Proposition 69
La proposition 69, officiellement intitulĂ©e DNA Samples. Collection. Database. Funding. Initiative Statute, est une loi d'Ătat votĂ©e par rĂ©fĂ©rendum en Californie, en 2004, et mise en application Ă partir de 2009.
Elle est une proposition visant Ă permettre de recueillir des Ă©chantillons ADN de toute personne arrĂȘtĂ©e et soupçonnĂ©e d'avoir commis un crime (felony). La proposition est soumise Ă rĂ©fĂ©rendum le , et acceptĂ©e par 62 % des votants [1], donnant naissance au DNA Fingerprint, Unsolved Crime and Innocence Protection Act. Jusqu'Ă 2009, en vertu de cette proposition, seules les personnes condamnĂ©es Ă©taient fichĂ©es, mais la proposition prĂ©voyait qu'Ă partir de cette date, les personnes arrĂȘtĂ©es le seraient aussi. PrĂ©alablement Ă cette loi, les officiers de police recueillaient les empreintes digitales de toute personne arrĂȘtĂ©e [2]. En 2008, la base de donnĂ©es comportait le profil d'1,2 million de personnes condamnĂ©es (ceci exclut donc les profils enregistrĂ©s de personnes simplement arrĂȘtĂ©es) [3], contre 274 000 avant 2004 [4].
Mesures mises en Ćuvre par la loi
Selon les statistiques officielles de 2003, plus d'un demi-million de personnes Ă©taient arrĂȘtĂ©es chaque annĂ©e et soupçonnĂ©es d'avoir commis une felony, dont Ă peu prĂšs un tiers sont par la suite acquittĂ©s ou bĂ©nĂ©ficient d'un non-lieu [5]. En vertu de cette proposition, soutenue par le gouverneur Arnold Schwarzenegger, toutes ces personnes, condamnĂ©es ou reconnues innocentes de crimes pouvant aller du simple vol au meurtre, en passant par l'Ă©mission de faux chĂšques ou le hacking informatique, seront fichĂ©s sur une base de donnĂ©es gĂ©nĂ©tique [5] et s'ajouteront aux 274 000 personnes dĂ©jĂ fichĂ©es en 2004 Ă la suite d'une condamnation pour un crime (felony) Ă caractĂšre violent [4]. Contrairement Ă d'autres fichiers similaires, et en vertu du Forensic Identification Data Base and Data Bank Act de 1998, loi californienne qui prĂ©voyait le recueil d'Ă©chantillons gĂ©nĂ©tiques de personnes condamnĂ©es pour crime grave, les Ă©chantillons ADN eux-mĂȘmes sont conservĂ©s, et pas simplement l'empreinte gĂ©nĂ©tique numĂ©risĂ©e [5]. Si 35 autres Ătats fĂ©dĂ©rĂ©s recueillaient alors les Ă©chantillons ADN de personnes condamnĂ©es pour felony, la Louisiane Ă©tait le seul autre Ătat Ă recueillir ceux des personnes simplement arrĂȘtĂ©es [4].
La proposition 69 avait un effet rĂ©troactif, permettant Ă l'Ătat californien de requĂ©rir des personnes qui avaient Ă©tĂ© arrĂȘtĂ©es par le passĂ©, mĂȘme s'il elles avaient Ă©tĂ© par la suite acquittĂ©es, de rĂ©clamer leur Ă©chantillon ADN [5]. Cependant, cette mesure rĂ©troactive a Ă©tĂ© annulĂ©e par un juge fĂ©dĂ©ral en [6].
En cas d'acquittement, la personne peut demander au juge qu'elle soit retirée de la base de données ; toutefois, en cas de refus du juge, il n'y a aucune possibilité de recours [1]. Le juge ne peut donner son accord si le procureur général s'y oppose [7]. De plus, en raison de sa complexité, la procédure de demande de retrait requiert l'assistance d'un avocat, procédure coûteuse[2].
L'accÚs à la base de données est fort étendu (laboratoires privés, bureaux du procureur général, forces locales de maintien de l'ordre et Codis, la base fédérale de données ADN gérée par le FBI) [5]. Chaque échantillon recueilli est comparé par un laboratoire à Richmond avec une base de données comportant les échantillons ADN prélevés sur des scÚnes de crime [4].
La loi créé aussi un nouveau crime (felony) punissable de deux à quatre ans de prison, s'appliquant à toute personne dont un échantillon ADN ou une empreinte digitale a été demandée et qui manipulerait (tamper) ces échantillons et/ou empreintes d'une façon ou d'une autre [2].
Chaque test, effectué en grattant la joue avec un coton-tige, coûtait en 2004 entre 50 et 60 dollars [8]. Le coût annuel du programme est estimé à 20 millions de dollars [8].
