrogĂ© par la police comme possible suspect, mais la piste avait Ă©tĂ© abandonnĂ©e par la suite. Petterson Ă©met l'hypothĂšse qu'Engström Ă©tait tombĂ© sur Palme dans la rue et l'avait abattu, peut-ĂȘtre sans prĂ©mĂ©ditation. Ce serait donc un meurtre et non un assassinat.

Plusieurs preuves sur la scĂšne de crime prouveraient qu'Engström est l'assassin. D'autres tĂ©moins ont en effet donnĂ© une description du tueur en fuite correspondant Ă  Engström, certains trĂšs Ă©troitement. Personne ne se rappelle la prĂ©sence d'Engström aprĂšs les coups de feu alors qu'Engström lui-mĂȘme a affirmĂ© avoir Ă©tĂ© prĂ©sent depuis le dĂ©but, avoir parlĂ© Ă  Mme Palme et Ă  la police, et avoir participĂ© Ă  des tentatives de rĂ©animation de la victime. Cependant, les seules personnes qu'Engström a pu identifier comme ayant Ă©tĂ© prĂ©sentes sur les lieux Ă©taient celles susceptibles d'avoir Ă©tĂ© rencontrĂ©es par le tueur dans sa fuite. De plus, les dĂ©placements connus d'Engström au cours de la soirĂ©e, au sujet desquels il a fourni de fausses informations lorsqu'il a Ă©tĂ© interrogĂ©, indiquent qu'il avait eu l'occasion de retrouver Palme au cinĂ©ma plus tĂŽt dans la soirĂ©e et plus tard de le suivre jusqu'Ă  la scĂšne du crime.

Peu aprĂšs le meurtre, Engström a commencĂ© une sĂ©rie d'apparitions dans les mĂ©dias dans lesquelles il a dĂ©veloppĂ© un rĂ©cit de plus en plus dĂ©taillĂ©e de son implication dans les Ă©vĂ©nements et a critiquĂ© la police. Il a affirmĂ© avoir couru derriĂšre la police pour rattraper le meurtrier et que les autres tĂ©moins l'avaient confondu avec le tueur en fuite. En raison de ses versions changeantes, la police a considĂ©rĂ© Engström comme tĂ©moin peu fiable et incohĂ©rent et l'a rapidement classĂ© comme personne sans intĂ©rĂȘt. Petterson imagine que les apparitions d'Engström dans les mĂ©dias Ă©taient une tactique opportuniste, et finalement rĂ©ussie, conçue pour induire les enquĂȘteurs en erreur. Engström aurait souhaitĂ© attirer plus tard l'attention en se prĂ©sentant comme un tĂ©moin important nĂ©gligĂ© par la police.

Bien que la thĂ©orie de Petterson repose sur des preuves indirectes, il estime que la culpabilitĂ© d'Engström pourrait ĂȘtre Ă©tablie en traçant et en examinant l'arme du crime. Selon le journaliste, le revolver appartenait probablement Ă  une connaissance d'Engström, un collectionneur passionnĂ© d'armes Ă  feu.

ClĂŽture de l'enquĂȘte officielle

Le 10 juin 2020, le parquet suĂ©dois, par le biais du procureur Krister Petersson et tout en notant le manque de preuves matĂ©rielles, prĂ©sente Stig Engström, « l'homme de Skandia », comme l'auteur de l'assassinat et clos l'enquĂȘte. Engström Ă©tant dĂ©cĂ©dĂ©, il ne peut ĂȘtre poursuivi. L'enquĂȘte peut toutefois ĂȘtre rouverte en cas de nouveaux Ă©lĂ©ments. Le mĂȘme jour, le Premier ministre, Stefan Löfven, 28 ans au moment des faits, dĂ©clare que « les coups de feu tirĂ©s sur SveavĂ€gen dans la nuit de fĂ©vrier 1986 ont depuis lors Ă©tĂ© une sorte de crise, une blessure, un mystĂšre non rĂ©solu. Pour un pays, l'assassinat d'un Premier ministre est un traumatisme national. J'espĂšre que cette blessure peut maintenant guĂ©rir. Dans un Ă©tat de droit, ce n'est pas le gouvernement qui annonce un verdict ou le lieu pour le gouvernement de juger les conclusions des procureurs. Mais en tant qu'ĂȘtre humain, et en tant que chef du mĂȘme parti qu'Olof Palme, je peux dire que c'est une journĂ©e pleine d'Ă©motions »[19].

