Myopathie mitochondriale
Les myopathies mitochondriales sont l'une des nombreuses formes des maladies mitochondriales ; ce sont celles des myopathies qui sont systématiquement associées à une maladie mitochondriale[1]. Elles forment le groupe le plus courant des troubles métaboliques observés chez l'homme (leur prévalence est vers 2015 estimée à environ 1 cas sur 4300 personnes, quand on prend en compte toutes les mutations pathogÚnes de l'ADN mitochondrial (ADNmt) et de l'ADN nucléaire (ADNn)[2]. Ces myopathies mitochondriales dites primaires (MMP) sont définies comme étant des désordres génétiquement induits menant à des défauts de phosphorylation oxydative affectant principalement le muscle squelettique, mais pas uniquement. Il existe aussi des formes environnementales de myopathies mitochondriales, dites « secondaires ».
![Description de cette image, également commentée ci-aprÚs](https://img.franco.wiki/i/langfr-260px-Animal_mitochondrion_diagram_en_(edit).svg.png.webp)
Spécialité | Neurologie |
---|
CIM-10 | G71-G72, M60-M63 |
---|---|
CIM-9 | 359.4-359.9, 728-728 |
OMIM | 251900 |
DiseasesDB | 8723 |
eMedicine | emerg/328 |
MeSH | D009135 |
Mise en garde médicale
La myopathie est parfois la seule caractéristique clinique d'une maladie mitochondriale, mais en général elle est associée à d'autres manifestations « chiffons rouges mitochondriaux » telles que le diabÚte, la perte auditive neurosensorielle, l'atrophie optique, une neuropathie périphérique, une cardiomyopathie, une néphropathie, une hépatopathie, un accident vasculaire cérébral ou encore des convulsions, une ataxie, des retards de croissance et/ou intellectuels voire la démence[3].
Quand ils sont d'origine génétique les symptÎmes sont parfois présent in utero ou détecté dÚs la naissance (hypotonie associée à une faiblesse musculaire) ou ils apparaissent plus tardivement dans l'enfance ou à l'ùge adulte.
On distingue plusieurs sous-catégories de myopathies mitochondriales et des formes plus ou moins handicapantes. Elles sont souvent difficiles à diagnostiquer.
Causes et éventuels co-facteurs génétiques
Cette famille de maladies a dâabord Ă©tĂ© considĂ©rĂ©e comme hĂ©rĂ©ditaire et dâorigine maternelle (hĂ©ritage non-mendĂ©lien), mais on sait maintenant que certaines dĂ©lĂ©tions d'ADN nuclĂ©aire causent aussi une myopathie mitochondriale ; ex: dĂ©lĂ©tion du gĂšne OPA1. Des causes iatrogĂšnes (mĂ©dicamenteuses) et toxiques (myopathies toxiques sont Ă©galement aujourd'hui connues[4] - [5].
Diagnostic
Souvent difficile, il peut ĂȘtre prĂ©cisĂ© par une biopsie du muscle squelettique et Ă fin d'Ă©tudes histologiques, enzymatiques (dĂ©ficit de l'activitĂ© de la NADH dĂ©shydrogĂ©nase ; complexe I de la chaine respiratoire dans le muscle), histochimiques et ultrastructurales, (qui montrent souvent de nombreux agrĂ©gats de mitochondries pathologiques (au microscopie Ă©lectronique) [6]. Les tissus musculaires des patients atteints de ces maladies prĂ©sentent gĂ©nĂ©ralement des fibres musculaires rouges «dĂ©chiquetĂ©es». Ces fibres rouges irrĂ©guliĂšres contiennent de lĂ©gĂšres accumulations de glycogĂšne et de lipides neutres ; elles peuvent montrer une rĂ©activitĂ© accrue Ă la succinate dĂ©shydrogĂ©nase et une rĂ©activitĂ© diminuĂ©e pour la cytochrome c oxydase.
Signes et symptĂŽmes
Ils incluent (pour chacun des syndromes suivants) :
- Cas associĂ©s Ă un Syndrome MELAS (qui est une maladie mitochondriale dĂ©butant typiquement dans l'enfance, se manifestant essentiellement par un syndrome neurologique. L'acronyme « MELAS » est l'abrĂ©viation de l'anglais « mitochondrial encephalopathy with lactic acidosis and stroke-like episodes » (ce qui peut-ĂȘtre traduit par encĂ©phalopathie mitrochondriale, acidose lactique et Ă©pisodes dĂ©ficitaires neurologiques, souvent dit « MELAS »)
- Différents degrés de déficience cognitive voire de démence
- Acidose lactique (taux de lactates et pyruvates anormalement élevés)
- Accident vasculaire cérébral
- Accident ischémique transitoire
- Perte auditive
- Perte de poids.