DĂ©bat
L'argumentaire officiel en faveur de la proposition 69 a Ă©tĂ© signĂ© par le gouverneur Arnold Schwarzenegger, le procureur gĂ©nĂ©ral (state attorney) de Californie Bill Lockyer [2] - [4] - [9], le procureur gĂ©nĂ©ral de Los Angeles (LA Country District Attorney) Steve Cooley (en), le prĂ©sident de l'association des procureurs de district de Californie David W. Paulson, le prĂ©sident de l'Association des enquĂȘteurs californiens sur les attaques sexuelles Scott Currie et le prĂ©sident de l'Association des gardiens de la paix de Californie Jerry Adams [2].
Les arguments officiels opposés à la Proposition ont été signés, eux, par Beth Givens, le directeur du Privacy Rights Clearinghouse, le secrétaire du Privacy & Freedom Center de l'American Conservative Union (en) Bob Barr, le secrétaire du Conseil pour des Génétiques Responsables (Council for Responsible Genetics (en)) Paul Billings, et par le directeur de l'Association nationale de la Police noire (National Black Police Association (United States) (en)) Ronald E. Hampton [2].
L'Union américaine pour les libertés civiles (ACLU) a porté plainte en devant la cour fédérale de district de Californie contre cette loi [7] - [1]. D'autres adversaires rappellent que des statistiques font écho d'un taux d'erreur de 3 % dans les meilleurs laboratoires, ce qui, à l'échelle de la Californie, se concrétiserait par l'inclusion erronée de 15 000 personnes par an dans ces fichiers [5].
La proposition aujourd'hui
Le procureur gĂ©nĂ©ral de Californie, Jerry Brown, a autorisĂ© en les recherches « familiales » sur la base de donnĂ©es : la police est autorisĂ©e Ă rechercher des Ă©chantillons ne correspondant pas exactement Ă la mĂȘme personne, mais Ă quelqu'un de son entourage familier [3].
Depuis la promulgation de cette loi, la Californie a Ă©tĂ© imitĂ©e par d'autres Ătats : outre la Louisiane et la Virginie, dix autres Ătats recueillaient, en 2008, les Ă©chantillons ADN de personnes simplement arrĂȘtĂ©es [10]. En 2009, un autre Ătat s'est ajoutĂ© Ă la liste, ainsi que le gouvernement fĂ©dĂ©ral [3]. Le gouvernement fĂ©dĂ©ral a en effet aussi dĂ©cidĂ© de recueillir les empreintes gĂ©nĂ©tiques de toute personne arrĂȘtĂ©e en relation avec un crime fĂ©dĂ©ral, ce qui susciterait une augmentation importante de la base Codis du FBI, ainsi que des bases de la Border Patrol et de l'Internal Revenue Service [10].
Notes et références
- (en) Ulysses Torassa, ACLU sues to scrap Prop. 69 and its DNA databank, SF Gate, 8 décembre 2004.
- (en) DNA SAMPLES. COLLECTION. DATABASE. FUNDING. Proposition 69, présentation par la League of Women Voters of California Education Fund.
- Jeffrey Rosen (en) (professeur à la faculté de droit de l'Université George Washington), Genetic Surveillance for All?, Slate, 17 mars 2009
- Julia Scheeres, Rough Reception for DNA Law, Wired, 27 novembre 2004
- Laura K. Donohue, Proposition 69 could threaten privacy of DNA, SF Gate, 22 août 2004.
- Union américaine pour les libertés civiles (ACLU), Federal Court Affirms Limits on DNA Testing Under Proposition 69, 27 avril 2005
- Union américaine pour les libertés civiles (ACLU), ACLU FILES CHALLENGE TO PROPOSITION 69, 7 décembre 2004
- Eric Slater, State Lends a Strong Hand to Crime-Fighting With DNA, Los Angeles Times, 9 novembre 2004
- Bill Lockyer, Proposition 69 provides safe, efficient tool to fight crime, Oakland Tribune, 28 octobre 2004
- Ellen Nakashima et Spencer Hsu, U.S. to Expand Collection Of Crime Suspects' DNA, Washington Post, 17 avril 2008
Voir aussi
Bibliographie
- Simoncelli, Tania; Steinhardt, Barry (2006), « California's Proposition 69: A Dangerous Precedent for Criminal DNA Databases », The Journal of Law, Medicine & Ethics, Volume 34, Number 2, Summer 2006, pp. 199â213(15)
Articles connexes
Liens externes
- Sélection d'articles à propos de la Proposition 69, sur le site de l'Institute of Governmental Studies de l'Université de Berkeley