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Westinghouse J40

Conçu et produit par la société américaine Westinghouse Aviation Gas Turbine Division (en), le Westinghouse J40 aurait dû être un turboréacteur à postcombustion à hautes performances.

Westinghouse J40
(caract. J40-WE-8)
Vue du moteur
Un Westinghouse J40, en 1952 (archives US Navy).

Constructeur Westinghouse Aviation Gas Turbine Division (en)
Utilisation McDonnell F3H-1 Demon
Caractéristiques
Type Turboréacteur monocorps avec postcombustion
Longueur 7 200 mm
Diamètre 1 000 mm
Masse 1 590 kg
Composants
Compresseur Axial Ă  11 Ă©tages
Chambre de combustion Annulaire
Turbine Axiale Ă  2 Ă©tages
Performances
Poussée maximale à sec 32,47 kN
Poussée maximale avec PC 48,49 kN
Taux de compression 5,2 : 1

Historique

DĂ©but 1946, le Bureau of Aeronautics de l'US Navy avait prĂ©vu de l'utiliser pour Ă©quiper de nombreux avions de chasse et un bombardier, avec une poussĂ©e statique au niveau de la mer tarĂ©e Ă  33 kN Ă  sec et 48,49 kN avec la postcombustion. Une version plus puissante, tarĂ©e Ă  42,26 kN et 60,94 kN, Ă©tait prĂ©vue pour remplacer les premières versions pour les diffĂ©rents appareils concernĂ©s, mais elle fit preuve d'un concept de compresseur imparfait et manquait d'un système de contrĂ´le convenable. Ces versions Ă  haute puissance de ces moteurs furent considĂ©rĂ©es comme un gros Ă©chec et laissèrent le bureau de l'aĂ©ronautique de la Navy avec seulement les versions Ă  faible puissance.

Ils furent finalement utilisĂ©s pour des tests en vol initiaux. Dans le cas du McDonnell F3H-1N Demon, le moteur de 48,49 kN de poussĂ©e fut utilisĂ© dans des appareils de production pour un temps très court, avant que l'appareil ne soit clouĂ© au sol après de multiples incidents dus au fait que la structure de l'avion, dĂ©sormais trop lourde, Ă©tait poussĂ©e par un moteur trop faible et continuellement touchĂ© par des pannes diverses. Des pannes en service menèrent Ă  la perte de l'avion. Une enquĂŞte du gouvernement sur le problème du programme F3H-1N Ă©choua Ă  dĂ©terminer si des pilotes avaient Ă©tĂ© perdus seulement Ă  cause des failles du moteur. Les avions clouĂ©s au sol furent soit mis au rebut, soit utilisĂ©s comme carcasses pour de l'entraĂ®nement au sol. La version suivante, F3H-2N, employa elle le moteur Allison J71.

Après que le programme ait Ă©tĂ© dĂ©signĂ© comme Ă©tant un « fiasco », le programme J40 fut terminĂ© en 1955, pĂ©riode Ă  laquelle tous les avions qui auraient dĂ» en ĂŞtre Ă©quipĂ©s furent soit clouĂ©s au sol, annulĂ©s ou redessinĂ©s pour utiliser d'autres moteurs. L'Ă©chec du J40 fut parmi ceux qui affectèrent le plus de programmes militaires. La principale cause de l'Ă©chec du programme Ă©tait le manque d'investissements dans la recherche et l'expĂ©rimentation par la sociĂ©tĂ© Westinghouse, ce qui les laissa incapables de rĂ©soudre les problèmes avec les diffĂ©rentes versions du moteur prĂ©vues. En 1953, Westinghouse travaillait avec Rolls-Royce Limited pour offrir au marchĂ© des moteurs basĂ©s sur le Rolls-Royce Avon, mais Westinghouse fut sortie du business des moteurs d'avion vers 1965 quand leur version a rabaissĂ© Ă  27,58 kN de l'Avon 300-series Ă  53,38 kN, l'XJ54, Ă©choua Ă©galement Ă  trouver un marchĂ© aux États-Unis[1].

Le programme du moteur était en fait bien plus vaste que ce qui est communément admis, avec treize différents modèles soumis à des contrats, alors que tous n'étaient pas encore entrés en développement actif. Le besoin initial du bureau de l'aéronautique de la Navy, concernant des moteurs à forte puissance, les força à passer un second contrat de production, cette fois-ci avec la division Lincoln Mercury de la Ford Motor Company, pour le développement de moteurs J40-WE-10 et J40-WE-12. Le contrat fut encore une fois annulé après des échecs dans le développement de ces nouveaux moteurs.

DĂ©veloppement

Le prototype XF3H-1 Ă  moteur J40 sur le pont de l'USS Coral Sea, en 1953.

