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Conduite forcée

Une conduite forcée est une conduite hydraulique, un assemblage de tuyaux ou bien un tunnel, transportant de l'eau d'un point à un autre. La différence de pression entre le liquide et son environnement est maßtrisée (pas de fuites). La fabrication des tubes métalliques appartient d'abord au métier de forgeron avec le SiÚcle des LumiÚres[1] et plus tard au début du XIXe siÚcle au métier de chaudronnier (avec l'émergence des machines à chaudiÚre à vapeur)[2]. La fabrication des tuyaux en béton armé préfabriqués appartient aux maçons et est mis en place dans les aménagements dÚs 1900[3].

La conduite forcée sert aussi bien à la production industrielle (minoteries, centrales électriques) qu'à l'amenée d'eau (eau d'irrigation, eau potable).

Typologies, configurations

Canal béton d'amenée d'eau en tunnel sous pression à la centrale électrique du Canton d'Uri. Suivant le débit d'écoulement de la source, le tube peut avoir en partie haute de l'air au dessus de l'eau.
Conduite forcée à Guchen dans les Pyrénées.
Conduite forcée dans le Vorarlberg (Autriche).
Conduite forcée sur une centrale hydroélectrique en Maurienne.
Conduite forcée située à Avrieux.
Conduite forcée Paul Héroult située à Saint-André.
Conduite forcée du Tilleret à Saint-Jean-d'Arves.

Lorsque les deux extrĂ©mitĂ©s sont Ă  mĂȘme altitude avec point bas intermĂ©diaire, exploitant le principe des vases communicants, on parlera de siphon ou de pont-siphon).

Dans le cas d'une centrale hydroélectrique de montagne, la conduite forcée relie le réservoir, alimenté par un ou plusieurs cours d'eau ou sources, et les turbines situées en aval.

Dans le cas d'une station de pompage-turbinage, la conduite forcée relie deux réservoirs situés à des altitudes différentes et équipée d'une turbine réversible afin de pomper l'eau vers le réservoir supérieur lorsqu'un surplus d'énergie électrique est disponible sur le réseau (production intermittente ou période de faible consommation, par exemple nocturne) et de turbiner celle-ci lorsqu'une demande en électricité est constatée.

Les conduites forcĂ©es ont Ă©galement Ă©tĂ© employĂ©es avant le dĂ©veloppement des pompes hydrauliques. Ainsi, certains chĂąteaux d'eau ont Ă©tĂ© construits de telle sorte que le haut de leur rĂ©servoir corresponde Ă  la mĂȘme altitude que l'extrĂ©mitĂ© amont de la conduite forcĂ©e qui l'alimente. Le systĂšme de canalisation reliant le rĂ©servoir du chĂąteau d'eau aux clients qu'il dessert est Ă©galement de facto une conduite forcĂ©e.

Enfin, on met en Ɠuvre des conduites forcĂ©es en vue d'alimenter en eau potable des localitĂ©s distantes de leurs sources d'approvisionnement. Contrairement aux rigoles qui doivent prĂ©senter une dĂ©clivitĂ© continue de l'amont Ă  l'aval, ces conduites peuvent Ă©pouser un relief fluctuant. Leur confinement permet par ailleurs d'Ă©viter une pollution de l'eau durant son acheminement. Elles fonctionnent soit sur le principe des vases communicants, soit grĂące Ă  une pompe de refoulement.

En France, une conduite forcĂ©e est dĂ©signĂ©e par le ministĂšre de l'environnement comme « canalisation d’eau sous pression servant soit d'amenĂ©e d'eau Ă  un ouvrage d'utilisation de la force hydraulique, soit au pompage de l’eau dans l’objectif d’une utilisation ultĂ©rieure de la force hydraulique. En particulier, elle dĂ©signe aussi bien une conduite individuelle qu’un ensemble de conduites » ; Cette conduite est dite « individuelle » si elle ne comporte « aucun convergent ou divergent »[4].

Équipements

En son sommet, elle peut ĂȘtre munie d'une ou plusieurs cheminĂ©es d’équilibre pour prĂ©venir les coups de bĂ©lier dus aux brusques variations du flux d'eau lors de l'ouverture et de la fermeture des vannes.

Les conduites forcĂ©es peuvent ĂȘtre « aĂ©riennes (tronçons implantĂ©s en surface, ou remblayĂ©s ou implantĂ©s en galerie mais non encastrĂ©s au massif rocheux traversĂ©) ou souterraines (tronçons rĂ©alisĂ©s avec des viroles « bloquĂ©es au rocher » qui sont encastrĂ©es dans un massif rocheux) »[4] ; la conduite forcĂ©e est parfois « raccordĂ©e Ă  un rĂ©seau de galeries souterraines en charge ». Les galeries peuvent ĂȘtre excavĂ©es, chemisĂ©es ou non-chemisĂ©es[4].

