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ParagrĂȘle

Les paragrĂȘles sont des Ă©quipements dĂ©veloppĂ©s au dĂ©but du XIXe siĂšcle dans le but de se protĂ©ger de la grĂȘle. Ainsi, le paragrĂȘle Ă©lectrique, tout comme sa forme moderne, le niagara, sans parler du canon anti-grĂȘle, ont-ils Ă©tĂ© mis en Ɠuvre, mais avec des succĂšs trĂšs mitigĂ©s. Il est ici question des paragrĂȘles Ă©lectriques, le canon anti-grĂȘle Ă©tant traitĂ© par ailleurs.

"ParagrĂȘles tels qu'ils sont Ă©tablis (...) dans le Bolonais", lithographie extraite de la "Feuille du canton de Vaud" XII, Lausanne 1825

Historique

De longue date, les humains ont cherchĂ© Ă  se protĂ©ger de la foudre et de la grĂȘle. Au Moyen Âge, notamment Ă  Villars-les-Moines, les religieux conjurent la grĂȘle au moyen d’un rituel liturgique (la) Contra grandinem[1] et trĂšs gĂ©nĂ©ralement, sous l’Ancien RĂ©gime, on sonne les cloches Ă  l’approche d’un orage. L’on estime aussi que les dĂ©charges d’artillerie dissipent les orages naissants[2].

Avec la dĂ©couverte de l’électricitĂ© atmosphĂ©rique par Benjamin Franklin et sa mise en Ă©vidence en France en 1752 lors d’une cĂ©lĂšbre expĂ©rience Ă  Marly, l’on suspecte dĂ©sormais cette force d’ĂȘtre responsable de bon nombre de manifestations naturelles. Non seulement la foudre, mais la pluie, la grĂȘle, mĂȘme les tremblements de terre et les Ă©ruptions volcaniques lui sont attribuĂ©s, notamment par l’abbĂ© Bertholon en 1787[3]. Le physicien genevois Ami Argand propose en 1776 dĂ©jĂ  Ă  l’AcadĂ©mie des sciences de Paris un rapport (perdu), intitulĂ© MĂ©moire et observations sur la cause de la grĂȘle attribuĂ©e Ă  l’électricitĂ©[4].

Le paragrĂȘle Ă©lectrique

Au dĂ©but du XIXe siĂšcle se manifeste Ă  l’échelle internationale, aux États-Unis, en France, en Italie, en Allemagne et en Suisse romande un engouement pour les paragrĂȘles Ă©lectriques, qui sont en fait des paratonnerres dissĂ©minĂ©s sur le territoire que l’on veut protĂ©ger.

ConcrĂštement, ces paragrĂȘles se prĂ©sentent comme des perches en bois longues de 10-15 m, Ă©quipĂ©es d’une pointe de laiton mise Ă  terre par un fil mĂ©tallique, voire, curieusement, par une corde en paille de froment ou de seigle, au centre de laquelle court un cordon de lin Ă©cru[5].

La notion est introduite en 1807 Ă  la SociĂ©tĂ© d’émulation du canton de Vaud par la lecture d’une lettre venant de BĂąle et dĂ©crivant un « prĂ©servatif contre la grĂȘle » essayĂ© depuis peu en Allemagne. Puis, Ă  la suite de rapports positifs venus d’Italie, plus exactement du Bolonais et d'Émilie-Romagne, le pasteur et professeur de zoologie Ă  l’AcadĂ©mie de Lausanne Daniel-Alexandre Chavannes se fait le chantre enthousiaste de cette nouvelle technique et suscite un grand engouement au dĂ©but des annĂ©es 1820. Se constitue alors une SociĂ©tĂ© des paragrĂȘles qui mobilise les vignerons vaudois. Ceux-ci implantent des milliers de paragrĂȘles tout au long de la rive du LĂ©man entre Nyon et Montreux. A GenĂšve, la SociĂ©tĂ© des Arts est tentĂ©e de s’associer Ă  l’expĂ©rience, mais est finalement retenue par une dĂ©claration pĂ©remptoire du savant botaniste Augustin Pyrame de Candolle[6]. En revanche, des projets similaires se dĂ©veloppent autour de Besançon et surtout de ChambĂ©ry, sous l’influence notamment des Ă©crits d’Alexandre-Ferdinand Lapostolle[7].