Westinghouse Electric Corporation créa la Westinghouse Aviation Gas Turbine Division (en) (AGT) en 1945. Le Westinghouse J30 fut le premier turboréacteur de conception américaine à fonctionner, et fut utilisé dans le FH-1 Phantom. La version agrandie J34 fut obsolète lorsqu'elle fut produite, mais connut tout-de-même un succès assez correct. Un nouveau concept, suivant les progrès rapides de l'industrie, était alors nécessaire pour assurer un futur serein à l'entreprise.

Le J40 reprĂ©sentait une grosse opportunitĂ© pour Westinghouse de devenir un acteur majeur dans le marchĂ© des turborĂ©acteurs. La marine amĂ©ricaine dĂ©montra une grande confiance en cette compagnie, lorsqu'elle prit le pari de miser sur Westinghouse pour une nouvelle gĂ©nĂ©ration de moteurs, alors que trois autres compagnies motoristes Ă©taient Ă©galement sur le marchĂ©. Ce fut en que le Bureau of Aeronautics de la Navy signa le contrat pour ce dĂ©veloppement. Le prototype du moteur fut dĂ©marrĂ© pour la première fois en . D'après un article paru dans l'Ă©dition d' du Naval Aviation Confidential Bulletin, Ă©crit par le Lieutenant Commander Neil D. Harkleroad du Bureau of Aeronautics Power Plant Division, « Le moteur a fonctionnĂ© avec succès jusqu'Ă  prĂ©sent »[Note 1]. Comme d'après ce tĂ©moignage, les tests des 50 heures de vol furent achevĂ©s vers , et le test de qualification des 150 heures fut achevĂ© en .

Le J40 fut conçu pour dĂ©livrer le double de la puissance des moteurs alors en service, permettant au J40-WE-8 avec postcombustion d'Ă©quiper une bonne partie des nouveaux chasseurs embarquĂ©s de la Navy ne possĂ©dant qu'un moteur. Parmi ces nouveaux appareils figuraient le chasseur d'emploi gĂ©nĂ©ral Grumman XF10F Jaguar Ă  ailes Ă  gĂ©omĂ©trie variable, et les intercepteurs McDonnell F3H Demon et Douglas F4D Skyray. Une montĂ©e en puissance Ă  plus de 67 kN Ă©tait planifiĂ©e. Une autre version, sans postcombustion, le J40-WE-6, devait propulser le bombardier embarquĂ© bimoteur Douglas A-3D Skywarrior[2].

Le J40-WE-8 Ă©tait dĂ©passait juste les 1 000 mm en diamètre mais mesurait 7,6 m de long, avec ses accessoires et sa postcombustion. Sa masse Ă©tait de presque 1 600 kg. Le J40-WE-6 Ă©tait presque 2,13 m plus court et 270 kg plus lĂ©ger, mais il Ă©tait dĂ©pourvu de postcombustion.

En 1949, une version sans postcombustion Ă  plus haute puissance J40-WE-12 (42,26 kN), avec une meilleure consommation de carburant, fut proposĂ©e pour l'A3D, et une version avec postcombustion J40-WE-10, de 60,94 kN de poussĂ©e, fut proposĂ©e pour les projets de chasseurs. Les deux versions furent acceptĂ©es et Ă©quipèrent les avions pour lesquels elles furent conçues. Les versions Ă  faible puissance des dĂ©buts furent dès lors destinĂ©es Ă  des essais au sol et des tests en vol initiaux en attendant que les moteurs Ă  haute puissance deviennent disponibles.

Abandon du projet

Le dĂ©veloppement du gros moteur fut très long. Le test très important de qualification des 150 heures, qui aurait dĂ» ĂŞtre achevĂ© en , ne fut pas achevĂ© avant , un an après la date prĂ©vue. La postcombustion fut particulièrement capricieuse : La version Ă  postcombustion du moteur, le J40-WE-8, ne passa pas son test de qualification de 150 heures avant ! En consĂ©quence, le moteurs J40-WE-6 sans PC durent ĂŞtre utilisĂ©s pour les tests initiaux, causant de nombreux retards dans les programmes de tests en vol.

