Quartier des Blachernes
Le quartier des Blachernes est situé au nord de Constantinople, entre le monastÚre de Chora, la porte d'Andrinople et la Corne d'Or. Outre un palais, il comprend l'une des 24 portes de la muraille de Théodose II, appelée « porte des Blachernes », ainsi que la basilique Sainte-Marie-MÚre de Dieu, dite « église Sainte-Marie-des-Blachernes ».
Ătymologie
Le linguiste roumain Ilie Gherghel, aprĂšs Ă©tude des sources anciennes comme lâhistorien Genesios ou le lexicon Suidas, pense que le nom Blachernes vient des Valaques (ÎλΏÏÎżÎč en grec) qui y Ă©taient Ă©tablis : il ne sâagit pas dâhabitants de lâactuelle Valachie (alors sous domination pĂ©tchĂ©nĂšgue puis coumane) mais des populations romanisĂ©es des Balkans sous domination byzantine, issues des Thraco-Romains : une composante de lâEmpire byzantin largement ignorĂ©e par les historiens modernes[1].
Histoire
AprÚs avoir été largement utilisé par les empereurs byzantins avant 1204, le palais des Blachernes est choisi comme résidence ordinaire des empereurs latins de Constantinople.
Lorsquâen 1261, Michel VIII PalĂ©ologue restaure lâEmpire byzantin, la Cour rĂ©intĂšgre le Grand Palais.
Le palais des Blachernes (grec moderne : Ï᜞ áŒÎœ ÎλαÏÎÏΜαÎčÏ Î Î±Î»ÎŹÏÎčÎżÎœ : « le palais dans les Blachernes ») devient cependant le siĂšge dĂ©finitif de la Cour impĂ©riale sous les empereurs de la dynastie des PalĂ©ologues, le Grand Palais Ă©tant tombĂ© dans un Ă©tat de dĂ©labrement le rendant difficilement rĂ©parable dans le contexte dâappauvrissement (et dâendettement envers les GĂ©nois) de lâEmpire depuis la quatriĂšme croisade.
Constantin XI, dernier empereur de Constantinople, mourut lors dâun dernier assaut Ă la porte des Blachernes.
Description
RĂ©parti sur une superficie de 2 km2, le domaine impĂ©rial des Blachernes longe les remparts de ThĂ©odose depuis les premiers contrebas de la sixiĂšme colline, jusquâaux murs dâHĂ©raclius en bordure de la Corne dâOr. Il ne reste aujourdâhui de cet ensemble monumental que quelques Ă©lĂ©ments Ă©parpillĂ©s dans le quartier. DĂ©finitivement abandonnĂ© aprĂšs la conquĂȘte de la ville par les Ottomans, il est progressivement dĂ©moli.
Ă lâinstar du Palais SacrĂ©, le palais des Blachernes se prĂ©sentait comme une succession de bĂątiments auxquels chaque empereur ajoutait ses propres dĂ©pendances lors de son rĂšgne. Chacune des constructions de cet ensemble Ă©tait considĂ©rĂ©e comme un palais portant le nom de lâempereur qui lâavait fait construire.
Lors de la chute de Constantinople en , le domaine impérial des Blachernes comprenait principalement les éléments suivants :
- Palais d'Alexis ComnĂšne : Il domine la Corne dâOr, la campagne hors des remparts et une partie de la ville. Le bĂątiment principal, qui abritait les appartements impĂ©riaux, la salle du trĂŽne et dâautres salles de rĂ©ception, Ă©tait suivi Ă lâouest par un autre bĂątiment Ă salles de rĂ©ception, adossĂ© aux remparts terrestres et ouvrant sur la campagne. AbandonnĂ© en 1453, il fut partiellement transformĂ© en prison plus tard : de celle-ci, trois Ă©tages comprenant douze salles sont encore visibles. Sur son emplacement se trouvent aujourdâhui lâactuelle mosquĂ©e Ayvaz Efendi et les ruines du couvent Emin Buhari.
- Palais dâAnastase : Plus rien n'est visible de ce bĂątiment sous les constructions plus rĂ©centes.
- Palais du PorphyrogĂ©nĂšte : Il est situĂ© entre la porte dâAndrinople et la porte Kaligaria. Il fut construit entre 1261 et 1291, par Constantin PalĂ©ologue, l'un des fils de Michel VIII, mais ses soubassements appartiennent Ă un bĂątiment plus ancien des Xe et XIe siĂšcles, construit entre 944 et 959 par Constantin VII PorphyrogĂ©nĂšte[2]. Ce palais reste aujourdâhui lâĂ©lĂ©ment le plus visible et le mieux conservĂ© des Blachernes.
