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Projet 112

Le Projet 112 Ă©tait un programme expĂ©rimental d'armes chimiques et biologiques menĂ© sous la conduite du DĂ©partement de la DĂ©fense des États-Unis de 1962 Ă  1973. Ce projet est nĂ© sous l'administration de John Fitzgerald Kennedy et a Ă©tĂ© autorisĂ© par son secrĂ©taire de la dĂ©fense Robert McNamara dans le cadre d'un rĂ©examen complet des systĂšmes de dĂ©fense des États-Unis. Le nom de Projet 112 fait rĂ©fĂ©rence au numĂ©ro de ce programme parmi les 150 propositions de ce rĂ©examen autorisĂ© par McNamara. Toutes les composantes de l'armĂ©e des États-Unis ainsi que les agences de renseignement (un euphĂ©misme pour la Direction de la science et technologie du Bureau des Services Techniques de la CIA) y ont participĂ©, aussi bien financiĂšrement que directement avec leur personnel. Le Canada et le Royaume-Uni ont Ă©galement participĂ© Ă  certaines activitĂ©s du Projet 112[1].

Le Projet 112 s'est d'abord penchĂ© sur l'utilisation d'aĂ©rosols pour rĂ©pandre des produits chimiques et biologiques qui pourraient provoquer des incapacitĂ©s temporaires contrĂŽlĂ©es. Le programme de test devait ĂȘtre menĂ© Ă  grande Ă©chelle hors des 48 Ă©tats des USA continentaux, dans le Pacifique Sud, le Pacifique Central [2] et l'Alaska ceci de concert avec la Grande-Bretagne, le Canada et l'Australie. Au moins 50 essais ont Ă©tĂ© rĂ©alisĂ©s dont au moins 18 concernaient des "imitations" d'agents biologiques (comme le Bacillus subtilis) et au moins 14 concernaient des produits chimiques y compris le gaz sarin et le gaz VX, mais aussi des gaz lacrymogĂšnes et d'autres produits semblables. Les lieux des tests ont Ă©tĂ© Porton Down (Grande-Bretagne), Ralston (Canada) et au moins 13 navires de guerre de l'US Navy ; les essais embarquĂ©s ont Ă©tĂ© nommĂ©s SHAD (pour Shipboard Hazard And Defense soit DĂ©fense et Danger EmbarquĂ©s). Le projet a Ă©tĂ© coordonnĂ© depuis le Deseret Test Center dans l'Utah, Ă  100 km au sud-ouest de Salt Lake City.

Jusqu'en 2005, les informations disponibles sur le Projet 112 sont restées incomplÚtes[1].

Des instructions du plus haut niveau

L’USS George Eastman (YAG-39), navire du type Liberty ship (AprĂšs avoir Ă©tĂ© Ă©quipĂ© de matĂ©riel scientifique)

En , Robert McNamara a envoyĂ© une directive aux chefs d'État-major interarmĂ©es concernant les armes chimiques et biologiques, leur enjoignant : "d'examiner toutes les applications possibles, incluant leur utilisation comme une alternative aux armes atomiques, de prĂ©parer un plan pour le dĂ©veloppement d’acceptables capacitĂ©s de dissuasion chimiques et biologiques, d’y inclure des estimations des coĂ»ts, et d’évaluer les consĂ©quences politiques nationales et internationales. " Les chefs d’État-major dĂ©signĂšrent un groupe de travail qui recommanda un plan de 5 ans Ă  mener en 3 parties[3] - [4].

Le , le prĂ©sident Kennedy signa le mĂ©morandum d’action nationale pour la sĂ©curitĂ© (numĂ©ro 235) qui approuvait ce projet en ces termes :

« La politique internationale nous conduit Ă  rĂ©aliser un ensemble d’expĂ©riences scientifiques et technologiques Ă  grande Ă©chelle, lourdes de consĂ©quences et de longue durĂ©e dans des domaines physiques et biologiques. Des expĂ©riences qui par leur nature pourraient entrainer des allĂ©gations intĂ©rieures ou Ă©trangĂšres qu’il pourrait y avoir de telles effets seront incluses dans cet ensemble mĂȘme si l’agence impliquĂ©e est dĂ©terminĂ©e Ă  pouvoir prouver que de telles allĂ©gations sont infondĂ©es[5]. »