Les autres pistes

Implication de la police

Une hypothĂšse veut que plusieurs membres de la police de Stockholm auraient jouĂ© un rĂŽle dans l'assassinat ou du moins auraient participĂ© au sabotage travail d'enquĂȘte a posteriori. Il n'existe pas Ă  proprement parler une piste unique pouvant ĂȘtre qualifiĂ©e de « piste policiĂšre », mais plutĂŽt un faisceau de tĂ©moignages concernant les agissements suspects de certains policiers avant, pendant, ou aprĂšs le meurtre[sou 20] - [20].

Le soir du meurtre, plusieurs témoignages mentionnent des hommes portant des talkies-walkies sur le trajet des époux Palme à leur sortie du cinéma Grand. Par ailleurs, un délai intentionnel au niveau du central de la police de Stockholm ainsi que la passivité de certaines patrouilles de police auraient permis au meurtrier de s'enfuir.

De l'enquĂȘte, il ressort uniquement qu'il y avait, au sein de la police de Stockholm, des individus aux opinions d'extrĂȘme droite et prĂ©sentant un intĂ©rĂȘt inhabituel pour les armes Ă  feu, mais rien qui n'accrĂ©dite une quelconque participation Ă  l'assassinat de Palme. Le rapport de la commission d'Ă©valuation sur l'enquĂȘte, qui contient une Ă©tude approfondie sur plusieurs policiers ayant participĂ© Ă  l'enquĂȘte, dĂ©plore nĂ©anmoins que la « piste policiĂšre » n'ait pas Ă©tĂ© prise au sĂ©rieux et qu'il n'ait donc pas Ă©tĂ© possible de lever les soupçons de maniĂšre convaincante, et considĂšre que cette piste aurait dĂ» ĂȘtre poursuivie de façon plus approfondie pour contrer la dĂ©fiance envers les enquĂȘteurs qui s'est dĂ©veloppĂ©e parmi les experts indĂ©pendants et les critiques[sou 21].

Des documents prĂ©cĂ©demment classĂ©s confidentiels et passĂ©s dans le domaine public pendant l'Ă©tĂ© 2010 montrent que des policiers ont mis en cause certains de leurs collĂšgues en affirmant qu'ils savaient qui avait tuĂ© Palme. Les collĂšgues en question Ă©taient signalĂ©s comme sympathisants d'extrĂȘme droite et faisaient partie de la brigade du quartier de Norrmalm. Le tĂ©moignage d'un chauffeur de taxi, qui a dĂ©clarĂ© avoir reconnu un des policiers suspectĂ©s sur les lieux du crime 4 Ă  5 minutes avant l'assassinat, a Ă©galement Ă©tĂ© mis au jour[21] - [22]. Ces documents renforcent les soupçons, dĂ©jĂ  rĂ©pandus parmi les experts indĂ©pendants, qui pĂšsent sur un supposĂ© groupe de policiers d'extrĂȘme droite, liĂ©s Ă  la brigade de Norrmalm. Certains membres avaient des liens avec un club de tir et avec la « Basebolliga » (« Ligue de baseball » — un groupe de policiers Ă  la dĂ©rive), et ont mĂȘme Ă©tĂ© soupçonnĂ©s de liens avec la piste des services secrets sud-africains[23].

Le film du réalisateur Kjell Sundvall I lagens namn (« Au nom de la loi »), inspiré librement de l'affaire de la « Basebolliga », et qui sort fin 1986, aurait contribué à créer un climat de suspicion envers la police[24].

Ces derniĂšres annĂ©es, une variante de la piste policiĂšre a Ă©tĂ© mise en avant par, entre autres, le criminologue Leif GW Persson[25]. Par ailleurs, Göran Lambertz, membre de la Cour suprĂȘme et ancien chancelier de justice, a critiquĂ© le fait que la piste policiĂšre n'ait pas fait l'objet d'une enquĂȘte alors mĂȘme qu'une commission d'Ă©valuation a estimĂ© que cela Ă©tait nĂ©cessaire[26].

