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Animaux durant la Première Guerre mondiale

Un grand nombre d'animaux furent utilisés par les belligérants lors de la Première Guerre mondiale[1], principalement des équidés pour le transport et la cavalerie, des chiens pour le transport (chien d'attelage) et la transmission des messages[1], ainsi que des pigeons voyageurs.

Dans une Europe encore largement paysanne, soldats et officiers vont vivre pendant ces annĂ©es de guerre largement au milieu des bĂŞtes[1] qui seront victimes en nombre du conflit, certaines apportant aussi du rĂ©confort aux soldats, comme les mascottes[2]. Ainsi plus de 11 millions de chevaux, d'ânes et de mules seront tuĂ©s pendant la guerre[1].

Si le souvenir de cet apport animal est très vivace juste après le conflit[1], il va s'estomper dès les années 1930, l'image d'une guerre largement mécanisée s'imposant[1] avec les taxis de la Marne, l'apparition des tanks et des avions, etc. Dans l’hexagone, outre les monuments installés par les étrangers et deux plaques dédiées seulement aux pigeons (Verdun et Lille), Couin (Somme) abrite le seul monument aux Morts de France, pour les animaux[3] - [4], dont deux plaques de marbre avec l'inscription « Ne les oublions pas ! »[5]. Un monument référencé et visité chaque jour par des résidents des chambres d’hôtes du château, des Britanniques de passage, et de rares Français[4]. En 2004 est édifié à Londres l'Animal in War Memorial[2].

Les archives officielles de l'armée donnent assez peu d'informations sur cette importante contribution animale[1], au contraire des témoignages des soldats[1]. Maurice Genevoix dans Ceux de 14 évoque ainsi souvent les animaux de la guerre. Ce sujet historique sera oublié en France jusque dans les années 1980 où l'intérêt en Occident sur l'éthologie et la condition animale, relancera les recherches[1].

Équidés, bovins et camélidés

Le roi Pierre Ier de Serbie sur un caisson d'artillerie tiré par des bœufs pendant la retraite de Serbie en 1915.
Soldat italien des Alpini menant une mule, toile d'Achille Beltrame, 1916.
Hommes, dromadaire et chien du service sanitaire de l'armée ottomane sur le front de Palestine, 1918.

Les mules Ă©taient largement employĂ©es par les belligĂ©rants. Pendant le siège de Kut-el-Amara en MĂ©sopotamie (-), l'armĂ©e indo-britannique du gĂ©nĂ©ral Townshend Ă©tait encerclĂ©e par les Ottomans avec 11 000 hommes et 18 000 mules. Quand les provisions vinrent Ă  manquer, il fallut nourrir les mules encore vivantes avec la chair des mules mortes mĂ©langĂ©es avec du son et du sel. Les 26 mules encore vivantes Ă  la fin du siège furent abattues par les soldats pour ne pas les laisser aux mains des Turcs[6].

11,5 millions d’équidés (ânes et mulets compris) participèrent à la guerre, toutes armées confondues (6 millions pour les Russes, 2,5 pour les Allemands, 1,88 pour les Français et 1,2 pour le Royaume-Uni). Un certain nombre de ces animaux étaient déjà habitués au travail qui leur était demandé (utilisés auparavant dans les compagnies de transport ou les mines), mais d'autres, jusque là propriété de particuliers ou de paysans, sont très perturbés, en particulier par les très dures conditions d'acheminement jusqu'aux champs de bataille, pour tirer les canons, les munitions, les ambulances, etc. Comme les soldats, ils subissent l'horreur des tranchées et des combats. Après le conflit le cheval Ragtime parade avec les vétérans, orné de cinq médailles[2].

Les équidés tout comme les humains sont mobilisés pour la guerre. Les paysans se sont retrouvés sans bêtes pour les aider. 11.5 millions d’équidés sont réquisitionnés par l’état-major.

