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Turbine Pelton

Une turbine Pelton est un type de turbine hydraulique à augets utilisée dans les centrales hydroélectriques. Elle a été inventée en 1879 par Lester Allan Pelton.

Roue Pelton.

Principe

Cette turbine est du type « Ă  action » car l’énergie cinĂ©tique de l’eau s'Ă©coulant en sortie de la conduite forcĂ©e est transmise Ă  la turbine (couple et vitesse angulaire) par l'intermĂ©diaire d’un jet d'eau qui agit directement sur les augets de la roue.

Ce type de turbine ne dispose pas de diffuseur (ou aspirateur) en sortie d’eau, car celle-ci s’écoule librement Ă  la pression atmosphĂ©rique dĂšs l'instant oĂč elle quitte l'injecteur sous forme de jet. Plus prĂ©cisĂ©ment, le jet se partage en deux au moment oĂč il atteint l'auget, chaque demi-jet est ensuite dĂ©viĂ© par la forme concave de l'auget dans lequel il s'Ă©crase (transmettant ici son Ă©nergie cinĂ©tique au mouvement de la roue), puis l'eau s'Ă©chappe latĂ©ralement de la roue avec une vitesse rĂ©siduelle faible. Elle est finalement rĂ©cupĂ©rĂ©e par la bĂąche - une coque enfermant la turbine - le long de laquelle elle s'Ă©coule par gravitĂ©.

D’aprĂšs le calcul de la vitesse spĂ©cifique, ces turbines sont adaptĂ©es Ă  des chutes dites « hautes chutes » (supĂ©rieures Ă  400 m) avec un faible dĂ©bit d’eau (infĂ©rieur Ă  15 m3/s)[Note 1].

La vitesse maximale du jet en sortie de l’injecteur satisfait la relation[1] :

Pour optimiser le rendement, le maximum d'Ă©nergie cinĂ©tique de l'eau doit ĂȘtre transmise Ă  la roue : la vitesse de l'eau Ă  la sortie des augets doit ĂȘtre minimale (quasiment nulle). Ainsi, la vitesse de rotation de la roue (vitesse des augets) doit atteindre la moitiĂ© de la vitesse du jet[1] :

.

Cette conception permet un rendement exceptionnel de plus de 90 %. Le rendement théorique en fonction de la vitesse peut s'écrire[1] :

Pour entraßner un alternateur (synchrone), le diamÚtre de la roue (au centre des augets) est directement lié à la hauteur de chute , à la fréquence du réseau et au nombre de pÎles . En premiÚre approximation :

Cette turbine se caractĂ©rise par l’absence de poussĂ©e axiale. Une rĂ©alisation comportant plusieurs injecteurs placĂ©s uniformĂ©ment autour de la roue annule la force rĂ©sultante des poussĂ©es normales Ă  l’axe. Ces effets simplifient la conception et l’entretien des lignes d’arbres des turbines.

La puissance d'une turbine Pelton est de l'ordre de 60 MW. Certaines atteignent 400 MW (centrale de Bieudron prĂ©levant les eaux de la Grande Dixence en Suisse).

Constitution

Turbine Pelton Ă  six injecteurs.

Une turbine Pelton comporte une roue mobile, munie d'aubes appelées « augets » sur sa périphérie, et un ou plusieurs injecteurs fixes qui envoient, à trÚs grande vitesse, l'eau sur les augets. Le tout est entouré d'une bùche en tÎle d'acier destinée à protéger la roue et à évacuer l'eau[2].

Roue Ă  augets

Roue Ă  augets, d'une turbine Pelton de 40 kW.
Roue à augets, détail.

Les turbines Pelton utilisent la roue dite « Ă  augets ». Cette roue ressemble Ă  un disque Ă©quipĂ© d’augets ressemblant Ă  des demi-coquille de noix, placĂ©s en circonfĂ©rence.