La piste du PKK

DĂšs la semaine qui suit l'assassinat, les enquĂȘteurs s'intĂ©ressent Ă  l'organisation kurde du Parti des Travailleurs du Kurdistan (PKK). En effet, en 1984 et 1985, d'anciens membres du PKK avaient Ă©tĂ© assassinĂ©s Ă  Uppsala et Ă  Stockholm, et le PKK avait Ă©tĂ© mĂȘlĂ© Ă  des crimes violents Ă  travers toute l'Europe. Le gouvernement suĂ©dois ayant qualifiĂ© le PKK d'organisation terroriste et assignĂ© ses membres Ă  rĂ©sidence, on considĂšre que l'organisation avait un mobile pour s'attaquer aux intĂ©rĂȘts suĂ©dois et se trouvait en capacitĂ© d'assassiner Olof Palme[sou 22]. Le point faible de cette piste demeure qu'il n'a jamais Ă©tĂ© possible d'identifier un quelconque membre du PKK rue SveavĂ€gen au moment du meurtre[sou 23].

Au printemps 1986, un certain nombre de Kurdes sont entendus concernant les meurtres d'anciens membres du PKK en 1984 et 1985. Durant l'automne et l'hiver 1986-1987, la police prĂ©pare une rafle de plus grande envergure, dans le cadre d'une opĂ©ration dirigĂ©e par Hans HolmĂ©r baptisĂ©e OpĂ©ration Alpha[27]. L'idĂ©e est qu'une opĂ©ration d'envergure sĂšmera la confusion et incitera les personnes apprĂ©hendĂ©es Ă  dire ce qu'elles savent de la participation du PKK dans l'assassinat de Palme. Au cours de la rafle menĂ©e le 20 janvier 1987, 22 personnes sont interrogĂ©es et 3 sont mises en garde Ă  vue pendant une semaine. L'enquĂȘte policiĂšre ne fait cependant aucun progrĂšs[sou 24] et l'opĂ©ration est dĂ©noncĂ©e comme une chasse aux sorciĂšres dans l'opinion. HolmĂ©r est contraint de dĂ©missionner quelques semaines plus tard de ses fonctions de directeur d'enquĂȘte. Quelques mois plus tard, il dĂ©missionne Ă©galement de son poste de prĂ©fet de police[28].

Dans le prolongement de cette piste Ă©clate l'affaire Ebbe Carlsson. La ministre de la justice Anna-Greta Leijon est contrainte Ă  la dĂ©mission aprĂšs qu'il ait Ă©tĂ© rĂ©vĂ©lĂ© qu'elle avait, dans une missive, demandĂ© Ă  l'Ă©diteur Ebbe Carlsson de mener une enquĂȘte Ă  titre privĂ© Ă  l'encontre du PKK. De hauts responsables de la police dont Hans HolmĂ©r et Per-Göran NĂ€ss sont condamnĂ©s pour avoir conduit des Ă©coutes illĂ©gales, et Carlsson et quelques policiers sont condamnĂ©s pour avoir importĂ© illĂ©galement du matĂ©riel d'Ă©coute.

La piste de la Guerre froide

Les enquĂȘteurs suĂ©dois se sont intĂ©ressĂ©s Ă  une possible implication de la CIA, l'agence de renseignement amĂ©ricaine. La raison est que les positions internationales d'Olof Palme, qui prĂŽnait une zone dĂ©nuclĂ©arisĂ©e en Europe du Nord, contrariaient les projets des États-Unis en pleine Guerre froide[29]. Une extension de cette thĂ©orie implique le rĂ©seau Gladio, structure clandestine qui agissait au cƓur des pays de l'OTAN et tentait d'entraver toute action soupçonnĂ©e d'ĂȘtre procommuniste. Le rĂ©seau aurait alors dĂ©cidĂ© d'Ă©liminer Olof Palme, jugĂ© trop favorable Ă  l'URSS, en recrutant des sympathisants d'extrĂȘme droite au sein de la police suĂ©doise.

L'implication de l'URSS à travers le KGB a également été également envisagée car le Premier ministre avait critiqué les intrusions de sous-marins soviétiques dans les eaux suédoises[29].