Les cadavres de chevaux étaient tellement importants que certaines usines ont commencé à fabriquer des chevaux de camouflage pour les tireurs d’élite. Ils étaient aussi utilisés comme moyen d’espionnage pour ensuite transmettre les informations recueillis par radio.

Les dromadaires sont largement utilisĂ©s par tous les belligĂ©rants sur le front du Moyen-Orient. Dans la campagne du SinaĂŻ et de Palestine, en 1916, l'Egyptian Expeditionary Force britannique se dote d'un Camel Transport Corps de 35 000 bĂŞtes pour alimenter le front et le chantier du chemin de fer traversant le SinaĂŻ (en) ; au cours des opĂ©rations de 1918, le 21e corps utilise 13 206 chameaux et 1 984 mules, la seule 54th (East Anglian) Infantry Division (en) ayant 1 166 chameaux. Un dromadaire robuste peut porter deux rĂ©servoirs d'eau de 12,5 gallons (56,8 l). Des cacolets imitĂ©s de ceux de l'armĂ©e ottomane sont employĂ©s au transport des blessĂ©s et des bagages[7].

Pigeons voyageurs

60 000 pigeons furent mobilisés par la France pendant la guerre[2].

On peut citer Cher-Ami, un pigeon voyageur ayant sauvé 194 soldats au péril de sa vie. Il y a d'ailleurs laissé un œil et une patte.

Chiens

Chien du service médical austro-hongrois, 1914-1918.

Environ 100 000 chiens[8] ont Ă©tĂ© employĂ©s par les diffĂ©rents belligĂ©rants durant le conflit (dès 1914 pour l'Allemagne et l'Autriche-Hongrie, qui possèdent une rĂ©elle culture cynophile[2]). De fonctions habituelles, mascotte d'une unitĂ© ou chien ratier, ils serviront Ă©galement d'estafette pour transmettre des messages, de chiens de transport, l'armĂ©e belge les utilisera ainsi pour tracter des mitrailleuses[8], pour tirer des lignes de tĂ©lĂ©phonie entre les tranchĂ©es[8] ou repĂ©rer des blessĂ©s sur le champ de bataille[8].

« Les chiens sanitaires » dans l'armée française, Le Petit Journal, 8 février 1918.

En 1915, Alexandre Millerand, ministre français de la Guerre, conscient de leur importance crĂ©a le Service des chiens de guerre avec plus de 3 000 animaux[8], principalement pris dans les fourrières[8]. De manière gĂ©nĂ©rale, les Britanniques apparaissent plus respectueux des animaux qu’ils emploient que les Français, notamment vis-Ă -vis des chiens. Qu’ils soient messagers, sentinelles, gardes ou secouristes, « il s’agit, pour les Britanniques, de construire une relation et de susciter leur collaboration, alors que les Français leur imposent un ordre et une fonction », souligne Eric Baratay : « Très imprĂ©gnĂ©s de la notion d’animal-machine, ces derniers assimilent le dressage Ă  une mĂ©thode de conditionnement et privilĂ©gient la distance entre le maĂ®tre et le chien. Les Britanniques, au contraire, considèrent que chaque chien est diffĂ©rent, avec sa psychologie propre, et laissent le lien s’établir entre son maĂ®tre et lui. »[9]

Pendant l'occupation du nord-est de la France, l'armĂ©e allemande ordonne aux habitants de rassembler tous leurs chiens sur la place publique et rĂ©quisitionnent ceux aptes Ă  l'usage militaire : les autres doivent ĂŞtre abattus. Des officiers allemands confisquent aussi des chiens de chasse pour leur usage personnel. 2 500 chiens des services sanitaires (« Sanitätshunde ») sont employĂ©s Ă  chercher les blessĂ©s sur le champ de bataille, d'autres Ă  intercepter la contrebande ou monter la garde sur les bases et le long des cĂ´tes. Après la guerre, la France rĂ©clamera au titre des rĂ©parations de la Première Guerre mondiale un dĂ©dommagement pour la perte de 26 000 chiens[10].

