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Amanita friabilis

Amanite des aulnes

Amanita friabilis
Description de cette image, également commentée ci-après
Amanita friabilis, l'Amanite des aulnes (Estonie).

Espèce

Amanita friabilis
(P.Karst.) Bas (d) 1974[1]

Synonymes

  • Amanitopsis vaginata var. friabilis P.Karst., 1879[1] - [2] - [3]
  • Amanitopsis friabilis (P.Karst.) Sacc., 1887[1] - [2] - [3]
  • Amanita alnicola Rouzeau & F.Massart, 1967[1] - [4] - [3]
  • Amanita sternbergii Velen., 1920[1] - [3]

Amanita friabilis, l'Amanite des aulnes, est une espèce de champignons agaricomycètes (Fungi) de la famille des Amanitaceae et du genre Amanita. Il s'agit de l'une des plus petites espèces du genre Amanita. Sa volve très friable laisse de nombreuses petites plaques grises sur son chapeau et son pied, ce qui lui donne un aspect poudreux-farinacé. L'espèce affectionne les sols forestiers humides et le long des cours d'eau où elle vit en association obligatoire avec les aulnes. Sa présence est un critère qualifiant la naturalité du lieu. Elle a longtemps été considérée comme endémique d'Europe où elle est rare à très rare, mais elle est également présente dans le Caucase et en Amérique du Nord.

Taxinomie

Cette Amanite est décrite pour la première fois en par le mycologue finlandais Petter Adolf Karsten (1834-1917) comme la variété friabilis d'Amanitopsis vaginata, aujourd'hui nommée Amanita vaginata[5]. L'épithète « friabilis » lui est donnée en raison de sa caractéristique principale : la consistance particulièrement friable de sa volve dont le voile général laisse de petites plaques grisâtres à maturité. Le taxon est rapidement rehaussé au rang d'espèce en par le mycologue italien Pier Andrea Saccardo (1845-1920) sous le nom Amanitopsis friabilis[6]. En , le mycologue néerlandais Cornelis Bas (d) (1928-2013) reprend l'ensemble des travaux concernant cette espèce et ses proches parentes[1]. Ses conclusions le poussent à la recombiner dans le genre Amanita sous le nom Amanita friabilis et à la synonymiser avec Amanita alnicola et Amanita sternbergii[1].

En français, l'espèce est principalement nommée « Amanite des aulnes[7] - [8] - [9] » mais il existe également les vulgarisations littérales du nom scientifique sous les formes « Amanite friable[10] » et « Amanite à volve friable[11] ».

Systématique

En , Amanita friabilis est placée par Cornelis Bas (en) au sein du sous-genre Amanita à cause de l'absence d'anneau, de son voile général très friable et de son pied présentant un bulbe basal[1]. En , Marcel Bon la place dans les Vaginatinae en raison du pied plus clavé que bulbeux et vite creux. En , le mycologue allemand Rolf Singer (1906-1994) place l'espèce dans la section des Ovigerae à cause de l'absence d'anneau libre et des spores plus ou moins longuement ellipsoïdales. Quant à Henri Romagnesi, il affirme en que les Amanitopsis « constituent un ensemble très homogène, qu'il n'est guère acceptable de diviser ». En , les mycologues provençaux Pierre Neville et Serge Poumarat soutiennent la position de Bas en adoptant sa classification dans leur révision complète du genre : Amanita friabilis est ainsi classée dans le sous-genre Amanita pour l'absence d'anneau libre et ses spores non spores non amyloïdes, dans la section Amanita pour les flocons de son chapeau et sa volve peu remarquable et dans la sous-section des Amanitella pour la base du pied plus ou moins bulbeuse et le voile général friable[12] - [13].

Description

Macroscopie

Amanita friabilis (réserve naturelle Goč-Gvozdac, mont Goč, Serbie)

L'Amanite des aulnes produit un sporophore, au chapeau peu charnu et fragile, mesurant de 30 Ă  60 mm de diamètre, jusqu'Ă  70 mm au QuĂ©bec. OvoĂŻde au dĂ©but, puis hĂ©misphĂ©rique Ă  convexe, il s'aplanit et s'Ă©tale enfin lors de la vieillesse, ses bords se relevant Ă©galement. Sa surface est lisse, mate, striĂ©e par transparence depuis la marge jusqu'au quart voire au tiers du chapeau. Sa coloration est beige-ochracĂ©e pâle Ă  grisâtre tirant sur le brun olive au centre et de plus en plus pâle vers le bord. Il est largement et irrĂ©gulièrement garni de lambeaux floconneux gris-brun pâle issus du voile universel. La marge est aiguĂ« et striĂ©e. La chair est peu consistante, fragile, blanchâtre immuable Ă  la coupe, mince, Ă  odeur nulle et Ă  saveur douce quelconque mais agrĂ©able[1] - [14] - [10] - [15] - [9].