Le Projet 112 Ă©tait un programme classĂ© secret dĂ©fense ayant des buts Ă  la fois offensifs et dĂ©fensifs portant sur les rĂ©actions des ĂȘtres humains, des animaux et des plantes pendant une guerre chimique et biologique dans diverses situations climatiques et gĂ©ographiques[3]. Le Corps d’ArmĂ©e pour la Guerre Chimique U.S. a payĂ© la part amĂ©ricaine d’un accord entre les États-Unis, le Royaume Uni, le Canada et l’Australie Ă  nĂ©gocier, Ă  hĂ©berger, Ă  conduire, dans l’idĂ©e d’y participer en respectant les intĂ©rĂȘts mutuels de recherche, le dĂ©veloppement des activitĂ©s et les domaines de tests.

Centre de commandement

Le logo du Deseret Test Center montrant la Terre dans un nuage d’aĂ©rosols

Pour la localisation, voir :

Le centre de commandement du Deseret Test Center, qui fut prĂ©vu pour superviser le Projet 112, contourna quelque peu les canaux habituels du DĂ©partement de la DĂ©fense et rendit compte directement aux ComitĂ© des chefs d’état-major interarmĂ©es et Ă  un Cabinet composĂ© du SecrĂ©taire Ă  la dĂ©fense, du SecrĂ©taire aux affaires Ă©trangĂšres, et dans une bien moindre mesure, du SecrĂ©taire Ă  l’agriculture. Les expĂ©riences ont Ă©tĂ© planifiĂ©es et conduites par le Deseret Test Center et le Deseret Chemical Depot au Fort Douglas dans l’Utah. Les tests ont Ă©tĂ© conçus pour tester les effets des armes biologiques et chimiques sur les ĂȘtres humains, les animaux, les plantes, les insectes, les vĂ©hicules, les navires, les Ă©quipements et mĂȘme les toxines pour Ă©valuer leurs interactions. Certaines expĂ©riences des projets 112 et SHAD ont concernĂ© des personnes ignorant ces tests, qui n’avaient pas donnĂ© leur consentement aprĂšs information, et qui se trouvaient Ă  terre ou en mer dans diverses situations climatiques et gĂ©ographiques. Ces expĂ©riences ont aussi concernĂ© des avions, des sous-marins et des vĂ©hicules amphibies[6].

Les tests d’armes biologiques

Les tests proposĂ©s ont eu une grande variĂ©tĂ© de buts par exemple : « systĂšmes sĂ©lectionnĂ©s de protection pour prĂ©venir la pĂ©nĂ©tration d’un navire par un aĂ©rosol biologique », l’impact des « conditions mĂ©tĂ©orologiques sur les performances des systĂšmes armĂ©s en pleine mer », « la pĂ©nĂ©tration d’agents biologiques dans la vĂ©gĂ©tation d’une jungle », « la pĂ©nĂ©tration d’une ‘’inversion’’ arctique par un nuage d’aĂ©rosols biologiques », « la faisabilitĂ© d’un largage au large d’un nuage de moustiques Aedes aegypti en tant que vecteurs de maladies infectieuses », « la possibilitĂ© de rĂ©aliser une attaque biologique d’un archipel », ainsi que l’étude du taux de dĂ©croissance d’agents de guerre biologique sous diverses conditions[7].

Les tests du Projet 112 ont portĂ© sur les agents suivants ou sur des agents imitant leur action : l’agent de la tularĂ©mie, Serratia marcescens, Escherichia coli, Bacillus, le Staphylococcal enterotoxin de Type B, la rouille noire[7]. Ces agents et leurs imitations Ă©taient habituellement dispersĂ©s en aĂ©rosols en utilisant des appareils ou des bombes de pulvĂ©risation de petite taille.

En , aux États-Unis, des tests de rĂ©sistance utilisant le bacillus subtilis imitant l’anthrax ont Ă©tĂ© menĂ©s dans les environs de Washington par des agents secrets des laboratoires militaires de l’armĂ©e des États-Unis. L’un des tests a Ă©tĂ© menĂ© dans la gare ferroviaire et des cars Greyhound et l’autre dans le terminal nord de l’aĂ©roport national de Washington. Pour ces tests les bactĂ©ries Ă©taient relĂąchĂ©es par des diffuseurs d’aĂ©rosols cachĂ©s dans des mallettes spĂ©ciales. Ces laboratoires ont aussi menĂ© une sĂ©rie de tests dans le mĂ©tro de New York entre le 7 et le en lĂąchant des ampoules Ă©lectriques contenant du bacillus subtilis var.niger. Dans les derniers tests, les rĂ©sultats ont indiquĂ© qu’une Ă©pidĂ©mie au niveau de la ville serait survenue. Ni la police , ni les autoritĂ©s locales n’en avaient Ă©tĂ© informĂ©es[7].