La forme de ces augets est trĂšs Ă©voluĂ©e et permet au jet d’eau qui les frappe de se sĂ©parer en deux jets dĂ©viĂ©s sur les cĂŽtĂ©s de la roue. Le nombre d’augets rĂ©pond Ă  une formule issue de l’expĂ©rience des constructeurs, soit Z=15+D/2d, avec Z = nombre d’augets, D = Ø primitif, d = Ø du jet d’eau. Leur nombre varie de 15 Ă  25 en pratique. Le diamĂštre du centre des augets est appelĂ© le Ø Pelton, diamĂštre qui sert Ă  positionner l’axe du jet d’eau, axe qui doit ĂȘtre tangent Ă  ce Ø Pelton.

Construite le plus souvent d’une seule piĂšce, les roues Pelton sont moulĂ©es par coulage, avec des matĂ©riaux ferreux fortement alliĂ©s en chrome et nickel. Le moulage de ces roues est une opĂ©ration complexe et dĂ©licate, nĂ©cessitant des contrĂŽles mĂ©tallurgiques nombreux et coĂ»teux. Les roues d’un diamĂštre important (> 1 500 mm) sont constituĂ©es d’une couronne moulĂ©e d’augets, couronne fixĂ©e entre deux disques servant de moyeu.

La surface intĂ©rieure des augets, appelĂ©e « intrados », doit avoir un Ă©tat de surface poli pour optimiser l’écoulement de l’eau. La partie extĂ©rieure (extrados) des augets est parfois nervurĂ©e pour augmenter la tenue mĂ©canique de l’auget.

L'axe de la roue est habituellement horizontal. L'alternateur peut ĂȘtre commandĂ© par une ou deux roues, avec les dispositions suivantes :

  1. Une roue : l'alternateur et la roue sont placés cÎte à cÎte.
  2. Deux roues : l'alternateur est placé entre les deux roues.

Injecteur

L’injecteur a pour rĂŽle d'alimenter la roue en eau et de permettre le rĂ©glage du dĂ©bit. L'eau pĂ©nĂštre dans l’injecteur Ă  faible vitesse et en sort Ă  grande vitesse. Il y a donc dans l’injecteur transformation de l'Ă©nergie de pression en Ă©nergie cinĂ©tique, l'eau agissant essentiellement sur la roue par son Ă©nergie cinĂ©tique. La vitesse de l'eau Ă  la sortie de l’injecteur ne dĂ©pend que de la hauteur de chute, elle est approximativement Ă©gale Ă  .

L’injecteur est composĂ© :

  • d'un corps, se terminant du cĂŽtĂ© de la sortie d'eau par un trou d’ajutage appelĂ© « buse »,
  • d'une aiguille, se dĂ©plaçant dans le corps et servant au rĂ©glage du dĂ©bit d’eau,
  • d'un vĂ©rin hydraulique de manƓuvre.

Le corps ressemble Ă  un tube, montĂ© en bout de la conduite forcĂ©e. FabriquĂ© en acier coulĂ©, il est rectiligne ou coudĂ©. À la sortie du corps, la buse est soumise Ă  une forte Ă©rosion de l’eau et comporte une partie dĂ©montable appelĂ©e « bec de buse ». Cette piĂšce rĂ©alisĂ©e en acier inoxydable peut ĂȘtre donc remplacĂ©e suivant son usure.

L’aiguille sert d’obturateur et de rĂ©gleur du dĂ©bit d’eau en se dĂ©plaçant longitudinalement dans le corps de l’injecteur. À l’extrĂ©mitĂ© de l’aiguille, le pointeau (en forme de radis) est une piĂšce en acier inoxydable parfaitement usinĂ©e et polie, venant en contact avec le bec de buse.

La manƓuvre de l’aiguille est assurĂ©e par un vĂ©rin placĂ© en bout de l’aiguille et fixĂ© sur le corps de l’injecteur. La prĂ©sence de ce vĂ©rin oblige Ă  concevoir une forme coudĂ©e pour le corps de l’injecteur. Le guidage de l’aiguille est assurĂ©e par un croisillon cĂŽtĂ© buse (sortie d’eau) et par un presse-Ă©toupe cĂŽtĂ© vĂ©rin. La conception fait que l’aiguille a tendance Ă  se fermer sous la pression d’eau amont pour assurer la sĂ©curitĂ© de la fermeture. Le vĂ©rin ne sert qu’à la manƓuvre d’ouverture et au rĂ©glage du jet d’eau.