La piste sud-africaine

L'implication des services secrets sud-africains dans l'assassinat de Palme est jugĂ©e crĂ©dible en raison de son combat mondialement reconnu contre le rĂ©gime d'apartheid alors en place. Une sĂ©rie d'accusations et de contre-accusations de personnes ayant collaborĂ© avec les services secrets sud-africains laisse planer le doute car les dĂ©clarations sont contradictoires, de seconde main, et la crĂ©dibilitĂ© des protagonistes est sujette Ă  caution[sou 25]. NĂ©anmoins le procureur gĂ©nĂ©ral a dĂ©montrĂ© que l'agent sud-africain Craig Williamson se trouvait Ă  Stockholm au moment de l'assassinat[30]. Eugene de Kock, officier sous le rĂ©gime d'apartheid condamnĂ© pour crimes contre l'humanitĂ©, a lui-mĂȘme mentionnĂ© la possibilitĂ© d'une implication de l'Afrique du Sud.

L'auteur de la sĂ©rie de romans policiers Ă  succĂšs Millenium, Stieg Larsson, a enquĂȘtĂ© sur le meurtre d'Olof Palme de 1986 jusqu'Ă  sa mort en 2004[31]. En 1987 il avait remis une note Ă  la police les mettant sur la piste d'un certain Bertil Weddin, depuis exilĂ© Ă  Chypre. Selon la thĂ©orie de Larsson, Olof Palme aurait Ă©tĂ© assassinĂ© sur ordre de l'Afrique du Sud avec le soutien d'Ă©lĂ©ments d'extrĂȘme droite dans le police de Stockholm. Cependant, en 1988, la police avait Ă©cartĂ© son hypothĂšse au profit de celle d'un tueur isolĂ©[32].

Les Oustachis

Pendant quelque temps, les enquĂȘteurs s'intĂ©ressent aux Oustachis, un mouvement d'extrĂȘme droite croate actif ayant collaborĂ© avec l'Allemagne nazie et passĂ© dans la clandestinitĂ© aprĂšs la guerre. Miro BareĆĄić, un ancien membre des Oustachis, avait en 1971 assassinĂ© l'ambassadeur de Yougoslavie Ă  Stockholm, devenant Ă  cette occasion le premier terroriste international qu'ait connu la SuĂšde. AprĂšs l'assassinat de son mari, Lisbet Palme dĂ©clare aux enquĂȘteurs qu'elle soupçonne le groupe terroriste Oustachi. Olof Palme avait en effet en 1982 promis de gracier Miro BareĆĄić. Au sein de la SĂ€po (service de la sĂ»retĂ© suĂ©doise), certains s'Ă©taient opposĂ©s Ă  une libĂ©ration, car l'on craignait que les Oustachis ne se lancent dans une campagne nationale de terreur. Palme aurait donc Ă©tĂ© assassinĂ© pour ne pas avoir graciĂ© BareĆĄić[33].

L'extrĂȘme droite suĂ©doise

En fĂ©vrier 2014 le quotidien Svenska Dagbladet interroge la compagne du militant de droite Alf Enerström, opposant acharnĂ© d'Olof Palme, qui avait Ă©tĂ© suspectĂ© Ă  l'Ă©poque et a, depuis, Ă©tĂ© internĂ© dans un hĂŽpital psychiatrique pour comportement violent. Cette femme affirme qu'Alf « est sorti en disant qu'il allait mettre de l'argent dans le parcmĂštre. J'ai pensĂ© que c'Ă©tait Ă©trange car le stationnement Ă©tait gratuit le vendredi soir et le week-end. Il est ensuite rentrĂ© tard. Â»

L'affaire Bofors

Le groupe d'armements suédois Bofors aurait versé plus de 40 millions de dollars à différentes personnalités indiennes, issues du ministÚre de la Défense, ainsi qu'au Premier ministre indien, Rajiv Gandhi pour obtenir un marché de livraison d'obusiers d'un montant de 1,4 milliard de dollars. Informé de cette corruption aprÚs la signature du contrat, Olof Palme voulut rendre le scandale public, ce qui aurait porté gravement préjudice au groupe Bofors et créé une crise diplomatique majeure avec l'Inde.

L'affaire Eva Rausing et la thĂšse du trafic d'armes

L'affaire Olof Palme a rebondi de façon étonnante en juillet 2012 lors de la découverte du corps d'Eva Rausing, une riche héritiÚre suédoise exilée à Londres, à son domicile de Belgravia. L'autopsie a révélé qu'elle serait morte d'une overdose mais, quelques semaines avant sa mort, elle avait contacté un écrivain suédois en prétendant lui révéler l'identité du commanditaire de la mort d'Olof Palme.

