Place Tahrir
La place Tahrir (en arabe : Ù ÙŰŻŰ§Ù Ű§ÙŰȘŰ۱Ù۱, MÄ«dÄn at-Taáž„rÄ«r), littĂ©ralement « place de la LibĂ©ration » (parfois traduit par place de l'IndĂ©pendance[1]) est une des principales places publiques du Caire, en Ăgypte.
Place Tahrir | |
la place Tahrir | |
Situation | |
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CoordonnĂ©es | 30° 02âČ 40âł nord, 31° 14âČ 09âł est |
Pays | Ăgypte |
RĂ©gion | Gouvernorat du Caire |
Ville | Le Caire |
Morphologie | |
Type | Place |
Histoire | |
Monuments | Musée égyptien du Caire Mogamma Université américaine du Caire |
Disposition
Centre névralgique de la capitale égyptienne, la place Tahrir est située à la jonction de plusieurs axes importants : la rue Talaat Harb, la rue al-Mogamma et l'avenue at-Tahrir. Elle est située à 200 m du Nil, sur la rive orientale, prÚs du pont Qasr al-Nil.
Un gigantesque rond-point occupe le centre de la place, emprunté en permanence par un important trafic automobile.
Plusieurs rues aboutissent sur la place Tahrir : au sud, la rue Qasr al-Ayn, Ă lâest, la rue Talaat Harb, au nord la Meret Basha. La voie Qasr al-Nil traverse la place dans sa partie sud, vers le pont Qasr al-Nil sur le Nil.
La place Tahrir est bordée d'édifices assez disparates :
- Ă lâouest, les hĂŽtels Nile Hilton, Ă©difiĂ© Ă l'emplacement de l'ancien palais du Nil, et Concorde ;
- au sud, la mosquĂ©e Omar Makram, oĂč sont cĂ©lĂ©brĂ©es les obsĂšques nationales[2]. Cette mosquĂ©e tire son nom du hĂ©ros de lâexpĂ©dition dâAlexandrie en 1807, Omar Makram, rĂ©sistant Ă lâoccupation française, dont la statue est placĂ©e devant la mosquĂ©e ;
- lâimmeuble Mogamma, de style soviĂ©tique, oĂč travaillent des milliers de fonctionnaires, Ă©galement sur le cĂŽtĂ© sud de la place[2] ;
- sur le cÎté ouest, le siÚge de la Ligue arabe[2] ;
- au nord de la place, le musée égyptien[2] ;
- lâancien siĂšge du parti national dĂ©mocratique (parti du prĂ©sident Moubarak) ;
- lâuniversitĂ© amĂ©ricaine du Caire, de style nĂ©o-mauresque. Les rues adjacentes sont bordĂ©es d'immeubles de bureau, de boutiques et de cafĂ©s.
La station « Sadate » du métro du Caire dessert la place.
Historique
La place est à l'origine une zone humide, inondée périodiquement par les eaux du Nil, et passablement insalubre. L'aménagement débute au XIXe siÚcle, sous le régime du khédive Ismaïl Pacha (1830-1895). S'inspirant des villes européennes, il fait édifier des immeubles modernes et percer des rues droites et bordées d'arbres. Au bord du fleuve, il fait édifier le palais du Nil (Qasr-el-Nil) et à l'angle sud-ouest de la place, le palais Ismaïliyey. Lorsque les Anglais imposent leur protectorat en 1882, le palais du Nil devient leur quartier général. Le bùtiment est démoli en 1959[3].
La place porte tout d'abord le nom de place Ismaïlia, du nom d'Ismaïl Pacha. Elle est rebaptisée place de la Libération au moment de la révolution de 1952[3].
Le , une explosion se produit dans les toilettes d'une administration situĂ© sur la place Tahrir, blessant 14 personnes ; le gouvernement Ă©gyptien ainsi que les mĂ©dias accusent des agents libyens[4]. Le gouvernement Ă©gyptien dĂ©clare avoir arrĂȘtĂ© deux citoyens Ă©gyptiens entraĂźnĂ©s par les services secrets libyens pour effectuer des sabotages en Ăgypte[5]. Cela sera une des causes de la guerre Ă©gypto-libyenne.
Ce pivot de la vie cairote est le cadre de plusieurs manifestations populaires : rassemblement contre la guerre en Irak en 2003, mais câest aussi le point de ralliement des manifestations durant la rĂ©volution Ă©gyptienne de 2011[6].