- Cas associé à une épilepsie myoclonique associée a la myopathie des fibres rouges en haillons (MERRF)
- Ăpilepsie myoclonique juvĂ©nile, progressive
- PrĂ©sence d'amas de mitochondries pathologiques s'accumulant dans les fibres musculaires, donnant l'apparence de «fibres rouges irrĂ©guliĂšres» dans le muscle quand l'Ă©chantillon de biopsie du muscle est colorĂ© avec coloration au trichrome de Gömöri. Les mitochondries de ces patients sont fusionnĂ©es ou mal fermĂ©es ou trop allongĂ©es ou prĂ©sentent des ultrastructures aberrantes des crĂȘtes mitochondriales (par rapport aux tĂ©moins). Ces malformations correspondent Ă des dysfonctionnements parfois graves[7] de la chaine respiratoire[8].
- Petite taille.
- Cas associés à un Syndrome de Kearns-Sayre (KSS, une maladie neuromusculaire induite par des délétions de l'ADN mitochondrial : de 1,3 à 8 kilobases, souvent 5 kb). Ces délétions sont trÚs souvent sporadiques, et donc hétéroplasmiques).
- Ophtalmoplégie externe
- défauts de conduction cardiaque
- Perte auditive neurosensorielle et/ou ophtalmoplégie externe progressive chronique (CPEO)
- Ophtalmoparésie progressive
- et autre symptĂŽmes se chevauchant avec ceux d'autres myopathies mitochondriales.
Recherche médicale
En 2017 un atelier international de consensus a été consacré aux éléments à retenir pour les études relatives aux myopathies mitochondriales de l'enfant et de l'adulte[2].
Précautions à prendre en cas d'anesthésie
- Le patient peut prĂ©senter une sensibilitĂ© accrue Ă des dĂ©rivĂ©s myorelaxants inhibiteurs neuromusculaires non-dĂ©polarisants (Ă action intermĂ©diaire) comme le rocuronium (dĂ©rivĂ© du curare) et l'atracurium ; en cas d'anesthĂ©sie nĂ©cessaire pour ces patients, le dosage de relaxants musculaires devrait ĂȘtre rĂ©duit et une surveillance adĂ©quate du bloc neuromusculaire est Ă prĂ©voir[9] - [10] - [11]. Une sensibilitĂ© anormale au rocuronium et Ă lâatracurium chez un sujet en bonne santĂ© apparente devrait impliquer des examens neurologiques complĂ©mentaires.
Notes et références
- « Mitochondrial Myopathy Information Page | National Institute of Neurological Disorders and Stroke », sur www.ninds.nih.gov (consulté le )
- Mancuso, M., McFarland, R., Klopstock, T., Hirano, M., Artuch, R., Bertini, E., ... & Kaufmann, P. (2017) International Workshop: Outcome measures and clinical trial readiness in primary mitochondrial myopathies in children and adults. Consensus recommendations. 16â18 November 2016, Rome, Italy. Neuromuscular Disorders, 27(12), 1126-1137
- Gorman GS, Chinnery PF, DiMauro S, Hirano M, Koga Y, McFarland R, et al. (2016) Mitochondrial diseases. Nat Rev Dis Primers ; 2:16080.
- Khelfi, A., Azzouz, M., Abtroun, R., Reggabi, M., & Alamir, B. (2017, September). MĂ©canismes dâaction directs mis en jeu dans les myopathies toxiques. In Annales Pharmaceutiques Françaises (Vol. 75, No. 5, pp. 323-343). Ed : Elsevier Masson (rĂ©sumĂ©).
- Khelfi, A., Azzouz, M., Abtroun, R., Reggabi, M., & Alamir, B. (2017). Exploration des myopathies toxiques: de lâanamnĂšse aux mĂ©thodes de pharmacogĂ©nomique. Toxicologie Analytique et Clinique, 29(3), 273-297 ()rĂ©sumĂ©.