Plus tĂ´t, mĂŞme les versions Ă  faible puissance du moteur furent considĂ©rĂ©es comme inutilisables en raison de leurs problèmes de fiabilitĂ©. Le bombardier A3D se montra excellent lorsqu'il utilisa des moteurs alternatifs, mais le chasseur F3H-1 fut relĂ©guĂ© Ă  un rĂ´le de chasseur subsonique avec ce moteur Ă  faible puissance. Il continua d'ailleurs Ă  rester subsonique mĂŞme avec le moteur plus puissant Allison J71. Il avait Ă©tĂ© Ă©tabli que malgrĂ© les dĂ©faillances subies, le F3H-1 aurait pu ĂŞtre compĂ©titif face aux premiers « Century Fighters » supersoniques de l'US Air Force, si les moteurs attribuĂ©s avaient respectĂ© les spĂ©cifications de leur cahier des charges[3]. En fait, le Demon qui Ă©mergea de son dĂ©veloppement Ă©tait un chasseur tout-temps armĂ© de missiles qui Ă©tait 8 000 lbs (3 628,74 kg) plus lourd que l'avait Ă©tĂ© son prototype XF3H-1, et finalement, mĂŞme le J71 et sa forte puissance ne pouvaient rien faire pour lui redonner ses performances convoitĂ©es…

Le chasseur monomoteur F3H-1N Demon fut initialement une très grande dĂ©ception, en raison du manque de fiabilitĂ© du J40 et de la difficultĂ© Ă  piloter un appareil bien plus lourd avec les moteurs les moins puissants J40-WE-22A. La conception de l'avion pouvait accepter les contraintes du plus puissant J40-WE-10. Ces Demons des premières sĂ©ries de production furent clouĂ©s un temps au sol afin d'ĂŞtre redessinĂ©s pour accepter le moteur J71, après la perte de six avions et quatre pilotes[4]. La dĂ©cision d'orienter le Demon vers le J71 avait Ă©tĂ© prise bien avant la production de la sĂ©rie initiale de l'avion, mais comme la mise au point de la postcombustion du J71 prenait du temps, Le bureau de l'aĂ©ronautique de la Navy dĂ©cida d'accepter que les premiers appareils volent avec les moteurs Westinghouse J40-WE-22A and -22. Cette dĂ©cision vint après une assemblĂ©e du Congrès en 1955 et attira de fortes critiques de la part du Congrès. Le Time Magazine appela le maintien Ă  terre de tous les F3H-1 Ă  moteurs Westinghouse de la Navy un « fiasco », avec 21 appareils inutilisables qui ne pouvaient ĂŞtre utilisĂ©s que pour de l'entraĂ®nement Ă  terre et Ă  un coĂ»t de 200 millions de dollars[5].

L'un des seuls coups d'Ă©clat du J40 fut l'Ă©tablissement, en 1955, d'un record non officiel de vitesse ascensionnelle, avec un Demon, atteignant 3 000 m en 71 secondes[4].

On ne pouvait pas simplement installer un moteur de remplacement à l'intérieur des vieux Demons, car le fuselage aurait dû être redessiné et élargi. Quand ce fut fait pour adapter le J71, la surface alaire fut aussi agrandie pour compenser la prise de poids de ce chasseur tout-temps. Le F4D Skyray avait lui été dessiné pour accepter plus facilement des moteurs de types différents, et entra en service avec le Pratt & Whitney J57.

De la même manière, l'A3D apparut avec des versions dépourvues de postcombustion du J57. Le programme XF10F-1 Jaguar fut abandonné principalement en raison de problèmes aérodynamiques insolubles avec l'aile à flèche variable et les systèmes de contrôle. Les défauts du J40 furent finalement d'une importance secondaire durant les essais en vol de ce prototype.

D'après le magazine Flight International du , le coĂ»t total du programme se monterait Ă  281 millions de dollars[6].