Les liens entre la famille d'Eva Rausing et l'industrie de l'armement on conduit à imaginer l'implication de marchands d'armes dans la mort du Premier ministre. Il existe en effet en SuÚde un vaste consortium formé d'industriels spécialisés dans la vente d'armes. Ce groupe a notamment vendu illégalement des armes à l'Iran au cours de la guerre Iran-Irak, en dépit de l'embargo international sur la vente d'armes vers ces deux pays. Or pendant son mandat, Olof Palme avait fait voter une série de lois limitant le commerce des armes : toute exportation d'armes vers des pays en guerre était interdite. Olof Palme en outre avait été mandaté par l'ONU comme médiateur entre l'Iran et l'Irak. Il devait donc posséder des éléments sur ce trafic et aurait risqué de divulguer les agissement du groupement industriel.

Impact de l'assassinat

Le chef du gouvernement Ă©tant dĂ©cĂ©dĂ©, le gouvernement suĂ©dois remet sa dĂ©mission au roi dans la foulĂ©e. C'est le Vice-Premier ministre Ingvar Carlsson qui prend la tĂȘte du Parti Social-DĂ©mocrate et succĂšde Ă  Olof Palme.

L'assassinat d'Olof Palme est encore aujourd'hui considĂ©rĂ© comme un traumatisme national en SuĂšde. Le pays n'avait en effet pas connu d'assassinat politique depuis deux siĂšcles. Selon une formule populaire, la SuĂšde aurait « perdu son innocence » Ă  la suite de cet Ă©vĂ©nement[34]. Ce sentiment est renforcĂ© Ă  la suite de l'assassinat de la ministre Anna Lindh le Ă  Stockholm. Par ailleurs, les ratĂ©s de l'enquĂȘte et sa clĂŽture en 2020 sans conclusions formelles ont Ă©tĂ© une grande source de frustration de le pays.

Selon la loi prĂ©cĂ©demment en vigueur, le crime aurait dĂ» ĂȘtre prescrit vingt-cinq ans aprĂšs les faits, Ă  savoir en 2011. À la suite d'un amendement promulguĂ© en janvier 2010, l'assassinat d'Olof Palme, de mĂȘme que les autres crimes non Ă©lucidĂ©s considĂ©rĂ©s comme particuliĂšrement graves, ne peuvent plus bĂ©nĂ©ficier d'une prescription.

L'assassinat dans la culture populaire

Dans la fiction

Le roman La Manipulation Yggdrasil Ă©crit par GĂ©rard de Villiers, sorti en 1997 et portant le numĂ©ro 129 de la sĂ©rie SAS, Ă©voque une enquĂȘte rĂ©alisĂ©e en 1997 par le hĂ©ros, Malko Linge, afin de dĂ©terminer si la CIA ou l'OTAN Ă©taient les commanditaires de l'assassinat d'Olof Palme.

Kjell Sundvall a réalisé un film en 1998, Sista kontraktet (en), qui traite de l'assassinat de Palme et prétend qu'une conspiration est derriÚre ce meurtre.

Leif G. W. Persson dĂ©crit dans son livre Mellan sommarens lĂ€ngtan och vinterns köld (paru en 2002) un meurtre qui rappelle dans son ensemble celui de Palme. Dans son roman Comme dans un rĂȘve, il dĂ©crit la rĂ©ouverture de l'enquĂȘte relative Ă  l'assassinat d'Olof Palme[35].

Dans le journal fictif Bert och bacillerna (paru en 1997), écrit par Anders Jacobsson et Sören Olsson, Bert et sa classe sont désagréables avec le remplaçant, HÄkan Kelnius, qu'ils appellent aussi le Terroriste. Bert écrit dans son journal qu'il croit que HÄkan Kelnius a tué Palme[36]

Dans le troisiĂšme volet de la saga MillĂ©nium de Stig Larsson, l'assassinat d’Olof Palme est Ă©voquĂ© par un des personnages, membre de la SĂ€po, la police de sĂ©curitĂ© suĂ©doise. Larsson a menĂ© jusqu'Ă  sa mort une enquĂȘte parallĂšle sur cette affaire.