Sur le front italien des Alpes, l'armĂ©e italienne emploie 3 500 chiens, principalement des saint-bernards, Ă  transporter des approvisionnements par traĂ®neau[10].

Plusieurs chiens seront décorés ou honorés comme Satan, porteur d'un message au fort français de Thiaumont, pendant la bataille de Verdun, pour demander à la garnison encerclée par les Allemands de tenir encore une journée, le temps que les renforts arrivent[8] et qui sera blessé dans sa mission, Rags (en), la mascotte et chien de liaison de la 1re division d'infanterie américaine. Le plus célèbre est sans doute le Bull Terrier Stubby, qui servit dans le 102e régiment d’infanterie de la 26e division d'infanterie américaine. Il fut le chien le plus décoré de la guerre[8], obtenant même le grade de sergent.

Éléphants

Photographie noir et blanc de l'éléphante avec un soldat la tenant à la bride.
L'éléphante Jenny transportant du bois en 1915.

Quelques éléphants sont récupérés dans les zoos ou les cirques, de même que des chameaux[11] - [12]. Ils sont principalement utilisés dans les fermes pour remplacer les chevaux partis au front ou pour transporter de lourdes charges dans les villes[11] - [12]. L'éléphante Jenny est ainsi employée par les Allemands dans le Nord de la France en 1915-1916[13].

Dans la culture

L'écrivain pacifiste Erich Maria Remarque a écrit : « Je vous le dis, que des animaux fassent la guerre, c'est la plus grande abomination qui soit ! »[2].

Notes et références

  1. Catherine Vincent, « Le 14-18 des animaux », Le Monde - Culture & Idées,‎ , p. 6
  2. Maryvonne Ollivry, « Guerre de 14. Bêtes de tranchée, héros silencieux », Paris Match, semaine du 27 mars au 2 avril 2014, p. 119-122.
  3. Sophie Diers, « COUIN : La commune abrite le seul monument aux Morts de France, pour les animaux | L'Abeille de la Ternoise », sur www.labeilledelaternoise.fr (consulté le )
  4. « Couin: ils ont combattu comme des bêtes… et ils ont leur mémorial en France », sur La Voix du Nord (consulté le )
  5. Mémoires de pierre en Pas-de-Calais - Ivan Pacheka, « Monument aux morts et commémoratif de Couin », sur memoiresdepierre.pagesperso-orange.fr (consulté le )
  6. Ronald Millar, Kut: The Death of an Army, Pen & Sword, 2017, p.268.
  7. Michael J. Mortlock, The Egyptian Expeditionary Force in World War I, McFarland & Co., 2011, p.62-63.
  8. « article Focus », Geo Histoire, no 25,‎ , p. 88 et 89
  9. « Bêtes de guerre, héros silencieux – Le 14 -18 des animaux, des vécus oubliés : 11 millions ont été emportés dans la guerre », Résistance Inventerre,‎ (lire en ligne, consulté le )
  10. (en) Spencer Tucker, « Animals », dans World War I: A Student Encyclopedia, vol. 1 A-D, ABC Clio, .
  11. (en-US) « When the elephants were used to aid the war effort, 1914-1945 - Rare Historical Photos », sur https://rarehistoricalphotos.com/, (consulté le )
  12. (en-GB) « World War One: The circus animals that helped Britain », BBC News,‎ (lire en ligne, consulté le )
  13. « La véritable histoire de Jenny, l’éléphante amenée par les Allemands à Felleries en 14-18 », sur La Voix du Nord (consulté le )

Bibliographie

  • BĂŞtes des tranchĂ©es. Des vĂ©cus oubliĂ©s, Éric Baratay, CNRS Éditions, 2013
  • (en) Spencer Tucker, « Animals », dans World War I: A Student Encyclopedia, vol. vol. 1 A-D, ABC Clio, 2006

Voir aussi

Articles connexes

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