Injecteur.
Injecteur.
Injecteur.
Injecteur d'une turbine Pelton de 40 kW.

DĂ©flecteur

Le dĂ©flecteur a pour rĂŽle de dĂ©vier le jet d’eau, en cas d'incident grave sur la turbine ou sur l'alternateur, sans arrĂȘter l'Ă©coulement de l'eau et d'Ă©viter ainsi les coups de bĂ©lier dans la conduite amont ou l’emballement de la turbine.

Le déflecteur est composé :

  • d'un Ă©trier en acier, pivotant perpendiculairement devant la sortie du jet d’eau de l’injecteur,
  • d'un vĂ©rin hydraulique de manƓuvre.

AprĂšs une manƓuvre du dĂ©flecteur, la roue n’est plus entraĂźnĂ©e par le jet, et ce dernier peut ĂȘtre diminuĂ© lentement par l’injecteur sans risque. L’efficacitĂ© du dĂ©flecteur est assurĂ©e par sa position tangente au jet d’eau en position normale. Le dĂ©flecteur est une piĂšce le plus souvent forgĂ©e, Ă  cause des contraintes importantes qu’il subit.

Injecteur.
Injecteur.
Injecteur.
Déflecteur passif. Déflecteur activé.

BĂąche

La bñche est la partie enveloppant la roue, contenant ainsi la terre d’eau (valable uniquement pour les turbines à axe horizontal)

Cette bùche est composée :

  • d'un bĂąti fixe en partie basse, ancrĂ© dans le bĂ©ton,
  • d'une capote dĂ©montable, permettant l’accĂšs Ă  la roue pour les contrĂŽles et rĂ©parations.

Le plan de joint entre le bĂąti et la capote est donc horizontal et passe par l’axe de rotation de la roue. AprĂšs chaque dĂ©montage, l’étanchĂ©itĂ© de ce plan de joint est refaite, par application de pĂąte d’étanchĂ©itĂ© ou par remplacement du joint torique placĂ© dans une gorge du bĂąti.

D’autre part, des boucliers mĂ©talliques appelĂ©s « renvois d’eau » sont fixĂ©s dans la partie infĂ©rieure du bĂąti. Ces piĂšces permettent de rĂ©colter l’eau projetĂ©e et de la guider vers la fosse d’évacuation.

RĂ©gulation

La turbine Pelton est particuliĂšrement bien adaptĂ©e pour fournir rapidement de la puissance de rĂ©glage grĂące Ă  la dynamique de sa rĂ©ponse Ă  une sollicitation. Une usine arrĂȘtĂ©e (dĂ©marrage Ă  froid) peut injecter sur le rĂ©seau Ă©lectrique la totalitĂ© de sa puissance en quelques minutes, et ceci mĂȘme pour des amĂ©nagements importants[3].

Une intervention rapide dans le cadre des rĂ©glages primaire et secondaire est une garantie pour un bon fonctionnement du rĂ©seau en cas d’incident majeur.

Quelques centrales en France

Liste des plus puissantes centrales hydroélectriques françaises de type Pelton
Nom Nombre de turbines Type Puissance (MVA) DĂ©bit (m3/s) Hauteur de chute (m) Remarques
Grand'Maison 4 Vertical 680 75,9 962
La BĂąthie 6 Vertical 529 55,6 1 208
Villarodin 2 Vertical 390 51 888
Malgovert 4 horizontal 345 50,7 750
La Coche[4] - (STEP) 1 (2019) - 240 28 900 En montage en 2019, c'est la plus grande turbine Pelton de France[5]. Elle complÚte les 4 turbines Francis déjà en place.
PragnĂšres 3 horizontal 205 17,7 1 255
Combe d'Avrieux 1 Vertical 132 17,25 888
Passy 4 horizontal 126 34 387
Montpezat 2 horizontal 126 26,5 628
Montahut 2 Vertical 110 19,8 921
Aston 4 horizontal 101 22,2 519
Hospitalet 3 horizontal 99 15,2 785
Aussois 3 horizontal 90 12,6 860
Orlu 2 horizontal 85 11 990
Nentilla 2 horizontal 60 12,4 526
Saint Martin VĂ©subie 2 horizontal 57 8,8 730
Portillon 2 horizontal 55 3,7 1 410
Pralognan 3 horizontal 51 8 724
Merens 2 horizontal 45 16,9 327
Total (somme) 52 - 3526 436,55 14 758
Moyenne 2,7 - 185,7 25,5 824,1