Spécificités hydrauliques et techniques

À la diffĂ©rence des conduites industrielles classiques, les conduites forcĂ©es sont soumises en rĂ©gime normal Ă  de trĂšs importantes diffĂ©rences de pression entre leur point haut et leurs point bas [4]. Elles sont en outre soumises en condition normale d’exploitation Ă  des phĂ©nomĂšnes hydrauliques transitoires violents (coups de bĂ©lier) nĂ©cessitant une haute rĂ©sistance, et des rĂšgles de conception et d’exploitation adaptĂ©es. Selon le ministĂšre français de l’Environnement (en novembre 2016) « Des incidents sĂ©rieux en France et un accident dramatique Ă  l’étranger ont montrĂ© que les dangers potentiels des conduites forcĂ©es ne devaient pas ĂȘtre ignorĂ©s »[4].

XIXe siĂšcle

Au cours du XIXe siÚcle, privilégiant l'utilisation de l'acier plutÎt que du fer, de nombreux systÚmes pour fournir l'étanchéité des conduites ont été testés. Avant la soudure et le rivetage ont existé l'emboitement sous contrainte, les colliers entourant la conduite, et les agrafes intérieures de plaques cintrées à repli. Par exemple le systÚme Heinrich Ehrhardt de sertissage[5].

En 1870[6], FĂ©lix Viallet s'associe avec un autre industriel de Grenoble, Joseph Bouchayer, installĂ© en 1868 dans la rue de Vizille, pour crĂ©er les Ateliers de construction Bouchayer et Viallet avec une mise de fonds de 80 000 francs rĂ©partis Ă  parts Ă©gales[7], pour la construction et l'installation d'appareils de chauffage et de ventilation, la construction et l'exploitation d'usines Ă  gaz, l'exploitation d'une fonderie de fer. La fabrication de tuyaux et de conduites forcĂ©es dĂ©bute vers 1880[7]. En 1879, la premiĂšre — d'un diamĂštre de 32 cm, longue de 450 m, pour une chute de 180 mĂštres — est vendue Ă  la SociĂ©tĂ© des ciments de la Fontaine Ardente.

XXe siĂšcle

Un systÚme de 565 kilomÚtres de conduite existe depuis le projet de Charles Yelverton O'Connor entre 1896 et 1903 d'un barrage sur Helena River alimentant Kalgoorlie et Coolgardie dans le désert en Australie, en remplacement des trains citernes[note 1].

La question des tracés des conduites monte rapidement dans les esprits[5].

En 1908, la premiÚre conduite forcée installée à l'usine d'Auzat, dans l'AriÚge, par Bouchayer et Viallet[note 2], ne réussit pas à obtenir un tracé rectiligne, les propriétaires des terrains traversés se montrant tellement intransigeants que l'on dut adopter en fin de compte un tracé en plan des plus sinueux. On avait déjà, à l'étranger (en Allemagne en particulier), abandonné les tuyaux rivés en forte épaisseur, pour y fabriquer des tuyaux soudés au gaz à l'eau, que l'on fut amené à fabriquer en France vers 1910. La conduite d'Auzat s'est rompue pour des causes diverses, vices de matiÚres, coups de bélier par suite d'ouvertures ou de fermetures instantanées. Les accidents survenus en 1907-1910 sur ce site ont efficacement contribué au progrÚs de la construction des conduites forcées, selon les recherches du jeune ingénieur Georges Ferrand[8].

En 1914 le systĂšme d’agrafe est perfectionnĂ© par les AmĂ©ricains, donnant un joint Ă  languette[note 3].

GrĂące Ă  des matĂ©riaux de plus en plus performants, les conduites forcĂ©es augmentent de diamĂštre, afin de vĂ©hiculer un dĂ©bit plus important sous une mĂȘme pression. Ainsi Ă  partir de 1900, le fer rivĂ© est remplacĂ© par l’acier rivĂ© puis, Ă  partir de 1910, la soudure au gaz Ă  l’eau remplace le rivetage jusqu’à ce qu’apparaisse dans les annĂ©es 1930 la soudure Ă  l’arc Ă©lectrique, pour utiliser des aciers plus performants, Ă  l’aide d’électrodes enrobĂ©es.