La place pendant la révolution de 2011 : la Commune ou la République[7] de Tahrir
Devant la rĂ©ussite de la rĂ©volution tunisienne, divers mouvements comme le Mouvement de la Jeunesse du 6 avril appellent Ă manifester le , via des pages Facebook, pour une journĂ©e de revendications politiques baptisĂ©e « journĂ©e de la colĂšre ». Le jour choisi est une fĂȘte nationale, nommĂ©e Jour de la police, en souvenir de lâinsurrection de la police Ă©gyptienne en 1952 qui avait abouti au dĂ©part des Britanniques[8]. Le mouvement du organise une manifestation chaque annĂ©e Ă cette date, depuis 2009. Ces manifestations sont interdites[9] - [10], et la place Tahrir est encerclĂ©e par un cordon de policiers.
Les manifestants rejoignent la place en petits groupes qui empruntent des petites rues, ce qui leur permet dâĂ©viter les grandes avenues oĂč les attendent les concentrations de forces de lâordre[11]. Celles-ci, dĂ©stabilisĂ©es, courent aprĂšs ces petits groupes, se divisent et ne parviennent pas Ă empĂȘcher la convergence dâenviron 15 000 personnes sur la place Tahrir[12]. Deux mille personnes manifestent Ă Suez, et dâautres manifestations ont lieu Ă Alexandrie, Assouan, Assiout, dans le delta du Nil, Ă IsmaĂŻlya, dans le SinaĂŻ[13]. Des manifestants occupent la place Tahrir toute la nuit, mais ils en sont chassĂ©s au canon Ă eau le lendemain matin[14].
Le , aprĂšs trois jours dâaffrontements, le siĂšge du PND au pouvoir est incendiĂ©. Quelques heures plus tard, des chars de l'armĂ©e Ă©gyptienne prennent position sur la place. Au cours des jours qui suivent, la place devient l'Ă©picentre de la contestation, et est envahie quotidiennement par des milliers de manifestants. Le 1er fĂ©vrier, elle rassemble plusieurs centaines de milliers de protestataires (environ deux millions dans l'ensemble de la capitale[15]).
DĂ©roulement des occupations
AprĂšs une occupation qui ne dure que la nuit du 25 au 26, les opposants au rĂ©gime commencent une nouvelle occupation de la place aprĂšs la manifestation du , la police Ă©gyptienne sâĂ©tant retirĂ©e de la place dans la nuit[8]. Initialement, il sâagirait dâailleurs dâun lieu de jonction et de repli pour diffĂ©rentes manifestations prises sous les tirs de la police, et non d'une occupation programmĂ©e[16].
Alors que les manifestants ne sont que quelques milliers au maximum en sortant de la nuit, leurs rangs se renforcent toute la journĂ©e[8]. Le voisinage avec lâarmĂ©e, qui reste sur les marges de la place, se passe bien : soldats et manifestants Ă©changent des aliments[8].
Le couvre-feu nâest Ă©videmment pas respectĂ©, mais dĂšs quâil a sonnĂ©, Ă 16 h 00 ce , des affrontements opposent police et manifestants devant le ministĂšre de l'IntĂ©rieur tout proche, faisant trois morts dans les rangs des opposants[8].
Ă partir du 30, les tentes se multiplient au centre de la place. Du matĂ©riel destinĂ© Ă militer et Ă rendre possible une occupation de longue durĂ©e est apportĂ©. Lâexemple de lâoccupation de la place principale du Caire est suivi Ă Alexandrie, Suez et dans des douzaines de villes dâĂgypte[17].
Le 1er fĂ©vrier, la place Tahrir est submergĂ©e par les manifestants[8]. Devant ce succĂšs, le pouvoir envoie, le lendemain matin, quelques milliers de partisans payĂ©s pour affronter les manifestants. Ceux-ci, surpris dans un premier temps, rĂ©sistent vigoureusement : les Ă©changes de pierres et de cocktails molotov durent jusquâau milieu de la nuit, puis reprennent le lendemain, jeudi 3[8]. Finalement, et malgrĂ© la charge de dromadaires, les pro-Moubarak sont repoussĂ©s, aprĂšs avoir tuĂ© entre six et vingt manifestants et en avoir blessĂ© 1500[8] - [18].