Projet Shad – DĂ©fense et dangers embarquĂ©s

Le navire USS Granville S. Hall -- 1965

Le Projet SHAD est un acronyme pour "Shipboard Hazard and Defense (ou parfois Decontamination)”, soit ‘’dĂ©fense et danger dans un navire’’, Ă©tait une partie d’un effort plus large nommĂ© Projet 112 qui a eu lieu pendant les annĂ©es 1960. Le Projet SHAD a concernĂ© des tests conçus pour repĂ©rer les vulnĂ©rabilitĂ©s des navires de guerre U.S. Ă  des attaques d’agents chimiques ou biologiques et pour dĂ©velopper des moyens pour faire face Ă  de telles attaques tout en maintenant des possibilitĂ©s de riposte. Le dĂ©partement de la DĂ©fense des États-Unis a dĂ©clarĂ© que le Projet 112 a Ă©tĂ© pensĂ© sans se prĂ©occuper des capacitĂ©s des États-Unis de se protĂ©ger et de se dĂ©fendre contre les menaces chimiques et bactĂ©riologiques potentielles. Le projet 112 a concernĂ© Ă  la fois des tests au sol et en mer. Les essais en mer, appelĂ©s Projet SHAD ont tout d’abord Ă©tĂ© faits depuis d’autres navires comme le USS Granville S. Hall (voir photo ci-dessus) et le USS George Eastman qui Ă©taient des Liberty ships, des remorqueurs militaires, des sous-marins ou des avions de combat. Le Projet SHAD a Ă©tĂ© conçu pour repĂ©rer les vulnĂ©rabilitĂ©s des navires de guerre US aux attaques avec des armes chimiques ou biologiques et pour mettre au point des mĂ©thodes de dĂ©contamination tout en maintenant une capacitĂ© d’attaque. Il n’a jamais constituĂ© de catalogue des informations classĂ©es secrĂštes concernant SHAD ; elles n’ont jamais Ă©tĂ© regroupĂ©es en un seul lieu. De plus, le Deseret Test Center a Ă©tĂ© fermĂ© dans les annĂ©es 1970 et la recherche d’archives et de documents conservĂ©s par diffĂ©rents services de l’armĂ©e US en plusieurs lieux a Ă©tĂ© un dĂ©fi pour les chercheurs. Une fiche d’information a Ă©tĂ© mise au point pour chaque test rĂ©alisĂ© et quand l’annulation d’un test n’avait pas de document, on faisait une analyse de cette annulation en imaginant la logique qui avait menĂ© Ă  cette annulation[8].

DĂ©classification

L’existence du Projet 112 (ainsi que le projet SHAD qui lui est liĂ©) a Ă©tĂ© catĂ©goriquement niĂ©e par les autoritĂ©s militaires jusqu’en quand une enquĂȘte d’investigation du CBS Evening News a prĂ©sentĂ© des rĂ©vĂ©lations dramatiques Ă  propos de ces tests. Ces rĂ©vĂ©lations ont forcĂ© le DĂ©partement de la DĂ©fense et le DĂ©partement des anciens combattants Ă  lancer une enquĂȘte approfondie sur ces expĂ©riences et Ă  rĂ©vĂ©ler aux personnels concernĂ©s leur exposition aux toxines.