En 1916, les Établissements Bouchayer Viallet ont dĂ©jĂ  construit plus de 200 conduites mais seules quelques-unes dĂ©passent une hauteur de chute de 500 mĂštres[6], hauteur que les nouvelles conduites vont rĂ©guliĂšrement dĂ©passer, avec un premier brevet dĂ©nommĂ© « Rivure Ferrand » destinĂ© Ă  limiter l’épaisseur des parois, et opĂ©rĂ© par une filiale, la SociĂ©tĂ© dauphinoise d'Ă©tudes et de montages (SDEM)[6], prĂ©sidĂ©e par Georges Ferrand.

En 1919, le barrage des Sept-Laux en IsĂšre est Ă©quipĂ© par la sociĂ©tĂ© Bouchayer-Viallet d’une conduite de 85 cm de diamĂštre, de 3 800 m de longueur sur une hauteur de chute de 1 050 m produisant une puissance de 47 200 ch.

AimĂ© Bouchayer fonde en 1920 l’Association des producteurs des Alpes françaises (APA) qui rĂ©unira jusqu’à sept cents industriels[9].

FĂ©ru de recherche, Auguste Bouchayer obtient dans les annĂ©es 1920, le titre de meilleur hydraulicien de France en raison de ses travaux sur les conduites forcĂ©es et joue un rĂŽle de prĂ©curseur en matiĂšre de technique qui consiste Ă  utiliser l’énergie des centrales thermiques produite en pĂ©riode creuse pour remonter l’eau du bassin aval des centrales hydro-Ă©lectriques vers la rĂ©serve en amont.

En 1925, Georges Ferrand invente la technique des conduites auto-frettées : des frettes en acier spécial encerclent des tÎles relativement minces, pour une économie de matiÚre trÚs importante[6], et pour limiter le poids des tronçons, qu'il faut hisser sur des sites d'altitude parfois escarpés[6]. Le tuyau paroi est en acier extra doux, d'un diamÚtre extérieur légÚrement inférieur au diamÚtre intérieur des frettes, qui sont elles en acier ultra-résistant, et placées à froid sur le tuyau, ainsi plaqué contre les frettes, ce qui lui permet de résister à une pression supérieure à deux fois la pression normale de fonctionnement[6].

En 1927 apparait la mĂ©thode dite « française » pour l'installation des conduites aĂ©riennes, consistant Ă  supprimer les joints de dilatation entre les ancrages, placĂ©s eux-mĂȘmes en dehors des coudes, ainsi libres[10].

En 1930, lors d'un voyage aux États-Unis, Georges Ferrand constate que les constructeurs amĂ©ricains abandonnent la soudure au gaz Ă  l'eau au profit de la soudure Ă©lectrique. C'est aussi ce que firent quelques annĂ©es plus tard les Établissements Bouchayer et Viallet[10].

Gestion du risque

Le risque est dĂ» Ă  l'Ă©quipement et sa soliditĂ© et au contenu qui peut manquer lorsqu'il est propre mais aussi ĂȘtre trop abondant lorsque la saletĂ© y a stagnĂ©. Les Nations unies font des comitĂ©s de rĂ©gulation des risques gĂ©nĂ©raux d'inondation et d'amenĂ©e des eaux non potables[note 4].

Union-Européenne

« La directive-cadre sur l’eau (DCE) Ă©tablit un cadre juridique destinĂ© Ă  protĂ©ger et Ă  remettre en Ă©tat les eaux sur le territoire de l’Union, ainsi qu’à assurer leur exploitation durable Ă  long terme. Elle est complĂ©tĂ©e par une lĂ©gislation plus spĂ©cifique, comme la directive sur l’eau potable ou la directive sur les eaux de baignade, la directive sur les risques d’inondation et la directive-cadre « stratĂ©gie pour le milieu marin », ainsi que par des accords internationaux. » est la dĂ©claration de fond sur la gestion de la ressource eau de l'Union europĂ©enne[11].

France

Il existe un comité technique permanent des barrages et des ouvrages hydrauliques, qui peut donner des avis au gouvernements et aux ministÚres.

La législation se compose de :

  • le titre I du dĂ©cret no 2015-526 du fixe des rĂšgles nouvelles pour les ouvrages construits ou amĂ©nagĂ©s en vue de prĂ©venir les inondations[12] ;
  • le titre II du mĂȘme dĂ©cret comporte des complĂ©ments ou adaptations de la rĂšglementation existante sur la sĂ»retĂ© des ouvrages hydrauliques en gĂ©nĂ©ral ;
  • l'article 18 du mĂȘme dĂ©cret porte sur les Ă©tudes de dangers des ouvrages hydrauliques, qui deviennent obligatoires[13] pour les conduites forcĂ©es les plus importantes, pour « anticiper les Ă©volutions dommageables de ces Ă©quipements susceptibles de compromettre la sĂ©curitĂ© publique » ;
  • fin 2016, un projet d'arrĂȘtĂ© (portant sur les caractĂ©ristiques des conduites forcĂ©es au-delĂ  desquelles une Ă©tude de dangers est requise) est soumis Ă  consultation. « Environ 60 grosses conduites forcĂ©es associĂ©es Ă  des concessions hydroĂ©lectriques » devraient ĂȘtre concernĂ©es selon le ministĂšre de l'Environnement, en raison de leurs hauteurs de chute et du diamĂštre de leurs conduites.

