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Zénith (ballon)

Le Zénith est un ballon à gaz de 3 000 m3, fabriqué en 1874 par Théodore Sivel, financé par la Société de navigation aérienne, qui a battu des records avant de causer en 1875 les premiers décès d'aéronautes dus à l'altitude.

Vue de l'ingénieur Joseph Crocé-Spinelli, de l'officier de marine Théodore Sivel et de Gaston Tissandier dans la nacelle du ballon Zénith, après avoir perdu connaissance par manque d'oxygène et avoir atteint une altitude de près de 28 000 pieds (8,53 km), près de Paris, en France, en avril 1875.

Construction

Conçu par Théodore Sivel, le Zénith est monté et cousu à Pignet, domaine familial de Sivel, avec l'aide des femmes de Sauve dans le Gard, au cours de l'année 1874[1].

Réussite du vol Paris - Arcachon

Les 23 et , sous l'égide de Paul Bert, le commandant de bord Théodore Sivel, l'ingénieur Joseph Croce-Spinelli, les aéronautes Albert Tissandier, son frère Gaston Tissandier, rédacteur en chef du journal La Nature, et Claude Jobert réussirent un voyage de longue durée (22 h 40), battant tous les records de durée[2] - [3] - [1]. Le ballon s'élève à 16 h 20 de Paris et atterrit le lendemain à 17 h à Arcachon[1].

Parti de l'usine à gaz de La Villette, correspondant actuellement au no 159, boulevard Macdonald à Paris, l'atterrissage se fait sur la commune de Lanton en Gironde. Ce vol a donné lieu à de nombreuses observations scientifiques, notamment par Croce-Spinelli chargé des observations spectroscopiques, les frères Tissandier de l'étude de la composition chimique de l'air à haute altitude, du dosage des proportions de gaz et de vapeur d'eau dans l'air raréfié, Sivel la direction du ballon et l'aide aux expériences de ses compagnons[1].

Tragédie de Ciron

Déroulement des faits

La Descente du Zénith

Après le gonflage du ballon du Zénith exécuté sous le contrôle d'Adrien Duté-Poitevin, le beau-frère de Sivel, trois aéronautes, Théodore Sivel, Joseph Crocé-Spinelli et Gaston Tissandier se sont envolés à bord de ce ballon près de l'usine à gaz de la Villette, située dans le 19e arrondissement de Paris, le à 11 h 35, dans l'espoir de battre le record de montée en altitude (7 400 m à l'époque) et d'effectuer des observations.

Malgré les malaises ressentis dès les 8 000 m d'altitude, les trois aéronautes décidèrent cependant de poursuivre leur ascension (les enregistreurs montrèrent que le vol avait atteint 8 600 m). Ils perdirent tous connaissance en raison du manque d'oxygène (hypoxie)[4]. Seul, Gaston Tissandier réussit à retrouver ses esprits afin de freiner la chute et le ballon réussit à se poser brutalement en s'éventrant contre un arbre mais sans trop de dommages de la nacelle, dans l'après-midi sur le territoire de Ciron (Indre) près du Blanc, à 250 km de Paris, à 16 h[1]. Lui seul survécut – en ayant perdu l'ouïe[5], et il décrivit lui-même son aventure et celle de ses compagnons dans La Nature du [6] et dans l'Aéronaute le mois suivant[7] - [8].

