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Union générale des étudiants de Tunisie

L'Union générale des étudiants de Tunisie (arabe : الاتحاد العام لطلبة تونس) ou UGET est un syndicat étudiant destiné à représenter les étudiants tunisiens et contribuer avec les autres organisations au développement du pays.

Union générale des étudiants de Tunisie
Histoire
Fondation
Prédécesseur
Cadre
Type
Siège
32, rue Ettazarki
Bab El Khadra
1075 Tunis
Pays
Organisation
Secrétaire générale
Warda Atig
Positionnement
Site web

Histoire

Fondation en 1952

L'UGET est constituée en 1952 sous l'impulsion du Néo-Destour ; son premier congrès se tient à Paris. Les années 1950 voient monter au sein de l'UGET une culture et un discours politique anti-impérialiste et anticolonialiste, qui s'expriment dès son premier congrès puis se développent dans les articles de sa revue Attaleb Atounsi (L'Étudiant tunisien) et ses communiqués, et s'amplifie avec la guerre d'indépendance algérienne démarrée en novembre 1954[1].

Fusion de 1956

Après l'indépendance de la Tunisie, le président Habib Bourguiba tient à en faire le seul organisme représentatif des étudiants. Par conséquent, la Voix de l'étudiant, organisation zitounienne, est absorbée[1].

Virage de janvier 1961

Siège historique de l'UGET au numéro 11 de la rue d'Espagne à Tunis.

Organe proche du pouvoir, l'UGET commence cependant à adopter progressivement une position critique vis-à-vis du gouvernement de Bourguiba. La commission administrative réunie les et demande ainsi la nationalisation des secteurs clés de l'économie nationale, en particulier les mines, la réalisation d'une réforme agraire assurant la répartition des terres selon un critère de justice sociale et en sauvegardant une bonne rentabilité par la généralisation du système coopératif, et la création d'un cercle d'études économiques[2].

Peu après, le à Kairouan, un groupe de fidèles réunis au sein de la Grande Mosquée assiège le bureau du gouverneur de la ville, Amor Chachia, proche de Bourguiba[3]. Dès octobre 1960, il s'était élevé contre le prêche du de l'imam Khelif, nommé quatre ans plus tôt, vilipendant la sortie des femmes[3]. La tension est aggravée par l'autorisation de tourner un film en plein ramadan dans la mosquée au cours duquel des pratiques « profanatoires » sont alléguées[3]. De violentes manifestations de rue dégénèrent en destruction de la maison du Néo-Destour et d'une ambulance[3]. L'intervention musclée de la police entraîne 137 inculpations[4], deux condamnations à la prison à perpétuité[4] et huit victimes[4], même si le bilan des morts demeure inconnu[3].

Au sein du syndicat étudiant, des voix discordantes commencent à se faire entendre et rapidement des « pressions ont été exercées en vue du renversement du bureau de la section de Grenoble »[5].

Scission de 1963

La volonté des militants destouriens d'annexer l'UGET à partir de se heurte à la section française, où militent des étudiants formés au Parti communiste tunisien, mais aussi des trotskistes, ou encore des panarabistes[1]. Le conflit entre la direction du syndicat en Tunisie et la section française se termine par l'exclusion en des militants de la seconde[1]. Ces derniers fondent en , à la résidence universitaire d'Antony, un nouveau syndicat qu'ils baptisent « Groupe d'étude et d'action socialiste tunisien » (GEAST), pour signifier une ligne de gauche, mais « sans réelle détermination idéologique ni ligne politique précise »[1]. Deux de ses militants, Mustapha Khayati, étudiant en philosophie à l'université de Strasbourg dans la première moitié des années 1960, et Béchir Tlili, militant des groupes jeunes de Pouvoir ouvrier dès 1961[6], participent à cette tendance du syndicat et son journal.

