Meurtre
Par pays
Les pays appliquent différemment le critÚre de préméditation et utilisent bien souvent une terminologie différente pour qualifier le meurtre. Par exemple, lorsqu'il y a préméditation, le crime est tantÎt qualifié de meurtre au premier degré au Canada, tantÎt qualifié d'assassinat en France.
Canada
En droit canadien, le meurtre est dĂ©fini Ă l'article 229 du Code criminel. Pour le meurtre au premier degrĂ©, il doit y avoir une mens rea d'intention de causer la mort avec prĂ©mĂ©ditation. Le meurtre se distingue notamment de l'homicide involontaire coupable, oĂč il n'y a pas de prĂ©mĂ©ditation dans la mens rea.
« 229 C.cr. Lâhomicide coupable est un meurtre dans lâun ou lâautre des cas suivants :
a) la personne qui cause la mort dâun ĂȘtre humain :
(i) ou bien a lâintention de causer sa mort,
(ii) ou bien a lâintention de lui causer des lĂ©sions corporelles quâelle sait ĂȘtre de nature Ă causer sa mort, et quâil lui est indiffĂ©rent que la mort sâensuive ou non;
b) une personne, ayant lâintention de causer la mort dâun ĂȘtre humain ou ayant lâintention de lui causer des lĂ©sions corporelles quâelle sait de nature Ă causer sa mort, et ne se souciant pas que la mort en rĂ©sulte ou non, par accident ou erreur cause la mort dâun autre ĂȘtre humain, mĂȘme si elle nâa pas lâintention de causer la mort ou des lĂ©sions corporelles Ă cet ĂȘtre humain;
c) une personne, pour une fin illĂ©gale, fait quelque chose quâelle sait, ou devrait savoir, de nature Ă causer la mort et, consĂ©quemment, cause la mort dâun ĂȘtre humain, mĂȘme si elle dĂ©sire atteindre son but sans causer la mort ou une lĂ©sion corporelle Ă qui que ce soit. »
France
En France, le meurtre est défini à l'article 221-1 du code pénal[2]. Il s'agit du « fait de donner volontairement la mort à autrui » et est puni de trente ans de réclusion criminelle. Il est puni de la réclusion à perpétuité lorsqu'il est commis dans une des circonstances aggravantes prévues à l'article 221-4 du code pénal[3].
Le meurtre suppose la réalisation à la fois d'un élément moral et d'un élément matériel.
L'élément matériel du meurtre consiste en la mort de la victime, par l'acte d'un tiers. Elle peut résulter à la fois d'une seule action, ou d'une pluralité d'entre elles, sur un temps plus ou moins long et éventuellement en plusieurs lieux différents[4] - [5]. Il n'est par ailleurs pas exigé que la victime soit identifiée, dÚs lors qu'il est certain qu'il s'agissait d'une personne humaine[6].
L'élément moral se caractérise par un dol général et un dol spécial. Le dol spécial, dans le cas particulier du meurtre, est caractérisé par la volonté de l'auteur de donner la mort à la victime, aussi appelée intention homicide (animus necandi). Cet élément permet de distinguer le meurtre de l'homicide involontaire et des violences ayant entraßné la mort sans intention de la donner[7].
Eu Ă©gard Ă l'impossibilitĂ© pour une juridiction de connaĂźtre avec certitude l'intention d'un accusĂ© au moment des faits, en dehors des hypothĂšses d'aveu, la jurisprudence considĂšre que l'intention homicide doit en pratique ĂȘtre dĂ©montrĂ©e par la juridiction en se fondant sur les Ă©lĂ©ments de fait. La cour d'assises peut notamment la prĂ©sumer du fait que l'auteur a utilisĂ© dans les violences commises envers la victimes une arme dangereuse, telle qu'un couteau[8], et frappĂ© la victime sur une partie du corps « particuliĂšrement exposĂ©e »[9] ou « sensible »[10], ou encore sur l'ensemble du corps[11]. De la mĂȘme façon, constitue une prĂ©somption grave d'intention homicide le fait de tirer Ă l'aide d'une arme Ă feu sur une personne en train de fuir[12] - bien que la Cour de Cassation note que le fait de tirer avec une arme Ă feu en direction d'une personne ou d'une habitation « n'implique pas nĂ©cessairement chez son auteur une intention de tuer »[13].
Par ailleurs, la condamnation pour meurtre est encourue dĂšs lors que l'auteur avait l'intention de donner la mort, et ce, quand bien mĂȘme les victimes finalement atteintes n'auraient pas Ă©tĂ© celles visĂ©es[14] - [15] (abberatio ictus), ou quand bien mĂȘme l'auteur ne visait pas une personne en particulier, par exemple en lançant un camion Ă vive allure avec l'accĂ©lĂ©rateur bloquĂ© en direction d'un groupe de personnes[16] - [17].
Le fait que la victime ait consenti Ă ĂȘtre tuĂ©e est sans incidence sur la qualification de meurtre, et la personne devra ĂȘtre condamnĂ©e. Il s'agit par exemple de l'hypothĂšse d'un duel Ă mort[18], ou encore de celle d'une victime qui demande Ă un tiers de la tuer pour se suicider[19].