La sĂ©rie L'improbable Assassin d'Olof Palme (en anglais The Unlikely Murderer) sortie en 2021 sur Netflix retrace l'assassinat ainsi que l'enquĂȘte policiĂšre. Il s'agit d'une adaptation du livre de Thomas Pettersson. La sĂ©rie a cependant Ă©tĂ© critiquĂ©e car elle Ă©tablit comme certaine la culpabilitĂ© de Stig Engström.

Dans la chanson

Dans l'album Eliten pÄ Grafiten de Roger Sjöstrom, la chanson Törnrosa traite de l'assassinat de Palme et de la piste policiÚre.

Le groupe de rap Looptroop Rockers (en), dans leur morceau « Jag sköt Palme » (« J'ai tué Palme »), chante « Det var jag som sköt Palme och satte Christer i klistret » (« C'est moi qui ai tué Palme et ai mis Christer en difficulté »).

Autres

Pierre Desproges a consacrĂ© l'une des Chroniques de la haine ordinaire, « la dĂ©mocratie Â», Ă  l'assassinat d'Olof Palme[37] - [38].

Notes et références

Notes de traduction
  1. Ce paragraphe contient des éléments issus des articles Sucksdorffsvapnet (sv) et MockfjÀrdsrevolvern (sv).
  2. Ces informations sont issues de l'article Christer Pettersson.
  3. On peut s'interroger sur la pertinence de cette remarque. Gunnarsson est né en 1953. Saïgon est tombé en 1975.
SOU 1999:88

En 1994, le gouvernement suĂ©dois met en place une commission d'Ă©valuation de l'enquĂȘte sur l'assassinat du premier ministre Olof Palme. Cette commission remet son rapport dĂ©finitif en 1999. Ce rapport est connu sous la rĂ©fĂ©rence SOU 1999:88. [(sv) lire en ligne]