Pays de Galles

Le gouvernement prévoit les difficultés avec l'évacuation de l'eau sale[14].

Aux Etats-Unis

À la suite des tsunamis et tempĂȘtes le gouvernement fait des dĂ©clarations prĂ©ventives par son comitĂ©[15].

Notes et références

Notes

  1. Cette conduite en acier fournit encore au XXIe siĂšcle les fermes, 100,000 habitants prĂšs des mines
  2. FĂ©lix Viallet prĂ©side le conseil d'administration. Le groupe emploie 3 000 personnes en 1918[6].
  3. « Ce mode de jonction est intĂ©ressant par les applications qu’il a reçues. Les bords Ă  rĂ©unir sont au prĂ©alable renflĂ©s par un forgeage Ă  froid. Ces deux bords ainsi refoulĂ©s sont introduits dans les gorges d’un double champignon fermĂ© de proche en proche Ă  la presse hydraulique, de maniĂšre que les tĂŽles se trouvent pincĂ©es Ă©troitement sur leurs bouts renflĂ©s. On exĂ©cute ainsi des tuyaux pouvant supporter des pressions Ă©normes allant jusqu’à 80 kilogrammes, sans que le joint ait Ă  en souffrir. A titre de curiositĂ©, je vous dirai que ce systĂšme de joint a Ă©tĂ© employĂ© pour la fourniture de 565 kilomĂštres de conduite alimentant la ville de Coolgardie (Australie). Cette installation a coĂ»tĂ© 70 millions[5]. »
  4. Nations Unies et les thÚmes régulation globale (santé et aléas climatiques):

Références

  1. D. Bouchard, « Structure et effectifs des mĂ©tiers du fer Ă  MontrĂ©al avant 1765 : STRUCTURE ET EFFECTIFS DES MÉTIERS DU FER D'APRÈS LES ACTES NOTARIÉS », Revue d'histoire de l'AmĂ©rique française,
  2. Jean-Baptiste Fressoz, « L'émergence de la norme technique de sécurité en France vers 1820 : Rendre responsable : la norme sur les chaudiÚres à vapeur », Le Mouvement Social,
  3. À la suite de Hennebique inventeur du bĂ©ton armĂ©, Bonna apporte le tuyau d'adduction d'eau « L’eau potable, une conquĂȘte historique », sur VĂ©olia
  4. Projet d’arrĂȘtĂ© dĂ©finissant les caractĂ©ristiques des conduites forcĂ©es au-delĂ  desquelles une Ă©tude de dangers est requise, le plan de cette Ă©tude de dangers et en prĂ©cisant le contenu (pdf - 63.3 ko - 15/11/2016)
  5. Auguste Bouchayer, « Conduites forcĂ©es en mĂ©tal » (Rapports qui devaient ĂȘtre prĂ©sentĂ©s au congrĂšs), DeuxiĂšme congrĂšs de la Houille blanche, Lyon,
  6. Jean et Henry Le Chatellier, Conduites forcĂ©es : les innovations de l’entreprise Bouchayer-Viallet Ă  Grenoble
  7. Bulletin de l'histoire de l'électricité, 1990, no 14, p. 25.
  8. [PDF] Georges Ferrand, « A propos du cinquantenaire d'une conduite forcée », La Houille Blanche, 1958.
  9. « Association des producteurs des Alpes françaises », sur Data Bnf
  10. [PDF] Georges Ferrand, « Les tendances nouvelles », La Houille Blanche, 1949.
  11. Union européenne : Protection et gestion des eaux.
  12. Décret n° 2015-526 du 12 mai 2015 relatif aux rÚgles applicables aux ouvrages construits ou aménagés en vue de prévenir les inondations et aux rÚgles de sûreté des ouvrages hydrauliques, sur legifrance.gouv.fr, consulté le 17 novembre 2017
  13. L’article R. 214-115 du code de l’environnement.
  14. Environmental regulation of overflows: action plan A plan to ensure water companies effectively manage and operate their network of sewers., 2022
  15. Comité US : Regulatory and Guidance Information by Topic: Water ; New Strategies for Controlling Stormwater Overflows;
    Tina Trenkner, With stormwater a major pollutant, cities are coming up with innovative "gray" and "green" ways to control its impact., 2011

Voir aussi

Articles connexes

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