TrĂšs rapidement, les scientifiques comme Gaspard Monge se montrent sceptiques face aux prĂ©tendus succĂšs de ces expĂ©riences, doutant que quelques perches armĂ©es, au ras du sol, puissent protĂ©ger d’une grĂȘle formĂ©e Ă  des hauteurs considĂ©rables et poussĂ©e par des vents violents. Si l’ AcadĂ©mie des sciences Ă  Paris, section physique, conteste l’efficacitĂ© des paragrĂȘles, la SociĂ©tĂ© linnĂ©enne de Paris, en revanche, fait partie de leurs fervents promoteurs. En rĂšgle gĂ©nĂ©rale, les paragrĂȘles sont dĂ©fendus plutĂŽt par des amateurs enthousiastes, agronomes, inventeurs, pasteurs, professeurs, ou encore vignerons et agriculteurs. Ces controverses donnent lieu Ă  des dĂ©bats intĂ©ressants, sur lesquels se greffe le risque que pourraient faire courir les paragrĂȘles aux Ă©difices les plus Ă©levĂ©s, en attirant littĂ©ralement sur eux la foudre. La question se pose de maniĂšre aiguĂ« Ă  l’occasion de l’incendie de la cathĂ©drale de Lausanne en 1825[6].

Dans le canton de Vaud, la ferveur retombe trĂšs brusquement en 1826, Ă  la suite de chutes de grĂȘle dĂ©vastatrices tombĂ©es sur des territoires que l’on croyait protĂ©gĂ©s. Du coup, l’enthousiasme populaire se transforme en hargne : partout on arrache perches et fils mĂ©talliques, et ces matĂ©riaux sont vendus aux enchĂšres[6].

Niagaras Ă©lectriques

Monts du Beaujolais. "Niagara" Ă©lectrique, dispositif anti-grĂȘle vers 1910. Carte postale

En dĂ©pit des Ă©checs Ă©voquĂ©s ci-dessus, l’idĂ©e d’une influence Ă©lectrique sur la grĂȘle n’est pas morte. En France, vers 1900, deux propriĂ©taires terriens dans la Vienne ont l’idĂ©e de construire des pylĂŽnes mĂ©talliques hauts de 40 m et pourvus eux aussi d’un Ă©quipement censĂ© dĂ©charger l’électricitĂ© atmosphĂ©rique. Ces pylĂŽnes se multiplient dans les rĂ©gions viticoles telles que le Beaujolais, le vignoble de Saint-Emilion, le Sauternais. Mais, lĂ  aussi, ces structures sont abandonnĂ©s avant 1920 au profit du canon anti-grĂȘle[6].

Bibliographie

  • Paul Bissegger, «Paratonnerres et paragrĂȘles. ExpĂ©riences pionniĂšres et mirages scientifiques autour d’Adrien Pichard (1790-1841), premier ingĂ©nieur cantonal vaudois», Bulletin de la SociĂ©tĂ© vaudoise des sciences naturelles, 2014/94.2, pp. 131-154.
  • Pierre Zweiacker, Fluide vital. Contes de l’ùre Ă©lectrique, Presses polytechniques et universitaires romandes, Lausanne 2005.
  • Pierre Zweiacker, SacrĂ©e foudre ! ou la scandaleuse invention de Benjamin F., Presses polytechniques et universitaires romandes, Lausanne 2011.

Références

  1. G. SchnĂŒrer, Das Necrologium des Cluniacenser-Priorates MĂŒnchenwiler (Villars-les-Moines) (Collectanea friburgensia), Fribourg 1909, p. 108.
  2. Pierre Zweiacker, Fluide vital. Contes de l’ùre Ă©lectrique, Presses polytechniques et universitaires romandes, Lausanne 2005.
  3. P.-N. Bertholon, De l'électricité des météores, Lyon 1787.
  4. ProcÚs-verbaux de l'Académie royale des sciences, Paris, 31 août 1776 (comm. René Sigrist).
  5. Pierre Zweiacker, Sacrée foudre ! ou la scandaleuse invention de Benjamin F., Presses polytechniques et universitaires romandes, Lausanne 2011.
  6. Paul Bissegger, «Paratonnerres et paragrĂȘles. ExpĂ©riences pionniĂšres et mirages scientifiques autour d’Adrien Pichard (1790-1841), premier ingĂ©nieur cantonal vaudois», Bulletin de la SociĂ©tĂ© vaudoise des sciences naturelles, 2014/94.2, pp. 131-154.
  7. A.-F.-L Lapostolle, TraitĂ© des parafoudres et des paragrĂȘles en cordes de paille, Amiens 1820.
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