La maintenance hydraulique en France

Les Ă©quipements hydrauliques des centrales françaises, concĂ©dĂ©es par l'État Ă  EDF ou Ă  ses filiales, sont prĂ©sents dans 447 centrales hydroĂ©lectriques. On y trouve en particulier, des turbines Pelton et leurs composants (rotors, augets, vannes, robinets, paliers, etc.). Tous les Ă©lĂ©ments touchant Ă  l'Ă©quipement hydraulique de ces centrales, sont entretenus et maintenus par une unitĂ© interne d'EDF, le Service de RĂ©paration Hydraulique[6], qui effectue des opĂ©rations de rechargement mĂ©tallique par soudage, de meulage pour remise au profil, soit en atelier ou sur site, ainsi que des travaux d'usinage.

Quelques centrales en Suisse

Liste des plus puissantes centrales hydroélectriques suisses de type Pelton
Nom Nombre de turbines Type Puissance (MVA) DĂ©bit (m3/s) Hauteur de chute (m) Remarques
Bieudron 3 Vertical 1217 75 1 883
Nendaz 6 Horizontal 391 45 1 000
Biasca 4 Horizontal 332 56 710
Bitsch 3 Vertical 326 53 720
Fionnay 6 Horizontal 301 45 790
Tierfehd Limmern ? ? 275 30 1 046
Forces motrices Hongrin-LĂ©man 4 (dĂšs 2015: 6) Horizontal (dĂšs 2015: horizontal et vertical) 240 (dĂšs 2015: 480) 34 840
Total (somme) plus de 22 - 3092 338 6 989
Moyenne plus de 3 - 441,7 48,3 998,4

Le phénomÚne de cavitation

Une Ă©rosion prĂ©maturĂ©e peut se rencontrer dans l'utilisation d'une turbine, provoquĂ©e par la cavitation[7]. Cela peut conduire Ă  l'arrĂȘt prĂ©maturĂ© de la turbine concernĂ©e, pour pouvoir effectuer de lourds travaux de maintenance et de rĂ©parations, et aussi des consĂ©quences Ă©conomiques importantes (arrĂȘt de production, frais de maintenance sur site, ou de rĂ©paration lourde en atelier, etc.). La cavitation peut aussi s'accompagner d'une baisse du rendement de la turbine, ou de la hauteur absorbĂ©e, d'une gĂ©nĂ©ration de vibrations de la structure mĂ©canique, accompagnĂ©es d'un bruit intense.

Notes et références

Notes

  1. Cf le document en référence, issu du Service de Réparation Hydraulique d'EDF, en page 4 : les turbines prises en charge par le SRH

Références

  1. (en) James B. Calvert - Impulse Turbines: The Pelton Wheel
  2. (en) World News (WN) Network, « Pelton turbine », sur wn.com, (consulté le ).
  3. Cleuson-Dixence : La puissance d’une centrale nuclĂ©aire en trois minutes Alpiq.fr, 2 avril 2009.
  4. [PDF] EDF - Unité de production Alpes, « Nouveau groupe de production d'hydroélectricité de La Coche », sur energie.edf.com, (consulté le ).
  5. « La roue Pelton a Ă©tĂ© livrĂ©e sur le chantier de la nouvelle centrale hydroĂ©lectrique de La Coche », ledauphine.com,‎ (lire en ligne)
  6. EDF - SRH, « Le service de réparation hydraulique (SRH) d'EDF » [PDF], sur energie.edf.com, (consulté le ).
  7. (en) IGHEM 2008 (International Conference on Hydraulic Efficiency Measurements), « On Pelton efficiency and cavitation », sur www.researchgate.net, (consulté le ).

Voir aussi

Articles connexes

Liens externes

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