Traité de Picquigny
Le traité de Picquigny est un traité de paix signé le entre le roi de France Louis XI et le roi d'Angleterre Édouard IV à Picquigny en Picardie (situé aujourd'hui dans le département de la Somme). Il met fin définitivement à la guerre de Cent Ans qui s'était « endormie » en 1453 après la bataille de Castillon.
Illustration de Job et Georges Montorgueil dans un livre pour la jeunesse, 1905.
Signé |
Picquigny, une des villes de la Somme |
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Parties | Royaume d'Angleterre | Royaume de France |
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Signataires | Édouard IV | Louis XI |
Contexte
Après la bataille de Castillon le , la guerre de Cent Ans était rentrée dans une période de calme relatif. Le royaume d’Angleterre a été secoué par une guerre civile entre les maisons de Lancastre et d'York (appelée aussi la guerre des Deux-Roses) tandis qu’en France, le roi de France Louis XI est occupé à contenir les ambitions territoriales du duc de Bourgogne, Charles le Téméraire.
Un traité de paix avait été signé entre la France et la Bourgogne en 1435, mais celui-ci avait été rompu par la volonté de Louis XI de limiter l'indépendance de ses plus puissants vassaux (notamment de Charles le Téméraire animé par le désir d’incorporer à son territoire la Picardie).
Le roi d’Angleterre Édouard IV voit dans le conflit franco-bourguignon une occasion de reconquérir les domaines continentaux perdus par ses prédécesseurs. Le , il signe un traité d’alliance avec Charles le Téméraire, en lui promettant de débarquer à Calais avec une armée, ce qu’il fait le [1].
Premiers pourparlers
Pressé d'en découdre, Édouard IV voit cependant la situation se détériorer rapidement. L’armée anglaise commence à manquer de vivres, et le soutien des nobles français, garanti par le duc de Bourgogne, fait défaut. Pire encore, le duc de Bourgogne ne semble pas vouloir respecter les conventions de leur accord en réunissant leurs forces. Il s’est aventuré en Lorraine et est parti guerroyer sur le Rhin.
Habile politicien, Louis XI voit alors là l'occasion de briser l’alliance anglo-bourguignonne. Il offre au roi d’Angleterre de racheter à prix d’or son rembarquement. Pour cela, il épuise le trésor du royaume et multiplie les emprunts. Furieux d’avoir été abandonné par son ancien allié et conscient de l'infériorité de son armée, Édouard IV accepte de traiter avec le roi de France[2] - [3].
Entrevue
Une rencontre est organisée entre les deux rois le à Picquigny, près d’Amiens, sur l'île de la Trève, entre les deux rives de la Somme.
Pour éviter tout incident ou un meurtre comme celui de Jean sans Peur lors d’une entrevue avec Charles VII à Montereau, un solide treillage en bois est construit afin de séparer les deux rois. Dans ses mémoires, Philippes de Commynes note ce qui suit :
« Une fois l’endroit choisi, on décida d’y faire un pont fort solide […]. Au milieu de ce pont fut aménagé un treillis de bois comme on en fait pour les cages de lions[3]. »
- Louis XI, roi de France.
- Édouard IV, roi d'Angleterre.
Clauses principales
Les deux souverains prirent les engagements suivants :
- Louis XI versa à Édouard IV une somme de 75 000 écus d'or et s'engagea à lui verser une pension annuelle de 50 000 écus d'or (soit la promesse totale de cinq cent mille écus[4]) ;
- Édouard IV accepta de retourner en Angleterre avec son armée et renonça à son alliance avec le duc de Bourgogne. Il reconnut également Louis XI comme seul roi légitime de France ;
- il fut convenu que le dauphin Charles devait épouser la fille aînée d'Édouard, Élisabeth[3] (elle épousa finalement Henri VII d'Angleterre) ;
- Marguerite d'Anjou, emprisonnée à la Tour de Londres, fut libérée contre une rançon de 50 000 écus[5].
Conséquences
Ce traité contenta les deux parties : Édouard IV d'Angleterre prétendit recevoir ainsi un tribut de la France, tandis que Louis XI de France affirma fournir une pension à son sujet le roi d'Angleterre. Elle permit surtout au roi de France d'affirmer son autorité sur ses vassaux, et en premier lieu sur le duc de Bourgogne, Charles le Téméraire[6].