Versions

  • XJ40-WE-2, XJ40-WE-4 : Moteurs de dĂ©veloppement internes Ă  l'entreprise ;
  • J40-WE-1 : Version pour l'Air Force du J40-WE-8, propulsant les avions sans pilote North American X-10. Deux moteurs existants Ă  l'intĂ©rieur d'une structure de X-10 sont visibles au musĂ©e national de l'US Air Force de Dayton, dans l'Ohio ;
  • XJ40-WE-3 : DĂ©signation initiale de l'Air Force pour la première version proposĂ©e du XJ40-WE-12 ;
  • XJ40-WE-5 : DĂ©signation de l'Air Force pour les versions dĂ©tarĂ©es Block II/Block III du XJ40-WE-12. 42,26 Ă  44,04 kN de poussĂ©e ;
  • J40-WE-6 : Moteurs de prĂ©-production pour essais en vol, propulsant les deux prototypes Douglas XA3D-1 Skywarrior, le prototype Douglas XF4D-1 Skyray, les prototypes McDonnell XF3H-1 Demon et les Grumman XF10F-1 Jaguar. 33,36 kN de poussĂ©e ;
  • J40-WE-8 : Moteur de prĂ©-production avec postcombustion remplaçant les versions -6 dans les avions Skyray, Demon et Jaguar. Un exemplaire est conservĂ© au Smithsonian Air and Space Museum. 48,49 kN de poussĂ©e ;
  • XJ40-WE-10 : Version Ă  postcombustion expĂ©rimentale de l'XJ40-WE-12. Aussi loin que l'on puisse chercher, il semblerait qu'aucun exemplaire n'ait Ă©tĂ© rĂ©ellement construit, mĂŞme si la postcombustion de type « iris » fut elle fabriquĂ©e. 60,94 kN de poussĂ©e ;
  • XJ40-WE-12 : Moteur expĂ©rimental Ă  plus forte puissance. Quatre exemplaires ont Ă©tĂ© dĂ©truits par des casses de compresseur sur le banc d'essais. 42,26 kN de poussĂ©e ;
  • XJ40-WE-14 : Concept Ă  double corps, placĂ© sous contrat mais non dĂ©veloppĂ©. 53,38 kN de poussĂ©e ;
  • XJ40-WE-16 : Version avec postcombustion du J40-WE-14, placĂ© sous contrat mais non dĂ©veloppĂ©. 77,40 kN de poussĂ©e ;
  • XJ40-WE-18 : Version modifiĂ©e avec postcombustion du J40-WE-10 pour le programme Convair Skate, proposĂ©e mais non acceptĂ©e. Proposition modifiĂ©e plus tard pour l'avion Martin Minelayer, mais refusĂ©e Ă©galement. PoussĂ©e de 50,71 KKN avec la plupart des capacitĂ©s d'altitude supprimĂ©es ;
  • XJ40-WE-20 : J40-WE-10 modifiĂ© avec la postcombustion pour fonctionner jusqu'Ă  une altitude de 50 000 pieds (15 240 m). Aucun exemplaire construit ;
  • J40-WE-22/-22A : Version de production du J40-WE-8, les deux modèles utilisant des systèmes de contrĂ´le diffĂ©rents. Un J40-WE-22A en coupe est visible au National Naval Aviation Museum. 48,49 kN de poussĂ©e ;
  • XJ40-WE-24 : Version proposĂ©e Ă  puissance rĂ©duite des premiers J40-WE-10 de production. Entre 53,60 et 58,27 kN de poussĂ©e ;
  • XJ40-WE-26 : Version proposĂ©e Ă  puissance rĂ©duite des premiers J40-WE-12 de production. Entre 42,26 et 44,04 kN de poussĂ©e.

Applications

Notes et références

Notes

  1. « The engine has been operating successfully to date. »

Références

  1. (en) « Westinghouse Electric » [archive du ] (consulté le ).
  2. (en) John Pike, « B-66 Destroyer / A3D Skywarrior », Global Security, (consulté le ).
  3. (en) Bob Jellison, « McDonnell F3H Demon » [archive du ] (consulté le ).
  4. (en) « F3H/F-3 Demon Fighter » [archive du ], sur Boeing.com, Boeing (consulté le ).
  5. (en) « Demon on the Ground », Time Magazine, (consulté le ).
  6. (en) « Aero Engines 1956 », Flight International magazine, Flight Global/Archives, vol. 69, no 2468,‎ , p. 596 (lire en ligne [PDF]).

Voir aussi

Articles connexes

Bibliographie

  • (en) Élodie Roux, Turbofan and turbojet engines : Database handbook, Raleigh, North Carolina (USA), Élodie Roux, , 595 p. (ISBN 978-2-9529380-1-3 et 2-9529380-1-6, lire en ligne).
  • (en) Anthony L. Kay, Turbojet : History and development 1930–1960, vol. 2 : USSR, USA, Japan, France, Canada, Sweden, Switzerland, Italy, Czechoslovakia and Hungary, Marlborough, Wiltshire (England), Crowood Press, , 1re Ă©d., 240 p. (ISBN 978-1-86126-939-3).
  • (en) William-Ed. Green, The World Guide to Combat Planes, Doubleday & Co., , 1re Ă©d. (ASIN B002C54EDA).
  • (en) Paul J. Christiansen, Westinghouse J40 Axial Turbojet Family, Development History and Technical Profiles, Olney, Maryland (USA), Bleeg Press LLC, , 1re Ă©d., 282 p. (ISBN 978-0-692-35852-8).

Articles

Document utilisé pour la rédaction de l’article : document utilisé comme source pour la rédaction de cet article.

  • (en) « Westinghouse Turbojets (1953) », Flight International magazine, Flight Global/Archives, vol. 64, no 2338,‎ , p. 642 (lire en ligne [PDF]). Document utilisĂ© pour la rĂ©daction de l’article
  • (en) « Aero Engines 1954 », Flight International magazine, Flight Global/Archives, vol. 65, no 2359,‎ , p. 461 (lire en ligne [PDF]). Document utilisĂ© pour la rĂ©daction de l’article
  • (en) Robert Dorr, « Engine faults 'dashed' Demon's Navy career », Army Times,‎ (lire en ligne, consultĂ© le ).
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