Cette tragédie aurait difficilement pu être évitée car les troubles liés à une altitude supérieure à 8 000 m leur étaient inconnus[9], même si l'aventure survenue à James Glaisher en 1862 aurait dû leur donner des indications, mais cet aéronaute britannique était entraîné et avait survécu à son vol en haute altitude. Aussi, la lettre de Paul Bert les avertissant de la nécessité d'emporter des réserves d'oxygène plus importantes (les leurs étaient constituées de trois petits ballons de caoutchouc contenant 70 % d'oxygène, et capable d'entretenir la respiration pendant une heure au plus) ne leur parvient pas à temps[5] - [3]. La trop grande rapidité d'ascension du Zénith est pour beaucoup dans la catastrophe[10]. « Durant la grande guerre, Maurice Dreyfous, qui avait été l'éditeur de Gaston Tissandier, écrira dans un livre de souvenirs que ce grand aéronaute lui aurait révélé certains détails sur la catastrophe du Zénith qu'il avait jusqu'alors volontairement cachés au public. Et l'on apprend que ce serait Sivel, et non Crocé-Spinelli, qui serait à l'origine de la brusque et mortelle remontée du ballon. Celui-ci, qui avait la charge de contrôler à chaque instant sur le baromètre l'altitude du ballon, aurait été victime de sa myopie et aurait cru lire que l'aérostat allait toucher terre. Et c'est lui qui aurait alors lancé par-dessus bord tout ce qui s'était trouvé à sa portée[10].

Dans tous les dessins de la catastrophe, la forme réelle de la nacelle du Zénith a été remplacée par une nacelle carrée de construction moins grossière et plus avantageuse[11] - [12].

Retentissement et hommages

Plaque de la rue Sivel à Paris évoquant la mort de l'aéronaute

L’annonce de cette catastrophe connut un certain retentissement en France et à l’étranger et plus de vingt mille personnes suivirent les funérailles de Théodore Sivel et de Joseph Crocé-Spinelli de la gare d'Orléans jusqu'au cimetière du Père-Lachaise à Paris.

Monument

Une souscription publique fut ouverte par la Société française de navigation aérienne afin de venir en aide aux familles des victimes ainsi que d’élever à l'endroit de l'atterrissage du ballon, un monument commémoratif[13]. Il est conçu par l'architecte Albert Tissandier (frère de Gaston Tissandier) et se présente sous la forme d'un obélisque en pierre entouré d'une grille, rue de Eglise Saint-Georges à Ciron[14] - [15]. Ce monument est inauguré le 25 mars 1881 puis est inscrit au titre des monuments historiques par arrêté du 4 avril 2017[16].

Salles de spectacle

Les salles de spectacle françaises dénommées Zénith doivent leur nom à ce ballon. En 1981, Jack Lang, alors ministre de la Culture décide de concevoir une salle de grande capacité située à l'extérieur des villes, adaptée au rock et aux musiques populaires, et inaugure le concept « Le Zénith » avec le Zénith de Paris pour remplacer le Pavillon de Paris. La première salle construite est située au Parc de la Villette à l'emplacement du site d'envol, le Ministre de la Culture s’étant inspiré de cet exploit pour dénommer cette structure[17].

Tombe

Tombe de Joseph Crocé-Spinelli et de Théodore Sivel.

Les dépouilles de Joseph Crocé-Spinelli et de Théodore Sivel ont été déposées dans une sépulture unique surplombée de leurs gisants allongés sur le dos, côte à côte avec leurs mains entrecroisées[18]. Cet ensemble, situé au cimetière du Père Lachaise à Paris (71e division), est l'œuvre (1878) de l'artiste Alphonse Dumilatre qui les représente tels que les témoins du drame déclarent les avoir trouvés[19] - [20].

Odonymie

Deux voies du 14e arrondissement de Paris, la rue Crocé-Spinelli et la rue Sivel, rendent hommage aux deux victimes de cette catastrophe aérienne.

Scène historique et musiques

Partition du Zénith pour voix et piano, 1875.

Des partitions musicales (voix et instrument) pour le théâtre sont publiées peu après la catastrophe, comme celles intitulées Le Zénith (paroles d'Adolphe Perreau, musique de Robert Planquette) ou Les martyrs du Zénith, scène historique (paroles de Julien Fauque, musique de Jules Jacob), qui reste en vente jusqu'en 1901[21].

Poème

Cette ascension et la tragédie qui en fut la conséquence ont inspiré un poème, dénommé Le Zénith, au poète français et futur premier lauréat du prix Nobel de littérature, Sully Prudhomme[22] - [23].