À la suite de cet acte, le duc de Bourgogne, se voyant abandonné par le roi d’Angleterre, conclut avec Louis XI la trêve de Soleuvre, la septième trêve entre la Bourgogne et le royaume de France depuis quatorze ans[2].
Grâce aux talents de négociateur de Louis XI, la présence anglaise se terminait sans victime. Les deux armées festoyèrent ensemble pendant toute une journée dans la campagne de Picquigny. « D'eau n'était nouvelles », plaisanta ainsi le chroniqueur Philippe de Commynes. Le roi embaucha les filles de joie de Paris, chargées de satisfaire les soldats anglais[7].
Les Anglais rembarquèrent définitivement. Ils ne possédaient plus en France que Calais qu'ils conservèrent jusqu'en 1558[3].
Lieux de mémoire
- Dans l'enceinte du château de Picquigny, une stèle rappelle la signature du traité.
- Panneau explicatif de la signature du traité de Picquigny sur les bords de la Somme.
Notes et références
Notes
Références
- Encyclopædia Universalis. Traité de Picquigny (1475)
- La France Pittoresque – 29 août 1475 : Traité de Picquigny – 28/08/2012
- Philippe Zwang, Jeanne d'Arc et son temps, Casterman 1999, Repères Histoire
- Jean Favier. Son intervention-radio du 23 juin 2011 à 14 heures dans l'émission Au cœur de l'histoire de Franck Ferrand sur Europe 1.
- Marie Nicolas Bouillet, Dictionnaire universel d'histoire et de géographie, L. Hachette et Cie, (lire en ligne).
- Christopher Lannes - 29 août 1475 – le traité de Picquigny - 2013
- Rapport du concours d'entrée 2008, École nationale des chartes, , 51 p. (lire en ligne), Histoire du Moyen Âge, p. 35.
Bibliographie
- Nils Bock, Henri Simonneau et Bastian Walter, « L'information et la diplomatie à la fin du Moyen Âge : l'exemple de Picquigny (1475) », Publications du Centre européen d'études bourguignonnes, vol. 53 « Rencontres de Calais (20 au 23 septembre 2012) : Négociations, traités et diplomatie dans l'espace bourguignon (XIVe – XVIe siècles) »,‎ , p. 149-164 (DOI 10.1484/J.PCEEB.5.101182).
- Jean-Marie Cauchies, Louis XI et Charles le Hardi. De Péronne à Nancy (1468-1477) : le conflit, Bruxelles, De Boeck Université, coll. « Bibliothèque du Moyen Âge » (no 8), , 184 p. (ISBN 2-8041-2128-3, présentation en ligne), [présentation en ligne].
- Pierre Champion, Louis XI, t. Ier : Le Dauphin, t. II : Le Roi, Paris, Honoré Champion, 1927, [compte rendu en ligne], [compte rendu en ligne], [compte rendu en ligne].
- Jean Favier, Louis XI, Paris, Fayard, , 1019 p. (ISBN 2-213-61003-7, présentation en ligne).
- Pierre-Roger Gaussin, Louis XI : un roi entre deux mondes, Paris, A.-G. Nizet, (1re Ă©d. 1976), 493 p. (ISBN 978-2-7078-0080-0).
- Jacques Heers, Louis XI : le métier de roi, Paris, Perrin, , 430 p. (ISBN 2-262-01233-4). Réédition : Jacques Heers, Louis XI, Paris, Perrin, coll. « Tempus » (no 40), , 430 p., poche (ISBN 2-262-02084-1).
- Paul Murray Kendall (trad. Éric Diacon), Louis XI : « l'universelle araigne » [« Louis XI : The Universal Spider »], Paris, Fayard, , XXVIII-584 p. (ISBN 2-213-00038-7, présentation en ligne). Réédition : Paul Murray Kendall (trad. de l'anglais par Éric Diacon), Louis XI : l'universelle araigne [« Louis XI : The Universal Spider »], Paris, Pluriel, coll. « Pluriel », , 702 p., poche (ISBN 978-2-8185-0428-4).
- Amable Sablon du Corail, Louis XI ou le joueur inquiet, Paris, Belin, , 491 p. (ISBN 978-2-7011-5245-5, présentation en ligne).
Voir aussi
- Assassinat de Jean Ier de Bourgogne
- Bataille de Castillon
- Charles le Téméraire
- Edouard IV
- Louis XI
- Histoire de la Picardie
- Siège de Calais (1558)
- Traité de Péronne (1468)
- Traité du Crotoy
- Villes de la Somme