Lorsque l'intention homicide est prĂ©sente, mais que l'auteur ne parvient pas Ă tuer la victime malgrĂ© des actes matĂ©riels en ce sens, en raison de circonstances extĂ©rieures Ă sa volontĂ©, il pourra ĂȘtre condamnĂ© pour tentative de meurtre. Il en va de mĂȘme pour l'auteur qui tente de donner la mort Ă une victime dont il ignore qu'elle est dĂ©jĂ dĂ©cĂ©dĂ©e[20].
Si les éléments moraux et matériels sont réunis, l'auteur pourra néanmoins éviter la condamnation en prouvant avoir agi en état de légitime défense, conformément à l'article 122-5 du code pénal[21].
Le meurtre commis avec préméditation ou guet-apens est qualifié d'assassinat, selon l'article 221-3 du code pénal[22] ; la peine encourue est alors portée à la réclusion criminelle à perpétuité.
Suisse
En droit suisse, le meurtre, soit le fait de tuer intentionnellement quelqu'un, est puni d'au moins cinq ans de prison (article 111 du Code pénal)[23].
Un meurtre caractĂ©risĂ© par une absence particuliĂšre de scrupules, notamment un mobile, un but ou une façon dâagir particuliĂšrement odieuse est qualifiĂ© d'assassinat, pour lequel la peine minimale est de dix ans de prison (article 112).
Le meurtre passionnel, commis sous le coup d'une Ă©motion violente que les circonstances rendaient excusable ou alors que l'auteur Ă©tait au moment de lâacte dans un Ă©tat de profond dĂ©sarroi, est passible d'un Ă dix ans de prison (article 113).
Le meurtre à la demande de la victime est puni d'une peine d'au plus trois ans de prison, ou d'une peine pécuniaire (jours-amende) (article 114).
L'infanticide commis par la mĂšre pendant lâaccouchement ou alors quâelle se trouvait encore sous lâinfluence de lâĂ©tat puerpĂ©ral est Ă©galement puni d'une peine d'au plus trois ans de prison, ou d'une peine pĂ©cuniaire (jours-amende) (article 116).
Notes et références
- Informations lexicographiques et étymologiques de « meurtre » dans le Trésor de la langue française informatisé, sur le site du Centre national de ressources textuelles et lexicales
- article 221-1 du Code pénal sur Légifrance
- Article 221-4 du Code pénal sur Légifrance (https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000045071040/2022-05-08?isSuggest=true)
- ArrĂȘt de la chambre criminelle de la Cour de Cassation, 13 mai 1965, bulletin criminel n°139
- ArrĂȘt de la Chambre Criminelle de la Cour de Cassation, 9 juin 1977, n°77-91.008, 4Ăšme considĂ©rant (https://www.legifrance.gouv.fr/juri/id/JURITEXT000007060057/)
- ArrĂȘt de la chambre criminelle de la Cour de Cassation, 15 mai 1946, bulletin criminel n°120
- ArrĂȘt de la Chambre Criminelle de la Cour de Cassation, 8 janvier 1991, n°90-80.075 (https://www.legifrance.gouv.fr/juri/id/JURITEXT000007068449/)
- ArrĂȘt de la Chambre Criminelle de la Cour de Cassation, 15 mars 2017, n°16-87.694 (https://www.legifrance.gouv.fr/juri/id/JURITEXT000034213769)
- ArrĂȘt de la Chambre Criminelle de la Cour de Cassation, 5 fĂ©vrier 1957, bulletin criminel n°110
- ArrĂȘt de la Chambre Criminelle de la Cour de Cassation, 13 juin 1931, bulletin criminel n°169
- ArrĂȘt de la Chambre Criminelle de la Cour de Cassation, 24 juillet 1974
- ArrĂȘt de la Chambre Criminelle de la Cour de Cassation, 6 novembre 1956
- ArrĂȘt de la Chambre Criminelle de la Cour de Cassation, 2 avril 1979, n°79-90.032 (https://www.legifrance.gouv.fr/juri/id/JURITEXT000007060206)
- ArrĂȘt de la Chambre Criminelle de la Cour de Cassation, 31 janvier 1835
- ArrĂȘt de la Chambre Criminelle de la Cour de Cassation, 4 janvier 1978, n°77-90.947 (https://www.legifrance.gouv.fr/juri/id/JURITEXT000007062657)
- ArrĂȘt de la Chambre Criminelle de la Cour de Cassation, 10 juin 1970, n°91-02.470
- ArrĂȘt de la Chambre Criminelle de la Cour de Cassation, 10 avril 1975, n°92-97.874
- ArrĂȘt des Chambres RĂ©unies de la Cour de Cassation, 21 aoĂ»t 1851
- ArrĂȘt de la Chambre Criminelle de la Cour de Cassation, 21 aoĂ»t 1851
- ArrĂȘt de la Chambre Criminelle de la Cour de Cassation, 16 janvier 1986, n°85-95.461 (https://www.legifrance.gouv.fr/juri/id/JURITEXT000007053746)
- Article 122-5 du Code pénal sur Légifrance (https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000006417218/)
- Article 221-3 du Code pénal sur Légifrance (https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000024041189?isSuggest=true)
- Code pénal suisse (CP) du (état le ), RS 311.0, art. 111.