Journal Perspectives et premières émeutes

La nouvelle organisation se donne pour mission de comprendre la situation socioéconomique et politique de la Tunisie et de formuler des alternatives crédibles[1]. Le GEAST publie dès sa fondation la revue Perspectives tunisiennes[1] - [7], dont les articles analysent en détail « l'inconsistance des réformes mises en œuvre par le régime »[1] de Bourguiba. Très vite, le GEAST se fait ainsi appeler Perspectives[1]. Le premier numéro, en , dénonce « la misère sévissant dans le monde rural » sous l'expression de « la condition agraire »[1]. Les numéros suivants abordent ensuite d'autres thèmes sociaux, le « problème syndical », « la classe ouvrière », « l'autocensure des intellectuels »[1] et les grandes controverses de l'époque[7], puis dénoncent plus globalement le pouvoir de Bourguiba, qualifié de « capitalisme d'État »[1]. Le GEAST milite ouvertement pour l'indépendance de l'UGET à l'égard du régime[8]. En 1964, dans le village de Cherahil, près de Moknine dans le Sahel tunisien, les militants réunis pour un congrès de l'UGET tiennent une réunion au cours de laquelle est voté le déplacement du centre de gravité de Paris vers la Tunisie, ce qui débouche sur une manifestation, racontée dans Perspectives tunisiennes, qui regroupe entre 500 et 700 étudiants le pour protester contre les conditions d'études[9]. Le , deux étudiants sont arrêtés à cause d'une altercation avec un agent de la Société nationale des transports, les protestations virant à l'émeute, avec 200 étudiants arrêtés et neuf condamnés, parmi lesquels cinq dirigeants du GEAST.

Événements de 1967-1968

L'année suivante, la défaite des armées arabes (Égypte, Syrie et Jordanie) lors de la guerre des Six Jours voient une montée du panarabisme et de l'Organisation de libération de la Palestine, qui radicalisent en partie le militantisme étudiant tunisien[1].

Début 1968, le positionnement anti-colonial et anti-impérialiste de l'UGET la mobilise contre la venue du Sud-Vietnamien Tran Van Do (vi), « prétendu ministre des Affaires étrangères du fantoche gouvernement de Saïgon », avec une série de grèves étudiantes et d'affrontements avec la police du au , soutenues par d'autres parties de la société[1]. La mobilisation étudiante est ainsi accompagnée d'une campagne d'affichage sauvage et de distribution de tracts dans les quartiers populaires[1]. Ensuite, du au , se déroule une grande grève générale au cours de laquelle se créé un comité estudiantin dominé par Perspectives qui exige une gestion tripartite de l'université, partagée avec les enseignants et l'administration[1]. Cette revendication est satisfaite par le pouvoir et le comité de coordination étudiante demande d'arrêter immédiatement les manifestations, pour se prémunir contre « la répression, y compris la violence physique brutale », mais se déchire entre les communistes et indépendants, qui le proposent, et les autres[1].

Cette division est exploitée par Habib Bourguiba et, au petit matin du , plusieurs centaines de personnes sont arrêtées dont une partie subit « l'usage systématique des techniques de torture avilissantes et brutales les plus diversifiées »[1], qui fait que la Tunisie ne participe pas pleinement et sereinement à ce qui se passe en France en mai 68[1]. Une juridiction d'exception, la Cour de sûreté de l'État, condamne au cours de l'été les militants à de lourdes peines de prison ferme, variant de quelques mois à seize ans et demi. Parmi les condamnés figurent 94 militants perspectivistes, sept communistes et 27 baathistes[1].

Congrès de 1971

Toutefois, ce n'est qu'en 1971, lors du congrès de Korba, que les opposants à l'inféodation de l'UGET au Parti socialiste destourien au pouvoir deviennent majoritaires et refusent la tutelle du gouvernement. Des actes de violence et d'anarchie empêchent l'achèvement de ce 18e congrès. La crise atteint son paroxysme avec la révolte étudiante du 5 février 1972.

Pour les pro-destouriens, c'est un congrès légal à la suite duquel ils organisent un 19e et un 20e congrès dont ils sont pourtant les seuls à reconnaître la légitimité. Pendant 17 ans, l'université tunisienne est un terrain de luttes interminables entre les pro-destouriens, désormais marginalisés, et les opposants de différentes sensibilités (communistes, nationalistes et baathistes puis aussi trotskistes, maoïstes et islamistes).