Ă la suite de cet Ă©chec du raĂŻs, lâarmĂ©e encercle la place, empĂȘchant par la suite les pro-Moubarak dâaller provoquer les manifestants[8]. Ceux-ci organisent un peu plus lâoccupation, la place devenant une ville dans la ville, organisant un mariage, possĂ©dant son bureau des objets trouvĂ©s[8]. Les priĂšres des musulmans sont protĂ©gĂ©es par les laĂŻcs et les chrĂ©tiens, des messes ont lieu, au milieu des musulmans qui veillent sur le rite chrĂ©tien[19].
AprĂšs lâannonce du dĂ©part de Moubarak, le 11, la liesse envahit les manifestants, et la fĂȘte dure toute la nuit, et reprend le soir du 12. Le 12 au matin, des Ăgyptiens nettoient la place, repavent les trottoirs, refont les peintures de la signalisation routiĂšre et du mobilier urbain, balaient mĂȘme la poussiĂšre[8].
Le dimanche 13, des Ă©chauffourĂ©es Ă©clatent entre les rĂ©volutionnaires de la place Tahrir, qui ne veulent quitter la place que quand leurs revendications seront satisfaites, et lâarmĂ©e, qui aprĂšs avoir Ă©vacuĂ© les barricades et les Ă©paves de voitures, veut expulser les manifestants[8]. Elle est cependant rĂ©occupĂ©e en permanence par des centaines de rĂ©volutionnaires, rejoints tous les vendredis par des manifestations plus ou moins importante.
De nouveaux affrontements opposent les occupants de la place, qui repoussent des centaines d'assaillants, armés de bùtons et de couteaux, le . L'armée, quasiment absente, n'intervient pas, tout comme elle n'avait pas protégé les coptes qui manifestaient pour protester contre l'incendie d'une de leurs églises, mardi . Ces affrontements communautaires ont fait dix morts et 110 blessés[20].
Organisation de la contestation Ă Tahrir
La place constitue dĂšs le dĂ©but de son occupation un univers autonome, dĂ©finissant ses propres rĂšgles de fonctionnement. Dans un esprit de fraternitĂ© et de tolĂ©rance, bien que mus par des idĂ©aux diffĂ©rents (les athĂ©es y croisent les musulmans, les syndicalistes des militaires ayant ralliĂ© la rĂ©volution), les manifestants y dĂ©battent de la construction de la future Ăgypte. ComparĂ©s Ă des communards vivant en rĂ©publique autonome, sans chefs, ils prĂ©parent en petit lâĂgypte quâils dĂ©sirent pour lâavenir[21] - [22]. DĂšs le dĂ©but, ils sâorganisent pour conserver la place vivable : le matin du 29, des volontaires nettoient la place[8] - [21] - [23].
Une partie de lâorganisation repose sur les consultations « informelles » entre les mouvements Ă lâorigine des manifestations (le Mouvement de la jeunesse du , le plus influent, Mouvement de la jeunesse en colĂšre, les FrĂšres musulmans, l'Alliance pour le changement de Mohamed el-Baradei)[24]. Les dĂ©cisions Ă©taient cependant prises sur un mode autogestionnaire et libertaire. AprĂšs discussion au sein de comitĂ©s, les propositions, lues au micro, sont adoptĂ©es par acclamation (cheer ou booo)[25] ; le reste du pays Ă©tait reprĂ©sentĂ© par des dĂ©lĂ©guĂ©s[22]. Le local de lâagence de voyages ZĂ©fir est investi par les manifestants[26]. Il sert de QG au « comitĂ© dâorganisation » rĂ©volutionnaire, constituĂ© de façon informelle. Ses membres (quelques dizaines avec les sous-comitĂ©s) sont surtout des anonymes, ce qui permet de rendre inutiles les arrestations ou les menaces[26]. Le mouvement se structure avec des sous-comitĂ©s spĂ©cialisĂ©s : sĂ©curitĂ© (dont un des membres Ă©minents est un certain « Adham »[27]), logistique, soins mĂ©dicaux[26].
Selon Duncan Green, la prĂ©sence de groupes organisĂ©s, comme les FrĂšres musulmans ou des clubs de supporters, sâest avĂ©rĂ©e dĂ©cisive lors de la dĂ©fense de la place, les 2 et . Il Ă©value Ă 10 Ă 15 % la proportion de femmes[28] ; la prĂ©sence de femmes en nombre, qui ne sont pas victimes de harcĂšlement sexuel, est en soi un Ă©vĂšnement relevĂ© par la suite[29].