Des rĂ©vĂ©lations concernant le Projet SHAD ont d’abord Ă©tĂ© prĂ©sentĂ©es par le reporteur et producteur Eric Longabardi qui a commencĂ© Ă  enquĂȘter sur ce programme encore secret au dĂ©but 1994, il creusa ce sujet pendant six ans. Il en a rĂ©sultĂ© finalement une sĂ©rie de reportages d’investigation qui sont passĂ©s aux CBS Evening News en . AprĂšs la diffusion de ces reportages exclusifs, le Pentagone et le DĂ©partement des Anciens Combattants ont ouvert leur propre enquĂȘte, toujours en cours, sur ce programme restĂ© longtemps secret. En 2002, des auditions au CongrĂšs des États-Unis sur le Projet SHAD, Ă  la fois au SĂ©nat et Ă  la Chambre des reprĂ©sentants a prolongĂ© l’attention des mĂ©dias sur ce programme. En 2002, un recours collectif devant la justice fĂ©dĂ©rale s’est ensuivi au nom des marins US exposĂ©s pendant les tests. D’autres Ă©tudes mĂ©dicales, dont une de plusieurs annĂ©es, furent poursuivies par l’AcadĂ©mie nationale des sciences amĂ©ricaine pour Ă©valuer les dĂ©gĂąts mĂ©dicaux potentiels provoquĂ©s aux milliers de marins, de civils et autres qui ont Ă©tĂ© exposĂ©s sans leur consentement au cours de ces essais secrets. Les conclusions de cette Ă©tude furent enfin publiĂ©es en .

Du fait que la plupart des personnes concernĂ©es par les essais des programmes Projet 112 et SHAD n’étaient pas informĂ©es sur ces tests, aucun effort ne fut fait pour s’assurer du consentement Ă©clairĂ© du personnel militaire [9]. Le DĂ©partement de la DĂ©fense a testĂ© dans d’autres pays des produits qui Ă©taient considĂ©rĂ©s comme trop contraire Ă  l'Ă©thique pour ĂȘtre rĂ©alisĂ©s aux USA continentaux. Jusqu’en 1998, le DĂ©partement de la DĂ©fense a affirmĂ© officiellement que le Projet SHAD n’avait jamais existĂ©. Du fait de cette absence de reconnaissance, les personnes ayant survĂ©cu aux tests ne pouvaient pas recevoir de pension d’invaliditĂ© pour les problĂšmes de santĂ© entrainĂ©s par ce Projet. Le ReprĂ©sentant US Mike Thompson dĂ©clara Ă  propos de ce programme et des efforts du DĂ©partement de la DĂ©fense pour le dissimuler : " Ils m’ont dit : « mais ne t’en fait pas Ă  ce sujet, nous n’avons utilisĂ© que des imitations ». Et ma premiĂšre pensĂ©e a Ă©tĂ©, « bien, vous avez menti Ă  ces types pendant 40 ans, vous m’avez menti pendant 2 ans. Ce serait pour moi un gouffre de dĂ©fiance Ă  franchir de croire que maintenant vous me dites la vĂ©ritĂ©. »"[10].

Le DĂ©partement des Anciens Combattants a initiĂ© une Ă©tude sur 3 ans pour comparer la santĂ© de vĂ©tĂ©rans ayant Ă©tĂ© concernĂ©s par les essais SHAD avec celle de vĂ©tĂ©rans de mĂȘme Ăąge n’ayant jamais Ă©tĂ© en contact avec les retombĂ©es des Projets SHAD ou 112. Cette Ă©tude couta environ 3 millions de dollars et les rĂ©sultats sont enregistrĂ©s en vue de publications futures. Le DĂ©partement de la DĂ©fense s’est engagĂ© Ă  fournir au DĂ©partement des Anciens Combattants les informations pertinentes dont il a besoin pour Ă©tablir les prestations aussi vite et aussi efficacement que possible ainsi que d’évaluer et de traiter les anciens combattants qui ont Ă©tĂ© impliquĂ©s dans ces tests. Ce qui demande une Ă©tude des documents historiques se rapportant Ă  la succession et Ă  l’exĂ©cution des Projets 112 et SHAD.

L’information historique communiquĂ©e sur le Projet 112 par le DĂ©partement de la DĂ©fense est constituĂ©e de fiches de synthĂšse plutĂŽt que de documents ou d’informations fĂ©dĂ©rales originales. Depuis 2003, 28 fiches de synthĂšse ont Ă©tĂ© communiquĂ©es, concernant essentiellement le Deseret Test Center prĂšs de Dugway, Utah, qui avait Ă©tĂ© construit entiĂšrement pour les Projet 112 et SHAD et qui a Ă©tĂ© fermĂ© aprĂšs que ces projets furent arrĂȘtĂ©s en 1973.

Les traces Ă©crites originales manquent ou sont incomplĂštes. Par exemple, un essai a consistĂ© Ă  vaporiser, pour les tester, des "aĂ©rosols" sur une tour de 91 m depuis un chasseur-bombardier sur l’üle d’Ursula dans les Philippines et il apparaĂźt effectivement dans la documentation originale publiĂ©e sur le Projet SHAD mais sans fiche de renseignements ni autre explication ou divulgation quant Ă  la nature de ce test ou mĂȘme le nom de ce test[11].