Les lames sont fines, libres parfois Ă©troitement adnĂ©es, très serrĂ©es et intercalĂ©es de lamellules, blanches se grisant Ă  maturitĂ© et mesurent de 47 Ă  52 mm de long pour mm de large. Leurs arĂŞtes sont finement floconneuses, un reste du voile partiel[1] - [14] - [10] - [15] - [9].

Le pied, grĂŞle, mince et chĂ©tif, mesure de 50 Ă  100 mm de haut (jusqu'Ă  140 mm au QuĂ©bec) pour de 5 Ă  12 mm d'Ă©pais. Il est cylindrique, plein au dĂ©but, creux avec l'âge, cassant, un peu Ă©paissi vers la base et parfois terminĂ© par un petit bulbe. Sa surface est recouverte sur toute sa hauteur d'un tomentum laineux floconneux gris brun sur fond blanchâtre issu du voile gĂ©nĂ©ral. Son sommet est plus ou moins lisse. Sa base est recouverte d'une petite volve aprimĂ©e, adnĂ©e, en forme de sac plus ou moins dĂ©veloppĂ© et très friable, peu ferme, gris crème ou brun grisâtre gĂ©nĂ©ralement rĂ©duite Ă  des traces en forme d'anneau ou Ă  des bandes floculĂ©es dispersĂ©es[1] - [14] - [10] - [15] - [9].

Microscopie

Amanita friabilis D-spores ; E-sphérocystides de la volve ; F-hyphes de la cuticule ; G-basides dans le rouge congo; H-basides dans le bleu de méthylène (réserve naturelle Goč-Gvozdac, Serbie)[16]

Amanita friabilis prĂ©sente des spores globuleuses Ă  largement ellipsoĂŻdales, lisses, hyalines et mesurant de 8,2 Ă  12,5 Âµm de long pour 6,5 Ă  11 Âµm de large. Sa sporĂ©e est blanche. Ces spores sont gĂ©nĂ©ralement produites par quatre (plus rarement par trois ou deux) par des basides de forme classique Ă©troitement clavĂ©es, mesurant de 42 Ă  50 Âµm de long pour 10 Ă  14 Âµm de large et ne prĂ©sentant pas de boucles de conjugaison. Au milieu de ces basides se trouvent des cystides en forme de poire ou de massue mesurant de 20 Ă  40 Âµm de long pour 10 Ă  20 Âµm de large. Les faces des lamelles ne prĂ©sentent pas de pleurocystides. Par contre, leurs arĂŞtes sont recouvertes par les cystides rondes du voile partiel qui protègent les lames durant leur croissance et leur mĂ»rissement mais rendent les arĂŞtes stĂ©riles. Ce voile ne contenant pas d'hyphes, l'ensemble ne peut ĂŞtre cohĂ©rent et ne forme pas d'anneau. La cuticule est formĂ©e d'hyphes cloisonnĂ©es, non bouclĂ©es, couchĂ©es et plus ou moins parallèles dont la largeur mesure de 3 Ă  6 Âµm, les superficielles Ă©tant plus ou moins gĂ©lifiĂ©es et les sous-jacentes pigmentĂ©es de brun. Le voile gĂ©nĂ©ral est composĂ© de sphĂ©rocystides abondantes et de cellules en forme de poire mesurant de 30 Ă  70 Âµm sur 27–64 Âµm dans la couche la plus externe et d'hyphes filamenteux de 3,5 Ă  10 Âµm de large en moyenne[1] - [14] - [15] - [9].

Écologie

Aulnaie, Torekov, Suède.

L'Amanite des aulnes est gĂ©nĂ©ralement visible en fin d'Ă©tĂ© et en automne soit d'aoĂ»t Ă  octobre, mais des spĂ©cimens ont Ă©tĂ© trouvĂ©s en mai en Russie et en juin en Finlande. En Italie, des Ă©carts de 5 Ă  10 ans ont Ă©tĂ© observĂ©s entre chaque fructifications. Elle est prĂ©sente de l'Ă©tage collinĂ©en Ă  l'Ă©tage alpin jusqu'Ă  1 900 m dans les Alpes mais porte une prĂ©fĂ©rence pour altitudes moyennes et les hautes latitudes[1] - [14] - [15] - [17].