Bibliographie

François-Xavier Planque, La catastrophe du ballon scientifique le Zénith à Ciron, dans l'Indre le 15 avril 1875, Cercle d'histoire d'Argenton n°39 pages 24 à 36, novembre 2022 ISSN 0983-1657

Références

  1. Jean Germain, Sauve: Antique et curieuse cité, FeniXX réédition numérique, (ISBN 978-2-402-19073-2, lire en ligne)
  2. Site leonc.fr, page "Paris - Arcachon : un voyage en ballon", consulté le 29 juillet 2021.
  3. « Paul Bert : définition et explications », sur Techno-Science.net (consulté le ).
  4. Henri Vignes, Ciron : histoire d'un village du Bas-Berry, La Simarre - Association des familles Vignes-Bougon, (ISBN 2-909184-02-1 et 978-2-909184-02-9, OCLC 32211342, lire en ligne).
  5. La navigation aérienne : histoire documentaire et anecdotique Par Joseph-louis Lecornu, 1903, p. 310
  6. Jean-Robert Masson Guide de Paris mystérieux éditions Tchou, coll. Les guides noirs, page 329-330.
  7. Gaston Tissandier, « L'Ascension à grande hauteur du 15 avril 1875 », sur Gallica, L'Aéronaute : moniteur de la Société générale d'aérostation et d'automotion aériennes, Société générale d'aérostation et d'automotion aériennes, Société française de navigation aérienne, (consulté le ), p. 167-185.
  8. Gaston Tissandier, Histoire de mes ascensions: Récit de vingt-quatre voyages aériens (1868-1877), Collection XIX, (ISBN 978-2-346-07069-5, lire en ligne).
  9. Site claude.dupras.com, les nouvelle de Maramanche "La vocation de Pierrot", consulté le 29 juillet 2021.
  10. Jean P. Saint Amand, « Arcachon - Paris-Arcachon, un voyage en ballon », sur leonc.free.fr (consulté le ).
  11. Raoul Delarue, « L'Aérophile », sur Gallica, (consulté le ), p. 80-81.
  12. (en) « On April 15, 1875, pilot Theodore Sivel, engineer Joseph Croce-Spinelli, and civilian Gaston Tissandier, took off in their balloon 'Zenith'... : Image 06625541 », sur mauritius images (consulté le ).
  13. Site sciences.gloubik.info, texte de Jacques Boyer, La Nature N°2951 du 15 Avril 1935 "Le soixantième anniversaire de la catastrophe du ballon « Le Zénith »".
  14. « Monument aux aéronautes Théodore Sivel et Joseph-Eustache Crocé-Spinelli à Ciron - PA36000041 - Monumentum », sur monumentum.fr (consulté le )
  15. « Monument commémoratif de la catastrophe du Zénith érigé à Ciron (Indre) », n° 7, sur Gallica, L'Aéronaute : moniteur de la Société générale d'aérostation et d'automotion aériennes, (consulté le ), p. 187-189
  16. Site monumentum.fr, fiche du Monument aux aéronautes Théodore Sivel et Joseph-Eustache Crocé-Spinelli à Ciron, consulté le 30 juillet 2021.
  17. Site lavillette.com, page "Zénith de Paris-La Villette", consulté le 30 juillet 2021.
  18. Site vdujardin.com, page "Enlacés jusque dans la mort… une tombe du cimetière du Père-Lachaise à Paris", consulté le 30 juillet 2021.
  19. Site tombes-sepultures.com, page ur Joseph Crocé-Spinelli et de Théodore Sivel, consulté le 30 juillet 2021.
  20. « Tombe Crocé-Spinelli et Sivel - Paris 20ème (Cim. Père-Lachaise) le 15 Avril 1875 | Aérostèles », sur www.aerosteles.net (consulté le )
  21. (en) « Les martyrs du "Zénith" scène historique paroles de Julien Fauque ; musique de Jules Jacob », sur Smithsonian Institution (consulté le )
  22. Google livre "Poésies de Sully Prudhomme, 1872-1878".
  23. William Marx, L'Adieu à la littérature : Histoire d'une dévalorisation, Éditions de Minuit, coll. « Paradoxe », , 240 p. (ISBN 9782707319364), « chapitre V ».

Annexes

Articles connexes

Liens externes

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