IntĂ©gration d’un 2e site extracontinental Ă  Okinawa, au Japon

D’aprĂšs ce document, "la 267e Compagnie Chimique avait pour mission d’opĂ©rer sur le Site no 2 du Project 112 du DĂ©partement de la DĂ©fense."

Des soupçons concordants Ă  propos des activitĂ©s du Projet 112 ont amenĂ© Ă  conclure Ă  "Une histoire rĂ©organisĂ©e de la 267e Chemical Company", qui a Ă©tĂ© rendue disponible par le Centre d’Education au Patrimoine Militaire des USA pour Michelle Gatz, officier du service des vĂ©tĂ©rans dans le ComtĂ© de Yellow Medicine du Minnesota en 2012. D’aprĂšs ce document, la 267e Compagnie du GĂ©nie Chimique a fait un ou des essais Ă  Okinawa, au Japon, le pendant que la 267e Division du GĂ©nie Chimique Ă©tait stationnĂ©e au dĂ©pĂŽt de Chibana sur l’üle d’Okinawa. Au cours de cette opĂ©ration, "Des personnels de l’unitĂ© Ă©taient activement occupĂ©s Ă  prĂ©parer le site 2 de la zone RED HAT pour la rĂ©ception et le stockage des premiers Ă©lĂ©ments de la cargaison dont le nom de code Ă©tait "YBA" (du Projet 112 du DĂ©partement de la DĂ©fense). La compagnie a reçu d’autres cargaisons, codĂ©s YBB et YBF, qui d’aprĂšs les documents dĂ©classifiĂ©s incluaient aussi du gaz sarin, du gaz VX et du gaz moutarde[12].

L’historien et universitaire, Sheldon Howard Harris, mort en 2002, Ă©crivit Ă  propos du Projet 112 :

« Le programme de tests, qui a commencĂ© Ă  l’automne 1962 et qui a Ă©tĂ© financĂ© au moins pendant l’annĂ©e fiscale 1963, a Ă©tĂ© considĂ©rĂ© par l'UnitĂ© d'armĂ©e chimique comme un « programme ambitieux ». Les tests Ă©taient conçus pour couvrir « non seulement les essais en mer, mais Ă©galement ceux en milieux arctiques ou tropicaux » ; ils Ă©taient probablement orientĂ©s gĂ©ographiquement vers ce que les officiers de recherche dĂ©signaient, sans les nommer, de « sites satellites ». Ces sites pouvaient ĂȘtre aussi bien dans les États-Unis continentaux que dans des pays Ă©trangers. On y faisait des tests concernant les rĂ©actions des humains, des animaux et des plantes aux armes biologiques. On sait que ces tests ont eu lieu au Caire en Égypte, au Liberia, en CorĂ©e du Sud et dans des provinces autour d’Okinawa au plus tard en 1961. C’était au moins an avant la crĂ©ation du Projet 112. Le projet de recherche anti cĂ©rĂ©ales d’Okinawa a pu fournir des connaissances aux projets plus ambitieux financĂ©s par le Projet 112. A Okinawa et « en plusieurs lieux du Midwest et du Sud des USA », des experts en armes biologiques ont menĂ©, en 1961, des « essais sur le terrain » utilisant les germes de la rouille du blĂ© et de la pyriculariose du riz. Dans le compte-rendu des donnĂ©es, ces tests ont rencontrĂ© un « succĂšs partiel » et ont donc menĂ©s Ă  une augmentation significative de la dotation pour l’annĂ©e fiscale 1962 dans le but de conduire des recherches supplĂ©mentaires dans ces domaines. L’argent Ă©tait largement dĂ©diĂ© Ă  dĂ©velopper des « conseils techniques dans la conduite de la dĂ©foliation et des activitĂ©s anti-cĂ©rĂ©aliĂšres dans le Sud Est asiatique ». À la fin de l’annĂ©e fiscale 1962, l'UnitĂ© d’armĂ©e chimique avait donnĂ© son autorisation ou nĂ©gociait des contrats pour plus de mille dĂ©foliants chimiques. Les tests Ă  Okinawa avaient d’évidence, Ă©tĂ© fructueux. »