L'espèce se développe à partir d'un primordium[14].

L'Amanite des aulnes pousse de façon isolée à grégaire, dans les forêts aux sols humides ou temporairement mouillés et riches à modérément riches en nutriments. Elle est indifférente au pH et au type substrat du sol. Ce sont des ripisylves, des bosquets et des buissons le long des cours d'eau ou des bras de mer enforestés. Elle forme obligatoirement des ectomycorhizes avec les Aulnes, notamment l'Aulne glutineux, l'Aulne de Corse, l'Aulne vert et l'Aulne blanc. La présence de l'espèce est un critère déterminant de la naturalité ou de la quasi-naturalité d'un biotope car elle évite les habitats trop influencés par l'Homme[1] - [14] - [15] - [17].

Plus précisément, les forêts concernées sont les aulnaies glutineuses, les aulnaies frênaies, les aulnaies à Stellaire des bois, les aulnaies blanches, les frênaies à prunelliers, les picées ouvertes et humides et les bois marécageux à feuilles caduques[17]. L'espèce pousse en compagnie de Lactarius lilacinus ainsi que des plantes typiques des aulnaies marécageuses Pulmonaria, Primula, Hedera, Arum, Alliaria et Chaerophyllum[1].

Distribution et protection

Longtemps considérée comme une espèce endémique du continent européen[17], elle est également présente dans le Caucase[17] et en Amérique du Nord[4], notamment au Québec[9] et peut-être au Groenland[17]. Plus précisément, en Europe, elle est présente en Grande-Bretagne, aux Pays-Bas, en France, en Belgique, en Suisse, en Espagne, en Italie, en Allemagne, en Autriche, en Pologne, en Tchéquie, en Slovaquie, en Hongrie, en Serbie, en Croatie, en Norvège, en Suède, en Finlande, en Estonie, en Lettonie, en Slovénie et en Russie européenne[1] - [14] - [10] - [17] - [16].

L'Amanite des aulnes est largement dispersée mais rare à très rare sur l'ensemble de son aire de répartition[10]. En Europe, une centaine de centres d'abondance sont répertoriés, quelques-uns étant en diminution d'effectifs comme en France, d'autres stables comme en Estonie, et certains en augmentation comme au Royaume-Uni. Cependant l'espèce est considérée comme en danger à l’échelle européenne, ses stations étant principalement menacées par le drainage et la déforestation[17]. À ce propos, Amanita friabilis figure sur la convention de Berne du Conseil de l'Europe[18] et sur la liste rouge de quelques pays européens dont la France et la Suisse[17].

Confusions possibles

Amanita olivaceogrisea (Estonie)

Amanita friabilis se caractérise par ses fructifications grêles, par la présence de lambeaux de voile sur le chapeau, par l'absence d'anneau, par une volve à la base du pied très friable souvent invisible, par la présence d'un petit bulbe ainsi que par son association avec les aulnes. La dimension des spores est assez variables et ne constitue pas un critère de détermination fiable[14] - [10].

Amanita vaginata a été considérée comme une parente d'A. friabilis, mais elle s'en distingue clairement par son voile universel membraneux qui forme une volve blanche à gris pâle bien définie et non friable car dominée par des hyphes filamenteux. De plus, elle pousse à proximité des hêtres, des bouleaux et des conifères[19].

Amanita olivaceogrisea est une espèce proche qui pousse également sur sol humide en association ectomycorhizienne avec les aulnes, mais aussi les bouleaux. Son chapeau est gris olive à brun grisâtre alors qu'il tire plus sur le gris brunâtre chez A. friabilis. Les lambeaux de voile sur le chapeaux sont blanc à gris ocreux alors qu'ils sont grisâtre chez A. friabilis. Le chapeau est conique et muni d'un umbo alors qu'il est convexe à étalé chez A. friabilis. Enfin, les spores sont généralement plus petites[19].

Amanita basiana est une espèce morphologiquement très proche qui a Ă©tĂ© rĂ©coltĂ©e Ă  proximitĂ© de Gène en Ligurie (Italie) dans l'herbe de pinèdes sèches de Pin maritime non loin de la cĂ´te mĂ©diterranĂ©enne. Cette espèce se diffĂ©rencie par son habitat radicalement diffĂ©rent ; son chapeau moins large mesurant de 30 Ă  55 mm de diamètre, avec un maximum de 80 mm ; un voile universel aux sphĂ©rocystides moins nombreuses, ce qui contribue Ă  un dĂ©litement distinct sur le chapeau et par des spores plus fines[20].