Le service dâordre mis en place par les occupants de la place compte jusquâĂ plusieurs centaines de personnes[26]. Il contrĂŽle et fouille les personnes entrant sur la place (femmes et hommes sĂ©parĂ©s), et dĂ©busque les agents provocateurs, qui sont alors amenĂ©s sans violence Ă lâagence ZĂ©fir et interrogĂ©s[26], ou dans la station de mĂ©tro Sadate transformĂ©e en prison[23]. Ces provocateurs sont nombreux Ă travailler pour la police ou le PND[30]. Les Tahrites ont comptabilisĂ© 350 « voyous » (truands payĂ©s ou policiers en civil venant espionner ou provoquer les manifestants) dĂ©busquĂ©s, arrĂȘtĂ©s et remis Ă lâarmĂ©e[31].
Le ravitaillement en vivres est assurĂ© en partie par des Ăgyptiens solidaires qui distribuent de la nourriture gratuitement ; des collectes et des vendeurs ambulants complĂštent[8]. La santĂ© et les secours sont garantis par des mĂ©decins volontaires, comme Bassem Youssef.
Les militants disposent de tout le matĂ©riel nĂ©cessaire pour les meetings et la vie quotidienne : sonos pour les discours et les concerts, points dâeau, tĂ©lĂ©s pour se tenir au courant[8]. RĂ©parti sur toute la place, ce matĂ©riel sert Ă tous, et aucun leader nâĂ©merge, mĂȘme si plusieurs figures de lâopposition lĂ©gale ou illĂ©gale passent Ă un moment ou Ă un autre pour haranguer les occupants de la place ou simplement pour ĂȘtre prĂ©sents[8] :
- Amr Moussa, secrétaire général de la Ligue arabe et Mohamed El Baradei ;
- des opposants expérimentés, comme des FrÚres musulmans, Nawal el Saadawi, doctoresse de 80 ans militant contre les mutilations sexuelles[30] ;
- des artistes comme Romi Essam, des blogueurs comme Wael Ghonim le .
Inversement, certaines personnalités jugées corrompues, trop proches du pouvoir ou opportunistes sont expulsées sans ménagement, comme le chanteur Tamer Hosni[32] - [7], l'animatrice de télévision Amro Adib, les frÚres vedettes de football Hossam et Ibrahim Hassan[7].
Le soir du 1er février, le discours de Moubarak est projeté sur un drap tendu entre deux poteaux, permettant à toute la foule de le suivre[8].
AprĂšs les combats des 2 et , lâoccupation sâorganise pour durer. Neuf barricades barrent les entrĂ©es de la place, prĂ©cĂ©dĂ©s dâordures imbibĂ©es dâessence et prĂȘts Ă ĂȘtre incendiĂ©es[23]. Pour la propretĂ©, des toilettes rudimentaires sont installĂ©es, la carcasse dâun camion de police incendiĂ© est reconvertie en dĂ©chĂšterie[8] - [33]. Les manifestants sont issus de toutes les classes sociales[21] : 150 mĂ©decins[30] organisent bĂ©nĂ©volement des cliniques de campagne pour soigner les victimes des affrontements avec la police et les pro-Moubarak, la principale occupant une petite mosquĂ©e, une pharmacie sâinstalle, les portraits des manifestants tuĂ©s par la police sont exposĂ©es sur un « mur des martyrs »[8] - [23]. Tous les services (soins, eau et nourriture, recharge de tĂ©lĂ©phones) sont gratuits[21].
Les journaux sont affichĂ©s sur un mur, pour que tout le monde puisse les lire[8]. Dâautres sont rĂ©digĂ©s, imprimĂ©s, vendus et lus sur la place. Les chansons rĂ©volutionnaires des annĂ©es 1960, dont celles de Cheikh Imam, reviennent Ă la mode[34].
Les manifestants organisent eux-mĂȘmes un second cordon de sĂ©curitĂ© avec fouille, donnant lieu Ă de trĂšs longues files d'attente d'Ăgyptiens venus se joindre au mouvement. Le de fortes rumeurs laissent prĂ©voir un dĂ©part du prĂ©sident Moubarak, qui survient le lendemain.
