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Wackes

L'appellation Wackes (ou Waggis en Suisse allemand) est utilisĂ©e de façon pĂ©jorative ou moqueuse par les Allemands et les Suisses allemands frontaliers au sujet de leurs voisins français dialectophones, c’est-Ă -dire les Alsaciens et les Mosellans germanophones, l’appellation Welsche (analogue : Welche) Ă©tant communĂ©ment rĂ©servĂ©e aux autres français dont les dialectes et langues rĂ©gionales sont d'origines gallo-romanes.

Significations

Alors qu'en dialecte alĂ©manique Wackes dĂ©signe un voyou, une crapule, bref une personne peu digne de confiance, il a le mĂȘme sens en alsacien mais y est gĂ©nĂ©ralement employĂ© avec une connotation plus modĂ©rĂ©e de garnement, filou, coquin[1].

L'appellation wackes est encore aujourd'hui, pour les dialectophones de la rĂ©gion, le qualificatif pour les habitants de la ville de Mulhouse d'origine alsacienne, il peut ĂȘtre disqualifiant, nĂ©gatif, mais peut aussi ĂȘtre positif, dans le sens de coquin, malin, roublard, plus Ă©veillĂ© que les paysans des environs, moins naĂŻf.

Représentation du Waggis

Le Wackes ou Waggis alsacien est devenu une des figures emblĂ©matiques du Carnaval de BĂąle, oĂč l'Alsacien est caricaturĂ© sous les traits d'un paysan cultivateur de lĂ©gumes vĂȘtu de façon extravagante aux couleurs du drapeau français (traditionnellement une chemise bleue, un pantalon blanc et une cravate rouge, avec parfois un bonnet pointu) et chaussĂ© de gros sabots rouges. Son nez rouge proĂ©minent est censĂ© illustrer sa consommation excessive de vin. La premiĂšre mention de Waggis remonte Ă  1870[2]. Il dĂ©signe alors familiĂšrement les habitants du Sundgau travaillant dans la ville de BĂąle et qui, ne pouvant ramener leurs salaires chez eux, avaient la rĂ©putation de boire sur place une bonne partie de leur argent.

Origines

L’emploi de Wackes par les Allemands ou Suisses-allemands traduit l’idĂ©e selon laquelle leurs voisins Alsaciens et Mosellans, ne cultivant pas avec la mĂȘme rigueur les valeurs considĂ©rĂ©es comme typiquement allemandes (ou suisses germanophone), ne peuvent ĂȘtre assimilĂ©s Ă  un peuple authentiquement germanique et Ă  ce titre ne sont pas dignes de confiance.

De la part des Allemands plus spĂ©cifiquement, il exprime Ă©galement le ressentiment et le dĂ©pit envers les Alsaciens-Lorrains qui, selon eux, se seraient toujours opportunĂ©ment retrouvĂ©s du cĂŽtĂ© des vainqueurs, auraient facilement retournĂ© leur veste et n’appartiennent pas Ă  la patrie allemande puisque s’accommodant si bien d'ĂȘtre français, voire le prĂ©fĂ©rant.

Ce sobriquet péjoratif était courant entre 1871 et 1918, lors de l'annexion de l'Alsace-Moselle par le second Reich. Les alsaciens et mosellans étaient considérés comme peu fiables du fait de leur francophilie et de la présence de la langue française à différents degrés au sein de la population. Les députés protestataires qui jusqu'à la mort de Bismarck étaient les seuls représentants de la terre d'empire envoyés au parlement.

En 1913, pendant l'annexion de l'Alsace-Lorraine par l'Empire allemand, l'emploi injurieux du terme Wackes par des troupes prussiennes stationnées à Saverne, à l'encontre de la population locale, a déclenché l'affaire de Saverne, pendant laquelle les termes ElsÀsserwackes et Sauwackes furent également employés[3].

De nos jours, ce terme et les ressentiments semblent plus appartenir au passé et au folklore, comme l'illustrent les caricatures du carnaval de Bùle.

Correspondances linguistiques

Cette appellation de Wackes correspond tout Ă  fait Ă  l’habitude dans l’aire germanophone de se rĂ©duire les uns les autres Ă  des dĂ©nominations pas toujours trĂšs aimables au sein du mĂȘme pays ou de la communautĂ© linguistique. Ainsi les Alsaciens, tout comme les Suisses allemands, dĂ©signent-ils collectivement les Allemands par Schwaben (les Souabes), Schwob (au pluriel Schwowwe) ou plus au Sud Schwoba ou encore Schwaabe – ce qui n’est pas prĂ©cisĂ©ment un compliment, sans parler des associations Sauschwob (cochon de Souabe) ou Drecksschwob (salopard de Souabe). La parentĂ© avec l’expression bavaroise Saupreußen (cochons de Prussiens) est ici Ă©vidente. Les Lorrains prĂ©fĂšrent dĂ©signer les Allemands par Pifeköp(f), Ă©quivalent de l'autrichien Piefke (du compositeur allemand de musique militaire Johann Gottfried Piefke).

Les Souabes sont vus comme le parfait contraire des Wackes : catĂ©goriques, bornĂ©s, rĂ©glementaristes, dĂ©pourvus d’humour, etc., ce qui confirmerait leur propre point de vue sur les Wackes. Le cas des voisins immĂ©diats sur l'autre rive du Rhin, les Badois (du Pays de Bade), est aussi intĂ©ressant : bien que ceux-ci considĂšrent les Souabes comme dĂ©plaisants et prĂ©fĂšrent se dĂ©marquer de leurs compatriotes d'outre ForĂȘt-Noire, ils ne coupent pas Ă  l’appellation collective de Souabes que leur donnent Alsaciens et Suisses-allemands. Il faut sans doute attribuer cette dĂ©nomination globale au fait que l’Alsace mais aussi la majeure partie de la Suisse alĂ©manique, la rĂ©gion de Bade ainsi que l’actuel district de Souabe bavarois appartinrent jusqu’au milieu du Moyen Âge au duchĂ© souabe de la Francie orientale et plus tard au Saint-Empire romain germanique.

Notes et références

  1. (de)Wörterbuch der elsĂ€ssischen Mundarten Wackes bis Äpfelweckeⁿ (Bd. 2, Sp. 807b bis 808b)
  2. (de) Rudolf Suter, Baseldeutsch-Wörterbuch, Bùle,
  3. Une page de l'histoire d'Alsace : Saverne 1913, dans Detective no 443, 1937 (lire en ligne)
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