Comestibilité

L'espèce est généralement considérée comme non comestible[14] - [10] - [9]. Cependant, selon le mycologue italien Roberto Galli, l'Amanite des aulnes pourrait probablement être comestible après cuisson. Néanmoins, sa rareté, sa petite taille, l'inconsistance de sa chair et sa fragilité lui ôtent tout intérêt[15].

Références

  1. (en) C. Bas, « A rare but widespread Amanita associated with Alnus », Bulletin de la Société Linnéenne de Lyon, no spécial - Travaux mycologiques dédiés à R.Küner,‎ , p. 17-23 (lire en ligne)
  2. V. Robert, G. Stegehuis and J. Stalpers. 2005. The MycoBank engine and related databases. https://www.mycobank.org/, consulté le 16 avril 2022
  3. BioLib, consulté le 16 avril 2022
  4. GBIF Secretariat. GBIF Backbone Taxonomy. Checklist dataset https://doi.org/10.15468/39omei accessed via GBIF.org, consulté le 16 avril 2022
  5. (fi) P. Karst., « Amanitopsis vaginata var. friabilis », Bidrag till Kännedom av Finlands Natur och Folk, vol. 32,‎ , p. 547
  6. (la) Pier Andrea Saccardo, Sylloge fungorum omnium hucusque cognitorum, vol. V, Patavii, sumptibus auctoris, (lire en ligne)
  7. MNHN & OFB [Ed]. 2003-présent. Inventaire national du patrimoine naturel (INPN), Site web : https://inpn.mnhn.fr, consulté le 16 avril 2022
  8. Base de données mondiale de l'OEPP, https://gd.eppo.int, consulté le 16 avril 2022
  9. Roland Labbé, « Amanita friabilis / Amanite des aulnes », sur MycoQuebec,
  10. Régis Courtecuisse (Auteur), Bernard Duhem (Illustrations), Champignons de France et d'Europe, Delachaux et Niestlé, , 544 p. (ISBN 978-2-603-02038-8)
  11. « Amanita friabilis », sur MycoDB,
  12. Pierre Neville & Serge Poumarat, Fungi Europaei : Amaniteae (Amanita, Limacella & Torrendia), Alassio, Edizioni Candusso, luglio 2004, 1121 p. (ISBN 88-901 057-3-9)
  13. Serge Poumarat, « Sous-genre Amanita pour les nuls », sur Mycologie et Lichénologie en Catalogne Nord
  14. J. Breitenbach & F. Kränzlin (trad. française J. Keller), Champignons de Suisse : contribution à la connaissance de la flore fongique de Suisse, vol. 4, champignons à lames 2 ème partie, Mykologia, , 375 p. (ISBN 3-85604-140-0)
  15. (it) Roberto Galli, Le Amanite, Édinatura, , 216 p.
  16. (sr) Nenad Milosavljević, « Retke vrste iz roda Amanita zabeležene u okviru Specijalnog rezervata prirode "Goč-Gvozdac" (Espèces rares du genre Amanita récoltées au sein de la réserve naturelle "Goč-Gvozdac") », Zaštita prirode, vol. 70, nos 1-2,‎ , p. 5-18 (DOI 10.5937/ZasPri2101005M, lire en ligne)
  17. (en) Peter Otto (University of Leipzig, Institute of Biology), « Ecology and chorology of 51 selected fungal species », sur European Council for the Conservation of Fungi,
  18. (en) Anders Bohlin & Enric GrĂ cia, 33 Threatened Fungi in Europe: Complementary and revised information on candidates for listing in Appendix I of the Bern Convention, Uppsala, European Council for the Conservation of Fungi, august 12th 2003 (lire en ligne)
  19. Henning Knudsen et Jan Vesterholt, Funga Nordica : agaricoid, boletoid and cyphelloid genera, Copenhagen, Nordsvamp, (ISBN 978-87-983961-3-0)
  20. (en) Rodham E. Tulloss & Mido Traverso, « Amanita basiana : a new species from pure Pinus forest and resembling the Alnus-associated species Amanita friabilis », Mycotaxon, vol. 77,‎ , p. 47-55 (lire en ligne)

Liens externes

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