ĂvĂšnements symboliques
La place Tahrir reste le symbole de la rĂ©volution, mĂȘme aprĂšs les diffĂ©rents changements de gouvernement. C'est sur cette place que le nouveau premier ministre, Essam Charaf, qui remplace Ahmed Chafik chassĂ© par les Tahrites, vient prendre un bain de foule et proclamer son allĂ©geance au peuple lors de la manifestation du [35]. Des militaires et des baltaguiyas encadrĂ©s par des officiers expulsent les occupants de la place Tahrir le . Les baltaguiyas utilisent des battes pour taper sur les manifestants et se servent des jets de bombes aĂ©rosols enflammĂ©s comme de lance-flammes pour incendier les tentes. Certains manifestants ont Ă©tĂ© arrĂȘtĂ©s par les baltaguiyas[36].
Le journaliste Ibrahim Issa choisit de nommer sa chaßne de télévision Tahrir[37].
Tahrir depuis la chute de Moubarak
La place Tahrir est devenue le lieu des anniversaires hebdomadaires de la chute de Moubarak. Elle accueille aussi les visites des personnalitĂ©s Ă©trangĂšres, en tant que symbole cairote de la rĂ©volution Ă©gyptienne[38] - [39]. Les principales personnalitĂ©s Ă©trangĂšres Ă ĂȘtre passĂ©es par la place Tahrir depuis le mois de sont le premier ministre britannique, David Cameron, Catherine Ashton, la Haute-ReprĂ©sentante pour les Affaires Ă©trangĂšres et la politique de sĂ©curitĂ© de lâUnion europĂ©enne et John Kerry, prĂ©sident du comitĂ© des Affaires Ă©trangĂšres du SĂ©nat amĂ©ricain. Hillary Clinton, secrĂ©taire d'Ătat des Ătats-Unis, s'y est Ă©galement rendue en , mais les chebabs ont refusĂ© de l'y croiser, Ă cause de l'attitude ambigĂŒe et changeante des Ătats-Unis pendant la rĂ©volution[40].
Les manifestations du vendredi ne sont pas que des anniversaires : chacune est lâoccasion de porter, et de faire aboutir, de nouvelles revendications afin dâachever la rĂ©volution[41] :
- lâarrestation de dignitaires du rĂ©gime, dont le ministre de lâIntĂ©rieur Habib el-Adli ;
- le renvoi du dernier gouvernement nommĂ© par Moubarak, le (soit la veille dâune importante manifestation et aprĂšs celle du qui avait dĂ©jĂ demandĂ© son dĂ©part[7]) ;
- celles du et du 1er avril pour lâĂ©puration des mĂ©dias publics (obtenue pour les journaux officiels le et la radio-tĂ©lĂ©vision dâĂtat le ) ;
- lâincarcĂ©ration le jour dâune manifestation de Safwat Al-Sharif, le ;
- celle du insistait plus particuliÚrement sur les poursuites judiciaires contre le dictateur : le 13, Hosni Moubarak et ses deux fils sont emprisonnés et leurs auditions commencent ; auparavant, le Parti national démocratique a été dissous. Certains manifestants avaient tenté de prolonger la manifestation par une occupation de la place, mais leur expulsion violente par la police, au matin du , entraßne la suspension des manifestations hebdomadaires[42] ;
- les gouverneurs trop gravement impliquĂ©s dans lâancien rĂ©gime sont remplacĂ©s ;
- le Second Jour de la colĂšre, vendredi , rĂ©unit 100 000 personnes qui exigent lâaccĂ©lĂ©ration des procĂ©dures Ă lâencontre dâHosni Moubarak et des personnalitĂ©s du rĂ©gime, ainsi que la fin des procĂšs de manifestants et la libĂ©ration des prisonniers politiques, plus diverses revendications propres Ă chaque mouvement[42]. La coalition des jeunes de la rĂ©volution et le Mouvement de la Jeunesse du 6 avril organisait la manifestation, soutenue par le Front dĂ©mocratique, le Mouvement Ă©gyptien social dĂ©mocrate, les Ăgyptiens libres et lâĂgypte de la libertĂ©[43]. Câest le plus important rassemblement depuis fĂ©vrier, et ce sont les manifestants eux-mĂȘmes qui ont assurĂ© la sĂ©curitĂ© durant toute la journĂ©e[42].
