Syndrome malin des neuroleptiques
Le syndrome malin des neuroleptiques (SMN) est un syndrome rare faisant le plus souvent suite Ă la prise d'un traitement de neuroleptique. Non traitĂ© Ă temps, le syndrome peut causer des sĂ©quelles neurologiques permanentes et aboutit au dĂ©cĂšs du patient entre 5 % et 22 % des cas. Le syndrome malin des neuroleptiques survient gĂ©nĂ©ralement une Ă deux semaines aprĂšs le dĂ©but du traitement et se caractĂ©rise par une rigiditĂ© musculaire, une hyperthermie, une perturbation du systĂšme nerveux autonome, une altĂ©ration de l'Ă©tat mental. Ă cause de l'imprĂ©dictibilitĂ© du SMN, le traitement peut ĂȘtre trĂšs variable mais souvent, le retrait du neuroleptique incriminĂ© et des soins symptomatiques suffisent[1].
Causes | Neuroleptique |
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MĂ©dicament | DantrolĂšne et bromocriptine |
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Spécialité | Neurologie et médecine d'urgence |
CIM-10 | G21.0 |
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CIM-9 | 333.92 |
DiseasesDB | 8968 |
eMedicine |
816018 med/2614ped/1581 |
MeSH | D009459 |
Patient UK | Neuroleptic-malignant-syndrome |
Mise en garde médicale
Diagnostic
Clinique
Les premiers signes sont souvent l'apparition de crampes musculaires ou de tremblements, une hyperthermie (probablement expliquée par le blocage des récepteurs à la dopamine de l'hypothalamus), avec instabilité du systÚme nerveux autonome, comme une pression artérielle instable par exemple, et des perturbations mentales : agitation, délire, coma.
Une fois que les symptĂŽmes sont apparus, ils peuvent progresser rapidement pour une pĂ©riode aussi courte que trois jours. Ces symptĂŽmes peuvent durer de 8 heures Ă 40 jours. Les symptĂŽmes musculaires ont tendance Ă ĂȘtre provoquĂ©s par le blocage du rĂ©cepteur D2 Ă la dopamine conduisant Ă une fonction anormale des noyaux gris centraux similaires Ă ceux vus dans la maladie de Parkinson. Une augmentation des leucocytes et de la crĂ©atine phosphokinase serait liĂ©e Ă l'augmentation de l'activitĂ© musculaire et Ă la rhabdomyolyse (destruction du tissu musculaire). Le patient peut avoir une acidose mĂ©tabolique Ă trou anionique augmentĂ©. Un ralentissement non gĂ©nĂ©ralisĂ© sur l'EEG est reportĂ© dans 50 % des cas[1].
Le tableau clinique rassemble :
- hyperthermie (> 38 °C) ;
- rigidité musculaire ;
- trouble de la conscience avec mutisme ou stupeur ;
- trouble du systÚme nerveux autonome avec parfois : une pùleur, une hypersudation, une sialorrhée, une tachycardie, une hypotension artérielle, une tachypnée, une incontinence, des hallucinations, des tremblements.
Complications
Les complications peuvent ĂȘtre sĂ©vĂšres et le pronostic vital est engagĂ©. L'Ă©volution dĂ©pend de la rapiditĂ© du diagnostic et de la prise en charge. 10 % des formes peuvent ĂȘtre fatales :
- rhabdomyolyse ;
- insuffisance cardiaque ;
- insuffisance rénale ;
- insuffisance respiratoire ;
- une amnésie peut apparaitre et peut persister à distance de l'épisode.
Diagnostic différentiel
- l'hyperthermie maligne[2]
- hyperthermie (coup de chaleur)[3] - [2]
- le syndrome sérotoninergique [2]
- surdosage de sels de lithium (toxicité du lithium)[2]
- l'infection ou le sepsis, une encéphalite,
- le delirium tremens[3]
- une encéphalopathie toxique[3]
- un Ă©tat de mal Ă©pileptique[3]
Causes
Le SMN est gĂ©nĂ©ralement causĂ© par l'utilisation de neuroleptiques[4]. Cependant, et contrairement Ă ce que son nom laisse Ă penser, le syndrome malin des neuroleptiques peut ĂȘtre causĂ© par d'autres mĂ©dicaments tels que des anticonvulsants, des antidĂ©presseurs ou la mĂ©toclopramide, qui ont en commun avec les neuroleptiques d'ĂȘtre des antagonistes au rĂ©cepteur D2 de la dopamine[4]. L'interruption abrupte de mĂ©dicaments pour traiter le maladie de Parkinson, qui sont agonistes de la dopamine, peut Ă©galement dĂ©clencher un Ă©pisode de SMN[4].
Physiopathologie
Les mécanismes biologiques à l'oeuvre dans le syndrome malin des neuroleptiques n'est pas encore entiÚrement compris[4]. Il existe plusieurs hypothÚses à ce sujet. Le mécanisme suggéré serait dépendant d'une diminution de l'activité dopaminergique à cause :
- du blocage des récepteurs de la dopamine ;
- de la diminution de la fonction des récepteurs de la dopamine D2 par un mécanisme génétique[5].