- Gerard, J. M., Retif, J., & Telerman Toppet, N. (1974). Myopathie mitochondriale associée à une ophtalmoplégie externe progressive. Acta neurologica belgica, 74(5), 284-296. (résumé)
- Westermann B. (2010) Mitochondrial fusion and fission in cell life and death. Nat. Rev. Mol. Cell Biol ., 11, 872â884.
- Bartsakoulia, M., Pyle, A., Troncosco, D., Vial, J., Paz-Fiblas, M. V., Duff, J., ... & Chinnery, P. F. (2018). [Bartsakoulia, M., Pyle, A., Troncosco, D., Vial, J., Paz-Fiblas, M. V., Duff, J., ... & Chinnery, P. F. (2018). A novel mechanism causing imbalance of mitochondrial fusion and fission in human myopathies. Human Molecular Genetics. A novel mechanism causing imbalance of mitochondrial fusion and fission in human myopathies]. Human Molecular Genetics.
- Naguib M, El Dawlatly AA, Ashour M, Al-Bunyan M. Sensitivity to mivacurium in a patient with mitochondrial myopathy. Anesthesiology 1996; 84: 1506â9
- Finsterer J, Stratil U, Bittner R & Sporn P (1998) Increased sensitivity to rocuronium and atracurium in mitochondrial myopathy. Canadian journal of anaesthesia, 45(8), 781.
- Breucking E, Mortier W, Lampert R, Brandt L. Anaesthesia and intensive care for a patient with mitochondrial myopathy and general condition similar to that seen with malignant hyperthermia. (German) Anaesthesist 1993; 42: 719â23.
Voir aussi
Articles connexes
Bibliographie
- Coquet M, Babbwarth B & Henin D (2001). Myopathies médicamenteuses et toxiques : Maladies musculaires. La Revue du praticien, 51(3), 278-283.
- Desnuelle C, Pellissier J.F, Serratrice G, Pouget J & Turnbull D.M (1989) Le syndrome de Kearns et Sayre: encéphalomyopathie mitochondriale par déficit de la chaßne respiratoire. Revue neurologique, 145(12), 842-850.
- Gerard J.M, Retif J & Telerman Toppet N (1974) Myopathie mitochondriale associée à une ophtalmoplégie externe progressive. Acta neurologica belgica, 74(5), 284-296. (résumé)
- Griebel V, KrĂ€gelohâMann I, Ruitenbeek W, Trijbels J.M.F & Paulus W (1990) A mitochondrial myopathy in an infant with lactic acidosis. Developmental Medicine & Child Neurology, 32(6), 528-531 ()rĂ©sumĂ©.
- Grotemeyer, K. H., Lehmann, H. J., Jorg, J., Reinhard, V., & Hartjes, W. (1984). FamiliÀre Stammganglienverkalkung, Mitochondriale Myopathie und Epilepsie-Folge einer einzigen Stoffwechselstörung ?. Nervenarzt, 55(4), 202-207
- Harlé J.R, Disdier P, Bolla G, Coulom F. Figarella-Branger D, Desnuelle C, ... & Weiller P.J (1994) Relations entre pseudopolyarthrite rhizomélique et myopathie mitochondriale : 24 observations. La Presse médicale, 23(1), 15-18.
- Holt I.J, Harding A.E & Morgan-Hughes J.A (1988) Deletions of muscle mitochondrial DNA in patients with mitochondrial myopathies. nature, 331(6158), 717 (résumé)
- Lapresle J, Fardeau M & Godet-Guillain M.J (1972) Myopathie distale et congénitale, avec hypertrophie des mollets: Présence d'anomalies mitochondriales à la biopsie musculaire. Journal of the Neurological Sciences, 17(1), 87-102 (résumé).
- Muller-Hocker J, Walther J.U, Bise K, Pongratz D & Hubner G.(1984) Mitochondrial myopathy with loosely coupled oxidative phosphorylation in a case of Zellweger syndrome. A cytochemical-ultrastructural study. Virchows Archiv. B, Cell pathology, 45(2), 125-138.
- Zierz S, Von Wersebe O, Gerbitz K.D & Jerusalem F (1990) Ophthalmoplegia-plus: Klinische VariabilitÀt, biochemische Defekte der mitochondrialen Atmungskette und Deletionen des mitochondrialen Genoms. Nervenarzt, 61(6), 332-339.
- Zierz S, MeeĂen S & Jerusalem F (1989) Lactat-und Pyruvatblutspiegel in der Diagnostik mitochondrialer Myopathien. Nervenarzt, 60(9), 545-548.