Plusieurs autres revendications sont portĂ©es chaque vendredi depuis le : la libĂ©ration des prisonniers politiques, lâannulation des procĂšs de manifestants par des tribunaux militaires et la grĂące de ceux dĂ©jĂ condamnĂ©s[41].
Lors des journĂ©es des 28 et 29 juin 2011, la place Tahrir est le point dâaboutissement des groupes qui protestent contre la violence de la police. AprĂšs la manifestation du , un nouveau campement de plusieurs milliers de personnes est Ă©tabli[44] - [45], signe que la rĂ©volution Ă©gyptienne est toujours en cours[46].
Le , à quelques jours des élections législatives, la police et l'armée attaquent un campement de 200 personnes (les forces anti-émeutes étaient à peu prÚs 5 000). Cette violence engendre ce qu'on appellera les évÚnements de la rue Mohamed Mahmou, la bataille principale étant dans cette rue là . Ces évÚnements sont connus par : l'utilisation de nouveaux gaz lacrymogÚnes asphyxiants et aussi par leur violence (58 morts en 5 jours)
Notes
- Pierre Arnaud Barthel, « « Une révolution urbaine en marche ? Lectures d'un observateur urbaniste »(Archive.org ⹠Wikiwix ⹠Archive.is ⹠Google ⹠Que faire ?) », Centre d'études et de documentation économiques, juridiques et sociales, publié le 18 mars 2011, consulté le 23 mai
- Claude Guibal, Tangi SalaĂŒn, LâĂgypte de Tahrir : anatomie dâune rĂ©volution, Paris : Seuil, 2011. (ISBN 978-2-02-103938-2), p. 23
- Ăgypte, Hachette, coll. « Guides Voir », 70-72 p.
- Hermann Eilts (US Ambassador to Egypt) to Department of State, August 9, 1976
- Hermann Eilts to Department of State, August 11, 1976
- Claude Guibal, « Place Tahrir, Le Caire espÚre », Libération,
- Giedre Sabaseviciute, « Le peuple contre le rĂ©gime. La construction de lâidĂ©e de rupture dans "la rĂ©volution du 25 janvier" », Centre d'Ă©tudes et de documentation Ă©conomiques, juridiques et sociales, publiĂ© le 18 mars 2011, consultĂ© le 23 mai
- Ălodie Auffray, « Place Tahrir, poumon de la rĂ©volution », LibĂ©ration, consultĂ© le 13 fĂ©vrier 2011, consultĂ© le 14 fĂ©vrier
- Fatima El-Bacha, « Ăgypte : El Baradei est arrivĂ© au Caire », Cyberpresse,â (lire en ligne)
- Le Figaro : Le pouvoir égyptien réprime de nouvelles manifestations
- Constance dâAmbriĂšres et Alexis Renault-SabloniĂšre, « La surprise Ă©gyptienne : la rĂ©volution du 25 janvier vue du Caire », Moyen-Orient, n° 10 : RĂ©volutions : le rĂ©veil du monde arabe, mars-avril 2011, p. 38-39
- Constance dâAmbriĂšres et Alexis Renault-SabloniĂšre, op. cit., p. 39
- Compilation de sources, « Manifs Ă la tunisienne en Ăgypte - 25 janvier », Jura libertaire, publiĂ© le 25 janvier, consultĂ© le 13 fĂ©vrier
- Compilation de sources, « Insurrection égyptienne - 26 janvier », Jura libertaire, publié le 26 janvier, consulté le 13 février
- « Démonstration de force réussie pour l'opposition égyptienne », Nouvel observateur,
- CĂ©cile Hennion, « Les dix-huit jours qui ont eu raison des trente ans de pouvoir dâHosni Moubarak », Le Monde, 13-14 fĂ©vrier, p. 4
- Compilation de sources, « Luttes de classes en Ăgypte - 16 fĂ©vrier », Jura libertaire, publiĂ© le 15 fĂ©vrier, consultĂ© le 24 fĂ©vrier 2011
- Compilation de sources, « La place Tahrir toujours occupée au Caire - 9 février 2011 », Jura libertaire, publié le 9 février, consulté le 14 février
- Claude Guibal, Tangi SalaĂŒn, op. cit., p. 40
- « Des pro-Moubarak se dĂ©chaĂźnent sur des manifestants place Tahrir », L'Ăcho, 10 mars, p. Actu 4
- Luc Peillon, « Tahrir, lâEgypte dĂ©mocratique avant lâheure », LibĂ©ration, 12 fĂ©vrier 2011, consultĂ© le 14 fĂ©vrier
- Jack Shenker, « Cairo's biggest protest yet demands Mubarak's immediate departure », The Guardian, publié le 5 février 2011, consulté le 21 février
- Adrien Jaulmes, « Avec les manifestants de la place Tahrir », Le Figaro, publié le 4 février 2011, consulté le 14 février
- Yves Bourdillon, « La victoire d'un mouvement sans leader », Les Ăchos, mis Ă jour le 15 fĂ©vrier 2011, consultĂ© le 25 fĂ©vrier 2011
- Jack Shenker, âCairoâs biggest protest yet demands Mubarakâs immediate departure,â Guardian, 5 fĂ©vrier 2011.