Cependant, ces dysfonctionnements n'expliquent pas complĂštement les symptĂŽmes de SMN ni l'apparition de SMN avec les neuroleptiques atypiques qui ont une activitĂ© de blocage des rĂ©cepteurs D2 moindre. Ceci a menĂ© Ă l'hypothĂšse d'une hyperactivitĂ© sympathique liĂ©e Ă la dĂ©sorganisation du systĂšme nerveux autonome. Par ailleurs, la libĂ©ration du calcium est augmentĂ©e par le rĂ©ticulum endoplasmique avec l'utilisation d'antipsychotiques. Ceci peut entraĂźner une augmentation de la contractilitĂ© musculaire qui peut jouer le rĂŽle de dĂ©faillance musculaire avec une rigiditĂ© musculaire, une hyperthermie. Certains pensent qu'il faut considĂ©rer un qu'il existe un chevauchement entre le syndrome de catatonie retrouvĂ© dans les schizophrĂ©nies et le SMN. Le premier Ă©tant la forme idiopathique et le second la forme induite par les traitements d'un mĂȘme syndrome[6].
Prévalence
La survenue du syndrome malin des neuroleptiques est rare. Elle touche entre 0,04 et 0,01 % des patients prenant des antipsychotiques[4] - [7] - [8].
Facteurs de risque
Les facteurs de risques connus sont la dĂ©shydratation, un Ă©tat de malnutrition, un Ă©tat d'agitation, la dĂ©pendance aux drogues et Ă l'alcool[4]. Le fait de prendre du lithium en mĂȘme temps qu'un traitement neuroleptique est Ă©galement un facteur de risque, tout comme le fait d'avoir des lĂ©sions cĂ©rĂ©brales prĂ©existantes ou d'avoir dĂ©jĂ prĂ©sentĂ© un Ă©pisode de syndrome malin des neuroleptiques[4].
Le fait de prendre des hautes doses de neuroleptiques et le fait d'augmenter rapidement la posologie d'un traitement neuroleptique sont considérés comme étant probablement également des facteurs de risques[4].
Histoire
Le syndrome malin des neuroleptiques a été décrit pour la premiÚre fois par Frank J. Ayd, sous le nom de hyperpyrexie fatale (fatal hyperpyrexia)[4]. Son nom actuel lui a été donné par une équipe de cliniciens français qui travaillaient dans les années 60 sur les effets secondaires de l'halopéridol[3].
Traitement
- Urgence médicale
- Prise en charge en soins intensifs ou en réanimation
- ArrĂȘt du traitement neuroleptique en cours
- Traitement symptomatique pour le maintien des fonctions vitales en attendant l'Ă©limination de l'agent causal :
- réhydratation ;
- réfrigération (couverture refroidissante, packs de glace dans des tissus placés dans le creux axillaire ou l'aine) et antipyrétique (paracétamol) ;
- prévention des complications de décubitus (thromboses veineuse profondes) ;
- hémodialyse si insuffisance rénale ;
- assistance cardio-respiratoire si nécessaire ;
- myorelaxant (benzodiazépine) ou dantrolÚne ;
- agoniste dopaminergique (bromocriptine) pour lutter contre la rigidité[9] ;
- rĂ©introduction prudente Ă faible dose du neuroleptique (pas de forme Ă libĂ©ration prolongĂ©e). Discuter arrĂȘt complet de la substance incriminĂ©e ou de la classe mĂ©dicamenteuse.
- Surveillance clinique.
Notes et références
- Jeffrey R. Strawn, Paul E. Keck et Stanley N. Caroff, « Neuroleptic malignant syndrome », The American Journal of Psychiatry, vol. 164, no 6,â , p. 870â876 (ISSN 0002-953X, PMID 17541044, DOI 10.1176/ajp.2007.164.6.870, lire en ligne, consultĂ© le )
- (en) Jambur Ananth, Kamala Aduri, Sharath Parameswaran et Sarath Gunatilake, « Neuroleptic malignant syndrome: risk factors, pathophysiology, and treatment », Acta Neuropsychiatrica, vol. 16, no 4,â , p. 219â228 (ISSN 0924-2708 et 1601-5215, DOI 10.1111/j.0924-2708.2004.00085.x, lire en ligne, consultĂ© le )
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- (en) L. Kuhlwilm, C. SchönfeldtâLecuona, M. Gahr et B. J. Connemann, « The neuroleptic malignant syndromeâa systematic case series analysis focusing on therapy regimes and outcome », Acta Psychiatrica Scandinavica, vol. 142, no 3,â , p. 233â241 (ISSN 0001-690X et 1600-0447, DOI 10.1111/acps.13215, lire en ligne, consultĂ© le )
- Kazuo Mihara, Tsuyoshi Kondo, Akihito Suzuki et Norio Yasui-Furukori, « Relationship between functional dopamine D2 and D3 receptors gene polymorphisms and neuroleptic malignant syndrome », American Journal of Medical Genetics. Part B, Neuropsychiatric Genetics: The Official Publication of the International Society of Psychiatric Genetics, vol. 117B, no 1,â , p. 57â60 (ISSN 1552-4841, PMID 12555236, DOI 10.1002/ajmg.b.10025, lire en ligne, consultĂ© le )
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- (en) Michael Schneider, Johannes Regente, Timo Greiner et Stephanie Lensky, « Neuroleptic malignant syndrome: evaluation of drug safety data from the AMSP program during 1993â2015 », European Archives of Psychiatry and Clinical Neuroscience, vol. 270, no 1,â , p. 23â33 (ISSN 1433-8491, DOI 10.1007/s00406-018-0959-2, lire en ligne, consultĂ© le )
- S. Dhib-Jalbut, R. Hesselbrock, M. M. Mouradian et E. D. Means, « Bromocriptine treatment of neuroleptic malignant syndrome », The Journal of Clinical Psychiatry, vol. 48, no 2,â , p. 69â73 (ISSN 0160-6689, PMID 3804991, lire en ligne, consultĂ© le )