Régime de Ben Ali

Après l'arrivée au pouvoir du président Zine el-Abidine Ben Ali, le , les opposants arrivent à tenir un « 18e congrès extraordinaire » entre le 30 avril et le . Samir Lâabidi, futur ministre du président Ben Ali, est élu secrétaire général de l'UGET. L'adhésion est toujours refusée aux pro-destouriens qui, par un retournement de l'histoire et grâce à la dépolitisation des étudiants et le renouvellement du Rassemblement constitutionnel démocratique (RCD) finissent par devenir majoritaires au sein des instances représentatives. L'UGET, minée par les luttes internes, est depuis incapable de tenir son congrès. Elle est divisée en deux grands courants, l'un ayant accepté des négociations avec le régime de Ben Ali et l'autre s'y étant opposé. Comme au sein de l'UGTT, la direction du syndicat était plus proche politiquement du gouvernement que sa base[10].

La lutte est reportée sur la représentation au sein des conseils scientifiques des établissements universitaires où l'écrasante majorité des sièges est longtemps remportée par les étudiants destouriens de l'Organisation des étudiants du RCD.

Période post-révolutionnaire

Après la révolution de 2011, le , l'UGET remporte les élections des conseils scientifiques en obtenant 175 sièges sur 485, soit 36 % du total, contre 152 sièges pour l'Union générale tunisienne des étudiants[11], soit 31,3 % du total.

Lors des préparatifs de son 25e congrès, l'UGET se trouve divisée entre deux tendances : d'un côté les syndicalistes radicaux (extrême gauche), les étudiants nationalistes, les baathistes et les patriotes démocrates à l'université (Wataj), de l'autre les étudiants proches du Parti des travailleurs, du Parti unifié des patriotes démocrates, du parti Taliâa (d'avant-garde) arabe démocratique (baathistes), du Parti socialiste, de la Voie démocratique et sociale, de la Ligue de la gauche ouvrière, etc. La première tendance tient son congrès les 24 et , élisant un bureau avec à sa tête pour la première fois une étudiante, Ameni Sassi[12] - [13]. Un deuxième congrès se tient au même endroit, la faculté de droit de Tunis, et élit un autre bureau dont le secrétaire général, Wael Naouar, est proche du Parti des travailleurs[14].

Le , c'est l'UGTE qui remporte les élections des conseils scientifiques, avec 266 sièges sur 542 soit 49 % du total, alors que l'UGET en obtient 147 soit 27 %, le reste, 127 sièges, revenant à des étudiants indépendants ou appartenant à d'autres organisations [15].

Congrès

CongrèsDateLieuSecrétaire général
1er 10- Paris Mustapha Abdessalem
2e 14- Nice Mansour Moalla
3e Tunis Abdelmajid Chaker
4e 1er- Bir El Bey Hafedh Tarmiz
5e 20- Tunis Tahar Belkhodja
6e 12- La Marsa Tahar Belkhodja
7e 20- Tunis Mongi Kooli
8e 9- Radès Mohamed Sayah
9e - Carthage Mohamed Sayah
10e 13- Bizerte Abdelhamid Ammar
11e 15- Le Kef Mokhtar Zannad
12e 17- Monastir Abdelaziz Ghachem
13e 17- Nabeul Abdelhay Chouikha
14e 9- Tabarka Mohamed Ben Ahmed
15e 10- Gabès Slim Aloulou
16e 12- Menzel Temime Mahjoub Guerfali
17e 4- Mahdia Aïssa Baccouche
18e (non achevé) 12- Korba Habib Chaghal
18e (extraordinaire) - Tunis Samir Lâabidi
19e Tunis Samir Hammouda
20e Tunis Naoufel Ziadi
21e Tunis Naoufel Ziadi
22e Tunis Assef Yahyaoui
23e Tunis Ezzeddine Zaâtour
24e Tunis Ezzeddine Zaâtour
25e 24- Tunis Ameni Sassi
25e 25- Tunis Wael Naouar
26e 10- Tunis Nidhal Khadraoui
27e 3- Tunis Warda Atig[16]

Direction

Au cours des trois premiers congrès, le premier responsable porte le titre de président et se trouve épaulé par un secrétaire général. Les trois secrétaires généraux ont été Abdelhakim Abdeljaoued (1953), Hamed Karoui (1954) et Mohamed Ben Abdesselem (1955). Mohamed Sayah a pour sa part fait partie de cinq bureaux différents : deux fois en tant que secrétaire général et trois fois en tant que membre chargé de l'information.