- Jean-Philippe Rémy, « Dans la nuit place Tahrir, l'espoir, puis, trÚs vite, la rage », Le Monde, 12 février 2011, p. 6
- Rémy Ourdan, Jean-Philippe Remy, « Sur la place Tahrir, les suites de la révolution du 25 janvier suscitent joie et inquiétude », Le Monde, 15 février 2011, p. 4
- Duncan Green, « What caused the revolution in Egypt? », The Guardian, publié le 17 février 2011, consulté le 21 février
- Hanaa Al-Mekkawi, « Les Egyptiennes aussi font leur révolution », Al Ahram Hebdo, n° 865, 6-12 avril 2011, consulté le 11 avril 2011
- Nicholas Kristof, « We Are All Egyptians », The New-York Times, publié le 3 février 2011, consulté le 14 février
- Leila Fadel, Will Englund and Debbi Wilgoren, « 5 shot in 2nd day of bloody clashes; amid outcry Egyptian PM apologizes », Washington Post, 3 février 2011
- Compilation de sources, « Ăgypte : GrĂšves massives Ă Suez - 12 fĂ©vrier », publiĂ© le 12 fĂ©vrier 2011, consultĂ© le 21 fĂ©vrier
- Jean-Philippe RĂ©my, « Sur la place Tahrir en liesse, lâEgypte se prend Ă rĂȘver dâavenir », Le Monde, 13-14 fĂ©vrier 2011, p. 5
- Compilation de sources, « Ăgypte : les dĂ©mocrates travaillent place Tahrir - 12 fĂ©vrier », Jura libertaire, publiĂ© le 12 fĂ©vrier, consultĂ© le 13 fĂ©vrier
- Sophie Shihab, « En Egypte, la révolution fait tomber la puissante sécurité d'Etat », Le Monde, 9 mars 2011, p. 6
- Cris d'Ăgypte, « L'armĂ©e de Tantawi mise Ă nue », blogs de LibĂ©ration, 9 mars 2011, consultĂ© le 17 mars
- « Quand Moubarak fliquait tout le monde », Courrier international, republié le 17 mars 2011, consulté le 25 mai 2011
- BBC News: "Thousands attend political rally in central Cairo", publié le 18 février 2011, consulté le 21 février 2011
- BBC News: "David Cameron meets locals around Cairo's Tahrir Square", publié le 21 février 2011, consulté le 21 février 2011
- Claude Guibal, Tangi SalaĂŒn, op. cit., p. 176
- Benjamin Barthe, « Au Caire, les jeunes de Tahrir veulent porter le coup de grĂące Ă lâancien rĂ©gime », Le Monde, 19 avril 2011, p. 9
- Mohamed Abel-Baky, « Egypt: Unity Remains Elusive », Arab Reform, publié le 10 juin 2011, consulté le 20 juin
- Chérine Abdel-Azim, « La place Tahrir gronde de nouveau », Al-Ahram Hebdo en ligne, no 873, du 1er au 7 juin
- RFI, « Egypte : les nouvelles autorités contestées par la rue », Radio France internationale, publié le 13 juillet 2011
- Alexandre Buccianti, « En Ăgypte, les militants qui campent place Tahrir sont toujours dĂ©terminĂ©s », Radio France internationale, publiĂ© le 13 juillet 2011
- Alain Gresh, « La place Tahrir s'embrase à nouveau », Nouvelles d'Orient, blog du "Monde diplomatique, publié le 30 juin 2011.