  1. p. 170
  2. p. 147-148
  3. p. 148
  4. p. 173-181
  5. p. 255
  6. p. 981
  7. p. 151-152
  8. p. 157
  9. p. 909
  10. p. 893
  11. p. 847-848
  12. p. 252-253, 255
  13. p. 961-966
  14. p. 253
  15. p. 705
  16. p. 718
  17. p. 550-551
  18. p. 552
  19. p. 637-554
  20. p. 275-276
  21. p. 418-419
  22. p. 624-
  23. p. 636
  24. p. 637
  25. p. 479
Autres références
  1. Anne-Françoise Hivert, « La fin de l’enquĂȘte sur le meurtre d’Olof Palme, premier ministre tuĂ© en pleine rue, laisse un goĂ»t amer en SuĂšde », Le Monde.fr,‎ (lire en ligne, consultĂ© le )
  2. (sv) Jan Ström. Ekots extrasÀndning vid Olof Palmes död. Sveriges Radio. 1er mars 1986.
  3. (sv) Birger Nylén. Vasaloppet borde vara nationaldag. Dalarnas Tidningar. 2 mars 2007.
  4. (sv) Johan Nordström. Leif GW sÄgar Palmegruppen. Aftonbladet. 21 février 2011.
  5. (sv) Kjell Rynhag/TT. 130 har erkÀnt Palme-mordet. Göteborgs-Posten. 21 février 2011.
  6. (sv) Anders Haraldsson. MockfjÀrdsrevolvern för rostig. Svenska Dagbladet. 28 mai 2007.
  7. (sv) Jan Olsson, Ulf ÅsgĂ„rd. Mordet pĂ„ Olof Palme. Brottsanalys. GĂ€rningsmannaprofil. CitĂ© dans SOU 1999:88 p. 847 et suivantes.
  8. (sv) Bo Sandberg, Christer Skogwik. Palmeutredningen – en revisionell bedömning. CitĂ© dans SOU 1999:88 p. 33 et suivantes p. 892 et suivantes.
  9. (sv) Claes Borgström. RÀttegÄngen om mordet pÄ Olof Palme : en advokats analys. Rabén & Sjögren. 1991. (ISBN 91-29-61551-8). p. 41.
  10. (sv) Claes Borgström. RÀttegÄngen om mordet pÄ Olof Palme : en advokats analys. Rabén & Sjögren. 1991. (ISBN 91-29-61551-8). p. 49-52.
  11. (sv) Anders Hellberg. Epileptiskt anfall bakom Christer Petterssons död. Dagens Nyheter. 30 septembre 2004.
  12. Sarah Ziaï, « DécÚs de Lisbeth Palme », sur Lepetitjournal.com, (consulté le ).
  13. (sv) Anders Leopold. Ett verk av diktaturers kreatur och satans mördare. Leopoldreport. 9 janvier 2011.
  14. « Palmemordet: Den osannolika mördaren », Filter, no 62,‎ (https: //magasinetfilter.se/tag/palmemordet-den-osannolika- mordaren /, consultĂ© le )
  15. https: //www.expressen.se/nyheter/police-investigate-engstrom-for-the-murder-of-palme/
  16. https: //www.aftonbladet.se/nyheter/a/ngK4m m /
  17. http: //www.nationensfiende.se
  18. https: //www.expressen.se/nyheter/skandiamannen-vaxte-upp-i-armeklader/
  19. « SuĂšde : l'enquĂȘte sur l'assassinat d'Olof Palme est terminĂ©e, le principal suspect est dĂ©cĂ©dĂ© », sur RTBF Info, (consultĂ© le ).
  20. (sv) Striptease. Sveriges Television. 27 avril 1994.
  21. (sv) Olle Minell. Vad döljer sig i de hemliga Palmedokumenten? ProletÀren. 15 septembre 2010.
  22. (sv) Olle Minell. Hittar vi Palmes mördare i Stockholms Försvarsskytteförening? ProletÀren. 1er octobre 2010.
  23. (sv) Frank Baude. Mordet pÄ Palme och polisspÄret: en vitbok. Kommunistiska partiet marxist-leninisterna (revolutionÀrerna). 1989. (ISBN 91-7384-043-2).
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  25. (sv)Anders Johansson, Eric Tagesson. GW: Palme mördades av en polis. Aftonbladet. 22 février 2011.
  26. (sv) Lambertz starkt kritisk mot Palmeutredning. Sveriges Radio. 6 octobre 2012.
  27. (sv) Richard Aschberg. PKK lejde skytten. Aftonbladet. 29 avril 1998.
  28. (sv) Gunnar Wall. MordgÄtan Olof Palme. Bokförlaget Semic. 2010. (ISBN 978-91-552-5756-9).
  29. Olivier Truc, « Meurtre d'Olof Palme : l'enquĂȘte continue », Le Monde,‎ (lire en ligne, consultĂ© le ).
  30. (en) « Apartheid assassin `killed Swedish PM' », The Independent,‎ (lire en ligne, consultĂ© le ).
  31. Thomas HUBERT, « Affaire Olof Palme : révélations sur l'assassinat qui a choqué la SuÚde », sur France24.com, (consulté le ).
  32. (en) Jan Stocklassa, « Stieg Larsson and the unsolved murder case of Olof Palme », The Guardian,‎ (lire en ligne)
  33. (sv) J.O. Sundberg. Palmemordet 1: "Det var Ustasja!". Aftonbladet. 27 juin 2006.
  34. Anne-Françoise Hivert, « Le meurtrier d’Olof Palme, premier ministre suĂ©dois tuĂ© en pleine rue, identifiĂ© 34 ans aprĂšs », Le Monde,‎ (lire en ligne)
  35. Comme dans un rĂȘve - Un roman sur un crime, Payot et Rivages, coll. « Rivages/Thriller », 2009 ((sv) Faller fritt som i en dröm, 2007), trad. Esther Sermage
    Réédition Payot et Rivages, coll. « Rivages/Noir » no 842, en 2011
    .
  36. (sv) Anders Jacobsson et Sören Olsson, Bert och bacillerna, Rabén & Sjögren 1997, chap. 21 novembre, p. 42-44.
  37. « La dĂ©mocratie Â» version audio
  38. "La démocratie", selon Pierre Desproges, version texte sur nouvelobs.com, 16 avril 2008

Article connexe

Bibliographie

  • (en) Ruth Freeman, Death of a Statesman : Solution to the Murder of Olof Palme, Robert Hale Ltd, , 192 p. (ISBN 978-0-7090-3698-2)
  • (en) Jan Bondeson, Blood on the Snow : The Killing of Olof Palme, Cornell University Press, , 250 p. (ISBN 978-0-8014-7936-6)
  • (de) Patrick Baab et Robert E. Harkavy, Im Spinnennetz der Geheimdienste : Warum wurden Olof Palme, Uwe Barschel und William Colby ermordet?, Westend, , 413 p. (ISBN 978-3-8648-9250-9)

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