Parmi les premiers responsables de l'UGET, six sont devenus ministres (Moalla, Chaker, Belkhodja, Kooli, Sayah et Laâbidi), un est devenu secrétaire d'État (Ben Ahmed), deux gouverneurs (Zannad et Aloulou) et un ambassadeur (Ammar).

Abdelhay Chouikha, après avoir quitté le PSD, a été l'un des fondateurs du Mouvement des démocrates socialistes.

Conseils scientifiques

Année % Rang Sièges
2012 39,5 1er
191 / 484
2013 41,5 1er
228 / 549
2014 22,1 2e
114 / 516
2018 23,4 2e
127 / 542
2019 32 2e
171 / 534
2020 28,3[17] 2e
156 / 551
2021 28,67[18] 2e
157 / 551
2022 36[19] 2e
191 / 527

Références

  1. Moutaa Amine El Waer, « Mars 68 et le non-mai 68 tunisien », sur dossiers-bibliotheque.sciencespo.fr (consulté le ).
  2. La Presse de Tunisie, 7 janvier et 8 février 1961.
  3. Mohamed Kerrou, « La Grande Mosquée de Kairouan : l'imam, la ville et le pouvoir », Revue des mondes musulmans et de la Méditerranée, no 125, (lire en ligne, consulté le ).
  4. (en) Clement Henry Moore, Tunisia since Independence : The Dynamics of One-Party Government, Berkeley, University of California Press, , 230 p.
  5. Jeune Afrique, 4 et 10 février 1963.
  6. Anna Trespeuch-Berthelot, « Khayati Mustapha », sur maitron.fr, (consulté le ).
  7. Mohsen Toumi, La Tunisie de Bourguiba à Ben Ali, Paris, Presses universitaires de France, , 317 p. (ISBN 978-2130428046).
  8. (ar) Abdeljalil Bouguerra, De l'histoire de la gauche tunisienne : le mouvement Perspectives, 1963-1975, Tunis, Cérès, , p. 16.
  9. Bouguerra 1993, p. 11-15.
  10. « Tunisie : Union générale des étudiants tunisiens (UGET), y compris les caractéristiques générales des cartes de membre et l'existence d'un bureau de l'UGET en France ; le cas échéant, une comparaison entre les cartes émises en Tunisie et celles émises en France ; information sur la situation actuelle des membres de l'UGET (mars 2004) »(Archive.orgWikiwixArchive.isGoogle • Que faire ?), sur unhcr.org.
  11. « Universités - Élections des conseils scientifiques : le taux de participation n'a pas dépassé les 20 % (ministère) »(Archive.orgWikiwixArchive.isGoogle • Que faire ?), sur tap.info.tn, .
  12. « Amani Sassi à la tête de l'UGET »(Archive.orgWikiwixArchive.isGoogle • Que faire ?), sur mosaiquefm.net, .
  13. Salah Ben Hamadi, « L'UGET toujours aussi écartelée depuis le blocage historique de 1972 »(Archive.orgWikiwixArchive.isGoogle • Que faire ?), sur letemps.com.tn, .
  14. Ferid Rahali, « L'UGET : l'union impossible ? », sur nawaat.org, (consulté le ).
  15. (ar) « Annonce des résultats selon l'affiliation : la faction islamiste gagne les élections des conseils scientifiques »(Archive.orgWikiwixArchive.isGoogle • Que faire ?), sur ar.lemaghreb.tn, .
  16. Wided Nasraoui, « Tunisie : Warda Atig, première femme à la tête de l'Uget », sur jeuneafrique.com, (consulté le ).
  17. « L'UGTE remporte les élections estudiantines », sur businessnews.com.tn, (consulté le ).
  18. (ar) « L'Union général tunisien des étudiants remporte les élections des conseils scientifiques », sur businessnews.com.tn, (consulté le ).
  19. « L'UGTE remporte les élections estudiantines », sur buisnessnews.com.tn, (consulté le ).

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Lien externe

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