— (Harris, 2002)[3]:232

Le gouvernement des USA avait auparavant rĂ©vĂ©lĂ© des informations sur les tests d’armes chimiques et biologiques menĂ©s en mer et Ă  terre cependant, des documents nouvellement dĂ©couverts montrent que l’armĂ©e US avait testĂ© des armes biologiques Ă  Okinawa au dĂ©but des annĂ©es 60, quand la rĂ©gion Ă©tait sous juridiction US. Au cours de ces tests qui ont Ă©tĂ© menĂ©s au moins une douzaine de fois entre 1961 et 1962, des germes du champignon de pyriculariose attaquant le riz, ont Ă©tĂ© diffusĂ©s par l’US Army en utilisant « un petit pulvĂ©risateur pour rĂ©pandre ces germes le long des champs Ă  Okinawa et Ă  TaĂŻwan, » ceci pour mesurer les dosages effectivement requis en fonction de la distance aux cultures et pour relever les effets nĂ©gatifs sur la production de cĂ©rĂ©ales[13] - [14]. La pyriculariose produit une mycotoxine appelĂ©e l’acide tenuazonique connu pour ses consĂ©quences sur la santĂ© humaine et animale[15].

Notes d’information et comptes-rendus officiels

Un bon nombre d’études, de rapports et de notes d’information ont Ă©tĂ© publiĂ©s sur les consĂ©quences des expositions aux armes chimiques et biologiques. Ci-dessous on trouvera une liste des principaux documents[16].

Articles connexes

Références

  1. (en) Jeanne Guillemin, Biological Weapons : From The Invention Of State-Sponsored Programs To Contemporary Bioterrorism, Columbia University Press, , 109–110 p. (ISBN 978-0-231-12942-8, lire en ligne)
  2. (en) Ed Regis, The Biology of Doom : The History of America's Secret Germ Warfare Project, Henry Holt and Company, , 272 p. (ISBN 978-0-8050-5764-5, lire en ligne)
  3. "Factories of Death: Japanese Biological Warfare, 1932–1945, and the American cover up" by Sheldon Harris. (ISBN 0-203-74360-1)
  4. (en) John Ellis et Courtland Moon, Deadly Cultures : Biological Weapons since 1945, Harvard University Press, , 32–33 p. (ISBN 978-0-674-04513-2, lire en ligne), « The US Biological Weapons Program »
  5. (en) « National Security Action Memorandum No. 235, April 17, 1963. » (consulté le )
  6. (en) « Ships Associated with SHAD Tests » [archive du ] (consulté le )
  7. (en) John Ellis et Courtland Moon, Deadly Cultures : Biological Weapons since 1945, Harvard University Press, , 26–28 p. (ISBN 978-0-674-04513-2, lire en ligne), « The US Biological Weapons Program »
  8. (en) « Project 112/SHAD – Shipboard Hazard and Defense, Force Health Protection & Readiness » [archive du ] (consultĂ© le )
  9. http://www.olmstedfoundation.org/olmsted/data/attachments/e20080613.pdf « Copie archivée » (version du 2 janvier 2014 sur Internet Archive) Atlanta Journal-Constitution (June 13, 2008) 40. "Cold War Test Victims Seek Aid"
  10. http://www.olmstedfoundation.org/olmsted/data/attachments/e20080613.pdf « Copie archivée » (version du 2 janvier 2014 sur Internet Archive) Martin, David, 41. "Retired Navy Officer Seeks Justice", CBS News, June 12, 2008.
  11. http://www.dod.mil/pubs/foi/operation_and_plans/Exercises_and_Projects/1017.pdf « Copie archivée » (version du 13 juillet 2013 sur Internet Archive)
  12. Mitchell, Jon, "'Were we marines used as guinea pigs on Okinawa?'," Japan Times, 4 December 2012, p. 14
  13. U.S. Army tested biological weapons in Okinawa, January 12, 2014, Japan Times.
  14. Thomas H. Barksdale; Marian W. Jones (June 1965). Technical Report 60: Rice Blast Epiphypology (U) (Report). U.S. Army. Retrieved April 20, 2013.
  15. (en) Robert S. Zeigler, Sally A. Leong, P. S. Teng et International Rice Research Institute, Rice Blast Disease, Int. Rice Res. Inst., , 533– (ISBN 978-0-85198-935-8, lire en ligne)
  16. (en) « Briefings and Reports, Force Health Protection & Readiness » [archive du ] (consulté le )
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