C'est un grand bĂątiment Ă trois niveaux, situĂ© entre les fortifications internes et externes de l'extrĂ©mitĂ© nord du mur de ThĂ©odose. Le rez-de-chaussĂ©e prĂ©sente quatre arches qui ouvrent sur une cour dominĂ©e par cinq larges baies au premier Ă©tage. L'Ă©tage supĂ©rieur dĂ©passe les remparts et prĂ©sente des fenĂȘtres sur toutes ses faces. On remarque Ă l'est les vestiges d'un balcon. Le toit et tous les planchers ont disparu. La maçonnerie est dĂ©corĂ©e de dessins gĂ©omĂ©triques formĂ©s par l'alternance du marbre et de la brique rouge, typique de la pĂ©riode byzantine tardive[3]. - Basilique Sainte-Marie-MĂšre de Dieu : La basilique Sainte Marie MĂšre de Dieu, dite « Sainte-Marie des Blachernes », constituait le sanctuaire le plus sacrĂ© de Constantinople. Un premier Ă©difice fut Ă©difiĂ© sur cet emplacement en 452 par l'impĂ©ratrice PulchĂ©rie, pour abriter la Sainte robe et le Saint Voile, rapportĂ©es de Palestine. En 473, l'empereur LĂ©on Ier fit construire une autre Ă©glise, tout prĂšs de la chapelle de PulchĂ©rie, Ă laquelle il donna le nom de Notre-Dame des Blachernes. Justinien, puis Basile Ier le MacĂ©donien et LĂ©on VI reconstruisirent et embellirent le sanctuaire. L'Ă©glise fut dĂ©finitivement dĂ©truite par un incendie accidentel en 1434. Selon le croisĂ© Robert de Clari, on y dressait chaque vendredi un Saint-Suaire, « le sydoine oĂč Notre Sire fut enveloppĂ© » de telle sorte qu'« on y pouvait bien voire la Sainte Face de Notre Seigneur »[4]. Un Saint-Suaire Ă©tait en effet vĂ©nĂ©rĂ© Ă Constantinople depuis au moins 1080 et une hypothĂšse spĂ©culative veut qu'il ait Ă©tĂ© ramenĂ© en Occident par les croisĂ©s, aprĂšs la prise de Constantinople en 1204 et soit rĂ©apparu Ă Lirey en 1357 sous la forme du suaire de Turin[5].
- Tour dâIsaac Ange : Elle reçut son nom aprĂšs 1453 en souvenir de l'empereur Isaac II, qui y avait Ă©tĂ© enfermĂ©. Les vestiges sont aujourd'hui accessibles.
- Kastellion : C'est une dépendance fortifiée qui commandait le passage de la porte des Blachernes et comprenait deux portes, quatre hautes tours et trois plus petites, ainsi qu'une église.
- Porte des Blachernes : Elle Ă©tait initialement simple porte de ville et fut par la suite rĂ©servĂ©e Ă lâempereur, lorsque les Blachernes devinrent rĂ©sidence impĂ©riale. L'empereur Constantin XI mourut en dĂ©fendant sa capitale prĂšs de ses portes le .
- Ăglise Saint-Pierre-et-Saint-Marc : Elle a probablement Ă©tĂ© Ă©levĂ©e sous le rĂšgne de LĂ©on Ier, par deux patriciens romains Galbien et Candios en 458.
Notes et références
- Ilie Gherghel, (ro) CĂąteva consideraÈiuni la cuprinsul noÈiunii cuvĂąntului Vlah in « Convorbiri Literare », Bucarest 1920, p. 4-8.
- Alexander van Millingen, Byzantine Constantinople : The Walls of the City and Adjoining Historical Sites, London, United Kingdom, John Murray, (lire en ligne)
- Alexander Van Millingen, (en) Byzantine Constantinople: The Walls of the City and Adjoining Historical Sites, John Murray Ed., Londres 1899
- Robert de Clari, La ConquĂȘte de Constantinople, 1204, manuscrit 487, folio 123b, BibliothĂšque royale de Copenhague.
- Philippe Quentin, Que penser du suaire de Turin aujourd'hui ?, Ăditions de l'Emmanuel, , p. 71.
Annexes
Articles connexes
Liens externes
- Palais des Blachernes en 3D, Byzantium 1200.
- Palais du PorphyrogénÚte en 3D, Byzantium 1200.